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Jours tranquilles à Paris
11 septembre 2020

Rimbaud et Verlaine : une pétition soutenue par Roselyne Bachelot demande leur entrée au Panthéon

verlaine rimbaut

Par Pierre Ropert

Une pétition, soutenue par la ministre de la Culture, demande à ce qu'Arthur Rimbaud et Paul Verlaine fassent leur entrée au Panthéon. La pétition fait "appel au président de la République", seul habilité à décider de ce transfert.

"Est-ce ainsi que la France honore ses plus grands poètes ?" interroge la pétition lancée par un groupe d’intellectuels, académiciens et universitaires passionnés de Rimbaud et Verlaine, qui souhaitent faire entrer le couple de poètes au Panthéon. Soutenue par Roselyne Bachelot, ministre de la Culture, ainsi que neuf de ses prédécesseurs, dont Jack Lang ou François Nyssen, la pétition précise :

Arthur Rimbaud et Paul Verlaine sont deux poètes majeurs de notre langue. Ils ont enrichi par leur génie notre patrimoine. Ils sont aussi deux symboles de la diversité. Ils durent endurer "l’homophobie" implacable de leur époque. Ils sont les Oscar Wilde français. Ce ne serait que justice de célébrer aujourd'hui leur mémoire en les faisant entrer conjointement au Panthéon, aux côtés d'autres grandes figures littéraires : Voltaire, Rousseau, Dumas, Hugo, Malraux.

Les signataires de l'appel soulignent ainsi que Rimbaud (1854-1891) est non seulement enterré à Charleville-Mézières, une ville qu'il détestait, mais surtout dans le caveau familial aux côtés de Paterne Berrichon, "son ennemi et usurpateur", poète qui épousa sa sœur et tenta de lisser l'image de Rimbaud à titre posthume, en prétendant que ce dernier avait retrouvé la foi catholique sur son lit de mort et en faisant passer sa relation homosexuelle avec Verlaine pour une relation plus chaste qu'elle ne l'était.

Verlaine (1844-1896), de son côté, repose au cimetière des Batignolles à Paris, "près du périphérique, sous d’affreuses fleurs en plastique" assène la pétition.

Les signataires ne manquent pas d'appuyer le caractère patrimonial des œuvres respectives des deux poètes :

C’est dans l’œuvre de Verlaine que l’on a puisé en 1944 le message annonçant le débarquement en Normandie à l’intention de la résistance intérieure – le vers célèbre "Les sanglots longs des violons de l’automne/ Bercent mon cœur d’une langueur monotone". C’est vers la figure emblématique de Rimbaud que l’on se tourne dès qu’une révolte éclate, surréaliste ou étudiante, comme en mai 68, ou lorsqu’il est question de « Changer la vie », le slogan de la gauche des années 1970.

Arthur Rimbaud et Paul Verlaine ont pourtant longtemps été considérés comme des amants scandaleux, et à ce titre punis. Les signataires de l'appel estiment ainsi que les panthéoniser reviendrait à leur rendre justice, deux siècles après la condamnation de Verlaine à deux ans de prison.

L'histoire sulfureuse des deux poètes débute à la fin de l'été 1871. Arthur Rimbaud, après une brève correspondance dans laquelle il a donné à lire quelques uns de ses poèmes, débarque à Paris, dans le cercle littéraire de Verlaine. Celui-ci, âgé de 27 ans, s'éprend du jeune Ardennais, de 10 ans son cadet. Ensemble, ils vivent un amour passionné et tumultueux.

Deux ans plus tard, en 1873, lors d'une énième dispute à Bruxelles où ils se sont réfugiés, Rimbaud annonce son désir de repartir à Paris.  Verlaine explose, descend acheter un revolver, puis remonte à l’hôtel. Ivre mort, à trois mètres de distance, il parvient à toucher Rimbaud au poignet ; le second coup se fiche dans le plancher. La série documentaire Une Histoire particulière revenait sur cet épisode décisif dans la vie des deux poètes :

Verlaine est arrêté. Mais c'est davantage pour son homosexualité et son passé de communard que pour les violences faites à Arthur Rimbaud qu'il sera condamné, ce que ne manque pas de rappeler la pétition :

Paul Verlaine a été condamné à deux ans de prison pour avoir tiré deux coups de revolver sur Rimbaud. Ce dernier, dont la blessure était légère, s’est désisté de toute action en justice. Mais le parquet belge et la police française ont monté un dossier à charge, dont les archives prouvent désormais qu’il fut lié à son rôle dans la Commune et à son homosexualité. Il est resté 555 jours en prison, quand il aurait dû n’y passer que quelques semaines. Et on sait aussi que la Préfecture de police de Paris a favorisé l’aggravation de sa peine en raison, précisément, de ce "drôle de ménage ".

Les signataires de la pétition font ainsi "appel au président de la République", seul habilité à décider d'un transfert ou non au Panthéon. Sous son mandat, Emmanuel Macron a déjà transféré deux personnes au Panthéon : la résistante et ministre Simone Veil, avec son mari Antoine, en juillet 2018.

Précision 9/9  - 18h07 : Roselyne Bachelot n'a pas signé directement la pétition mais la soutient publiquement

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