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Jours tranquilles à Paris
25 décembre 2019

Lundi 23 décembre 2019 - Disparition. Ahmed Gaïd Salah, le “vrai” chef de l’Algérie, est mort

hamed

Chef d’État-major de l’armée depuis quinze ans, Ahmed Gaïd Salah est mort ce lundi 23 décembre d’une crise cardiaque, ont révélé les médias d’État. Honni des manifestants, il était considéré comme le vrai dirigeant du pays.

L’information fait la une des sites d’informations algériens : Ahmed Gaïd Salah est mort, ce lundi 23 décembre, a confirmé l’agence de presse officielle APS. À 79 ans, le chef d’État-major de l’armée et vice-ministre de la Défense a fait une crise cardiaque à l’aube. Transporté à l’hôpital, il n’a pu être réanimé. “Ahmed Gaïd Salah tire sa révérence”, titre le grand quotidien algérien El Watan.

Cet homme aux fines lunettes et à la moustache poivre et sel était à la tête de la puissante armée algérienne depuis quinze ans. Incarnant le “système”, il était considéré comme le véritable homme fort du pays : celui qui tirait les ficelles derrière Abdelatif Bouteflika, déchu en avril dernier après 20 ans à la tête de l’État, et derrière Abdelatif Tebboune, le tout nouveau président du pays. Investi il y a seulement quatre jours, cet ancien Premier ministre et ancien ministre d’Abdelaziz Bouteflika était souvent dépeint comme une marionnette aux mains de l’armée.

Bête noire des manifestants

Ahmed Gaïd Salah était quant à lui l’ennemi du Hirak, ce mouvement de contestation sans précédent en Algérie. Il n’avait pas hésité à “menacer”, selon les termes d’El Watan, “les traîtres manipulables.” Depuis le mois de février, les manifestants n’ont cessé de réclamer son départ.

Omniprésent sur le terrain, c’est lui qui “en 2019, à la suite de la pression des manifestations populaire contre le régime, a poussé au départ le président Abdelaziz Bouteflika, dont il était un fidèle parmi les fidèles”, estime El Watan. Lui encore qui a maintenu coûte que coûte l’élection présidentielle, alors que son annulation était réclamée par une partie de la population, comme l’écrivait Liberté fin octobre. Les procès contre les caciques du régime Bouteflika, notamment contre son frère Saïd, n’ont pas suffi à satisfaire les protestataires qui estimaient qu’Ahmed Gaïd Salah ne faisait que des sacrifices pour mieux maintenir son pouvoir.

Ancien commandant des forces terrestres, il était considéré comme un tenant de la ligne dure dans l’armée. Son décès, alors que les protestations contre le système ne faiblissent pas, plonge l’Algérie dans encore un peu plus d’incertitudes.

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Politique. En Algérie, “la fin d’une époque ?”

La mort inattendue de l’homme fort du pays, le chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah, le 23 décembre, change la donne politique. Alors qu’un mouvement de contestation sans précédent traverse le pays, cette disparition va-t-elle sonner le début d’une révolution ? Le grand quotidien national s’interroge.

La nouvelle du décès d’Ahmed Gaïd Salah, le 23 décembre, a été si inattendue que les sites d’informations algériens ont mis plusieurs heures avant d’oser publier des articles s’éloignant du communiqué officiel. Alors que le pays traverse une période très délicate, avec un mouvement de contestation très fort depuis dix mois et l’arrivée au pouvoir, le 19 décembre, d’un nouveau président très contesté, la disparition de l’homme le plus puissant du pays plonge l’Algérie dans une ère d’incertitude. “Elle constitue sans doute un tournant dans la vie nationale”, estime ainsi El Watan.

Comme la totalité de la presse algérienne, le grand quotidien algérien affiche à sa une une photo d’Ahmed Gaïd Salah. Mais loin des apologies publiées par les journaux proches du régime – tel le Moudjahid, qui évoque le “héros national” – il s’interroge sur l’après-Gaïd Salah. Dans un pays habitué à voir l’armée tirer les ficelles dans l’ombre, “depuis la démission forcée d’Abdelaziz Bouteflika le 2 avril, le patron de l’armée a été propulsé au-devant de la scène comme rarement un haut gradé l’a été, rappelle El Watan. À 79 ans, il fustigeait tantôt les partisans de la transition, tantôt les ‘préalables’ au dialogue ; il s’en prenait aux promoteurs du slogan ‘État civil, pas militaire” en soutenant qu’il était “dicté par des cercles hostiles à l’Algérie.’” “Bref, celui dont on disait qu’il aimait la bonne chère avait son mot à dire sur tous les sujets. À tel point qu’on n’entendait que lui, parmi le personnel officiel”, poursuit le titre.

Omniprésent, Ahmed Gaïd Salah faisait aussi figure d’homme omnipotent. Chef d’état-major depuis quinze ans, un record, il était ainsi devenu “la cible privilégiée des chants du Hirak.” Les manifestants le tenaient pour responsable de la répression, voyaient sa main dans les condamnations de protestataires. “Beaucoup saluent le fait qu’il n’ait pas ‘tiré sur le peuple’ et d’avoir déféré devant les tribunaux des poids lourds de l’ère Bouteflika, ce qui lui vaudra le surnom d’‘El Mendjel’ [la faucille]”, rappelle El Watan. Reste que le chef d’état-major, “fidèle parmi les fidèles” d’Abdelaziz Bouteflika était aussi un tenant de la ligne dure qui avait imposé coûte coûte l’élection présidentielle du 12 décembre dernier, soldée par l’élection d’Abdelatif Tebboune, un autre homme du système. “Abdelmadjid Tebboune qui n’a pas manqué, par ailleurs, de décorer, à cette occasion, Gaïd Salah de sa dernière médaille, celle de ‘l’Ordre du mérite national Sadr’”, poursuit El Watan.

À la fin d’une année marquée par de profonds bouleversements, le titre s’interroge : “La mort [d’Ahmed Gaïd Salah] va-t-elle accélérer le changement souhaité par le Hirak ? Donnera-t-elle plus de liberté d’action au nouveau président ? Les plus lucides tempèrent toute conclusion hâtive en rappelant à juste titre que ce qu’on appelle ‘le système’ a toujours réussi à survivre à ses hommes et à changer de peau sans jamais changer d’âme.”

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