Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
14 juin 2015

La terreur règne en Arabie

Nous souffrons parfois d’un silence aveugle face aux barbaries de nos pseudo-alliés. Nous en avons déjà parlé ici. Et il faut malheureusement en reparler, encore et encore. Ce pays ami qu’est l’Arabie Saoudite vient de confirmer les dix ans de prison et les mille coups de fouet, condamnation ignoble infligée à Raïf Badawi dont le seul crime est d’avoir osé penser et écrire… Les éditions Kero publient avec le soutien d’Amnesty International un recueil de ses textes interdits (1) qui lui ont valu cette condamnation qui indigne le monde entier. Lisons ses textes, publiés sur la toile pendant trois années. On y entend une pensée humaniste en marche. Sa voix lumineuse se dresse contre les tyrannies, celle des islamistes comme celle de« l’extrême droite réactionnaire européenne qui se réclame du Moyen Âge ». Sa plume critique la pensée religieuse et revendique sa séparation d’avec la politique. Il raille les astronomes de la charia et la litanie des châtiments, il en appelle au courage du respect des opposants, il interroge la société saoudienne qui reste aux portes de la modernité et ploie« sous le joug d’un ordre théocratique ». Il aurait pu fuir, comme nombre de penseurs sur le chemin de l’exil« en quête d’air pur, loin des sabres de l’autoritarisme religieux ». Ce n’est pas une métaphore : les lames s’aiguisent et s’abattent… Il croupit dans une geôle sordide, loin de sa femme et de ses enfants réfugiés au Canada. Il vit la terrible attente de la prochaine séance de flagellation. L’intolérance sunnite, la pratique de la décapitation au sabre, la soumission absolue de la femme contrainte sous les voiles… Tout le monde sait quel paradis terrestre sont les sables d’Arabie. La terreur que les fanatiques armés de l’État islamique imposent sur les terres acquises au drapeau noir n’a rien à envier aux règles de la charia en vigueur chez les pétromonarchies dont l’œuvre diplomatique contraint ses interlocuteurs au cynisme. Charybde et Scylla cohabitent sous notre nez. Aujourd’hui, Raïf Badawi n’est pas seulement un étendard pour ceux qui défendent la liberté d’expression en Arabie Saoudite. Son martyr en fait une icône pour tous ceux qui dans le monde sont confrontés aux violences commises au nom de l’intolérance et des fanatismes. Avec lui et pour lui, au nom de toutes les autres victimes, il faut redire sans relâche que la liberté d’expression ne se négocie pas. Cette liberté ne s’arrête pas aux marches des palais des princes des sables ni aux frontières des marchés des économies de l’énergie des fossiles. Ici, le silence diplomatique n’est plus seulement cynique. Il devient un déshonneur. (1) 1 000 coups de fouet, parce que j’ai osé parler librement, Kero, 64 pages, 3 €.

Publicité
Commentaires
Publicité