HAB Galerie
Nouvelle galerie dédiée à l'art contemporain
Situé à la pointe ouest de l’île de Nantes, le Hangar 21 est plus connu de la population sous le nom de Hangar à Bananes.
Un surnom qu’il tient de son histoire : spécialement conçu en 1949-50 pour recevoir des primeurs, bananes et ananas venant d’Afrique déchargés, manutentionnés et stockés dans un hangar climatisé.
En 2007, propriété du port autonome de Nantes Saint-Nazaire, il est réhabilité à l’occasion de la première édition de l’événement biennal Estuaire Nantes <> Saint-Nazaire. A côté des espaces bar et restauration, un espace reste volontairement dédié à des expositions. Au cours des années qui suivent, il accueille autant des expositions d’art que des expositions thématiques ou des événementiels.
En 2011, c’est avec la création de la SPL Le Voyage à Nantes, dirigée par Jean Blaise et qui a pour objet de promouvoir la destination Nantes Métropole grâce au développement culturel, que ce lieu sera désormais un lieu permanent uniquement dédié à l’art contemporain : HAB GALERIE.
Après Erwin Wurm, Roman Signer et Felice Varini, Huang Yong Ping, autre artiste de la collection pérenne d’Estuaire, s’empare de la HAB Galerie. Tirant le fil du spectaculaire Serpent d’océan créé sur une plage de Saint-Brevin, l’exposition explore les thèmes universels qui ont toujours émaillé le travail de l’artiste : les grands mythes, les stratégies du pouvoir, les capacités créatrices et destructrices de l’homme. L’exposition exprime la liberté de pensée de cet artiste majeur qui, pour l’occasion, produit une impressionnante nouvelle pièce.
Huang Yong Ping n’a de cesse de jongler entre mythes orientaux et occidentaux pour mieux révéler la crise totale qui ébranle le monde. Usant de l’animalité de manière récurrente, c’est pourtant à l’humanité qu’il s’adresse. Les œuvres de l’exposition reflètent en toile de fond le marasme écologique actuel et s’attaquent aux formes de pouvoir concourant au déséquilibre mondial.
Puissantes, violentes et critiques, ces allégories offrent un constat du monde ; l’exposition met en lumière le travail passionnant de cet artiste en perpétuelle mutation.
Huang Yong Ping choisi pour
la prochaine Monumenta, en 2016
A peine les Kabakov ont-ils clos leur « Etrange cité » imaginée pour Monumenta que l'on apprend le nom de celui qui leur succédera sous la nef du Grand Palais, à Paris : l'artiste français d'origine chinoise Huang Yongping. Le choix de la ministre de la culture, Aurélie Filippetti, s'accompagne d'une autre annonce : il n'y aura pas de Monumenta 2015, la manifestation annuelle se muant en biennale, les années paires, afin de « laisser toute sa place à la Biennale de Lyon » les années impaires. Huang Yongping a donc deux années devant lui pour élaborer sa proposition monumentale sous l'immense verrière, un défi qui sied bien aux installations volontiers hors-normes de ce petit homme discret et affable.
Né en 1954 à Xiamen, dans l'extrême sud de la Chine, Huang Yongping a été une figure majeure de l'art d'avant-garde chinois des années 1980. Influencé par Marcel Duchamp et le dadaïsme, il avait alors fondé le mouvement « Xiamen Dada ». C'est en 1989 que l'artiste avait été découvert lors de la célèbre exposition « Les Magiciens de la Terre » au Centre Pompidou, l'année de la répression de la place Tianamen. Cette exposition fondatrice avait consisté à ouvrir la scène de l'art contemporain international aux artistes non occidentaux. Huang Yongping s'était installé à Paris dans la foulée, avant d'être naturalisé français.
