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Jours tranquilles à Paris
16 mai 2020

Caméras, agents « sentinelles », traçage Wi-Fi… Comment la SNCF contrôle à distance le déconfinement

Par Eric Béziat - Le Monde

Le PC voyageurs est la « tour de contrôle » de la complexe mise en place des règles de distanciation physique dans les gares et les trains de la SNCF.

16 h 34, l’heure où les travailleurs commencent à rentrer chez eux. Nous sommes jeudi 14 mai, quatrième jour du déconfinement. Serge Wolf, directeur exploitation et sécurité de la SNCF, bombardé directeur du tout nouveau PC voyageurs, fait le point sur la situation. Ils sont quatre dans la petite salle du bel immeuble qui abrite, près de la gare de l’Est, à Paris, le Centre national des opérations ferroviaires. L’œil rivé sur les écrans géants accrochés au mur, M. Wolf zoome sur les données des quais de la gare Saint-Lazare : « Côté Rome, 0,4 voyageur au mètre carré ; quai côté Amsterdam, on est à 0,3. La situation est sous contrôle. »

Ici, dans ce poste central, monté en quelques semaines à l’occasion de l’épidémie de Covid-19, convergent les informations remontant de tout le réseau français. La SNCF y scrute les 265 principales gares du pays, les 6 500 trains du quotidien et les 300 liaisons grandes lignes opérées chaque jour en France en ce moment (60 % des trains de la banlieue parisienne, les Transilien, 55 % des TER, 35 % des TGV et 25 % des Intercités).

Respect des règles

La mission essentielle de la trentaine d’agents du PC voyageurs qui se relaient de 6 heures à 20 heures est de veiller au respect des règles du déconfinement, autrement dit de prévenir les entorses à la distanciation physique : affluence, effets de foule ou trains bondés. Et, au besoin, alerter agents en gare, police ferroviaire ou forces de l’ordre afin de filtrer les accès. Le tout sous la houlette de Serge Wolf, un cadre SNCF aux épaules solides ; c’est lui qui avait été envoyé gare Monparnasse au moment des grandes pannes de 2017 et 2018 pour reprendre en main l’établissement.

Depuis cette véritable « tour de contrôle du déconfinement », pour reprendre la formule de Christophe Fanichet, le PDG de SNCF Voyageurs (la filiale de la SNCF qui fait rouler l’ensemble des trains transportant des passagers), l’entreprise ferroviaire nationale a multiplié les outils de surveillance. Les opérateurs ont un accès direct aux 9 300 caméras disposées dans 400 gares d’Ile-de-France.

« CE SYSTÈME NOUS A PERMIS DE REPÉRER TRÈS VITE QUE NOUS AVIONS UN TROU DE DESSERTE SUR LA LIGNE B DU RER ET DE REMETTRE DE LA FRÉQUENCE À CE MOMENT-LÀ » SERGE WOLF, DIRECTEUR DU PC VOYAGEURS

Sur le réseau Transilien, quelques trains récents sont équipés de cellules photoélectriques au niveau des portes, permettant un comptage automatique des voyageurs entrant. Pour le reste du matériel roulant, environ 200 agents « sentinelles » (des cheminots et des prestataires extérieurs) disposés sur les quais de 41 gares-clés assurent un comptage des voyageurs par train, par horaire et par voiture. Les sentinelles font remonter, via une l’application Google Form, les données en temps réel à la cellule « affluence » de Transilien puis au PC voyageurs.

A ce dispositif s’ajoute une technologie de traçage Wi-Fi anonyme, par le biais des smartphones des usagers, laquelle permet de calculer la densité au mètre carré sur les quais des gares parisiennes les plus fréquentées. Ce procédé, déjà en usage dans les centres commerciaux, a été développé avec une start-up parisienne, Sapa. Il a fait l’objet d’une déclaration à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). « L’ensemble du système de surveillance a déjà donné des résultats, assure M. Wolf. Il nous a permis de repérer très vite que nous avions un trou de desserte sur la ligne B du RER à l’ouverture du réseau et de remettre de la fréquence à ce moment-là. »

Dans les réseaux régionaux des TER, la surveillance porte particulièrement sur 160 trains repérés comme comportant un risque de « suraffluence Covid ». Les contrôleurs à bord font eux aussi remonter les niveaux d’affluence vers le PC sécurité. Ils sont secondés par 350 autres agents sentinelles déployés dans 141 gares qui opèrent de la même façon qu’en banlieue parisienne. Côté TGV ou Intercités, autrement dit les trains à réservation obligatoire, la limitation des ventes à 50 % des places disponibles permet une surveillance nettement plus aisée de l’affluence.

Une montée modeste du trafic

Au bout de quatre jours de déconfinement, la SNCF a bien repéré une montée modeste et régulière du trafic voyageurs, mais les niveaux restent particulièrement bas, avec 2 millions de voyageurs en quatre jours sur le réseau Transilien contre 13,6 millions habituellement.

Et ce n’est pas un hasard si Christope Fanichet a, lors de la présentation à la presse du PC voyageurs, commencé par remercier les usagers qui ont joué le jeu du télétravail et des consignes d’utilisation raisonnée des transports collectifs. Il a aussi souligné l’efficacité des coupons d’accès aux TER mis en place dans cinq régions (Occitanie, Hauts-de-France, Normandie, Centre - Val-de-Loire, Bourgogne-Franche-Comté) et de l’attestation employeurs obligatoire en Ile-de-France aux heures de pointe.

« L’augmentation progressive de notre offre est plus rapide que la hausse de la fréquentation, souligne Mathieu Chabanel, numéro 2 de SNCF Réseau et dirigeant d’astreinte au PC voyageurs ce 14 mai. Ce qui fait que pour le moment on “désature”. » La SNCF compte pouvoir faire circuler 100 % de ses trains du quotidien la première quinzaine du mois de juin.

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