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Jours tranquilles à Paris
poutine
14 mai 2020

Vladimir Poutine apparaît comme un chef autoritaire en perte d’autorité

Article de Marie Mendras

Alors que la Russie se révèle comme l’un des principaux foyers de la pandémie de Covid-19, le président semble incapable de mettre le pays en ordre de bataille, analyse la politologue

La Russie arrive en seconde position, derrière les Etats-Unis, en matière de progression quotidienne de l’épidémie. Selon les données officielles, quelque 11 000 nouveaux cas de Covid-19 ont été enregistrés le 11 mai, pour un total qui dépasse les 220 000 personnes contaminées, et plus de 2 000 décès. Scientifiques et médecins assurent que les chiffres réels sont beaucoup plus élevés. La méthode de décompte des décès écarte les personnes qui souffraient aussi d’une autre pathologie, les victimes hors hôpital sont rarement comptabilisées, et les médias subissent un contrôle strict des autorités.

Le gouvernement semble en plein désarroi, ce qui provoque une forte anxiété au sein de la société. L’économie stagne depuis des années et l’arrêt de l’activité en mars laisse les acteurs économiques et les ménages exsangues. L’inadéquation des politiques étatiques invite à s’interroger : où est donc la fameuse « verticale du pouvoir », censée gouverner la vaste Fédération de Russie grâce aux oukases d’un président tout-puissant ?

A la mi-mars, quand les premiers cas ont enfin été reconnus, les autorités centrales ont sous-estimé le danger et n’ont pas proposé de réplique rapide pour juguler l’épidémie. C’est le maire de Moscou, Sergueï Sobianine, qui a pris l’initiative de décréter le confinement dans la capitale le 30 mars.

Un président anxieux et mal à l’aise

Au même moment, le petit show humanitaire pour porter secours aux New-Yorkais, après les Italiens, a vite tourné au fiasco. De l’avis des bénéficiaires, les matériels envoyés étaient inadaptés et n’ont pas été utilisés (la ville de New York a quand même reçu une facture de 667 000 dollars à payer à l’Etat russe fin avril). En Russie, l’opération de communication n’a pas été appréciée, car les hôpitaux accueillaient de plus en plus de malades et manquaient de tout. Le Kremlin a montré qu’il continuait à dribbler sur le terrain de la concurrence avec l’Occident, alors que tous les Etats se préparaient à combattre le virus chez eux, sur le champ de bataille national.

Vladimir Poutine s’est adressé à la nation plusieurs fois, d’abord moralisateur et détaché, puis sombre et magnanime, en « octroyant » plusieurs semaines de congés confinés et payés (payés par qui ?, se demandent les travailleurs…). Alors qu’on attendait un chef déterminé, c’est un homme anxieux et mal à l’aise qui s’est exprimé devant les écrans de télévision. Le président a décidé de ne pas diriger le combat contre la pandémie, et l’a dit clairement aux gouverneurs des 85 provinces de Russie : à vous de gérer !

Il s’est retiré dans sa datcha présidentielle de Novo-Ogarevo, dans les environs de Moscou. Il se tient à très grande distance et abandonne la gestion d’une crise multidimensionnelle aux administrations et aux entreprises, sous contrôle du FSB et des forces de l’ordre, sans vraiment déléguer ni orchestrer. La répression politique continue, par des juges qui condamnent « à distance ». Les grandes voix de l’opposition, reprises par de nombreux sites et blogs, dénoncent l’incurie du pouvoir. Le fameux « ordre poutinien » paraît incapable de mettre le pays en ordre de bataille.

Les administrations locales en première ligne

Les chefs d’administrations provinciales et municipales sont placés en première ligne, alors qu’ils ont presque tous été choisis pour leur loyauté sans faille et leur faible envergure, et n’ont pas les moyens de remplir leur mission. Les informations fiables sur la propagation du virus dans les provinces manquent, et les priorités pour apporter soins et aides aux malades, aux familles et aux personnes privées de revenus ne sont pas explicitées. Les hôpitaux sont pour la plupart livrés à eux-mêmes. Ils réclament des médicaments, des protections pour les soignants et un soutien logistique. Or, les administrations municipales et régionales n’ont pas de budget autonome pour leur prêter main-forte. Chaque province prend des mesures, parfois appropriées, souvent inapplicables. Nijni-Novgorod a été la première région à imposer l’autorisation de déplacement numérique, soumise à acceptation administrative. Le Tatarstan, la Tchétchénie, la province de Tcheliabinsk et quelques autres ont fermé leurs frontières aux déplacements et transports, contre l’avis du gouvernement central.

Les familles attendent de l’aide des administrations locales et de leurs employeurs, qui, à leur tour, attendent le soutien de l’Etat. La crise actuelle contribue à creuser les inégalités économiques et sociales, déjà très marquées. La méfiance envers « celui venu d’ailleurs » s’aiguise. Les conséquences sont dramatiques pour les millions de personnes vivant en Russie sans passeport russe ni permis de résidence.

