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Jours tranquilles à Paris
liberte de la presse
26 août 2017

Turquie. La demande de libération de Loup Bureau rejetée

Au lendemain du rassemblement organisé en son soutien à Paris, Loup Bureau a vu sa demande de libération conditionnelle refusée, a indiqué, hier, son avocat, Me Martin Pradel, sur Twitter.

Le journaliste est détenu dans une prison turque depuis un mois. Par ailleurs, un autre de ses avocats, Rusen Aytac, a indiqué qu'il avait été transféré dans une autre cellule « sans aucune raison » et qu'il était désormais « privé de télévision ».

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25 août 2017

Rassemblement de soutien à Paris pour Loup Bureau

loup

Reporters sans frontières et le comité de soutien à Loup Bureau – dont le porte-parole est le journaliste Pierre Haski – ont déployé, hier, une banderole sur le parvis de la mairie du IVe arrondissement à Paris. Mathias Depardon, qui avait été détenu un mois en Turquie, était présent. Tous réclament la libération du journaliste nantais de 27 ans, écroué à la prison de Sirnak (Turquie) depuis un mois. Une pétition a recueilli plus de 27 000 signatures.« Il s’agit d’une arrestation politique et c’est donc au politique de régler cette situation. » Loïc Bureau, le père de Loup, attend une nouvelle prise de parole du Président Macron, et regrette de ne recevoir« aucune information du Quai d’Orsay ». Christophe Girard, le maire socialiste, l’a assuré du soutien de Marielle de Sarnez, présidente de la Commission des Affaires étrangères à l’Assemblée.

16 août 2017

Etats-Unis : Libertés numériques

Le gouvernement américain veut identifier plus d’un million de visiteurs d’un site anti-Trump

Le 20 janvier, 1,3 million d’internautes s’étaient rendus sur un site qui organisait des manifestations hostiles à l’investiture du nouveau président.

Le gouvernement américain cherche à se procurer des informations sur tous les visiteurs d’un site Internet critique envers Donald Trump. Un mandat a été présenté par le ministère de la justice le 17 juillet à Dreamhost, l’entreprise hébergeant le site disruptj20.org (« perturbez le 20 janvier »), créé pour organiser les manifestations en marge de la cérémonie d’investiture du 45e président américain.

Cette demande concerne 1,3 million d’internautes s’étant rendus sur le site et a pour but d’obtenir leur adresse IP (l’identifiant sur Internet de l’appareil utilisé pour se connecter) ainsi que le jour et l’heure de leur visite.

Une adresse IP peut permettre au gouvernement d’obtenir l’identité de l’internaute qui l’utilise. Dreamhost a contesté cette demande devant la justice et a rendu publique cette procédure lundi 14 août.

Une demande « alarmante »

« Ces informations peuvent être utilisées pour identifier toute personne qui est allée sur ce site pour exercer et exprimer sa liberté d’expression politique, protégée par la Constitution », écrit l’entreprise sur son site, qualifiant la demande du gouvernement « d’alarmante », « un exemple d’abus de pouvoir de la part du gouvernement ».

« Je ne vois aucune justification légitime » à la demande du gouvernement, a réagi Mark Rumold, avocat pour l’Electronic Frontier Foundation, une ONG américaine de défense des libertés numériques, auprès du Guardian.

Comme le rappelle le quotidien de Londres, ce n’est pas la première fois que l’administration tente de démasquer ses critiques en ligne. En avril, elle avait tenté d’obtenir des informations sur un compte Twitter critique de sa politique en matière d’immigration. Le réseau de microblogging avait contre-attaqué en justice et le gouvernement avait abandonné sa requête. L’offensive du ministère de la justice contre les opposants ayant pris part aux manifestations en marge de la cérémonie d’investiture de M. Trump ne se limite pas à Internet : plus de deux cents personnes ont été inculpées en avril pour participation à des émeutes.

16 août 2017

Le journaliste français Loup Bureau entame son 22e jour de détention en Turquie

Par Marie Jégo, Istanbul, correspondante

Emmanuel Macron s’est entretenu hier avec le président turc et lui a fait part de « sa préoccupation » sur la situation du jeune homme. Loup Bureau est accusé par Ankara d’appartenir à « une organisation terroriste » pour avoir réalisé en 2013 un documentaire sur les Kurdes syriens.

