Festival de l'Imaginaire (hier à Paris)
La découverte de la pratique musicale Sinawi fait courir le risque d'un envoûtement. Y céder, c'est s'immerger dans un univers mystique et sonore unique, héritage ancien de vieilles traditions coréennes.
Le Sinawi reste intimement lié aux rites chamaniques, qu'il accompagne avec tout ce que cela suppose de rythmes entêtants et chants aux sonorités gutturales et mystérieuses. Le tout avec une grande liberté d'interprétation qui rend chaque représentation unique. "Avant chaque concert, explique Kim Young-gil, maître de la cithare ajaeung, nous répétons quelques parties qui restent fixées. Mais au final, il y a environ 60% d'improvisation". Une habitude fondée sur l'absence de rythmes propres à cette pratique musicale. " Cette musique fonctionne sur la base de cycles relativement longs, précise Kim Hae-sok, spécialiste de la cithare gayageum. Cela donne de la liberté.
L'ensemble se révèle fascinant, tant ses praticiens semblent habités par ses sonorités. Yoon Ho-se, au tambour sablier janggu, avoue même jouer "dans un état d'oubli total" qu'il assimile à un "état de purification". "Peut-être n'ai-je pas grande confiance dans ce monde-ci et que je m'évade facilement vers un autre monde ?". Un univers de divinités anciennes, qui rappellent que le chamanisme reste la religion première de la péninsule coréenne, avec sa conception de la mort associée à la renaissance, au repos et qui, finalement, paraît plus supportable, en tous les cas moins triste.
Le chamanisme est toujours pratiqué, notamment sur l'île méridionale de Jeju, qui abrite de nombreux sanctuaires, ou sur l'île de Jindo, d'où est originaire Kim Young-gil.
Même si elle lui reste intimement lié, le Sinawi s'en est quelque peu émancipé pour devenir une pratique artistique à part entière. Originaire de Séoul, la chanteuse Yu Mi-ri n'a jamais participé à des rites chamaniques mais reconnaît que, quand elle chante, elle ressent "la nature résonner en moi, chanter à travers mon corps". Habités par leur musique, les praticiens du Sinawi jouent en groupe ou seuls. (Source : l'Express)