L'artiste, qui reste encore méconnu du grand public, est pourtant très exposé, en France comme à l'étranger. Il avait représenté la France avec Jean-Pierre Bertrand à la 48e biennale de Venise en 1999. Il a récemment investi la chapelle des Petits-Augustins, à l'école des Beaux-Arts de Paris, avec son Arche (2009) inquiétante, remplie d'animaux taxidermisés, le Musée de Hospice Comtesse avec Wu Zei, son énorme pieuvre, dans le cadre de Lille 3000 (2012), ou encore l'estuaire de la Loire avec le squelette géant d'un Serpent d'océan (2012), une sculpture devenue pérenne. En 2012 encore, il réinventait la fin du monde avec l'exposition « Bugarach » chez son galeriste Kamel Mennour, à Paris.
L'an dernier, pour la Nuit Blanche, l'artiste avait déployé un vivarium aux allures de station spatiale de 36 mètres de long au Carreau du Temple, nouvel et large espace d'exposition du Marais, tandis que le MAC de Lyon lui dédiait une grande exposition personnelle : « Amoy/Xiamen ». Cet été, enfin, le Voyage à Nantes consacre une rétrospective à son travail, organisée autour de sa dernière création : une spectaculaire Mue de serpent translucide de 120 mètres de long.
L'homme, toujours, sait surprendre par ses installations à la fois théâtrales, violentes et symboliques, à l'affût des mutations du monde. David Moinard, le commissaire de l'exposition nantaise, a d'ailleurs choisi de présenter son travail sous cet angle, celui des « Mues » : « Les mues, il faut l'entendre dans le rapport au monde. Huang Yong Ping s'intéresse aux mues du monde », qu'elles soient sociales, culturelles et environnementales. « Ses œuvres explorent les différents types de pouvoirs qui gèrent le monde aujourd'hui : le pouvoir financier, le pouvoir militaire et le pouvoir religieux. » A chaque fois se pose la place de l'homme, à l'échelle d'un monde qui s'emballe.
Ci-dessus : ABBOTTABAD.
On s'en souvient, Abbottabad est le nom insistant de cette ville du Pakistan où Ben Laden avait choisi de se cacher pendant les cinq années qui précédèrent sa disparition définitive. Ce n'était point une grotte nichée dans des anfractuosités de montagne, il s'agissait d'une demeure à la fois anodine et cossue. Sa villa, ses deux étages et sa terrasse furent construits au pied d'une colline, parmi les terres cultivées et les casernes d'une banlieue vaguement poussiéreuse, à l'intérieur d'une enceinte de murs de cinq mètres de haut, bordés de barbelés et de fils électrifiés. L'homme le plus recherché du monde aura vécu les dernières heures de sa vie le 3 mai 2011 ; son cadavre fut abandonné à la mer pour qu'il ne puisse pas avoir de sépulture. Parce qu'elle devenait un lieu de "pélerinage" et de curiosité pour de trop nombreux visiteurs, les autorités pakistanaises choisirent d'effacer sa maison de la carte du monde. Les images de presse qui relatent l'opération sont relativement rares, des soldats lourdement armés bloquaient les accès du site ; les débris furent déblayés et emportés, les bulldozers, les pelleteuses et les grues rasèrent l'édifice pendant les jours et les nuits d'un week-end de la fin février 2012.
Pour évoquer autrement cet espace dont il ne reste que des gravats et des coups de balai, Huang Yong Ping a imaginé que son domaine aurait pu être abandonné et désaffecté. L'oubli l'aurait emporté, les silhouettes et la carcasse des vestiges de ce médiocre béton auraient subsisté : le mur d'enceinte est beaucoup moins apparent, les barbelés et les portes d'acier ont disparu, les dalles de la cour intérieure et un grand balcon sont visibles au premier plan, les herbes sauvages et la végétation se sont emparés de cet ensemble, plus personne ne s'y rend. On se serait éloigné de la catastrophe : du silence, quelque chose de beaucoup plus hasardeux et de tout à fait mystérieux se serait substitué aux grandiloquences et aux pitreries des planifications humaines.
Reportage photographique : Jacques Snap (photos prises avec mon IPhone)
Voir mes précédents billets sur Huang Yong Ping : 06/07/2014, 03/07/2014, 27/10/2012.
Pour y accéder (après avoir noté les différentes dates) voir l'historique en cliquant sur le lien suivant : http://jourstranquilles.canalblog.com/archives/index.html