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Jours tranquilles à Paris
13 octobre 2020

Rachida Dati et Anne Hidalgo, les deux Parisiennes qui pensent déjà à 2022

dati hidalgo

Par Denis Cosnard

Rachida Dati a effectué vendredi à Reims un premier déplacement de précampagne présidentielle. Anne Hidalgo réfléchit aussi à sa possible candidature. Le chemin s’annonce ardu pour l’une comme l’autre.

Destination Reims pour Rachida Dati. Vendredi 9 octobre, la maire du 7e arrondissement de Paris a passé une journée dans la principale ville de la Marne. Son premier déplacement d’une précampagne présidentielle qui ne dit pas encore son nom. Sans surprise, il a été centré sur l’insécurité, son thème fétiche depuis des années.

Un sujet sur lequel elle insiste dans un grand entretien accordé pour l’occasion au quotidien régional L’Union. Au programme, visite du « Centre de supervision urbain » où convergent toutes les images des caméras de vidéosurveillance installées dans la commune, puis rencontre avec les associations chargées de prévenir la délinquance. Avant de partir, l’ex-garde des sceaux a retrouvé le maire Les Républicains (LR) Arnaud Robinet, les élus et militants locaux.

Plus de doute : à 54 ans, Rachida Dati est repartie en campagne. Parler aux passants, capter leur regard, montrer qu’elle s’intéresse à la vie concrète des électeurs, c’est là qu’elle est la meilleure. Fin septembre, beaucoup, dans son propre camp, sont restés dubitatifs lorsqu’elle a lâché au Times de Londres : « Je me suis battue contre les élites françaises. Maintenant, je veux être présidente. » Ce n’était pas une foucade. Les sénatoriales passées, l’ancienne ministre sarkozyste a décidé de forcer sa chance.

Avec la poignée de fidèles qui l’entoure à Paris, elle entame une série d’allers-retours en province, ponctués d’interviews, pour donner une dimension nationale à sa possible candidature. « Le travail effectué à Paris pour retourner son image reste à effectuer ailleurs », explique un membre de son équipe. Après Reims, elle devrait notamment se rendre dans les Ardennes pour parler des « fractures territoriales », ainsi que dans une ville d’Ile-de-France. Et côté financier, son micro-parti existe déjà.

Parcours croisés

Anne Hidalgo n’est pas aussi déterminée. « Elle a encore besoin de longs mois pour se forger une conviction, assure un de ses proches. Elle ne tranchera qu’après les régionales du printemps 2021. » Mais, après avoir longtemps balayé cette hypothèse, la maire de Paris n’exclut plus d’être candidate à l’Elysée en 2022, et plusieurs de ses adjoints et conseillers réfléchissent à cette éventuelle échéance.

« Je vois bien que le regard sur moi a changé, a-t-elle confié au Point mi-septembre pour justifier cette évolution. J’entends les commentateurs, je vois les réactions chaleureuses des Parisiens, celles des Français que j’ai croisés cet été. Ils aiment les responsables politiques combatifs, qui ont des cicatrices et ont relevé des beaux défis, surtout lorsqu’on est une femme. Nous ne sommes pas si nombreuses à nous être inscrites dans le paysage politique sur la durée. » Des propos que Rachida Dati aurait pu tenir, mot pour mot.

CES DEUX FILLES D’ÉTRANGERS SONT PERÇUES COMME DES PARISIENNES, ET DES BOURGEOISES. UN ATOUT LOCAL. UN POINT PLUS DÉLICAT DANS UN SCRUTIN NATIONAL

Rachida Dati, Anne Hidalgo : une fois de plus, l’histoire fait se croiser les parcours de ces deux femmes. Pendant la campagne des municipales, elles bataillaient l’une contre l’autre pour le fauteuil de maire… et tiraient d’un même mouvement sur les candidats de La République en marche (LRM). A présent, elles continuent à ferrailler dans l’hémicycle de l’Hôtel de ville. Mercredi encore, Rachida Dati a endossé son costume d’opposante en chef, et mené une longue charge sans nuance contre « l’enlaidissement de la ville » signé d’après elle Anne Hidalgo.

Les municipales, cependant, ont un peu changé la donne, pour l’une comme pour l’autre. Donnée perdante un an plus tôt, Anne Hidalgo est sortie de l’épreuve auréolée de sa victoire, et de l’union qu’elle a su maintenir entre les écologistes et toutes les composantes de la gauche, hormis La France insoumise (LFI). De son côté, Rachida Dati a perdu, mais avec les honneurs et un résultat bien meilleur que prévu. Si bien que dans l’opinion, toutes deux bénéficient d’un statut un peu similaire, celui, donc, de femmes « qui ont des cicatrices et ont relevé des beaux défis ».

De quoi être vivement applaudies, chacune dans son camp. A gauche, la maire de Paris fait partie des six personnalités les plus appréciées, avec 49 % d’opinions positives selon le sondage réalisé les 6 et 7 octobre par Elabe auprès de 1 000 Français pour Les Echos et Radio Classique. Rachida Dati recueille le même taux d’approbation chez les sympathisants de droite.