Le fait que le président français Emmanuel Macron et son homologue turc Recep Tayyip Erdogan aient évoqué, mardi 15 août par téléphone, la situation du journaliste français Loup Bureau, emprisonné en Turquie pour un reportage, « est très positif, c’est le premier signe d’une réelle implication politique de la France », s’est réjoui Loïc Bureau, le père du jeune homme, interrogé par téléphone. « C’est ce que nous attendions. De plus, il y aura une suite puisque les deux dirigeants sont convenus de se reparler à nouveau. »

Voici 22 jours que le journaliste, inculpé par un juge turc pour « appartenance à un groupe terroriste », se morfond à la prison de Sirnak, non loin de la frontière turco-irakienne. « Il est dans l’isolement le plus total. Le consulat de France lui a fait parvenir des livres mais il ne les a pas encore reçus, ils sont encore à la fouille », explique Loïc Bureau qui a pu parler samedi quelques minutes avec son fils par téléphone tandis qu’une visite consulaire avait été autorisée la veille.

Papiers en règle

Le journaliste, qui a notamment travaillé pour Arte et TV5Monde, a été interpellé le 26 juillet alors qu’il franchissait en toute légalité, ses papiers en règle, la frontière irako-turque au poste de Habur. C’est là, dans le cadre d’un contrôle de routine qu’il a été placé en garde à vue à Sirnak, la ville la plus proche, pour être ensuite relâché en fin de journée.

Mais, peu de temps après et alors qu’il attendait le bus à Sirnak, une unité antiterroriste est venue l’arrêter. Il a alors été présenté à une ancienne juge pour enfants fraîchement nommée qui l’a aussitôt inculpé d’« appartenance » à une organisation terroriste, sans la nommer.

Plus de 4 000 magistrats ont été démis de leurs fonctions dans le cadre des purges qui ont suivi le coup d’état du 15 juillet 2016, entraînant une grande désorganisation de l’institution judiciaire. Il n’est pas rare actuellement de voir des magistrats eux-mêmes accusés d’appartenance au mouvement du prédicateur Gülen, décrit comme l’instigateur du coup d’Etat, instruire des dossiers liés au « terrorisme ».

Dans le cas de Loup Bureau, l’objet du délit est un documentaire sur les Kurdes syriens et sur leurs milices armées YPG réalisé en 2013. Aux yeux des autorités turques, ces milices ne sont qu’une filiale des Kurdes autonomistes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), avec lesquels une guerre est en cours depuis plus de 30 ans.

Aucun des avocats du jeune homme n’a accès au dossier

Toutefois, en 2013, la Turquie était en paix avec le Parti de l’Union démocratique (PYD) – dont les YPG sont le bras armé – et avec son chef Saleh Muslim, lequel était régulièrement reçu à Ankara. A l’époque, une trêve était également en vigueur en Turquie entre les autorités et le PKK. Les choses ont commencé à se gâter en 2015.

« Il est absurde qu’un documentaire diffusé à la télévision française puisse servir de pièce à conviction dans le cadre d’une enquête sur le terrorisme », déplore Loïc Bureau qui se démène pour que son fils soit lavé de l’accusation de terrorisme et libéré. « Mon fils est allé une seule fois en Syrie, en 2013, il n’y est pas retourné depuis. Le 26 juillet, il a franchi la frontière turco-irakienne en toute légalité et ne comptait pas travailler en tant que journaliste en Turquie. D’ailleurs, il s’apprêtait à prendre un avion à Ankara pour rentrer en Europe. »

L’assimilation faite par les autorités turques entre journalisme et terrorisme dépasse l’entendement. Aucun des avocats du jeune homme n’a eu accès au dossier comme c’est le cas pour les affaires liées au terrorisme.

« Impossible de savoir sur quels fondements les juges et le procureur turcs se sont fondés pour motiver l’incarcération de Loup », regrette Rusen Aytac, une avocate du barreau de Paris qui défend le journaliste.

