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Jours tranquilles à Paris
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29 mars 2020

CORONAVIRUS

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Ci-desssus : Coronavirus en Bretagne

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29 mars 2020

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29 mars 2020

INTERVIEW - «Dans ses discours, Macron a clairement la volonté de dramatiser pour mobiliser»

Par Laure Bretton 

Le chercheur en science politique Julien Fragnon décrypte la rhétorique guerrière du Président, qui vise, selon lui à empêcher les critiques et les divisions politiques.

Mobiliser les Français face à l’épidémie ou réaffirmer une autorité mise à mal et s’inscrire dans l’histoire ? Depuis quinze jours, Emmanuel Macron emprunte un registre martial dans ses allocutions sur le coronavirus. Une rhétorique qui vise, politiquement, à «réduire les critiques», selon Julien Fragnon, docteur et enseignant en science politique à Sciences-Po Lyon, chercheur associé à l’Institut de recherche stratégique de l’Ecole militaire et au laboratoire Triangle.$

Le mot «guerre» utilisé par Macron vous semble-t-il approprié à la période que nous vivons ?

Pour le savoir, il faudra analyser ce que le terme de guerre provoque chez les Français à long terme. Or, on voit déjà monter çà et là une forme de décalage entre les effets recherchés par Emmanuel Macron et la réception de son discours. Ce qui est sûr, c’est que ce que nous vivons est sans précédent dans nos sociétés et qu’il y a donc une volonté pour le Président de décrire la situation en faisant référence au symbolique de la guerre. Plusieurs aspects de la situation actuelle peuvent y correspondre : la réduction des libertés individuelles ou la mobilisation des armées.

Politiquement et historiquement, mobiliser l’armée face à cet «ennemi invisible», c’est une première ?

Invoquer la guerre, rendre l’armée visible dans la riposte sanitaire, c’est surtout espérer une mobilisation nationale, des Français et des forces politiques. Il y a, par ce terme qui écrase tout, la volonté de marquer une rupture et l’entrée dans une situation exceptionnelle, mais aussi celle de réduire les critiques.

Si nous sommes en guerre, les divisions sont interdites, en résumé ?

C’est l’effet recherché et on peut d’ailleurs noter que dans son discours de Mulhouse, le chef de l’Etat a fustigé «les facteurs de division» et les «doutes». Ses allocutions ont une visée : l’unité nationale. Il espère que, en ces temps de «guerre sanitaire», il y ait une forme de mise entre parenthèses des concurrences politiques ordinaires. Il y a très clairement la volonté de dramatiser pour mobiliser. Mercredi soir, il a parlé des médecins «tombés» pendant l’épidémie de Covid-19, comme au champ d’honneur.

Parler de crise ou d’épidémie ne suffisait pas ?

L’exécutif a besoin de marquer les esprits. Mais ce registre a aussi des effets négatifs pour le pouvoir. Certains disent : «OK, c’est la guerre, mais alors passons en économie de guerre, réquisitionnons officiellement les entreprises.» Ce que le gouvernement ne peut ou ne veut pas faire. Par ailleurs, envoyer l’armée au secours des Français, c’est le dernier recours dans l’imaginaire collectif : il n’y a rien au dessus. Si nous n’en sommes qu’au début de l’épidémie, le pouvoir ne pourra pas plus dramatiser sa communication.

Emmanuel Macron, François Hollande ou Nicolas Sarkozy sont des présidents qui n’ont pas connu la guerre, contrairement à de Gaulle, Mitterrand ou Chirac. Leurs références peuvent-elles trouver un écho chez les Français ?

Les présidents qui ont connu la guerre utilisaient sûrement le terme avec plus de prudence ! Mais les Français d’aujourd’hui n’ont pas non plus connu la guerre, donc chacun se fabrique ses propres représentations et à l’heure actuelle, pour tous, elles sont produites plus par la fiction (comme des films ou des romans sur la guerre et plus particulièrement sur l’expérience des guerres mondiales). Concernant Emmanuel Macron, ce n’est pas neuf, ce recours au registre militaire : souvenez-vous la descente des Champs-Elysées en command car après la présidentielle ou des fastes du premier défilé du 14 juillet de son quinquennat. Cela correspond à son image à lui de la présidence : il est le chef des armées, par la Constitution, et par les images.