Les détracteurs affirment que le président n’a endossé aucune décision pénible pour éviter de perdre un peu plus la confiance des Russes. Depuis l’impopulaire réforme des retraites et les manifestations qui ont eu lieu dans toutes les grandes villes de Russie à l’été 2018, le président n’a jamais retrouvé le niveau de soutien dont il bénéficiait précédemment. Dans un sondage de fin avril, le Centre Levada souligne que 46 % des personnes interrogées se disent satisfaites (contre 48 % insatisfaites) de la réponse des autorités à l’épidémie, un faible résultat dans une société où critiquer est risqué.

La célébration du poutinisme triomphant a tourné court. En début d’année, le Kremlin a fait voter au pas de charge une loi de révision constitutionnelle, signée par le président le 14 mars. Le « vote d’approbation populaire », prévu le 22 avril, a été reporté sine die pour cause de pandémie. Ce coup de force a donné à Vladimir Poutine la possibilité de briguer encore deux mandats de six ans, et de rester chef de l’Etat jusqu’en 2036. Tel est le paradoxe d’un système dirigeant qui prétend au pouvoir sans limite, alors qu’il ne sait pas assurer la protection de 140 millions de personnes, privées de visibilité sur leur avenir proche.

Contrairement aux idées reçues, le système Poutine n’est ni un Etat fort ni un Etat-providence. Un chef autoritaire en perte d’autorité, voilà un cas intéressant qui invite à bousculer la croyance en un effet d’aubaine de la pandémie pour les autoritarismes, alors que les démocraties y perdraient leur âme et leur légitimité.

Marie Mendras, politologue au CNRS et au CERI, enseigne à Sciences Po Paris

 

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22 avril 2020

Au Kremlin, « le coronavirus a tout gâché »

Par Sylvie Kauffmann, Editorialiste au « Monde »

Effondrement des cours du pétrole, pic épidémique attendu en mai, référendum et défilés patriotiques reportés sine die… La crise mondiale met à mal bien des plans de Vladimir Poutine, observe Sylvie Kauffmann, éditorialiste au « Monde », dans sa chronique.

Ce mercredi 22 avril devait être un grand jour pour Vladimir Poutine. Appelés aux urnes pour un vote qui avait tout l’air d’un plébiscite, les Russes devaient approuver le projet de réforme constitutionnelle concocté par leur président pour lui permettre de rester au pouvoir jusqu’en 2036. L’onction de la légitimité populaire n’était pas juridiquement indispensable, mais dans ce type de démarche, elle ne fait jamais de mal.

Le coronavirus a tout gâché. Avec un peu de retard sur l’Europe de l’Ouest, l’épidémie a gagné la Russie, où l’on s’attend maintenant à un pic en mai.

Sagement, le vote a donc été reporté. Aucune nouvelle date n’a été fixée : à Moscou pas plus qu’à Paris, personne ne peut dire à quel stade un scrutin pourra se tenir en toute sécurité sanitaire. L’incertitude économique est plus grande encore – qui a envie d’organiser un plébiscite quand le chômage est au plus haut et les revenus au plus bas ?

Car une autre catastrophe se profile pour la Russie. Si la nouvelle de l’effondrement du prix du baril de pétrole américain WTI, passé en dessous de zéro dollar lundi, a secoué Washington, elle a dû donner des sueurs froides au Kremlin. Pour la Russie, dont l’économie, très dépendante des revenus de ses hydrocarbures, était déjà stagnante avant cette crise, la perspective d’une chute durable des cours du pétrole est désastreuse : le budget russe est calculé sur la base d’un baril à 42,50 dollars.

Le Covid-19 n’est pas le seul coupable. Cet effondrement résulte aussi d’une erreur de jugement du pouvoir russe qui, allié à l’Arabie saoudite cet hiver, a voulu tuer les compagnies pétrolières du schiste américain en se lançant dans une violente guerre des prix. L’alliance entre Riyad et Moscou, cependant, n’a pas tenu, entraînant un dérèglement du marché et une douloureuse chute du cours du baril au-dessous de 30 dollars. Fin mars, Donald Trump a négocié un cessez-le-feu avec Vladimir Poutine et le leader saoudien Mohammed Ben Salman, mais les forces du marché, déchaînées par la pandémie qui a fait chuter la demande mondiale, sont en train d’imposer leur loi à la diplomatie.

Traumatisé par le souvenir des années 1990

Tout cela tombe au plus mauvais moment pour la Russie et pour le président Poutine qui avait annoncé, en janvier, un plan d’investissements publics, notamment dans le domaine social, censé lui regagner les faveurs d’une population usée par des années de déclin des revenus des ménages.

La Russie, souligne l’économiste russe Sergueï Gouriev, professeur à Sciences Po, dispose d’un important fonds souverain, équivalent à 10 % ou 12 % de son produit intérieur brut (PIB). « Elle a donc à peu près deux ans devant elle avant de devoir aller emprunter sur les marchés », dit-il.

Mais M. Poutine, traumatisé par le souvenir des années 1990, lorsque la Russie de Boris Eltsine, exsangue, avait dû recourir à l’aide internationale, répugne à toucher à cette cagnotte. Pourra-t-il résister longtemps ? Les deux tiers des Russes n’ont pas d’épargne, estime un expert de l’opposition : « S’ils ne touchent plus de salaire, ils ne mangent pas. » Les réserves dont dispose le pouvoir, note-t-il, « c’est de l’argent mis de côté pour les mauvais jours, et les mauvais jours sont là. Malheureusement, le gouvernement russe n’agit pas toujours dans l’intérêt de ses citoyens ».