« Son incarcération est dure, il est très isolé »

Son collègue Martin Pradel confirme : « Les autorités turques assument parfaitement le fait de poursuivre des avocats pour avoir plaidé, des journalistes pour avoir informé. Du point de vue français c’est surprenant, mais en Turquie, cette considération est assumée. » Le conseil n’est pas très optimiste sur le sort de son client, « Loup est en difficulté, son incarcération est dure, il est très isolé, et les charges qui pèsent contre lui sont extrêmement lourdes. »

La conversation que le chef de l’Etat français a eue avec le président turc est tout de même une bonne chose. « La situation des magistrats turcs étant ce qu’elle est, on comprend qu’ils ne peuvent pas prendre des décisions contraires à la volonté du numéro un turc, donc cette intervention était indispensable. Nous l’appelions de nos vœux depuis le début. »

Plus de 160 journalistes sont actuellement emprisonnés en Turquie. Récemment, 35 mandats d’arrêts ont été émis contre des journalistes accusés de « soutien au terrorisme », dix d’entre eux ont été arrêtés à Istanbul, dont Burak Ekici du quotidien d’opposition Birgün. Etre journaliste est devenu un crime. La chasse aux sorcières a pris des proportions inquiétantes.

Ainsi, lundi 14 août, des journaux progouvernementaux (Aksam, Star, Sabah) ont publié des noms, ceux de journalistes turcs affiliés à un groupe actif sur l’application WhatsApp, et se sont empressés de les présenter comme des fomentateurs de rébellion, des traîtres.

8 août 2017

Un comité de soutien demande la libération du journaliste Loup Bureau

Le Français a été arrêté à la frontière turco-syrienne le 26 juillet puis mis en examen et incarcéré pour « participation à un groupe terroriste ».

Un comité de soutien au journaliste français Loup Bureau, détenu depuis la fin juillet en Turquie pour soupçon d’appartenance à une « organisation terroriste armée », à la suite d’un reportage sur les Kurdes syriens des YPG (unité de protection du peuple), a été lancé par ses proches, lundi 7 août.

Plus de 2 500 personnes ont déjà rejoint le groupe Facebook « Free Loup Turkey - Comité de soutien à Loup Bureau », géré par sa famille. Une pétition en ligne en faveur de sa libération, lancée sur Change.org par le même comité, avait, elle, récolté plus de 10 300 signatures mardi à 6 heures.

Loup Bureau, journaliste indépendant qui a notamment collaboré avec les médias TV5 Monde, Arte et Slate, a été interpellé le 26 juillet à la frontière entre l’Irak et la Turquie, après que des photos le montrant en compagnie de combattants kurdes syriens des YPG – considérées comme une organisation terroriste par Ankara – eurent été trouvées en sa possession.

« C’est effrayant »

Selon son avocat, Martin Pradel, il a été mis en examen par un juge qui l’a considéré comme suspect d’appartenance à « une organisation terroriste armée », et ce malgré ses dénégations, du fait de ce reportage qui avait été réalisé en 2013.

Selon son père, interrogé par RMC, Loup Bureau « est complètement isolé du reste du monde ». « On nous annonce qu’il ne pourra avoir qu’un coup de téléphone d’une dizaine de minutes toutes les deux semaines et évidemment aucune visite ». « C’est effrayant » et « je ne sais pas dans quel état moral il est », a-t-il poursuivi, redoutant une détention de plusieurs mois.

Dans un communiqué commun, les syndicats de journalistes français SNJ, SNJ-CGT et CFDT-Journalistes, soutenus par la Fédération européenne des journalistes (FEJ) et la Fédération internationale des journalistes (IFJ), ont exigé « que le gouvernement français mette tout en œuvre » pour obtenir sa libération. « Les propos convenus ne suffisent plus », disent-ils.

Pour les trois syndicats, « il est clair que les dirigeants turcs et le président Erdogan en tête abhorrent les journalistes étrangers trop curieux et n’hésitent pas à les arrêter pour imposer un mur du silence sur la réalité de ce pays, qui est la plus grande prison au monde pour les journalistes, où 160 de nos confrères sont derrière les barreaux ».

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24 juillet 2017

Procès, arrestations et dénonciations rythment la vie quotidienne en Turquie

liberation liberté presse turquie

Par Marie Jégo, Istanbul, correspondante - Le Monde

Lundi 24 juillet à Istanbul s’ouvre le procès de dix-neuf journalistes et employés de « Cumhuriyet », le plus vieux quotidien du pays. Ils risquent jusqu’à 43 ans de prison pour « soutien au terrorisme », quand bien même leur acte d’accusation est vide.

Emblématique du sort fait à la liberté de la presse en Turquie, le procès de dix-neuf journalistes et employés de Cumhuriyet, le plus vieux quotidien du pays, s’ouvre lundi 24 juillet au palais de justice de Caglayan, à Istanbul, en présence de nombreux défenseurs des droits de l’Homme, venus les soutenir.

