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Jours tranquilles à Paris
21 octobre 2018

Les vélos en libre-service d’Uber débarquent à Paris

Par Éric Béziat

Le géant américain des VTC a choisi Berlin et Paris comme têtes de pont en Europe pour sa marque Jump de bicyclettes électriques.

Il est rouge, gros, rapide et a de quoi faire peur à ses ­concurrents. Lui, c’est le vélo électrique Jump. Il tire son nom de la marque de bicyclettes partagées que vient d’acheter Uber, et qui s’apprête à débarquer en Europe.

Jeudi 18 octobre, le géant américain de la réservation de VTC (voitures de transport avec chauffeur) a annoncé qu’il allait lancer début 2019 une flotte de vélos électriques à Paris, sans fournir plus de précision sur la date et le nombre d’appareils déployés.

Paris ne sera pas la première tête de pont de Jump en Europe. Uber va lancer cette nouvelle offre à Berlin « dans quelques semaines », là encore sans indication précise. « L’objectif, c’est de se lancer dans d’autres villes » après la capitale française, a déclaré Steve Salom, le directeur général d’Uber pour la France, la Suisse et l’Autriche, citant Lyon.

L’engin a été présenté à Paris lors du salon de la mobilité urbaine Autonomy. Malgré son aspect massif et son air robuste, il est très souple à conduire grâce à l’assistance électrique qui lui donne une autonomie de cinquante kilomètres et lui permet de rouler à 25 kilomètres/heure. Jump sera le premier vélo à batterie disponible en free floating à Paris, c’est-à-dire en stationnement libre, sans borne d’attache. Un cadenas en forme de U permettra de l’accrocher au mobilier urbain.

Pour le réserver, le déverrouiller et le reverrouiller, il suffira de passer par l’application Uber de réservation de VTC. Le prix du trajet n’a pas été donné, mais une porte-parole de la marque souligne que les tarifs devraient s’aligner sur ceux de la concurrence (louer un Vélib’ électrique de manière occasionnelle coûte 5 euros de forfait pour la journée + 1 euro la demi-heure). Aux Etats-Unis, Jump est accessible moyennant 2 dollars (1,7 euro) les trente premières minutes, puis 7 cents de dollar la minute supplémentaire.

« Devenir rapidement un acteur majeur »

Uber arrive donc sur un nouveau marché en Europe, lesté de sa notoriété, de la puissance de son application et, paradoxalement, de sa capacité à perdre de l’argent. « L’idée est de devenir rapidement un acteur majeur », relève-t-on chez Uber, première entreprise de mobilité au monde par la valeur (elle est estimée à environ 100 milliards de dollars, soit 87 milliards d’euros) et qui pourrait faire son introduction en Bourse en 2019.

Débutant en matière de vélos partagés, Uber compte sur sa jeune expérience outre-Atlantique. D’abord partenaire de Jump à San Francisco (Californie), où ont été déployés 250 engins en février, la société a, devant le succès de l’expérimentation, racheté son partenaire un mois plus tard. A présent, 7 000 vélos Jump sont déployés dans dix villes aux Etats-Unis, dont New York et Chicago (Illinois), et des trottinettes électriques Jump commencent à être testées à Santa Monica (Californie).

L’irruption de cette marque en Europe correspond au virage stratégique amorcé par le PDG d’Uber, Dara Khosrowshahi. « De plus en plus, Uber ne sera plus seulement destiné à réserver une voiture, mais il servira à se déplacer d’un point A à un point B avec le meilleur moyen [de transport] possible », déclarait, en avril, le ­patron irano-américain qui a succédé au fantasque Travis Kalanick, débarqué par ses actionnaires en août 2017.

D’où l’investissement dans Jump, mais aussi dans les trottinettes en libre-service Lime (désormais disponibles à Paris).

Défi complexe

Aux Etats-Unis toujours, Uber s’est allié avec la société de covoiturage et d’auto-partage Getaround pour proposer un service de location de voitures entre particuliers baptisé « Uber Rent ». Insatiable, le groupe a aussi noué un partenariat avec la start-up Masabi, spécialisée dans les billets électroniques, afin de permettre à ses clients de payer leurs trajets en bus et en train avec l’application Uber. Celle-ci deviendrait, dans le monde rêvé de M. Khosrowshahi, un assistant personnel universel de mobilité.

UBER-JUMP POINTE LE BOUT DE SON GUIDON AU MOMENT OÙ LE VÉLIB’ PARISIEN, EN GRANDE DIFFICULTÉ OPÉRATIONNELLE AU DÉBUT DE L’ANNÉE, RESSORT LA TÊTE DE L’EAU

En attendant, Uber doit parvenir à gagner son pari du vélo en free floating en Europe. Un défi complexe. Dans la capitale française, nombreux sont ceux qui s’y sont cassé les dents. Des quatre acteurs présents début 2018, il ne reste que les deux opérateurs de vélos chinois, Mobike et Ofo. Ce dernier, filiale de l’Uber chinois, Didi, a d’ailleurs décidé de réduire la voilure sue le Vieux Continent, décidant de ne rester qu’à Milan (Italie), Londres et Paris.

Uber-Jump pointe le bout de son guidon au moment où le Vélib’ parisien, en grande difficulté opérationnelle au début de l’année, ressort la tête de l’eau. Les 11 000 Vélib’, désormais opérationnels à 80 %, vont être difficiles à concurrencer.

« Augmenter les bases de clients »

Sans compter que d’autres rivaux se placent sur le marché hexagonal, telle la start-up Zoov, qui propose aux villes une flotte de vélos électriques partagés accrochés à des stations minimalistes et très bon marché. Un système astucieux fondé sur une petite batterie fournie aux abonnés permet de gérer la recharge sans coûts opérationnels élevés.

En revanche, pour ce qui est de Jump, de nombreux observateurs critiquent l’impossibilité de changer la batterie. Un défaut que les manageurs d’Uber ­envisagent de corriger.

« Uber-Jump comme Didi-Ofo ne gagneront jamais d’argent avec le free floating, assure Yann Marteil, directeur général de Via ID, l’un des actionnaires du nouveau Vélib’. Mais ce n’est pas forcément leur but. Ce type d’activité est, pour ces acteurs, une façon finalement peu onéreuse d’augmenter leurs bases de clients pour proposer ensuite des trajets en voiture, des livraisons, des voitures à louer. »

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