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Jours tranquilles à Paris
1 septembre 2020

Un officier français en poste à l’OTAN accusé d’espionnage pour le compte de la Russie

masque démasqué

Le lieutenant-colonel, basé à Naples, a été arrêté en France au mois d’août

Une affaire d’espionnage digne de la « guerre froide ». Le 21 août, un lieutenant-colonel de l’armée française en poste dans l’un des commandements militaires de l’OTAN, situé à Naples, en Italie, a été mis en examen et incarcéré par la justice française, pour avoir livré des informations à une puissance étrangère. Cet officier aurait espionné pour le compte des services de renseignement militaire russe (GRU), auxquels il aurait fourni des documents confidentiels et des éléments intéressant les activités de l’OTAN et de ses membres.

La justice avait été saisie par le ministère des armées, le 22 juillet, des soupçons existant contre cet homme âgé d’une cinquantaine d’années. Les services de renseignements français ont délibérément choisi la voie judiciaire au moment où le suspect revenait, avec sa famille, en France pour les vacances d’été.

Après une courte enquête préliminaire diligentée par le parquet de Paris, une information judiciaire a été ouverte, le 29 juillet, des chefs de « trahison par intelligence avec une puissance étrangère et collecte d’informations pour les livrer à une puissance étrangère ». Selon la radio Europe 1, qui a dévoilé l’information dimanche, l’intéressé, père de cinq enfants, a été interpellé par les agents de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) alors qu’il s’apprêtait à repartir vers l’Italie. Il a, depuis, été placé en détention provisoire à la prison de la Santé à Paris.

Les poursuites judiciaires en matière d’espionnage, notamment en faveur de la Russie, sont très rares. On en compte moins d’une dizaine depuis la fin de la guerre froide, après la chute du mur de Berlin, en 1989. Généralement, le monde de l’espionnage préfère régler ses différends en secret.

Protection des sources oblige, il sera difficile de connaître l’origine de la fuite ayant permis de surprendre cet espion français. En revanche, les surveillances des services secrets italiens ne semblent avoir rien manqué des rencontres, en Italie, entre cet officier français, russophone, et un agent du GRU, en poste en Italie. La France ayant été ensuite informée des soupçons pesant sur cet homme, la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD, ex-sécurité militaire) a mené l’enquête sur « son environnement » et contribué à rassembler les charges qui l’accablent aujourd’hui. La DGSI a, enfin, pris le relais, disposant d’un département judiciaire, elle reste, aujourd’hui, en charge du dossier.

Le commandement de l’OTAN basé à Naples gère les opérations pour le sud de l’Europe mais également celles concernant l’Afrique, notamment en Libye. Ses forces sont actuellement déployées au Kosovo ou encore auprès de l’Union africaine. En qualité de membre, la France y compte un certain nombre d’officiers supérieurs.

Exploitation politique de l’affaire

Le choix de saisir la justice n’allait pas de soi mais la France semble y avoir été contrainte. Cette affaire d’espionnage survenant au cœur d’un commandement intégré et partagé, la France avait moins loisir de gérer cette trahison à l’abri des regards. D’autres pays, au sein de l’OTAN, et leurs services secrets respectifs, étaient informés des faits.

De plus, ces derniers se sont déroulés sur un territoire étranger, en Italie. Enfin, la nature des informations transmises à l’ennemi peut conditionner la réponse à y apporter. Plus elles sont ordinaires, moins il est risqué de les rendre publiques. Selon des éléments recueillis par Le Monde auprès des autorités françaises, le choix de s’en remettre à la justice participe aussi d’une volonté d’adresser « un message de fermeté à la Russie ». En judiciarisant, on dénonce ainsi l’agressivité d’un pays. Dans le cas présent, cette publicité fait écho aux récriminations du camp occidental et de l’OTAN vis-à-vis de la Russie en relation aux événements en Biélorussie et ceux en Ukraine.

Néanmoins, le traitement judiciaire du dossier ne ferme pas la porte à d’autres répercussions. Il s’agira de surveiller les éventuelles suites politiques que la France, d’autres membres de l’OTAN ou l’Alliance atlantique elle-même pourraient donner à ces faits de trahison et d’espionnage. Car, s’il s’avère que les documents ou les informations transmises par cet officier français ont constitué un grave préjudice, des mesures de rétorsions pourraient survenir, notamment sous forme d’expulsions. La tentative d’assassinat par le GRU, en mars 2018, en Angleterre, d’un ex-collègue passé à l’Ouest avait donné lieu au renvoi, dans leur pays, de 160 diplomates russes en poste dans le monde.

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