29 mars 2020

Coronavirus : l’impossible communication de crise d’Emmanuel Macron

Par Cédric Pietralunga

Pour répondre à la crise sanitaire, le chef de l’Etat doit à la fois rassurer et effrayer. Un paradoxe qu’il tente de résoudre en saturant l’espace et en adoptant un ton martial.

C’est le cauchemar de tous les conseillers en communication : vivre une crise où chaque événement du jour peut remettre en cause ce que vous aviez décidé la veille.

C’est pourtant ce qu’affronte Emmanuel Macron depuis l’apparition du SARS-CoV-2, un virus qui oblige l’exécutif à adapter sa communication tout autant à l’avancée de l’épidémie qu’à celle des connaissances scientifiques. « Cette crise est inédite, il est normal de tâtonner », estime Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande.

Pour affronter la crise sanitaire, « la plus grave qu’ait connue la France depuis un siècle », comme l’a qualifiée le chef de l’Etat dès le 12 mars, l’exécutif avait au départ fait le pari de placer en première ligne le ministre de la santé, Olivier Véran, fraîchement nommé à ce poste après le départ d’Agnès Buzyn, et le directeur général de la santé, l’infectiologue Jérôme Salomon. « Ils doivent devenir les “François Molins” du coronavirus », entendait-on alors dans les rangs de la majorité, en référence à l’ancien procureur de la République de Paris, qui avait incarné la lutte contre le terrorisme après les attentats de 2015.

Hyperprésence d’Emmanuel Macron

Las ! Depuis son premier déplacement lié au Covid-19, le 27 février, à l’hôpital parisien de la Pitié-Salpétrière, le chef de l’Etat s’impose par son hyperprésence.

Un jour dans une maison de retraite, un autre dans un centre de régulation du SAMU, le suivant dans un laboratoire de l’Institut Pasteur ou dans un hôtel réquisitionné pour les SDF… En un mois, Emmanuel Macron s’est déplacé ou s’est exprimé une dizaine de fois sur le Covid-19. Sans parler de ses trois allocutions solennelles, les 12 et 16 mars depuis l’Elysée et le 25 mars à Mulhouse (Haut-Rhin). Des interventions suivies massivement : le 16 mars, son annonce du confinement a été regardée par 35 millions de Français, du jamais vu.

« Emmanuel Macron n’a pas le choix. Dans une période comme celle que nous vivons, le président doit se déplacer, aller sur le terrain, comme les généraux vont sur le front, approuve Gaspard Gantzer. Il faut remettre de l’humain, montrer une forme de courage physique, ça fait du bien aux gens. »

C’est cette ligne qu’avait choisie François Hollande après l’attaque de Charlie Hebdo en janvier 2015 ou les attentats de novembre 2015. « En période de crise, le pouvoir politique doit parler très souvent à son peuple, il doit s’exprimer », abonde Arnaud Dupui-Castérès, directeur général du cabinet Vae Solis et spécialiste de la communication de crise.

« Prendre de la hauteur »

« A partir du moment où le pouvoir fait le choix de la pédagogie et de la transparence, il doit prendre la parole quotidiennement. Dans une crise comme celle que nous vivons, il n’y a jamais assez de communication », confirme Clément Léonarduzzi, président de Publicis Consultants. Pour l’ex-bras droit de Marie-France Lavarini, ancienne communicante de Lionel Jospin à Matignon, le gouvernement devrait d’ailleurs instaurer un point quotidien sur la situation économique du pays, comme il le fait pour la situation sanitaire avec Jérôme Salomon. « Quand il y a des questionnements, il faut y répondre », estime le consultant.

A l’Elysée, on assume en tout cas cette posture jupitérienne retrouvée du chef de l’Etat, alors qu’Emmanuel Macron avait tenté de la gommer après la crise des « gilets jaunes ». « Le président est transparent, réactif et sur tous les fronts », résume son entourage.

Au point d’inquiéter certains soutiens, qui le trouvent exagérément exposé. « Macron est trop seul. A part [Olivier] Véran et [Jérôme] Salomon, qui s’occupent du sanitaire, personne n’imprime. Ce devrait être le rôle du premier ministre [Edouard Philippe] ou du [ministre de l’intérieur Christophe] Castaner de gérer l’opérationnel, mais ils n’y arrivent pas, il manque un échelon », estime un communicant réputé proche de l’Elysée.