Valider « le récit historique russe »

Autre dégât collatéral du coronavirus : le Kremlin a dû reporter les cérémonies du 75e anniversaire de la victoire de la seconde guerre mondiale, prévues le 9 mai à Moscou.

Vladimir Poutine attendait beaucoup de cet événement, pour lequel il avait réussi à attirer plusieurs dirigeants étrangers, dont le président Emmanuel Macron : c’était pour lui une façon de valider le « récit historique russe », analysait récemment Dmitri Souslov, de l’Ecole supérieure d’économie à Moscou, dans une visioconférence organisée par l’European Council on Foreign Relations, un institut de recherche paneuropéen. Il tient donc à organiser cette parade à une autre date, mais qui a envie de faire partie, en ces temps de virus mondialisé, d’un aréopage de dignitaires alignés côte à côte sur la place Rouge, comme au bon vieux temps ?

Le président russe place plus d’espoir dans la proposition qu’il a formulée en janvier à Jérusalem, de même que le président Macron, de réunir un sommet des leaders des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies (ONU), les « P5 ».

La santé de l’ONU n’est en ce moment guère plus florissante que celle du reste du monde, mais M. Poutine a écemment été en contact avec MM. Trump et Macron : les prodiges de la visioconférence vont peut-être, finalement, lui permettre de s’essayer au leadership mondial.

Monde bipolaire sino-américain

La configuration du monde postcoronavirus que certains entrevoient risque de ne pas lui faciliter la tâche. Comme l’Europe, la Russie aura du mal à trouver sa place dans un monde bipolaire sino-américain, avec une Chine plus forte et des Etats-Unis plus faibles.

Analyste au centre de recherche américain Carnegie, Dmitri Trenine relève que M. Poutine a cherché à renouer avec les Etats-Unis ces dernières semaines, comme il l’a fait lors de chaque grosse crise internationale, après les attentats du 11 septembre 2001 ou pendant l’offensive de l’organisation Etat islamique en 2015.

Mais pour la plupart des experts de la Russie, on aurait tort d’attendre un revirement de la politique étrangère russe à la faveur de la crise du Covid-19. La guerre de l’information que livre le Kremlin aux Etats-Unis s’en trouve même intensifiée, et la pandémie n’a rien changé au conflit sur l’Ukraine, de première importance pour Moscou. Tout au plus peut-on espérer, disent-ils, une baisse momentanée de l’activité militaire russe en Syrie et en Libye.

Après tout, a rappelé Vladimir Poutine à ses compatriotes le 8 avril, « tout passe, et ceci passera. Notre pays a affronté bien des défis majeurs – et la Russie les a tous surmontés. Nous vaincrons cette épidémie ». Les Russes en ont vu d’autres : nul ne le contestera sur ce point.

4 avril 2020

Poutine donne les « pleins pouvoirs » aux régions contre le Covid-19

Décision rare de l’hyper Président russe : la délégation, aux gouverneurs des provinces, de la gestion de la lutte contre le coronavirus. 

De notre correspondante en Russie, Nathalie Ouvaroff

La verticale du pouvoir, base de la gouvernance de Vladimir Poutine, n’a pas résisté au coronavirus. Le chef de l’État russe est contraint de donner davantage de pouvoirs de gestion aux gouverneurs des régions.

Dans un discours à la nation qui sonne comme un aveu d’impuissance, le chef de l’État russe a fait savoir à son peuple que la bataille contre la maladie était pour ainsi dire « régionalisée ».

Alors qu’il se taisait depuis l’annonce, à la surprise générale, d’une semaine de congés payés pour lutter contre la pandémie, Vladimir Poutine n’a pas annoncé, comme nombre de chefs d’État, l’instauration de l’état d’urgence mais un renforcement des pouvoirs des gouverneurs de provinces, qui seront désormais habilités à prendre toutes les décisions en accord avec un conseil ad hoc, chargé de la lutte contre l’épidémie près du Président.

Les gouverneurs auront la haute main sur toutes les questions sanitaires : hôpitaux, approvisionnement en médicaments et en moyens de protection pour les soignants et la population. Ils pourront également, avec l’aval des autorités sanitaires régionales, durcir ou assouplir les mesures de confinement et, bien entendu, les punitions pour les contrevenants.

Les chefs de région auront également les pleins pouvoirs, quant à l’infrastructure : arrêt des transports en commun, des trains, des transports fluviaux, des déplacements de population entre les différentes régions. Enfin, ils devront veiller sur la situation économique des régions dont ils ont la charge : empêcher les pénuries, le marché noir, la hausse de la criminalité, de l’alcoolisme.