Multiples embûches

Seront-elles pour autant candidates en 2022, et peuvent-elles gagner ? Le chemin s’annonce ardu. Ces deux filles d’étrangers sont en effet perçues comme des Parisiennes, et des bourgeoises. Un atout lors d’une campagne à Paris. Un point plus délicat dans un scrutin national où il faut séduire aussi les paysans bretons, les ouvriers victimes de la désindustrialisation ou encore les commerçants des centres-villes qui dépérissent.

Une campagne présidentielle impose en outre de bâtir un programme traitant tous les grands sujets, y compris internationaux. Un défi à relever pour Rachida Dati, qui avait concentré sa campagne municipale sur la sécurité et la propreté des rues parisiennes, mais aussi pour Anne Hidalgo. « Aura-t-on le temps d’ici à 2022 ?, s’interroge un pilier de son équipe. Ce n’est pas évident, alors que la gauche est divisée sur la laïcité, la politique économique, ou encore l’équilibre à trouver entre l’écologie et le social. »

Autre difficulté, les deux éventuelles candidates souffrent de plusieurs faiblesses. Anne Hidalgo devra expliquer pourquoi elle a si longtemps juré qu’elle ne serait jamais candidate à la présidentielle. Rachida Dati, pourquoi elle a semble-t-il reçu 900 000 euros d’honoraires de la part de Carlos Ghosn entre 2010 et 2012, pour des prestations de conseil assez insaisissables. Une enquête judiciaire est en cours, et risque de se traduire par divers rebondissements au fil des mois. Une mise en examen n’a rien d’impossible. « Heureusement, cela pèse peu sur son image à droite, plaide un de ses soutiens. Ses électeurs l’acceptent telle qu’elle est, en bloc, un peu comme Nicolas Sarkozy. »

Quel espace politique ?

Pour l’une comme l’autre, surtout, reste une question-clé : disposeront-elles de l’espace politique nécessaire à une candidature victorieuse ? A ce stade, les sondages sur la future présidentielle placent Emmanuel Macron et Marine Le Pen loin devant tous les autres candidats possibles. La droite classique comme la gauche pourraient être absentes du second tour.

A 61 ANS, LA MAIRE DE PARIS NE PEUT ROMPRE AVEC SES PROMESSES DE SE CONSACRER À CETTE FONCTION MAJEURE QUE SI SES CHANCES DE SUCCÈS À LA PRÉSIDENTIELLE PARAISSENT SUBSTANTIELLES

Au sein de leurs camps respectifs, Rachida Dati comme Anne Hidalgo sont en outre loin d’être seules en piste. La première doit compter avec la concurrence de Xavier Bertrand, Valérie Pécresse, Bruno Retailleau et d’autres.

La seconde, avec les ambitions de figures comme Yannick Jadot, Eric Piolle ou Jean-Luc Mélenchon. « Mélenchon ira au bout de sa démarche, jusqu’à l’absurde, anticipe un proche d’Anne Hidalgo. Mais s’il y a une bonne candidature de gauche face à lui, il peut ne réunir que 6 % des voix. En captant le reste des voix de gauche, des écologistes et d’une partie des déçus de Macron, une candidature sociale-démocrate pourrait franchir le cap du premier tour. »

Rien d’un boulevard, néanmoins. C’est la raison pour laquelle Anne Hidalgo ne veut surtout pas se déclarer trop tôt. A 61 ans, la maire de Paris ne peut rompre avec ses promesses de se consacrer à cette fonction majeure que si ses chances de succès à la présidentielle paraissent substantielles. Rachida Dati, elle, n’est pas entravée par la même contrainte. Au pire, sa précandidature ne débouchera pas, mais la droite appréciera sa pugnacité et l’en récompensera d’une façon ou d’une autre.

Denis Cosnard

Un ex-adjoint d’Anne Hidalgo mis en examen pour viol et agressions sexuelles. L’ex-adjoint à la Mairie de Paris Pierre Aidenbaum a été mis en examen pour viol et agressions sexuelles par personne ayant autorité, a fait savoir une source judiciaire à l’Agence France-Presse vendredi 9 octobre. Le 14 septembre, il avait démissionné de son poste d’adjoint, après avoir été accusé par une proche collaboratrice. A la suite de cette annonce, la maire de Paris, Anne Hidalgo, lui a demandé de « démissionner immédiatement » de son mandat de conseiller de Paris, qualifiant les faits pour lesquels la mise en examen a été prononcée d’« extrêmement graves ». A 78 ans, Pierre Aidenbaum est une figure de la politique parisienne. Conseiller de Paris depuis trente et un ans, il a en outre présidé, de 1993 à 1999, la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra). Elu maire du 3e arrondissement dès 1995, le socialiste a conservé son fauteuil durant un quart de siècle, jusqu’en juin de cette année. Dans le cadre de la fusion de son arrondissement avec trois autres (1er, 2e et 4e), il s’est alors effacé derrière un autre socialiste, Ariel Weil, devenu maire d’un nouveau secteur appelé « Paris Centre ». Après les accusations de harcèlement sexuel de la part d’une proche collaboratrice de M. Aidenbaum, la Mairie de Paris avait annoncé en septembre avoir « immédiatement » signalé ces faits au parquet qui, dans la foulée, avait confirmé l’ouverture d’une enquête pour « agression sexuelle » confiée à la brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP) de la police judiciaire parisienne.

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