« Dans une crise, on est souvent obsédé par la gestion opérationnelle. C’est une erreur. Un président ou un premier ministre doivent prendre de la hauteur et de la distance, pas s’occuper de la fermeture des marchés », abonde Arnaud Dupui-Castérès.

Sur la forme, l’exécutif a fait le choix d’une communication au ton très martial. « Nous sommes en guerre », a répété à six reprises Emmanuel Macron lors de son allocution télévisée du 16 mars, évoquant un « ennemi (…) invisible, insaisissable » contre lequel il faut sonner « la mobilisation générale ».

« Le président s’inspire beaucoup de Clemenceau »

Le 25 mars, le chef de l’Etat s’est volontairement mis en scène devant l’hôpital de campagne installé par l’armée sur le parking du centre hospitalier de Mulhouse, y annonçant même le lancement d’une opération militaire baptisée « Résilience ». « Le président s’inspire beaucoup de Clemenceau, qui fait partie de son panthéon personnel. Son appel à la mobilisation vient de là », explique un proche.

Mais certains s’interrogent sur la durabilité de ce ton martial. S’il a permis de mobiliser les Français et d’obtenir une forme d’union nationale contre le virus, poursuivre sur la même tonalité comporte aussi des risques, estiment les professionnels de la communication.

« Le vocabulaire guerrier peut s’user très vite, met en garde Gaspard Gantzer. Les gens voient bien qu’il ne s’agit pas d’une guerre au sens classique. » « C’est une sémantique qui met immédiatement dans une position de chef de guerre. Cela provoque un choc utile et nécessaire. Mais comme dans une guerre, il faut ensuite donner une perspective sur les batailles et la victoire à venir », abonde Clément Léonarduzzi.

D’autres se montrent aussi sceptiques sur le choix de médiatiser les experts du conseil scientifique ou du comité analyse, recherche et expertise (CARE), deux instances installées ces dernières semaines par l’exécutif pour le conseiller sur la crise sanitaire.

« Cela donne un sentiment de fébrilité, que le pouvoir cherche à s’abriter derrière les scientifiques. C’est une ligne Maginot illusoire », tance un conseiller de l’ombre. Des réserves balayées par l’Elysée. « Le président a mis en place ces conseils pour créer un lien de confiance avec les Français, pas pour se défausser », explique un membre du cabinet de M. Macron. « Le président s’entoure beaucoup mais il n’est pas prisonnier. Il ne veut pas d’un gouvernement d’experts. C’est lui qui prend les décisions et il l’assume », ajoute un autre conseiller.

Trouver un chemin de crête

N’empêche, l’exécutif a donné le sentiment de ne pas toujours savoir quelle stratégie tenir, notamment en matière de masques ou de tests, ce qui a provoqué le trouble.

« Ce type de crise nécessite des décisions quotidiennes, mais il faut choisir une ligne et éviter de se dédire. On ne peut pas être sur la face nord et sur la face sud en même temps, sinon plus personne n’y comprend rien », met en garde M. Dupui-Castérès. « La gestion des masques et des tests, on dirait Coluche qui disait : “dites-moi quel est votre besoin, je vous expliquerai comment vous en passer”. Cela va revenir comme un boomerang pour l’exécutif », craint un communicant ayant ses entrées à l’Elysée.

« Nous n’avons pas d’autre choix que de nous adapter, les scientifiques eux-mêmes changent d’avis ! Il y a encore quinze jours, l’OMS [l’Organisation mondiale de la santé] disait que généraliser les tests ne servait à rien ! », se défend-on à Matignon.

Reste à savoir combien de temps Emmanuel Macron pourra tenir ce rythme et maintenir ce ton. Depuis le début de la crise, l’exécutif est confronté à deux écueils, entre lesquels il tente de trouver un chemin de crête : celui d’en faire trop et celui de ne pas en faire assez.

« La plus grosse difficulté est ce paradoxe à gérer : il faut faire peur pour que les gens se confinent, mais aussi rassurer pour qu’ils gardent le moral. Cela n’a rien d’évident sur le long terme », reconnaît M. Gantzer.