L’unité russe en danger

La Fédération de Russie, qui comptait, au 1er janvier 2019, 146 millions habitants, recense, avec la Crimée, 22 « républiques kraï » (territoires administratifs), 48 « oblasts » (régions administratives) et trois villes d’importance fédérale : Moscou, Saint-Pétersbourg et Sébastopol. La région la plus peuplée est le Bachkortostan (quatre millions d’habitants) et la moins peuplée, l’Altaï (200 000). Reste que les régions de Russie sont très inégalement développées et que nombreuses sont celles qui, sur le plan sanitaire, ne sont absolument pas préparées à assumer le poids d’une pandémie. Dans ce contexte, cette « régionalisation » risque d’avoir des conséquences gravissimes et peut-être, à terme, remettre en question la Fédération de Russie comme un État unitaire.

1 avril 2020

Poutine

poutine542Du coup Poutine se protège... (en scaphandre jaune ci-dessous)

macron 2 protégé poutine

 Tandis que notre Macron (en gaulois intrépide) visite une usine de fabrication de masques, avec un simple masque chirurgical

macron prtégé

 

17 mars 2020

En Russie, la Cour constitutionnelle autorise Vladimir Poutine à se représenter.

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La plus haute instance judiciaire du pays a donné son aval lundi à des modifications de la loi fondamentale qui permettront au président de rester, s’il le souhaite, au pouvoir jusqu’en 2036. Cette décision n’a toutefois rien d’inattendu, note le site d’information russe Meduza, qui rappelle que 11 des 15 juges de la Cour constitutionnelle ont été nommés par Vladimir Poutine. Pour entrer en vigueur, le nouveau texte doit encore être approuvé par référendum le 22 avril prochain. Le président russe a signé samedi cette vaste réforme constitutionnelle, qui, grâce à un amendement ajouté à la surprise générale quelques jours avant et vivement dénoncé par l’opposition, permettra de remettre à zéro le nombre de ses mandats présidentiels, alors que la loi russe interdit au président d’effectuer plus de deux mandats consécutifs.

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11 mars 2020

Vladimir Poutine se voit bien rester au pouvoir jusqu'en 2036

Vladimir Poutine va-t-il se maintenir au pouvoir en Russie jusqu'en 2036 ? Le président russe a obtenu cette autorisation du Parlement ce mardi avec l'adoption d'un amendement qui, dans le cadre de sa réforme de la constitution, permettrait de «réinitialiser» le compteur limitant à deux les mandats présidentiels successifs. Ce qui tomberait bien, puisque Poutine est actuellement dans son deuxième mandat, qui doit s'achever en 2024. En effet, alors que la réforme confirme qu'il n'est pas possible d'exercer plus de deux mandats au pouvoir, cet amendement prévoit que les personnes ayant déjà présidé ou présidant actuellement (Poutine, donc) ne sont pas concernées, puisqu'il s'agirait en quelque sorte d'un «nouveau départ» constitutionnel. Selon lui, il reviendra à la Cour constitutionnelle de décider si cet amendement est constitutionnel, et aux citoyens russes de le confirmer lors d'un vote national le 22 avril dont les contours restent à définir. Si tel est le cas, Poutine pourrait à nouveau enchaîner deux mandats et garder le pouvoir jusqu'en 2036.

6 mars 2020

Syrie - Erdogan et Poutine annoncent un cessez-le-feu à Idlib

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COURRIER INTERNATIONAL (PARIS)

Le cessez-le-feu dans le nord-ouest de la Syrie est fragile, préviennent plusieurs médias européens. Mais il a le mérite de calmer les tensions entre les deux puissances après la mort d’une trentaine de soldats turcs dans une attaque menée par les forces de Bachar El-Assad, soutenues par Moscou.

Vladimir Poutine et Recep Tayyip Erdogan ont annoncé jeudi 5 mars à Moscou un cessez-le-feu provisoire à Idlib, au nord-ouest de la Syrie. Le résultat d’”une longue conversation. Ou plutôt une négociation ardue. Qui a duré cinq heures et quarante minutes, dont trois heures de tête-à-tête avec les seuls interprètes”, décrit le Soir.

Cet échange a lieu dans la foulée d’une attaque du régime syrien, soutenu par le Kremlin, le 27 février, qui a coûté la vie à plus de trente soldats turcs. “Bien sûr, le président turc sait très bien qu’une implication russe dans l’incident de jeudi  dernier ne peut être exclue. Les négociations sur la situation à Idlib n’ont donc pas été faciles”, explique la Süddeutsche Zeitung.

Il faut dire que “l’incident a fait naître la crainte d’un conflit militaire direct entre la Turquie et la Russie” d’où l’importance de cette rencontre entre les deux leaders afin d’“éviter une escalade majeure”, note la BBC.

Le président russe espère que “l’accord servira de base à la fin des combats dans la zone d’Idlib et mettra un terme aux souffrances de la population civile”. Une déclaration faite lors d’une conférence de presse commune. “Nous ne permettrons pas aux forces du régime de nuire à nos relations avec la Russie”,  a commenté son homologue turc, faisant référence à Bachar El-Assad.

Comme le rapporte Hürriyet, le cessez-le-feu a démarré vendredi à minuit. Un corridor de sécurité de douze kilomètres de large sera mis en place le long de l’autoroute M4 qui traverse la région d’est en ouest. Une autoroute où patrouilleront les forces russes et turques à partir du 15 mars.

