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Jours tranquilles à Paris
16 octobre 2017

Quand Emmanuel Macron tente de conjurer le régicide sur TF1

Par Françoise Fressoz - Le Monde

Pour le chef de l’Etat, « la France est un pays de monarchistes régicides ». Pour calmer la grogne, dimanche soir, il a opté pour la pédagogie mais pas pour les concessions, souligne dans sa chronique, Françoise Fressoz, éditorialiste au « Monde ».

Louis XVI n’est jamais loin des monarques qui nous gouvernent. « En forçant le trait, on pourrait dire que la France est un pays de monarchistes régicides, ou encore que les Français élisent un roi mais qu’ils veulent à tout moment pouvoir le renverser », a déclaré Emmanuel Macron dans un entretien à l’hebdomadaire allemand Der Spiegel publié juste avant son intervention télévisée, dimanche soir 15 octobre sur TF1.

Ce n’est pas la première fois que le vainqueur de 2017 souligne la précarité de la fonction présidentielle, sa dangerosité même. Il l’avait déjà analysée lorsqu’il était en campagne, reprenant à son compte l’analyse de Nicolas Sarkozy qui confessait durant son quinquennat avoir la crainte que d’un coup, tout s’embrase : « La France n’est pas le pays le plus simple à gouverner du monde… Les Français ont guillotiné le roi, au nom d’une mesure symbolique, ils peuvent renverser le pays », répétait-il à ses ministres lorsqu’il voulait calmer le jeu.

« Je fais ce que j’ai dit »

Pour conjurer le régicide, Nicolas Sarkozy, l’homme de « la rupture », avait appris à composer. Il dosait les réformes, pactisait avec la CGT, s’arrêtait au point d’équilibre qu’il jugeait acceptable, ce qui avait le don d’énerver son premier ministre, François Fillon, qui aurait voulu aller beaucoup plus loin que lui sur la réforme des régimes spéciaux de retraite ou l’assouplissement des 35 heures par exemple.

Emmanuel Macron, c’est tout le contraire : « Je continuerai au même rythme avec la même détermination. C’est le mandat du peuple français », a-t-il fait valoir dimanche en se glorifiant de mettre en œuvre tout ce qu’il avait annoncé pendant la campagne : « Je fais ce que j’ai dit. »

Ses cinq premiers mois élyséens le confortent. Certes, des résistances sont apparues mais aucune ne s’est révélée suffisamment forte et construite pour l’empêcher : les syndicats sont trop divisés, Jean-Luc Mélenchon trop radical, la droite trop centrée sur sa reconstruction et le PS trop empêtré dans sa déconstruction pour espérer peser.

« Je n’ai pas cherché à humilier »

Alors le président de la République fonce avec pour seul ennemi lui-même, ses déclarations à l’emporte-pièce – « bordel », « fainéants » – qui risquent, à force de s’accumuler, de le faire passer pour un « de la haute », méprisant, coupé du peuple, dépourvu d’affect. « Je n’ai pas cherché à humilier », s’est défendu Emmanuel Macron sans vouloir cependant se dédire, revendiquant le parler cru et dénonçant « le mot sorti de son contexte ».

Pour un roi, le mea culpa est toujours difficile, si ce n’est impossible. Et pourtant, le président de la République l’a senti : il faudra bien qu’il trouve les moyens d’améliorer sa relation au peuple durant cette période délicate d’« un an et demi à deux ans » qu’il s’est donnée avant d’engranger les résultats, de voir repartir la croissance et l’emploi, de prouver que le pays est effectivement « profondément transformable », comme l’annonce le contrat de départ.

Lorsqu’il était en difficulté, Nicolas Sarkozy jouait sur l’affect, Emmanuel Macron est davantage enclin à la pédagogie, un brin technocratique. Mais les causes sont parfois difficiles à plaider, comme celle de la réforme de l’ISF qui ne saurait se résumer à un simple problème de « jalousie ». La force symbolique de cet impôt est telle qu’il faudra plus qu’une intervention télévisée pour l’abattre.

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