Les meilleurs plumes de Turquie – entre autres l’éditorialiste Kadri Gürsel, le caricaturiste Musa Kart, le chroniqueur Aydin Engin, le journaliste d’investigation Ahmet Sik – seront présents sur le banc des accusés.

Sur dix-neuf prévenus, douze sont en prison – la plupart depuis près de neuf mois –, six comparaissent libres, et un seul, Can Dündar, l’ancien rédacteur en chef de Cumhuriyet, aujourd’hui réfugié en Allemagne, est jugé par contumace.

Tous risquent jusqu’à 43 ans de prison pour avoir soutenu, selon l’acte d’accusation, rien de moins que trois organisations terroristes, soit à la fois le mouvement du prédicateur Fethullah Gülen (accusé d’avoir été le cerveau de la tentative de putsch du 15 juillet 2016), le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et le groupuscule d’extrême gauche DHKP/C.

En réalité, les journalistes incriminés n’ont jamais cessé de porter leur plume contre le terrorisme sous toutes ses formes. L’acte d’accusation est fondé sur leurs articles de presse, leurs coups de téléphones, leurs tweets ainsi que sur quelques-unes de leurs déclarations. Aucune preuve tangible de leur implication dans une organisation terroriste ne figure au dossier.

« Le bien être et la paix »

« L’instruction a été bâclée, intentionnellement je dirais, et l’accusation ne tient pas debout. Les accusés n’ont aucun lien avec les organisations terroristes citées. Le parquet a ressorti des conversations téléphoniques très datées et cherche à nous faire croire qu’il s’agit d’une affaire retentissante », résume Abbas Yalcin, l’un des avocats du quotidien.

« Le procès repose sur des charges complètement bidons. Le pouvoir islamo-conservateur cherche à effrayer les intellectuels, les opposants, la jeunesse et tout ce qui reste de l’opposition afin de semer la terreur », estime Bedri Baykam, artiste peintre et galeriste à Istanbul, acquis aux idées du Parti républicain du peuple (CHP, opposition kémaliste), le parti fondé par Atatürk, dont Cumhuriyet est proche.

Le gouvernement, qui dirige par décrets depuis l’imposition de l’état d’urgence le 20 juillet 2016, fait fi des critiques. L’état d’urgence vient d’être prolongé une nouvelle fois pour trois mois et le président Erdogan a assuré qu’il en sera ainsi jusqu’à ce que la Turquie atteigne « le bien être et la paix ». Depuis la tentative de coup d’état du 15 juillet 2016, plus de 160 journalistes sont en prison et 150 médias ont été fermés.

« Les journalistes aussi commettent des crimes et lorsqu’ils agissent ainsi, la justice doit faire le nécessaire. Je tiens à vous dire que ceux que vous décrivez comme des journalistes ont aidé et encouragé le terrorisme », a expliqué le président Erdogan en marge du G20 à Hambourg, le 7 juillet.

« La peur nous colle à la peau »

Les journalistes ne sont pas les seuls incriminés. Depuis le putsch, plus 150 000 fonctionnaires ont été limogés par vagues successives et près de 50 000 personnes ont été emprisonnées, tant des supposés gülenistes que des militants de gauche, ainsi qu’une dizaine de députés du parti HDP (prokurde) et une centaine de maires de villes kurdes.

« 2016 a non seulement été consacrée à l’éviction des personnes éduquées – enseignants, universitaires et autres – de la sphère publique, mais on a essayé de faire disparaître la capacité élémentaire de l’être humain à raisonner », dénonce la jeune auteure Ece Temelkuran dans un point de vue publié par le quotidien britannique The Guardian, le 21 juillet.

« La raison a été débranchée », assure l’artiste Bedri Baykam. La répression confine à l’absurde. Ainsi les Turcs ont-ils appris cette semaine que le port d’un simple t-shirt pouvait les conduire droit au commissariat.

IL SE TROUVE QUE LA PLUPART DES « HÉROS » ONT ÉTÉ APPRÉHENDÉS SUR DÉNONCIATION, UNE PRATIQUE LARGEMENT ENCOURAGÉE PAR LES AUTORITÉS

Quinze personnes ont été interpellées dans tout le pays pour avoir porté un t-shirt avec le mot « Hero » inscrit en grosses lettres, les autorités voyant dans cette mode vestimentaire une forme de soutien déguisé aux auteurs du putsch manqué.

