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Jours tranquilles à Paris
30 juillet 2017

Les « cars Macron » ont séduit une clientèle peu voyageuse jusque-là

Par Éric Béziat

Adeptes de tarifs attractifs ou réfractaires au covoiturage sont transportés par les trois entreprises qui se partagent le marché.

Fin juillet, les adeptes de la musculation du parc de Bercy, à Paris, partagent leur espace avec des petits groupes de voyageurs poussant d’un banc à l’autre leurs valises à roulettes, attendant à demi allongés leur autocar qui s’apprête à partir. Ces bouts de pelouse pelée sont devenus l’excroissance de la gare routière parisienne de l’opérateur de cars longue distance Flixbus, parking morne et bien caché derrière l’AccorHotels Arena, la grande salle de spectacle de l’Est parisien, autrefois appelé Palais omnisports de Bercy.

En ce week-end de grands départs, le centre névralgique du principal opérateur de « cars Macron » devrait largement dépasser les 15 000 passagers par jour habituellement débarqués ou embarqués ici. Flixbus, c’est 2,8 millions de passagers transportés entre le 1er janvier et le 15 juillet 2017, en hausse de 80 %, selon les dirigeants de la start-up d’origine allemande par rapport à la même période de 2016. La compagnie aux cars orange et vert détient environ 45 % du marché. Un joli succès partagé avec l’autre opérateur majeur Ouibus (filiale de la SNCF, près de 40 % du marché) et dans une moindre mesure avec Isilines (filiale de Transdev, moins de 20 % du marché).

Une partie du succès de ces cars longue distance, libéralisés en septembre 2015 par Emmanuel Macron, alors ministre de l’économie, tient au fait qu’ils ont facilité le voyage de personnes qui voyageaient peu ou pas auparavant. « Ces néo-voyageurs représentent 20 % de nos clients, explique Roland de Barbentane, directeur général de Ouibus qui a récemment publié un portrait-robot de ses clients, réalisé en partenariat avec Google Data.

« Deux clients sur trois sont des clientes »

Retour dans la « salle d’attente » de la gare routière de Bercy. Rose, la quarantaine, vient de Nancy seule et attend son car pour le Nord de l’Allemagne où elle va retrouver de la famille. Ce qui l’a motivée ? Les petits prix, y compris à la dernière minute. « Pour prendre le train à un tarif raisonnable aujourd’hui, il faut s’y prendre trois mois à l’avance. Le car, c’est une garantie de ne pas payer trop cher, et je voyage tranquillement et confortablement », explique-t-elle.

Même constat pour Françoise, sexagénaire bruxelloise, qui a décidé à la dernière minute de s’offrir quelques jours à Paris. « En Thalys, j’aurais payé 170 euros l’aller-retour, là c’est 50 euros, 120 de plus à dépenser dans la capitale ! » La voyageuse belge n’a toutefois, contrairement à Rose, pas été convaincue par la prestation. Peu de place pour les pieds et des toilettes qui « sentent mauvais », confie-t-elle. En revanche, là où les deux femmes seules tombent d’accord, c’est sur leur méfiance envers le covoiturage. Quel que soit le prix. « Je n’ai aucune envie de faire la conversation », fait l’une. « Je ne serais pas rassurée », ajoute l’autre.

Ce double témoignage vient conforter les statistiques des opérateurs. « Deux clients sur trois sont des clientes, constate Yvan Lefranc-Morin, directeur général de Flixbus. Et si nos passagers sont plus jeunes que la moyenne, nous constatons une hausse de la clientèle famille et senior, trimestre après trimestre. » Et 50 % de ces voyageurs prennent leur billet dans les trois jours avant leur départ, si l’on en croit l’étude de Ouibus.

Ne pas être pressé

Autre nouveauté – pour le moins inattendue – l’émergence d’une clientèle professionnelle, certes encore très marginale. « Ce sont pour l’essentiel des auto-entrepreneurs, auxquels leurs tout petits business ne permettent pas de s’offrir le train ou l’avion, explique M. de Barbentane. Et il y a aussi des cas particuliers, comme cet employé de la RATP qui vit à Quimper et vient travailler à Paris deux fois par semaine en Ouibus. »

A n’en pas douter, le vecteur principal de la préférence des « macronautes » pour l’autocar, c’est le prix. MM. de Barbentane et Lefranc-Morin tombent au moins d’accord sur ce fait : 90 % de leurs usagers ont été attirés par les tarifs modiques pratiqués.

S’il n’est pas nécessaire d’être riche pour voyager en autocar longue distance, il faut en revanche ne pas être pressé. A Paris-Bercy, le Flixbus arrivé de Turin via Grenoble et Lyon a accumulé un gros retard. Son chauffeur explique aux passagers résignés qu’il va devoir prendre sa pause réglementaire et que le car partira pour Bruxelles avec plus de trente minutes de retard.

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