Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
18 mars 2019

« Grande America » : la Charente-Maritime se prépare à une marée noire

Par Frédéric Zabalza, La Rochelle, correspondant - Le Monde

Alors que les conditions météo compliquent les opérations de dépollution, le département s’organise avant l’arrivée des premiers résidus de pétrole attendue en milieu de semaine.

Quand et où arrivera-t-elle ? Ces deux questions taraudent les départements de Gironde et de Charente-Maritime, vers lesquels se dirige une nappe d’environ 5 km2 de fioul lourd échappé du cargo Grande America après son naufrage, le 12 mars, à près de 330 km au large de La Rochelle.

Difficile de répondre à l’une et l’autre tant les conditions météo, vent fort et mer agitée sans parler des puissants courants du golfe de Gascogne, ne sont guère favorables, y compris pour la flotte chargée des opérations antipollution, qui ont cependant commencé dès vendredi 15 mars dans l’après-midi.

Cinq bateaux participent à la manœuvre délicate, coordonnée par le directeur du Centre d’expertises pratiques de lutte antipollution (Ceppol) : le VN Partisan et le Ria de Vigo, affrétés par l’Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA), l’Argonaute et le VN Sapeur, affrétés par la marine nationale, qui a également envoyé le Rhône en soutien.

Deux remorqueurs en renfort

La préfecture maritime de l’Atlantique fait savoir que le dispositif sera renforcé lundi 18 mars par l’arrivée du remorqueur espagnol Alonso de Chaves, alors qu’un second remorqueur, le Maria de Maetzu, restera en alerte à Santander (Espagne), dans le cadre de l’accord franco-espagnol Biscaye Plan. Dans les airs, le Falcon-50 de la marine nationale et l’avion espagnol 102 poursuivent leurs observations. Ce sont eux qui ont permis de repérer la nappe d’hydrocarbure échappée du cargo, qui n’est peut-être pas la seule.

Deux nappes avaient en effet été observées dans un premier temps, avant de disparaître des radars. Mais il n’est pas impossible d’imaginer que le navire italien, désormais épave par 4 600 m de fond, continue de rejeter peu à peu les 2 200 tonnes de pétrole qui restaient dans ses réservoirs pour poursuivre son trajet jusqu’au Maroc. Sans oublier les quelque trois cent soixante-cinq conteneurs qu’il transportait, dont quarante-cinq sont répertoriés comme contenant des matières dangereuses.

C’est en tout cas la crainte exprimée à terre, où l’on s’attend à voir arriver les premiers résidus en milieu de semaine peut-être. En Charente-Maritime, déjà souillée par des échouages de boulettes de fioul lors des naufrages de l’Erika (1999) et du Prestige (2002), on se prépare au pire. La préfecture, qui a mis en place une cellule de préalerte pollution, déclenchera le plan Polmar Terre aux premières traces de pétrole sur la côte.

A La Rochelle, le maire Jean-François Fountaine (divers gauche) a annoncé dès jeudi qu’il mobiliserait, en cas de marée noire, cent cinquante agents municipaux et que la ville constituerait un dossier sur l’état de ses plages en vue de se retourner contre les responsables de la pollution, soit l’armateur Grimaldi. D’autres communes ont fait de même, notamment l’Ile-d’Aix, où les équipes municipales, aidées de volontaires, ont procédé samedi à un « nettoyage préventif » des plages afin de faciliter les opérations de ramassage du pétrole si la pollution se confirme.

Production ostréicole mise à l’abri

Les professionnels de la mer s’activent eux aussi, à commencer par les ostréiculteurs (sept cent quatre-vingts exploitations dans le département), dont certains s’empressent de mettre une partie de leur production à l’abri. Les pêcheurs des ports de La Cotinière (Oléron), La Rochelle et Royan suivent également de près la situation, mais ils redoutent moins les conséquences sur les poissons de cette pollution en surface que des répercussions sur les cours à la criée.

Comme lors des marées noires précédentes, des bateaux de pêche pourraient être associés au dispositif de lutte antipollution, entraînant une organisation logistique à terre (déchargement, stockage, transport, etc.). L’arrivée de boulettes nuirait plus encore aux pêcheurs à pied, à quelques jours des prochaines grandes marées (20-24 mars). Les acteurs du tourisme ne manquent pas non plus de s’inquiéter dans l’un des départements les plus fréquentés de France aux beaux jours.

Mais les premières victimes de cette potentielle marée noire risquent d’être, une fois encore, les oiseaux. La Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), dont le siège est à Rochefort, a d’ores et déjà constitué une équipe de crise avec ses services et se prépare à prendre en charge les volatiles mazoutés. De leur côté, les associations France Nature Environnement et Robin des Bois, qui avait été la première organisation non gouvernementale à alerter sur le risque de pollution du Grande America, ont fait part de leur intention de porter plainte contre l’armateur.

Publicité
Commentaires
Publicité