Un cessez-le-feu jusqu’à quand?

“Au-delà de ce cessez-le-feu, les positions détaillées par la suite par leurs ministres restaient particulièrement vagues”, prévient Le Temps pour qui “ces très longues discussions se concluent par une sorte de capitulation turque”. D’après le Guardian, l’accord permet en effet aux forces syriennes de conserver les territoires acquis grâce à leur offensive des trois derniers mois sur Idlib, l’un des derniers bastions des rebelles, soutenus par Ankara.

Par ailleurs, remarque CNN, l’existence d’un mécanisme à même d’imposer le cessez-le-feu n’est pas très claire. Et comme le rappelle la BBC, un autre accord sur l’arrêt provisoire des combats dans la zone en 2018 a été régulièrement violé depuis.

“Ce que Poutine et Erdogan ont convenu au Kremlin, c’est un cessez-le-feu qui s’appuie sur un cessez-le-feu existant - auquel personne ne se conforme”, estime Die Welt. Ce qui fait dire à plusieurs médias, dont El Pais, que “ce cessez-le-feu semble fragile”.

“Un nouvel accord ne signifie pas une solution. C’est un gel temporaire du conflit”, analyse pour la radio NPR Galip Dalay, un expert de la Turquie. Mais précise le Washington Post, pour Ankara, l’un des objectifs principaux de ce cessez-le-feu, c’est d’éviter l’arrivée massive de nouveaux réfugiés syriens dans un pays qui en accueille déjà plus de trois millions. Côté russe, souligne Axios, Poutine doit trouver un moyen de continuer à soutenir Assad tout en gardant la Turquie comme alliée pour fragiliser l’Otan.

En tout cas, “cet accord s’est conclu en l’absence des Syriens à Moscou”, insiste Le Temps. “A Damas, Assad doit certainement déjà chercher comment saboter ce qui apparaît comme une solution qui ne tient nullement compte de son aspiration à “libérer chaque mètre carré du sol syrien de la domination des terroristes”, pour reprendre son langage”, peut-on lire dans Le Soir. “Mais son allié russe, en laissant l’armée turque décimer ses divisions dans le sud d’Idlib après l’épisode du 27 février, a bien montré au potentat syrien qui, en réalité, décidait en Syrie”, poursuit le quotidien belge.

Si Assad ne décide de rien, l’Union européenne non plus, considère Die Welt. “Il est clair que chaque rencontre entre les deux autocrates réduit les Européens à un rôle de spectateur” sur la question syrienne.

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4 mars 2020

Russie. Poutine propose d’interdire le mariage homosexuel dans la Constitution

avec AFP.

Vladimir Poutine prépare une réforme de la Constitution russe, avec une partie largement institutionnelle. Pour concerner les électeurs, des amendements ont été ajoutés sur des questions de société : la foi en Dieu serait dans la Constitution, ainsi qu’une définition du mariage comme uniquement entre un homme et une femme.

Le président russe Vladimir Poutine a soumis au Parlement de nouveaux amendements constitutionnels, introduisant la mention de Dieu dans la Constitution et fixant le principe qu’un mariage n’est possible qu’entre un homme et une femme.

Vladimir Poutine a annoncé en janvier que la Russie allait amender sa Constitution de 1993, une initiative largement considérée comme visant à organiser l’après-2024, année où s’achève son quatrième et dernier mandat présidentiel.

Ces amendements constitutionnels ont été adoptés à l’unanimité par les députés en première lecture mais Vladimir Poutine a soumis 24 pages supplémentaires d’amendements avant la seconde lecture, la plus importante, prévue le 10 mars, a annoncé lundi le président de la Douma, Viatcheslav Volodine.

Le mariage mixte seulement

Les amendements du président sont le résultat de son dialogue avec les représentants de toutes les factions et de la société civile, a-t-il indiqué dans un communiqué publié par la Douma, la chambre basse du Parlement russe.

Ces amendements prévoient que la mention de la foi en Dieu des Russes soit introduite dans la Constitution et stipulent qu’un mariage est l’union d’un homme et d’une femme, a précisé le vice-président du parlement, Piotr Tolstoï.

Je pense que la plupart des propositions qui ont été discutées ont été prises en compte, a-t-il déclaré.

Crimée et îles Kouriles

Ces nouveaux amendements interdisent aussi que des portions de territoire russe soient données à des États étrangers et rendent illégal tout appel ou action en ce sens.

Selon l’acteur Vladimir Machkov, membre du groupe de travail formé par le Kremlin pour plancher sur la réforme constitutionnelle, cet amendement permettrait de garantir que la péninsule ukrainienne de Crimée, annexée en 2014, ou les îles Kouriles disputées avec le Japon, restent russes même après le départ de Vladimir Poutine.

Le président russe avait évoqué l’idée de fixer le principe de l’interdiction du mariage entre personnes du même sexe mi-février, lors d’une rencontre avec un groupe de travail chargé de plancher sur les changements.

