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Jours tranquilles à Paris
15 août 2020

Étel - La bénédiction de la mer, tradition ancrée à Etel

Jusqu’à son désarmement de la SNSM en 2004, le canot « Patron-Emile-Daniel » était le bateau-amiral des bénédictions ; depuis, il les accompagne en place d’honneur. Samedi, il apparaîtra rénové à neuf.

La bénédiction de la mer se tiendra à Etel samedi 15 août. Une tradition qui revêt une dimension particulière dans ce port à l’histoire maritime chargée.

Bien ancrée dans beaucoup de ports de pêche, la bénédiction de la mer revêt une dimension particulière à Etel. Si l’ancien port thonier est désormais tourné vers la plaisance, son histoire est riche (et parfois chargée, aussi), sa position reste importante avec le Crossa, qui coordonne les opérations de secours en Atlantique, sa station SNSM, une des plus anciennes, son ancien canot et son abri, tous deux classés, et la caisse de secours des marins et péris en mer. Et le pays d’Etel compte toujours de nombreux gens de mer, attachés à leur identité.

Traditionnellement, la bénédiction de la mer est doublée du souvenir des victimes du drame Bombard, le 3 octobre 1958, et de toutes les autres happées par la barre d’Etel.

Avant les campagnes de pêche

Désormais, cette bénédiction est amarrée au pardon de Notre-Dame des Flots, le 15 août. Autrefois, elle avait lieu avant la grande partance pour les campagnes de pêche, le jour de la Fête-Dieu (sul ar Sakramant). Après les vêpres, la procession s’élançait depuis l’église jusqu’au port, avec bannières, ex-votos, statue de Sainte-Anne, etc. Là, une estrade était dressée pour l’adoration du Saint-Sacrement. Suivait la bénédiction des bateaux à quai et de leurs équipages, un à un. Puis le célébrant embarquait sur le canot de sauvetage pavoisé pour la bénédiction des bateaux au mouillage.

Une édition adaptée

Cette année, le contexte sanitaire impose un déroulé adapté. « On a vu avec les personnes de la paroisse et le maire. La messe aura lieu sous la criée à 10 h 30 mais avec un nombre de participants réduit et tous les gestes barrière. Ensuite, on fera une petite procession jusqu’aux bateaux. On embarquera en nombre réduit, sept maxi, pour la bénédiction », précise le P. Syrinus, recteur. L’après-midi, la kermesse habituelle n’aura pas lieu.

Pratique

Samedi 15 août, messe : 10 h 30 ; bénédiction : vers 12 h.

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14 août 2020

Le Bégo ce week-end

le bego

14 août 2020

Auray - Paul Kuentz en concert à l’église Saint-Gildas d’Auray le 16 août

Après le confinement, les mélomanes ont besoin de culture, de grande musique ! L’Orchestre Paul Kuentz a programmé treize concerts cet été en Bretagne et Normandie. Il sera à Auray le 16 août prochain. Au programme, deux Ave Maria de Caccini et Schubert, deux concertos de Bach, pour violon et hautbois et pour violon en mi majeur, et la Cantate 51 « Jauchzet Gott in allen Landen », « Louez Dieu dans tous les pays », pour soprano et trompette. Deux surprises originales d’Haendel et Scarlatti termineront ce concert qui mettra en valeur la virtuosité de quatre solistes : Alexandra Gouton, soprano allemande, Georges Kando, trompettiste japonais, la flamboyante violoniste Eléonore Darmon, et le hautbois parfait de Réginald Lafont. À 90 ans, et avec plus de 7 000 concerts à travers le monde, cent albums enregistrés, cinq Grands prix du disque, plusieurs dizaines d’émissions télévisées, de nombreuses décorations, dont l’Orphée d’or pour l’ensemble de sa carrière, remis par Pierre Bergé et Clym, Paul Kuentz reste l’un des chefs d’orchestre les plus talentueux de sa génération.

Pratique

La réservation pour ce concert se fait à la Fnac.com, et à l’entrée du concert à partir de 16 h. Prix des places : 20 € et 16 € pour les réduits. Gratuit jusqu’à 12 ans.

13 août 2020

Plouharnel - Plongée dans l’histoire du Mur de l’Atlantique au Bégo

Avec l’office de tourisme, chaque jeudi, il est possible de faire une plongée dans l’Histoire à Plouharnel. Tour de tir et multiples bunkers du site du Bégo n’auront plus de secrets pour les visiteurs.

