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Jours tranquilles à Paris
25 mars 2014

M. Xi, l’insaisissable prince rouge débarque en France

Président aux allures simples mais à la poigne de fer, héraut d’une lutte anticorruption dont la famille jouit d’une suspecte fortune… En visite officielle en France à partir de demain pour le cinquantenaire des relations diplomatiques des deux pays, le numéro un chinois intrigue.

À Nanluoguxiang, allée commerçante de Pékin, la scène est dans toutes les mémoires.« Le mois dernier, en plein pic de pollution, le président Xi Jinping a déambulé dans notre rue » , se souvient une vendeuse de bijoux fantaisie. Fin décembre, déjà, le numéro 1 chinois s’était arrêté déjeuner dans un bouiboui, s’acquittant lui-même de sa note de 21 yuans (2,50 €). De quoi en faire un « président normal » à la chinoise ? Depuis son premier discours comme chef du Parti, en novembre 2012, Xi Jinping, 61 ans, joue d’un bagout inédit à ce poste. Mais si la figure de ce fan de foot est joviale, la poigne reste de fer. L’homme, pétri de contradictions et à la tête d’un régime opaque, est insaisissable. « Prince rouge », né dans le sérail communiste, Xi Jinping a la rébellion dans le sang. Soupçonné d’être « un ennemi du Parti », son père, Xi Zhongxun, ancien compagnon de Mao et vice-Premier ministre, connaît une purge en 1962. Son fils trinque. En 1968, le jeune Jinping est envoyé en « rééducation » à la campagne, proteste, est interné six mois dans un camp de travail. Autre signe de son fort caractère : dans un régime puritain, qui dédaigne le show-biz, Xi Jinping n’hésite pas à épouser, en 1987, la populaire chanteuse Peng Liyuan, en secondes noces de surcroît. Mais le rebelle est aussi ambitieux. Il grimpe tous les échelons du Parti, qu’il a rejoint en 1974. Protégé de l’ancien président Jiang Zemin (1993-2003), Xi est tour à tour vicemaire, secrétaire de province, puis membre du Comité permanent du Bureau Politique, cœur du pouvoir chinois. En 2012, il est promu numéro 1 du Parti. Celui qui, pour le grand public, n’était encore que « Monsieur Peng » accède alors à la notoriété nationale. Peng Liyuan, cette Première dame cantatrice, devient la Carla Bruni chinoise. Depuis, le pouvoir de Xi Jinping est immense.« Il est devenu le dirigeant chinois ayant accumulé le plus de pouvoir et d’autorité personnelle depuis Mao », affirme le sinologue François Godement dans La Chine de Xi Jinping . Une « rupture » donc, d’autant plus frappante que« le pouvoir était très collégial sous Hu Jintao (son lisse et monolithique prédécesseur),qui n’était que le premier parmi des égaux » , ajoute Willy Lam, universitaire hongkongais. Contrairement à Hu Jintao, Xi a tout de suite dirigé la puissante Commission militaire centrale. Il a récemment créé un nouvel organe de surveillance d’Internet. Xi Jinping est aussi le premier chef d’État chinois à envoyer sa fille étudier aux États-Unis, tout en relançant un inquiétant nationalisme. Dans le but de susciter, à l’instar d’un Poutine, la nostalgie d’un Empire révolu ? « La renaissance est, dans les temps modernes, le plus grand rêve de la nation chinoise » , proclame-t-il. Fini donc le profil bas cher à Deng Xiaoping, dans les années 1980 ! Au placard « le développement pacifique » de Hu Jintao ! Sous l’ère Xi, la deuxième économie mondiale assume ses ambitions… Au risque de faire du pays un ennemi, aux yeux de ses voisins, quand il affirme que« les pays étrangers ne doivent pas attendre que la Chine fléchisse sur ses intérêts cruciaux (de souveraineté territoriale). »

Incorruptible ou parrain ?

François Hollande est prévenu. Avec de juteux contrats en vue, il devrait demain aborder du bout des lèvres les questions sensibles. Dernier paradoxe, selon la presse américaine, la famille de Xi aurait amassé l’équivalent de 518 milliards d’euros. Or, dès 2004, lui-même avait enjoint ses collègues à« serrer la bride aux conjoints, enfants, proches, amis et au personnel ». Arrivé au sommet du Parti, Xi Jinping a lancé une lutte anti-corruption tous azimuts, visant« les mouches et les tigres » qui« menacent la survie même du Parti. » Tentative sincère d’assainissement de la classe politique ? Étape nécessaire pour redynamiser l’économie chinoise ? Habile campagne de communication en vue d’apaiser des administrés excédés par les injustices ? Ou obscurs règlements de compte afin d’asseoir son pouvoir ? Sans doute tout cela. Pour l’heure, Xi Jinping a dans le collimateur les caciques mafieux du Parti. Les dissidents tremblent aussi. Admirateur revendiqué du film Le Parrain , il les réprime avec la poigne d’un Don Corleone. Ainsi, l’éditeur Yao Wentian, 73 ans, prévoyait, depuis Hongkong, de publier en avril le brûlot Xi Jinping, le Parrain . Las ! Victime en octobre d’un guet-apens qui l’a conduit en terres chinoises, le vieil homme croupit aujourd’hui dans les geôles de la Chine de Xi Jinping… Article de Edgar DASOR.

1953

. Naissance à Pékin.

1974

. Entrée au Parti communiste.

1987

. Mariage avec Peng Liyuan.

2007

. Membre du Comité permanent du Bureau politique.

2012

. Secrétaire général du Parti communiste.

2013

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