Réformes constitutionnelles

La majorité des amendements votés par la Douma en première lecture étaient de nature plus institutionnelle, visant notamment à renforcer les pouvoirs présidentiels. Un vote populaire aux contours encore flous doit être organisé le 22 avril pour adopter ces changements.

La semaine dernière, entre 10 500 personnes selon la police et 22 000 selon une ONG ont manifesté en mémoire de l’opposant assassiné il y a cinq ans Boris Nemtsov, mais aussi pour protester contre ces réformes constitutionnelles.

Selon un récent sondage du centre indépendant Levada, seuls 25 % des Russes sont prêts à voter en faveur des changements constitutionnels, tandis que 65 % disent ne pas comprendre ce qu’ils signifient. Les personnes interrogées sont divisées sur l’avenir du président : 44 % veulent le voir quitter le pouvoir après 2024, 45 % le voir rester.

Pour des analystes, les changements sociétaux que le président propose d’introduire dans la Constitution sont un moyen de convaincre les Russes de prendre part au scrutin.

22 janvier 2020

Commémorations de la libération d’Auschwitz : la bataille des mémoires entre Russie et Pologne

Par Romain Su, Varsovie, correspondance, Benoît Vitkine, Moscou, correspondant

A Moscou comme à Varsovie, les dirigeants instrumentalisent l’histoire de la seconde guerre mondiale à des fins nationalistes.

La célébration du 75e anniversaire de la libération du camp d’extermination nazi d’Auschwitz en Pologne aurait dû faire l’unanimité dans le recueillement et l’unité. Organisée jeudi 23 janvier par le Mémorial de Yad Vashem, en Israël, elle vire à la foire d’empoigne entre deux Etats dont les dirigeants ont fait de la lecture nationaliste de l’histoire une arme politique.

Le premier d’entre eux, Vladimir Poutine, engagé dans une croisade visant à réécrire le rôle de l’Union soviétique dans la guerre, va-t-il profiter de la tribune offerte par Israël pour tenir de nouveaux propos polémiques ? Le second, Andrzej Duda, sera absent ; le président polonais, qui n’a pas été désigné comme orateur, contrairement à son homologue russe, boude les cérémonies en signe de protestation.

Quatre jours plus tard, à Auschwitz, où plus d’un million de personnes ont été exterminées, la configuration sera inverse pour les traditionnelles commémorations de la libération du camp. Mais M. Poutine n’a pas été invité.

La bataille est politique plus que mémorielle. Le retrait polonais des célébrations de Jérusalem a été ressenti à Moscou comme une victoire. Il suffit pour s’en convaincre de lire la note rédigée sur le sujet par l’Institut russe pour les études stratégiques, un think tank lié au Kremlin. Dans un texte intitulé « La Pologne a perdu la dispute mémorielle avec la Russie », l’auteure assure que « Moscou a lancé dès décembre [2019] une frappe préventive dans ce conflit lancé par Varsovie ».

En réalité, la stratégie de Moscou relève plus du tapis de bombes, tant le thème de la seconde guerre mondiale a mobilisé ces dernières semaines les responsables russes. A commencer par le premier d’entre eux, Vladimir Poutine, qui promettait encore, samedi 18 janvier, de « fermer leurs sales bouches à ceux qui essaient de tordre l’histoire ».

Monologue de Poutine

Le président russe a multiplié les interventions publiques visant, en premier lieu, à relativiser la portée du pacte Ribbentrop-Molotov de 1939, dont le protocole secret entérinait le partage de l’Europe orientale entre Berlin et Moscou, en le mettant sur le même plan que d’autres accords passés par l’Allemagne nazie, à commencer par les accords de Munich de 1938 entre la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Italie. Cette obsession n’est pas nouvelle, et une loi de 2014 a même permis de poursuivre des internautes qui avaient critiqué le pacte.

L’essentiel du discours de M. Poutine a surtout consisté à dénoncer le rôle supposé de la Pologne dans le déclenchement de la guerre. Le 20 décembre 2019, lors d’une rencontre avec ses homologues de la région, le président russe a tenu un monologue d’une heure pour rappeler que Varsovie avait participé au « dépeçage » de la Tchécoslovaquie et y avait conduit des « attaques terroristes ».

Quelques jours plus tard, il qualifiait l’ambassadeur polonais dans le Berlin d’avant-guerre de « cochon antisémite » pour avoir exprimé son soutien à une proposition de relocalisation des juifs d’Europe en Afrique. Jozef Lipski est connu pour avoir aidé des juifs à fuir l’Allemagne. « Ce qui pose problème, c’est l’interprétation et le choix des documents retenus », explique l’historien Sergueï Radtchenko, de l’université de Cardiff.

Varsovie a d’abord été pris de court, et ce n’est que neuf jours plus tard que la réponse du premier ministre polonais, Mateusz Morawiecki, traduite pour l’occasion en anglais et en russe, a été publiée. En y insistant sur la place singulière de la Pologne comme « première victime de la guerre », « premier pays à avoir vécu l’agression armée de l’Allemagne hitlérienne et de la Russie soviétique » et « premier Etat à se battre en défense de l’Europe libre », il a rappelé deux piliers du discours historique polonais sur la seconde guerre mondiale : d’un côté, l’équivalence entre nazisme et communisme et, de l’autre, le rejet de tout autre rôle, pour les Polonais, que celui de victime ou de héros.