La controverse a surgi lorsqu’un des militaires jugés à Mugla (sud-ouest) pour « tentative d’assassinat » sur le président Erdogan a comparu avec le t-shirt en question.

Mais la plupart des personnes interpellées, dont un couple conduit au commissariat samedi 22 juillet à Antalya, ainsi qu’un adolescent appréhendé à Canakkale (Dardanelles) le même jour, ont assuré ne pas être au courant des dangers que le t-shirt leur faisait courir. Deux personnes sur les quinze ont néanmoins été maintenues en détention dans l’attente de leur procès pour « propagande terroriste ».

Il se trouve que la plupart des « héros » ont été appréhendés sur dénonciation, une pratique largement encouragée par les autorités. C’est également sur dénonciation que dix militants turcs des droits de l’homme, dont la directrice d’Amnesty International pour la Turquie, Idil Eser, ont été arrêtés le 5 juillet sur l’île de Büyükada, ainsi que deux formateurs (un Suédois et un Allemand). Le 18 juillet, six d’entre eux ont été mis en détention, tandis que les quatre autres étaient relâchés et placés sous contrôle judiciaire. Depuis, les quatre ont été à nouveau arrêtés.

« La peur nous colle à la peau », affirme Hasan (le prénom a été changé), un fonctionnaire qui dit se sentir « en permanence comme un coupable en puissance ». Dans son administration, « c’est devenu la mode de partager sur les réseaux sociaux le plus de photos possible attestant de la présence des fonctionnaires aux grands rassemblements organisés par l’AKP (le parti de M Erdogan, au pouvoir depuis 2002). Ces témoignages nous serviront de bouclier, le jour où… »

3 juin 2017

La situation de Mathias Depardon, détenu en Turquie, suscite l'inquiétude

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Le photographe français a mis fin à sa grève de la faim, mais sa libération n'est pas programmée

Voici vingt-cinq jours que le photographe français Mathias Depardon est retenu par les autorités turques dans un centre de rétention pour migrants clandestins à Gaziantep, non loin de la frontière turco-syrienne, alors qu'aucune charge n'a été retenue contre lui.
Evoqué lors d'une rencontre entre Emmanuel Macron et son homologue turc, Recep Tayyip Erdogan, le 25  mai, en marge du sommet de l'OTAN à Bruxelles, son sort s'est légèrement amélioré, mais sa libération n'est toujours pas programmée. Le numéro un turc avait pourtant promis d'examiner " rapidement " la situation du photographe.


Quel intérêt a la Turquie de maintenir en détention un journaliste français ? S'agirait-il d'une épreuve de force engagée par M. Erdogan afin de tester la capacité de riposte du nouveau président français ? Le président turc envisagerait-il les relations avec ses alliés occidentaux comme un bras de fer permanent ?


Arrêté le 8  mai à Hasankeyf, dans le sud-est du pays, où il réalisait un reportage sur le Tigre et l'Euphrate pour le magazine National Geographic, le photographe se voit reprocher d'avoir travaillé sans la carte de presse délivrée chaque -année par les autorités turques. Installé à Istanbul depuis cinq ans, M. Depardon, 36 ans, l'avait toujours reçue jusque-là.
En  2017, son dossier n'a pas abouti, bien qu'aucun refus ne lui ait été formulé. Avant de partir en reportage dans le sud-est, le photographe a bien pris soin de prévenir par téléphone la Direction de la presse près le premier ministre (BYEGM), qui gère les accréditations des journalistes. Des assurances lui ont alors été données : son dossier était toujours en cours d'examen, et il ne risquait rien à partir en reportage sans ce document. Une fois arrêté, Mathias Depardon a relaté cet épisode au procureur. Contactée par le parquet, la BYEGM a confirmé ses dires.