« Montrer le bout du tunnel »

Pour éviter de tomber de ce fil d’équilibriste, tous les communicants s’accordent à dire que le chef de l’Etat n’a qu’une solution : ouvrir rapidement la séquence de l’après. « Pour garder la confiance de ses troupes, un chef de guerre doit aussi se projeter dans la victoire, estime Mayada Boulos, directrice générale adjointe de Havas Paris et ancienne conseillère de Marisol Touraine au ministère de la santé. Le temps est aujourd’hui comme suspendu, il faut montrer le bout du tunnel. Expliquer qu’il y aura un stade 4 après le stade 3 de l’épidémie. »

Un changement de discours qui passe aussi par des symboles, estiment d’autres conseillers. « Pour donner le moral aux Français, on pourrait imaginer que la patrouille de France passe au-dessus de l’Arc de triomphe comme la patrouille italienne est passée au-dessus de la Péninsule au son de Pavarotti. Ou annoncer dès maintenant que des soignants de l’AP-HP [Assistance publique-Hôpitaux de Paris] défileront sur les Champs-Elysées le 14 juillet, propose M. Gantzer, qui avait été de ceux à imaginer le grand défilé parisien après l’attaque contre Charlie Hebdo, qui avait réuni 1,5 million de personnes en janvier 2015. Les Français vivent des moments difficiles, ils ont aussi besoin d’être flattés, d’être considérés, de se sentir comme des résistants… »

28 mars 2020

La Tour Eiffel reconnaissante

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28 mars 2020

ALERTE France-Coronavirus: La France commande un milliard de masques en Chine (franceinfo)

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La France a passé commande à la Chine d’un milliard de masques de protection, annonce franceinfo qui cite la Direction générale de la Santé.

Un pont aérien va être mis en place pour aller chercher ce stock, dont 74 millions de masques de type FFP2. Chaque vol permettra de rapporter un peu plus de 18 millions de masques, qui seront ensuite répartis sur plusieurs sites en France.

28 mars 2020

Coronavirus - PRESSE

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27 mars 2020

La période de confinement est prolongée au moins de deux semaines

Coronavirus : la période de confinement est prolongée au moins de deux semaines, jusqu'au mercredi 15 avril, annonce le Premier ministre

Ce n'est pas encore demain que les Français retrouveront une vie normale. Depuis l'Elysée, où il s'exprimait vendredi 27 mars, Edouard Philippe a annoncé que la période de confinement pour lutter contre l'épidémie de coronavirus était prolongée de deux semaines. C'est-à-dire jusqu'au mercredi 15 avril. "Cette période pourra être prolongée si la situation sanitaire l'exige. Je remercie les Français pour leur civisme, leur patience et leur solidarité. Je vous donne rendez-vous demain pour un point complet avec le ministre de la Santé, Olivier Véran", a précisé le Premier ministre à la sortie du Conseil des ministres.

26 mars 2020

PQR - Presse Quotidienne Régionale

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26 mars 2020

Familles en HLM : «Si je craque, je fais craquer tout le monde»

Par Rachid Laïreche, Dessin Cyril Pedrosa et Ramsès Kefi 

Dans les quartiers populaires, où le manque d’espace est constant et où les jeunes voient souvent l’extérieur comme une manière de s’évader du carcan familial, le confinement fait ressortir tensions et frustrations.

Depuis des années, Marc dort sur le canapé du grand salon. Pas assez de place dans les chambres. A 21 ans, c’est lui l’aîné. Parfois, il rentre tard. Ou veille. Ou ressort la nuit pour fumer : «Parfois, tu veux regarder un film tout seul. Et le salon à partir de minuit, dans le noir, c’est la liberté. Pas de bruit, personne pour te demander ci ou ça.» Le T4, dans un HLM des Hauts-de-Seine, rétrécit quand toute la famille y est : ils sont sept dedans, en comptant les parents.