Politisation du récit historique

Cette vision promue par la droite au pouvoir, qui n’est pas exempte de considérations politiques, revient à minorer la portée des crimes commis contre les juifs et l’attitude de certains civils ou groupes armés à l’égard des juifs.

Vendredi 17 janvier, le ministère russe de la défense publiait une nouvelle série de documents « déclassifiés » évoquant le soutien apporté par les troupes soviétiques à l’insurrection de Varsovie, en 1944, à rebours de la lecture historique voulant que l’Armée rouge a laissé la résistance polonaise se faire exterminer avant d’intervenir. Il y est aussi question de « l’élimination [par la Résistance polonaise] des Ukrainiens et des juifs encore présents dans la ville » et de l’aide « désintéressée » apportée à la Pologne d’après-guerre.

« LA LÉGITIMITÉ DU POUVOIR RUSSE, QUE CE SOIT EN INTERNE OU SUR LA SCÈNE INTERNATIONALE, EST EN GRANDE PARTIE BÂTIE SUR LE RÉCIT DE LA VICTOIRE », RAPPELLE L’ANCIEN DIPLOMATE VLADIMIR FROLOV

La politisation du récit historique par le pouvoir russe est tout sauf une nouveauté. Les périodes tsaristes comme soviétiques sont lues uniquement au prisme de la grandeur nationale ou de l’opposition à l’Occident. La Grande Guerre patriotique, comme les Russes appellent la seconde guerre mondiale, fait ici figure d’étalon suprême.

Leader du « camp du bien », auquel l’Union soviétique a sacrifié 27 millions de ses citoyens, Moscou ne peut par principe avoir fauté. La période des répressions staliniennes fait depuis quelques années l’objet d’une réécriture et d’une atténuation. Une organisation comme Memorial, spécialisée dans l’étude de ce passé, est désignée comme ennemie et assommée d’amendes par les tribunaux.

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Montée des tensions

Cette nouvelle montée de tensions ne s’explique pas seulement par la mise en concurrence de deux récits visant à effacer toute lecture critique de l’histoire.

Côté russe, l’adoption par le Parlement européen, en septembre 2019, d’une résolution sur la « mémoire européenne », qui mettait sur un pied d’égalité communisme et nazisme, a incontestablement joué un rôle, quand bien même cette résolution a elle-même été motivée par la nervosité suscitée, à Varsovie et dans les Etats baltes, par le révisionnisme russe au sujet du goulag ou du massacre des officiers polonais de Katyn. A la veille d’une année de commémorations (le 75e anniversaire de la victoire doit être célébré en 2020), M. Poutine y a en tout cas vu une insulte… et un danger.

« La légitimité du pouvoir russe, que ce soit en interne ou sur la scène internationale, est en grande partie bâtie sur le récit de la victoire et les gains géopolitiques de l’après-guerre, rappelle Vladimir Frolov, ancien diplomate et analyste. Vladimir Poutine se souvient de l’erreur commise par Mikhaïl Gorbatchev lorsque celui-ci a ouvert la discussion sur les crimes de Staline et son alliance avec Adolf Hitler, contribuant à saper la légitimité soviétique dans le pays et en Europe orientale. »

Andreï Kolesnikov, du centre Carnegie, ajoute à cela une nuance : « La Pologne a l’audace de revendiquer son rôle d’acteur indépendant et sa souveraineté, tandis que selon les représentations historiques russes, elle n’est qu’un tampon entre l’Ouest et l’Est. » De façon plus pragmatique, le chroniqueur de Bloomberg Leonid Bershidsky note aussi que la Pologne constitue une cible opportune, de par sa vulnérabilité. Non seulement Varsovie entretient une relation houleuse avec Bruxelles, mais la Pologne est aussi engagée dans d’autres conflits mémoriels, sur la seconde guerre mondiale, avec Israël.

En 2018, l’opinion publique internationale avait ainsi été marquée par l’adoption d’une loi –retirée au bout de quelques mois – punissant de prison l’attribution à la Pologne d’une responsabilité dans la Shoah ou d’autres crimes de guerre.

Cet épisode, comme la présence de nombreux russophones sur le sol israélien ou encore les calculs politiques du premier ministre Benyamin Nétanyahou contribue à offrir à la position russe, pourtant très similaire à celle de la Pologne dans sa construction et ses objectifs, une certaine bienveillance de l’actuel gouvernement israélien.

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Auschwitz (en allemand : Konzentrationslager Auschwitz  « camp de concentration d'Auschwitz ») est le plus grand complexe concentrationnaire du Troisième Reich, à la fois camp de concentration et camp d'extermination. Il est situé dans la province de Silésie, à une cinquantaine de kilomètres à l'ouest de Cracovie, sur le territoire des localités d'Oświęcim (Auschwitz en allemand) et de Brzezinka (Birkenau en allemand), annexées au Reich après l'invasion de la Pologne en septembre 1939.