" Détention arbitraire "


" Mathias se porte bien, il a cessé sa grève de la faim. Les autorités turques ne font plus obstruction aux visites consulaires, mais aucune démarche ne semble être en cours pour mettre fin à sa détention. Pourtant, le procureur ne l'a pas -assigné à résidence, aucune charge ne pèse contre lui. L'avis d'expulsion daté du 11  mai n'a pas été mis -à exécution. Sa détention est vraiment arbitraire, il n'y a aucune raison de le retenir, sinon un motif poli-tique ", explique Rusen Aytac, l'une des avocates du barreau de Paris qui défend le journaliste.
Le 29  mai, elle et Martin Pradel, autre avocat français de M. Depardon, ont adressé un courrier à Emmanuel Macron. " En enfermant un journaliste, le pouvoir turc met à l'épreuve votre capacité à défendre vos ressortissants et, au-delà, votre attachement à nos principes fondamentaux et à nos valeurs ", dit la lettre. " Cette privation de liberté illustre la négation par la Turquie de ses engagements internationaux, notamment ceux résultant de son adhésion à la Convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales ", rappellent les avocats.
La réponse de l'Elysée, arrivée dès le lendemain, stipule que tout est fait en vue de sa libération. Ses conditions de détention se sont un peu assouplies. M.  Depardon est désormais en contact régulier avec les autorités consulaires, il a également reçu la visite de trois avocats du barreau de Gaziantep, qui se sont emparés de son cas.
Pour autant, Emine Seker, son avocate turque, n'a toujours pas reçu des autorités compétentes la notification de sa rétention. Habituellement, cette démarche ne prend pas plus d'une semaine, mais depuis le coup d'Etat raté -du 15  juillet 2016, l'appareil judiciaire s'est enrayé.


Ebranlé par de nombreuses révocations - 4 000 magistrats et procureurs limogés d'un trait de plume et bien souvent arrêtés -, il fonctionne au ralenti. Il faut désormais jusqu'à un mois pour obtenir une notification. " En Turquie, les centres de rétention ne sont soumis à aucune loi, c'est le règne de l'arbitraire. Le délai de rétention est illimité ", s'inquiète Rusen Aytac.
Nils Muiznieks, le commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe, a été alerté par les défenseurs du journaliste. Le 31  mai, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a décidé de traiter en urgence les dossiers des journalistes détenus de façon arbitraire en Turquie, Russie et Azerbaïdjan, les " champions " de ce genre de pratiques. Selon le site Internet P24, 165 journalistes turcs sont actuellement en prison.


Depuis le putsch raté du 15 juillet 2016 en Turquie, une vaste purge a été lancée contre les journalistes et les intellectuels. Environ 150 000 fonctionnaires ont été limogés, plus de 47 000 personnes ont été arrêtées. Le gouvernement turc vient de créer une commission (sept personnes pour 150 000 dossiers) chargée d'examiner le cas des fonctionnaires injustement licenciés. Mais les personnes concernées ne croient pas en ce recours et préfèrent s'adresser à la CEDH où les dossiers concernant la Turquie s'accumulent - en augmentation de 276  %.
Marie Jégo

1 juin 2017

Libérez Mathias Depardon !

28 mai 2017

Turquie. Un espoir pour Mathias Depardon

Le photojournaliste français Mathias Depardon, détenu depuis le 8 mai en Turquie, a mis fin à sa grève de la faim, a annoncé, hier, Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF). « Mathias Depardon est bien traité, il sait que son dossier est porté au plus haut niveau », a indiqué celui-ci, en précisant que le Français avait interrompu sa grève de la faim, vendredi soir, après avoir appris qu'il recevrait une visite consulaire. Le président turc Recep Tayyip Erdogan avait promis, jeudi, à son homologue français, Emmanuel Macron, d'examiner « rapidement la situation » du photojournaliste. Installé en Turquie depuis cinq ans, Mathias Depardon, âgé de 36 ans, a été arrêté alors qu'il effectuait un reportage pour le magazine National Geographic.

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L'intervention d'Emmanuel Macron auprès de Recep Tayyip Erdogan lors du sommet de l'Otan a-t-elle porté ses fruits ? La situation du photojournaliste français Mathias Depardon, détenu depuis le 8 mai en Turquie, semble en tout cas s'être améliorée.

"Mathias Depardon est bien traité, il sait que son dossier est porté au plus haut niveau : le journaliste a mis fin à sa grève de la faim", a annoncé samedi 27 mai le secrétaire général de Reporters sans frontières (RSF) Christophe Deloire, sur son compte Twitter.

