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Jours tranquilles à Paris
26 décembre 2019

Algérie : qui est Saïd Chengriha, le successeur d’Ahmed Gaïd Salah au poste de chef d’état-major ?

Par Karim Amrouche, Alger

Personne en Algérie ne se hasarde à une appréciation politique sur le général major Saïd Chengriha, premier à ce poste à ne pas être passé par l’Armée de libération nationale.

Plus ouvert qu’Ahmed Gaïd Salah ? Plus dur ? Personne en Algérie ne se hasarde pour le moment à une appréciation politique sur le général major Saïd Chengriha, qui succède à Ahmed Gaïd Salah au poste névralgique de chef d’état-major de l’armée algérienne.

L’homme n’est pas le plus gradé au sein de l’armée – c’est le général de corps d’armée Benali Benali, commandant de la garde républicaine qui l’est – mais la tradition veut que la fonction de chef des forces terrestres (CFT) prépare à celle de chef d’état-major.

Né en 1945 à El Kantara, dans la wilaya de Biskra, le général major Chengriha est loin d’incarner un changement générationnel au sein de la haute hiérarchie de l’armée. Il est cependant le premier chef d’état-major de l’armée algérienne à ne pas avoir fait partie de l’Armée de libération nationale (ALN) qui a mené la guerre d’indépendance.

C’est un changement symbolique au sein d’une armée qui, au cours des trois dernières années, a connu un grand chamboulement au sein de la haute hiérarchie avec des mises à la retraite, des limogeages et des mises en détention pour corruption et enrichissement illicite. Certains de ces généraux, encore à des postes sensibles il y a trois ans, sont aujourd’hui en état de fuite à l’étranger.

« Purge »

C’est à la faveur de cette « purge », selon la formule du site Mena-Défense, spécialisé dans les questions militaires, que le général major Saïd Chengriha a été désigné, en septembre 2018, au poste de Commandant des forces terrestres. Il prenait alors la relève du général major Lahcène Tafer, limogé du poste qu’il occupait depuis 2004. Tafer avait lui-même remplacé aux forces terrestres, Ahmed Gaïd Salah, promu à cette date au poste de chef d’état-major de l’armée par l’ancien président Abdelaziz Bouteflika.

En prenant le commandement des forces terrestres – la plus grande part des effectifs de l’armée algérienne –, Saïd Chengriha devenait de facto le numéro deux au sein de l’institution militaire.

C’est le parcours classique des précédents chefs d’état-major de l’armée – Khaled Nezzar, Mohamed Lamari et Ahmed Gaïd Salah – tous passés par ce commandement des forces terrestres, véritable rampe de lancement pour prendre la direction de l’armée.

Tout comme Ahmed Gaïd Salah, le général major Saïd Chengriha a largement dépassé l’âge du départ à la retraite tel que prévu dans le statut général des personnels militaires (64 ans pour un général de corps d’armée et 60 ans pour un général major). Un article de la loi promulguée en 2006 stipule bien qu’en temps de paix « nul ne peut servir au-delà de la limite d’âge de son grade », mais il prévoit aussi qu’une dérogation peut être accordée par le président de la République « aux officiers généraux et supérieurs occupant de hautes fonctions de la hiérarchie militaire ».

L’âge de la retraite

Cette disposition a permis à Abdelaziz Bouteflika de maintenir des hiérarques en poste au-delà de l’âge limite de la retraite. Elle a eu pour effet, selon certains analystes, de retarder le changement générationnel au sein du commandement de l’armée.

Gaïd Salah ainsi que l’ancien patron des services, le général de corps d’armée, Mohamed Mediene – dit Toufik –, condamné récemment à 15 ans de prison pour « complot contre l’armée », ont ainsi bénéficié de cette dérogation accordée par l’ancien président.

Saïd Chengriha, le « premier officier bachelier post-indépendance », ainsi que le rappelle dans un article dithyrambique le site Algérie-Patriotique (qui appartient au fils de l’ancien ministre de la défense, Khaled Nezzar, en fuite à l’étranger et condamné par contumace pour « complot contre l’armée »), a fait l’école de guerre de Moscou.

L’homme a participé à la guerre du Kippour en 1973 sur le front du Sinaï au sein d’une division blindée envoyée alors par l’Algérie.

Avant de devenir commandant des forces terrestres en 2018, Saïd Chengriha assurait le commandement de la 3e région militaire, dans le Sud-Ouest, un poste très sensible en raison de l’interminable conflit du Sahara Occidental. Mena-Défense souligne qu’il « est connu pour ses qualités de stratège militaire. Il a très longtemps travaillé à la sécurisation de la frontière ouest et a accompagné les changements stratégiques qu’a connus l’Armée nationale populaire [ANP] à partir de 2010 et le redéploiement vers les frontières Est et Sud. Homme de terrain, il n’a jamais eu à gérer les achats militaires ou les relations extérieures de l’ANP. »

Le nouveau chef d’état-major « par intérim » prend ses fonctions dans un contexte politique tendu marqué par un mouvement de contestation, le Hirak, ininterrompu depuis le 22 février. La rue exige un changement de système, refusant ces régimes successifs où le poids de l’armée reste déterminant.

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