L’étudiant dit que chacun, du plus vieux au plus petit, avait naturellement trouvé un équilibre. S’arranger avec l’étroitesse, trouver ses moments, laisser souffler les autres. Le confinement imposé remet tout à plat. «A minuit, mon petit frère et ma petite sœur ne dorment pas encore. A 8 heures du matin, ma mère fait des va-et-vient à la maison. Sur le canapé, je dérange.» Le père tourne en rond au sens propre du terme. Il squatte les fenêtres, devient obsédé par le rangement, scrute les sorties en les limitant à quinze minutes. «Il a peur de la maladie, il ne bouge plus. Dès que tu te déplaces, tu tombes sur lui. Il galère entre quatre murs. Parfois, la porte d’une chambre est fermée, il va l’ouvrir sans frapper…»

Normalité inversée

Le coronavirus a décrété l’extérieur irrespirable, alors que celui-ci est le ballon d’oxygène pour des familles nombreuses dont la définition n’a jamais été aussi spatiale. A Evry (Essonne), une mère de quatre enfants fait des divisions : «C’est la superficie qui compte en ce moment, pas le nombre. Si tu vis à six dans un grand pavillon, tu es juste une famille qui doit t’adapter à l’urgence. Pour nous, le confinement a divisé des petits espaces en espaces encore plus petits. Le mien aussi se restreint. Si je craque, je fais craquer tout le monde avec moi.» A Montreuil (Seine-Saint-Denis), un jeune adulte abonde dans son sens : «Nous sommes dix à la maison. Tu as déjà essayé de rester à quatre dans une chambre ? On a une armoire, un bureau, une télé et deux lits superposés. On ne peut même pas rester à trois debout.»

D’aucuns s’interrogent souvent sur ce qui pousse des jeunes à rôder jusqu’à pas d’heure et les parents à ne pas les retenir. Au vrai, la normalité s’inverse : il y a parfois plus d’intimité dans un hall d’immeuble que chez soi, où le manque de place accroît les problèmes, attise les tensions les plus infimes, accentue les frustrations. Dans le meilleur des cas, le gamin cherche de l’air. Dans le pire, il fuit. Quid de la vie dans les foyers très pauvres ? Dans les appartements délabrés où la lumière passe peu à cause de l’entassement des affaires ? Dans les familles minées par de graves conflits entre adultes ? Le paradoxe total : la rue devient le lieu où l’on se cache.

En mars, Libération avait écumé un territoire à Athis-Mons, dans la banlieue lointaine où pullulaient les rats, lesquels sont parvenus à entrer dans quelques appartements. Quid aussi de la vie en quarantaine avec des rongeurs ou des cafards ? A Créteil (Val-de-Marne), un travailleur social insiste à propos des parents taxés de laxisme : «Toute une génération de chefs de famille est d’origine villageoise. Pour eux, et ils le pensent sincèrement, le gamin ne risque rien dehors quand ils sont au travail. Il est avec des voisins, dans un espace qui leur paraît clos où tout le monde veille l’un sur l’autre. Ils ont du mal à imaginer autre chose.»

A Fontenay-sous-Bois (Val-de-Marne), Soraya raconte la famille nombreuse dispersée. Quand on doit veiller les uns sur les autres de loin et surtout que la moyenne d’âge à l’intérieur même de l’appartement augmente. Les heures au téléphone, l’inquiétude à distance. Le père est un ex-ouvrier, la mère est au foyer depuis toujours et quatre de leurs marmots sont partis construire leur vie ailleurs. Sauf deux garçons qui approchent les 30 ans. Le retraité a du mal à rester enfermé. Les habitudes ont des relents quasi religieux : la balade au marché, le café au PMU, les discussions sur son terroir d’origine avec d’autres anciens - la routine réglée à la seconde près. Soraya, à peine la quarantaine, confie, à propos de ses deux frangins restés au bercail : «Celui qui a 27 ans est tranquille, il travaille à la banque et bosse à la maison. Celui de 28 ans en revanche… Il traîne en bas pour fumer son joint, reste avec ses potes et rentre très tard. Ça sert à quoi d’ordonner à mon père de ne pas sortir si lui fait n’importe quoi ? Il peut faire rentrer le virus. L’aîné, qui vit dans le Sud, est comme un fou. Il veut remonter pour lui faire comprendre, mais il ne peut pas. Il a ses gosses et c’est chaud de voyager.»

«Un truc de vieux»

L’époque est ce qu’elle est : on quitte le cocon familial plus tard qu’avant. Avec ce que cela crée. Dans Libé, en 2018, Thomas Sauvadet, sociologue, décortiquait le mécanisme, côté masculin : «Les garçons restent désormais plus longtemps dans le foyer familial. On a, d’une part, le père, autorité virile, et dans certains cas, un ou des jeunes hommes au chômage, en construction et en recherche de virilité. Personne n’a vraiment envie d’entrer en conflit, alors tout ce monde passe son temps à s’éviter. La communication est minimale.» Une élue de l’Essonne évoque les femmes esseulées : «J’invite ceux qui donnent des leçons à passer une demi-heure avec une mère qui élève seule des garçons costauds. Ils ne tiendraient pas quinze secondes.»