Le camp de concentration, dirigé par les SS, est créé le 27 avril 1940 à l'initiative de Heinrich Himmler1 ; il est complété par un camp d’extermination (dont la construction démarre à la fin de 1941) et par un second camp de concentration destiné au travail forcé (créé au printemps 1942). Ces camps sont libérés par l'Armée rouge le 27 janvier 1945.

18 janvier 2020

Russie - En réformant la Constitution, Poutine jette les bases d’un pouvoir à vie

poutine

COURRIER INTERNATIONAL (PARIS)

L’annonce par Vladimir Poutine d’un train de réformes constitutionnelles, immédiatement suivie de la démission du Premier ministre Dmitri Medvedev, est interprétée par ses opposants et de nombreux observateurs comme la mise en place d’un système institutionnel destiné à lui assurer le pouvoir à vie.

“Un coup de tonnerre dans un ciel clair.” C’est ainsi qu’un ministre russe, aussi surpris que ses compatriotes, a décrit les multiples rebondissements de la journée de mercredi. En l’espace de quelques heures, Poutine a annoncé une vaste révision constitutionnelle, accepté la démission de Medvedev et nommé un nouveau Premier ministre, Mikhaïl Michoustine – un technicien inconnu du grand public.

En proposant de redéfinir l’équilibre entre le président – aujourd’hui tout-puissant – et le Parlement, “Vladimir Poutine a dessiné une nouvelle architecture du pouvoir, sans pour autant y définir sa place”, se bornant à confirmer qu’il quitterait son poste en 2024, comme l’exige la Constitution, écrit Le Temps.

“Les commentateurs de la vie politique russe s’accordent sur le fait que Vladimir Poutine compte dans tous les cas conserver une fonction prédominante dans la verticale du pouvoir qu’il a construit et remodèle à sa guise”, poursuit le quotidien. “La fonction reste aujourd’hui dissimulée, tandis que l’identité est connue de tous.”

Un avis partagé par Mikhaïl Kassianov, un ancien Premier ministre de Poutine passé depuis dans l’opposition, cité par le site de RFE-RL. “Ce qu’il faut retenir de ce discours, c’est que Poutine n’est pas près de partir et qu’il essaie de le dissimuler avec un présumé renforcement du rôle de la Douma et du Conseil fédéral”, dit-il.

Le fait que les réformes annoncées rognent le pouvoir présidentiel semble confirmer que Poutine chercherait une façon de garder le contrôle du pays en occupant une autre fonction, selon le Washington Post.

“Bien que certains de ses opposants assurent qu’il pourrait quand même essayer de rester président, d’autres voient les annonces de mercredi comme la mise en place d’un transfert de pouvoir plus sophistiqué”, analyse le quotidien.

Multiples scénarios

Toutes les hypothèses étant sur la table, chacun y va de son scénario.

Dans une colonne d’opinion pour l’agence Bloomberg, Leonid Bershidsky identifie trois voies possibles pour Poutine : “L’une serait de devenir Premier ministre avec des pouvoirs renforcés et de rester indéfiniment. Une autre serait d’essayer de diriger le pays depuis la présidence du Parlement. La troisième serait de gouverner depuis les coulisses, comme chef du parti majoritaire au Parlement – à la manière dont Jaroslaw Kaczynski, leader du parti Droit et justice, gouverne la Pologne”.

Cette dernière option est qualifiée de “probable” par le New York Times. Le quotidien rappelle qu’elle a aussi été appliquée avec succès par Noursoultan Nazarbaev lorsqu’il était président du Kazakhstan : “II a pris la tête du parti majoritaire et adopté le nouveau titre de ‘leader du peuple’.”

Dans son analyse, le Moscow Times cite Tatiana Stanovaïa, du Carnegie Moscow Center, qui penche plutôt pour une prise de contrôle du Conseil d’État, une institution qui pourrait étendre son emprise à tous les niveaux de pouvoir, “des gouverneurs à l’administration présidentielle, en passant par les ministres et les siloviki – ces responsables liés aux forces de police”.

Selon elle, un tel poste offrirait à Poutine “une grande capacité de contrôle, tout en le libérant des problèmes quotidiens”.

The Economist considère pour sa part que la fonction de Poutine à l’avenir importe peu, la Russie n’étant pas “une vraie démocratie”. Il pourrait tout aussi bien être président de l’Association nationale de bridge – seul poste officiel de Deng Xiaoping à la fin de sa vie, alors qu’il dirigeait encore la Chine, rappelle le magazine, non sans ironie. Il déplore en revanche le silence de l’Occident face à ces manœuvres.

“Il fut un temps où les États-Unis auraient protesté contre une telle manipulation des règles. Pas sous Donald Trump. Le président américain ne cache pas son admiration pour les hommes forts”, écrit le titre britannique. “Et voir M. Poutine s’accrocher au trône ne suscitera probablement qu’un murmure de l’Union européenne, effrayée par l’essor de la Chine et dépendante du gaz russe.”

“Les autocrates du monde entier suivront avec intérêt les développements à Moscou, pour voir si M. Poutine peut leur donner des idées utiles pour prolonger leurs propres mandats, poursuit le magazine. Quant aux démocrates, leur seule consolation est que même les dirigeants à vie ne sont pas éternels.”

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