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Jours tranquilles à Paris
10 octobre 2020

Récit - En renonçant à la présidentielle, François Baroin met LR sur les nerfs

Par Sarah Belouezzane - Le Monde

La question maintenant est de savoir si l’organisation ou non d’une primaire par Les Républicains sera capable de trancher entre les prétendants au poste qu’aurait dû occuper l’ancien ministre de l’économie.

Un seul être vous manque et tout est dépeuplé. Comme dans le cas du parti Les Républicains (LR), où les ambitions des uns se fracassent sur les oppositions des autres au lendemain du renoncement de François Baroin à représenter son parti en 2022. Celui qui devait être le sauveur de son mouvement lors du prochain scrutin présidentiel a fait ces derniers jours le tour des élus importants pour leur expliquer sa décision de ne pas y aller, laissant, derrière lui, un vide abyssal et un parti en surchauffe.

Résultat, LR s’est offert une petite séance de catharsis généralisée, jeudi 8 octobre, lors d’un séminaire parlementaire qui s’annonçait pourtant plutôt apaisé. Surprenant son public qui ne l’attendait pas sur ce terrain, l’eurodéputé François-Xavier Bellamy a terminé son discours sur une adresse assez personnelle à ses camarades : « Je suis affligé de voir que notre famille politique se livre depuis quelques semaines à une guerre de tranchées qui ressemble plus à une guerre des boutons qu’à un vrai débat de fond », a-t-il franchement regretté.

Le député européen Francois Xavier Bellamy a appelé ses pairs Républicains à mettre fin aux guerres internes, à l’Assemblée nationale, le 8 octobre. | JULIEN MUGUET POUR « LE MONDE »

L’élu a ensuite fustigé les « confidentiels, les off ou les on » et réclamé un « peu de sang froid » et « d’unité ». La députée du Doubs Annie Genevard a emboîté le pas à son camarade sur Twitter en déclarant : « Donnons l’exemple, ras-le-bol des querelles d’ego… masculines. Stop aux petites phrases blessantes. Ne remettons pas en route la machine à diviser. Le devoir est à l’union autour d’un seul objectif : la reconquête pour les Français. »

Ambiance électrique

S’il visait plus particulièrement certaines sorties dans la presse d’Aurélien Pradié, député du Lot et numéro trois du parti qui crispe de plus en plus en interne, François-Xavier Bellamy a mis au jour les divisions et l’ambiance électrique qui règnent rue de Vaugirard depuis quelques semaines.

« C’était important de se voir aujourd’hui, décrypte un élu de premier plan, car tout le monde est sur les nerfs depuis le renoncement de Baroin ; 90 % des députés et des sénateurs veulent que ça se règle. » « Privé de la présence apaisante et consensuelle de François Baroin, [le patron du parti] Christian Jacob se retrouve désormais confronté aux fractures internes et surtout à l’opposition entre une partie des parlementaires – dont les trois présidents de groupe – et son secrétaire général », analyse le député de Vaucluse Julien Aubert.

Principal mis en cause de la matinée, Aurélien Pradié estime pour sa part que cette séquence est l’occasion parfaite de distinguer « ceux qui sont capables de garder leurs nerfs » des autres. « Nous n’avons pas le droit d’ajouter de la fébrilité à la fébrilité du pays, c’est une question de responsabilité politique », juge-t-il, estimant qu’il est temps de « commencer à distribuer les camomilles » aux vertus calmantes qu’il envisage de prendre aussi.

Pour Damien Abad, président du groupe LR à l’Assemblée nationale, les « choses doivent sortir et les bulles exploser ». « L’unité, tranche-t-il, ne se décrète pas, elle se construit. »

« Un candidat naturel »

Au-delà des prises de position des uns contre les autres, le principal objet de cette guerre des nerfs est l’organisation, ou non, pour la présidentielle, d’une primaire capable de trancher entre les prétendants au poste qu’aurait dû occuper François Baroin. Un système de « départage » qui pourrait, selon certains, d’une part profiter au sénateur de Vendée Bruno Retailleau, jugé trop conservateur, et nuire, d’autre part, au patron de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand qui n’en veut pas.

Or, personne aujourd’hui à la direction du parti ne semble emballé par cette solution, préférant attendre que s’impose « un candidat naturel ». A l’inverse, Bruno Retailleau, qui défend « un départage transparent », estime que « l’heure des hommes providentiels est révolue ». Devant les parlementaires, Gérard Larcher, le président du Sénat, a, quant à lui, précisé vouloir « travailler dans les semaines à venir à proposer un système de départage ». Oublié donc le groupe de travail qui devait être constitué afin de réfléchir à cette question, Gérard Larcher et Christian Jacob travailleront ensemble à trouver une solution qui sera, précise le second, « soumise au vote des militants ».

Pour beaucoup, une telle ambiance « électrique » est la résultante directe de plus d’un an d’attente de l’annonce de la candidature de François Baroin. LR, rappellent les membres du parti, a, après tout, été mis en ordre de marche pour assurer au maire de Troyes un atterrissage en douceur en temps voulu. Chiraquiens tous les deux, Christian Jacob et François Baroin se connaissent de longue date.

Las, l’ancien ministre de l’économie, qui n’a jamais vraiment fait état de sa volonté d’être candidat, a fini par annoncer aux uns et aux autres son renoncement, notamment à Eric Woerth, député de l’Oise et ancien ministre du budget que le maire de Troyes a vu mardi matin. « Baroin n’a jamais trompé personne, juge l’élu. Beaucoup de gens ont pris leurs désirs pour des réalités. » Et d’ajouter : « Notre calendrier ne doit pas être dicté par celui des candidats sinon on va s’y perdre. Il faut garder son calme, on ne gagnera que si on imprime dans l’opinion. »

« C’est une tempête de sable, souffle l’eurodéputé Brice Hortefeux, on ne voit rien, on ne sait pas qui, on ne sait pas comment, mais ça finira par se dissiper. » « C’est comme dans un couple, on se dispute, puis on se réconcilie », abonde Damien Abad. Même les mariages les plus solides peuvent aussi finir par un divorce.

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