Sandrine vit seule avec ses deux filles et son fils dans un 45 m². Elle est séparée du père, brancardier dans un hôpital à Paris, qui ne voit plus ses enfants pour les protéger de la pandémie. Sandrine gère. Le salon, lieu de vie collectif, est sa chambre à coucher. Le soir, elle déplie le clic-clac. De temps en temps, elle craque : «Sur Facebook, je vois des copines dire que le confinement c’est super parce qu’elles font des siestes et regardent la télé alors que pour moi, c’est l’enfer. Je suis secrétaire, je fais du télétravail et je n’arrive pas à être efficace. Je dois aussi faire le ménage et je tente de convaincre mon fils de ne pas sortir mais il n’écoute pas. Certains de ses copains l’engrainent, lui disent que ce n’est pas grave et que le virus est un truc de vieux. Pourtant son père lui raconte l’hôpital, mais il n’y a rien à faire.»

La police a renforcé les contrôles dans les villes populaires et leurs quartiers. Les regroupements, ciment de la routine dans ces coins-ci, sont interdits. On mange, boit, fume, se déplace à plusieurs. Les halls sont des lieux de passage et de squat, soit tout ce qu’un virus contagieux adore. A Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), Samir, 30 ans, cadet d’une fratrie de quatre, dit : «Quand tu n’as plus l’habitude de rentrer chez toi, c’est dur de rester assis dans un canapé ou dans une chambre. La plupart de tes repères sont dehors, t’as plus l’habitude de l’intérieur, plus les réflexes, plus les bons mots. Même tes secrets sont à l’extérieur et tu ne peux pas les gérer enfermé. Moi, je ne réalise pas encore que je vais devoir rester un mois enfermé. Tu ne peux même pas parler au téléphone chez toi : tout le monde t’entend si tu appelles ta copine.» La semaine passée, Laurent Russier, maire (communiste) de cette ville, très dense, de 110 000 habitants nous expliquait : «Oui, il y a des jeunes qui traînent encore, pas beaucoup, mais des petits groupes. On ne peut pas envoyer la police parce que ça peut très vite dégénérer donc on tente de discuter, notamment avec les services de jeunesse et les médiateurs.» L’édile d’une ville voisine : «Vous allez verbaliser des familles qui ont déjà du mal à payer le loyer ?»

De Retour du turbin

A Montreuil, un père ramène tout au temps et à l’absence. Il travaille sur des chantiers, quarantaine ou pas. De 7 h 30 à 18 heures, temps de trajet non compris. Son épouse fait des ménages dans les bureaux. Elle arrive tôt le matin avant le défilé des cravates et s’en va en début d’après-midi. Ce qui crée un vide en période d’urgence sanitaire. Leurs sept enfants ont de 12 à 26 ans, dont cinq garçons qui se partagent une seule chambre. Un seul ordinateur, trois téléviseurs, qui ne suffisent pas. Le père : «Ce n’est pas facile pour eux. Ils se battent, ils crient. C’est fatigant pour toute la famille. Des copains au travail ont "peur" de rentrer à la maison à cause du bruit. Mes deux grands sortent beaucoup, mais comment les surveiller ? On leur dit qu’il ne faut pas, ils me répondent oui, mais ils poussent la porte.» De retour du turbin, la mère s’occupe des repas et surveille les devoirs des plus jeunes. L’un des deux grands, sur un ton fataliste : «Je sais qu’on peut se contaminer en sortant mais je ne fais rien de mal. Je reste en bas, je fume ma clope, je papote. Et quand je rentre, je me lave bien les mains. C’est chaud de rester à la maison. Ça voudrait dire être dans son lit une journée entière. Je ne peux pas bouger chez moi, c’est trop petit. Mes deux petites sœurs sont dans leur chambre, elles s’occupent. Mes parents sont dans le salon, devant la télé, et nous, les garçons, tu penses qu’on peut rester à cinq dans la chambre ? C’est une prison.»

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