Le secrétaire général de RSF a précisé à l'AFP que Mathias Depardon avait interrompu sa grève de la faim vendredi soir après avoir appris qu'il aurait une visite consulaire. "Cela ne veut rien dire sur l'issue finale, mais ce sont des signaux positifs. C'est satisfaisant de voir que la mobilisation, l'engagement de l'ambassade, le fait que ce soit traité en France, ça semble commencer à porter ses fruits", a dit Christophe Deloire.

Le consul adjoint d'Ankara, Christophe Hemmings, a rendu une visite d'une heure au journaliste détenu au centre de rétention de Gaziantep, dans le sud-est de la Turquie, selon M. Deloire. Une source diplomatique française a confirmé à l'AFP que la rencontre a bien eu lieu samedi après-midi entre un représentant du consulat de France à Ankara et Mathias Depardon, "dans le cadre de la protection consulaire demandée par le ministre des Affaires étrangères".

Le président turc Recep Tayyip Erdogan avait promis jeudi à son homologue français Emmanuel Macron, en marge du sommet de l'Otan à Bruxelles, d'examiner "rapidement la situation" du photojournaliste, selon la présidence française.

Installé en Turquie depuis cinq ans, Mathias Depardon, journaliste indépendant de 36 ans, a été arrêté le 8 mai à Hasankeyf, dans la province de Batman, où il effectuait un reportage pour le magazine National Geographic. Il a rapidement été transféré dans un centre d'accueil géré par la Direction des affaires migratoires à Gaziantep, où il est retenu depuis lors malgré une décision d'expulsion émise le 11 mai.

Le journaliste français était en grève de la faim depuis le 21 mai pour protester contre sa détention, selon RSF.

Avec AFP

26 mai 2017

Détenu en Turquie, le photographe français Mathias Depardon en grève de la faim

Par Marie Jégo, Istanbul, correspondante

Arrêté le 8 mai, le journaliste proteste contre sa détention. Reporters sans frontières et d’autres organismes de défense de la liberté de la presse demandent sa libération.

Détenu depuis plus de deux semaines à Gaziantep, dans le sud de la Turquie, le photographe français Mathias Depardon est entré dans son quatrième jour de grève de la faim, mercredi 24 mai. Il proteste contre sa arrestation arbitraire et ses conditions exécrables de détention dans un centre de rétention de migrants clandestins, non loin de la frontière syrienne.

Longtemps confiné dans une cellule d’isolement, le journaliste n’a pas pu entrer en contact direct avec les autorités françaises. Lorsqu’il a demandé de quoi écrire, il a reçu une feuille, mais pas de stylo.

Son seul contact avec le monde extérieur passe par son avocate, Emine Seker. Selon une source diplomatique française, « Mathias n’est plus à l’isolement, mais sa situation n’est pas bonne ». Son cas devrait être rapidement évoqué par le ministre français de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, lors d’une conversation par téléphone avec son homologue turc, Mevlüt Çavusoglu.

Région sous tension

Installé en Turquie depuis cinq ans, Mathias Depardon effectuait un reportage sur l’eau à Hasankeyf, dans la région de Batman, dans le sud-est de la Turquie, pour le compte de la revue National Geographic lorsqu’il a été interpellé le 8 mai.

Auparavant, pendant quelques jours, il s’était déplacé librement le long du Tigre et de l’Euphrate, photographiant sans histoires après avoir franchi les nombreux barrages policiers. La région, sous tension, est à nouveau le théâtre d’affrontements entre les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) et les forces turques.

Mais, au soir du 8 mai, il a été arrêté à un poste de contrôle. Ses appareils et ses cartes mémoire ont été saisis. Et selon un rituel désormais éprouvé, les policiers ont immédiatement exigé les codes d’accès de ses comptes sur les réseaux sociaux (Instagram, Facebook, Twitter).

A force de fouiller ses comptes, ils ont trouvé sur Instagram un cliché de recrues féminines kurdes en tenue de combat avec la légende « femmes du PKK ». Le PKK est classé comme terroriste par les autorités turques. Prise dans le cadre d’un reportage effectué dans le nord de l’Irak en 2014, la photo est devenue la pièce à conviction d’une enquête ouverte contre le photographe pour « propagande du terrorisme ». L’enquête n’a pas abouti pour l’instant à une décision judiciaire à son encontre, mais elle suit son cours.

Lettre ouverte

Pour l’heure, les autorités turques reprochent à Mathias Depardon d’avoir travaillé sans carte de presse, sa demande de renouvellement pour 2017 n’ayant pas abouti. Une décision d’expulsion a bien été émise le 11 mai, mais elle n’a pas été suivie d’effet.

L’organisation non gouvernementale Reporters sans frontières (RSF), d’autres organismes de défense de la liberté de la presse, ainsi que dix-neuf rédactions ont adressé, vendredi 19 mai, une lettre ouverte au ministre turc de l’intérieur, Süleyman Soylu, appelant à la libération de M. Depardon : « Le journaliste est laissé sans explications quant aux raisons du prolongement de sa détention. Cette absence d’informations nous inquiète de plus en plus et nous vous demandons respectueusement d’autoriser les diplomates français à venir lui rendre visite. »

Pour l’instant, les autorités turques sont restées sourdes aux demandes répétées des Français. Aucun contact n’a été autorisé avec Mathias Depardon, contrairement aux règles de la protection consulaire admises entre les Etats. L’état d’urgence déclaré au lendemain du putsch raté du 15 juillet 2016 permet aux autorités turques de faire fi des usages diplomatiques.

Climat de paranoïa et de peur

Dans ce contexte, l’exercice du métier de journaliste est devenu beaucoup plus difficile. Le climat de paranoïa et de peur qui s’est installé dans le pays au lendemain de la tentative de putsch fait de toute voix dissidente ou trop curieuse un potentiel « agent du PKK » ou du « FETÖ », l’acronyme officiel désignant la communauté religieuse de l’imam Fethullah Gülen, à l’origine du putsch selon Ankara. Les réseaux sociaux sont passés au crible.

Au moindre manquement administratif, c’est l’arrestation. Olivier Bertrand, journaliste français du site d’information Les Jours, travaillait en novembre 2016 sans carte de presse ni autorisation dans la région de Gaziantep, décrétée « zone d’exception militaire » depuis l’intervention turque dans le nord de la Syrie. Il a été expulsé après trois jours passés en détention.

En décembre 2016, Dion Nissenbaum, le correspondant à Istanbul du Wall Street Journal, a été détenu à l’isolement pendant plus de deux jours avant d’être expulsé vers les Etats-Unis. Il avait publié des images d’une vidéo de l’organisation Etat islamique (EI) sur son compte Twitter, malgré l’interdiction formulée par les autorités turques sur la diffusion de cette vidéo.

Depuis le début de l’année, le temps passé en détention s’est rallongé. En avril, le journaliste italien Gabriele Del Grande a été détenu deux semaines pour avoir travaillé sans carte de presse dans la région du Hatay, frontalière de la Syrie. Il a été expulsé vers l’Italie après avoir entamé une grève de la faim.

« Soutien au terrorisme »

Le sort des journalistes turcs est incomparablement plus terrible. Selon le site internet P24, 165 d’entre eux sont actuellement emprisonnés, la plupart sous l’accusation de « soutien au terrorisme ». Arrêté le 12 mai, Oguz Güven, le rédacteur en chef du site Internet du quotidien Cumhuriyet encourt sept ans et demi de prison pour un tweet erroné publié l’espace de 55 secondes sur le compte du journal. Il est le douzième employé de Cumhuriyet, le plus vieux quotidien de Turquie, à être emprisonné.

Vendredi 19 mai, le couperet est tombé sur le journal d’opposition Sözcü. Des mandats d’arrêt ont été émis par le parquet d’Istanbul contre son propriétaire, Burak Akbay, et plusieurs autres responsables. Tous sont accusés d’avoir « commis des crimes au nom d’une organisation terroriste armée ».

Utilisée à l’envi, l’accusation de « soutien au terrorisme » n’a pas épargné deux enseignants en grève de la faim à Ankara pour protester contre leur limogeage dans le cadre des vastes purges (150 000 employés du secteur public) entreprises après la tentative de coup d’Etat de juillet 2016. Après 76 jours de grève de la faim, Nuriye Gülmen, universitaire, et Semih Özakça, instituteur, ont été arrêtés chez eux dimanche 21 mai.

« La police a cassé la porte », a eu le temps de prévenir Nuriye dans un message. Mardi, les deux jeunes enseignants ont été inculpés. Le même jour, une manifestation de soutien organisée au centre d’Ankara a été violemment dispersée par la police.

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Mise à jour  http://www.huffingtonpost.fr/2017/05/25/erdogan-promet-dagir-pour-le-journaliste-francais-mathias-depardon_a_22109099/

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