L’office de tourisme intercommunal propose des visites du Mur de l’Atlantique à Plouharnel, chaque jeudi. Le 6 août, des visiteurs français et des Allemands ont pu découvrir ce lieu chargé d’histoire. Les francophones ont suivi Madeleine Juberay, et les germanophones Anne Hagemann-Morissonnaud.

Le Bégo, point géographique stratégique

Après un rappel historique des événements antérieurs qui se sont également passés en ce lieu lors de la contre-révolution, les deux guides concentrent leurs explications sur le lourd dispositif d’artillerie mise en place lors de la Seconde Guerre mondiale. « Il fallait défendre Lorient et interdire l’approche de l’ennemi par la mer », explique Madeleine Juberay.

« Le Bégo apparaît rapidement comme un point géographique stratégique, pouvant accueillir une batterie de longue portée. Quatre immenses cuves destinées à recevoir des canons sont creusées. Un grand chantier à ciel ouvert démarre ».

Grâce à ces visites, la tour de tir, les multiples bunkers sont expliqués, commentés et remis dans le contexte historique.

Pratique

À 14 h 30. Tous les jeudis. 6 €, gratuit - de 12 ans. Tél. 02 97 52 32 93.

12 août 2020

Erdeven - Fête des oignons : uniquement le marché aux légumes

Cœur historique de la fête des oignons, le marché aux légumes pourra être maintenu, dans un cadre sanitaire strict, mais le reste de la fête est annulé. Archives

Les cultivateurs et maraîchers locaux ont donné leur accord à la proposition du comité des fêtes d’Erdeven de maintenir le marché aux oignons et légumes le week-end de la fête des oignons, les 12 et 13 septembre. La fête, elle, doit être annulée car, avec son défilé et les concentrations inévitables de population autour des différents événements, elle s’avère impossible à organiser en respectant les protocoles sanitaires indispensables. Samedi 8 août, plusieurs cultivateurs et maraîchers ont répondu à l’invitation du comité, et il a été acté de tenir ce marché le samedi et le dimanche toute la journée. Ils seront rejoints par un petit nombre de producteurs locaux, d’Erdeven et proximité (miel, crêpes, etc.).

Un premier schéma d’implantation autour de la salle du Grand-Large a été envisagé. Il doit être ajusté et soumis aux élus ; une rencontre doit avoir lieu ce mercredi 12 août avec le maire pour décider de la solution la plus adéquate. L’objectif est de faire respecter de manière naturelle les distances, en assurant un sens de circulation, etc. « Le port du masque sera exigé », annonce déjà Gérard Borie, président.

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12 août 2020

Le Festival de La Gacilly, miraculé du coronavirus

la gacilly 22

Article de Claire Guillot

La manifestation, qui attire 300 000 visiteurs dans ce coin du Morbihan, a décalé et allégé son édition, grâce à l’aide des habitants

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LA GACILLY (MORBIHAN) - envoyée spéciale

C’est un commerçant de La Gacilly, dans sa boutique de bijoux, qui résume le mieux l’ambiance qui règne dans le petit village breton. « On considérait le festival comme un phénomène aussi naturel et régulier que la venue de l’été, et on s’est rendu compte qu’il pouvait s’arrêter du jour au lendemain. On s’est fait super peur… et on est soulagé. » L’épidémie de Covid-19 a fait vaciller les bases du festival de photographie qui, chaque année, fait venir quelque 300 000 visiteurs dans ce petit coin du Morbihan, patrie de l’entreprise de cosmétiques Yves Rocher, et rapporte près de 7 millions d’euros de retombées économiques.

Alors que plusieurs grosses manifestations, des Rencontres d’Arles aux Vieilles Charrues, ont jeté l’éponge devant les incertitudes et l’impossibilité de faire venir les artistes, celui-ci a finalement réussi à se monter, sauvé par son économie particulière – gratuit, il ne dépend pas des recettes de billetterie – et sa disposition : les expositions sont en plein air et donc soumises à des contraintes sanitaires moins strictes.

Pour autant, l’édition 2020 a été particulièrement délicate, même si le sponsor principal, Yves Rocher, touché par la crise, a respecté ses engagements. « Les partenaires publics ont tous joué le jeu et maintenu leurs subventions, explique le président du festival, Auguste Coudray. Mais les entreprises locales qui nous sponsorisent ont énormément souffert, avec un personnel au chômage, des carnets de commandes vides… On a compté nos sous, et listé nos priorités : payer les photographes, même ceux qui ne seront pas montrés finalement, trouver les moyens matériels et humains pour produire et monter des expositions. On a supprimé tout ce qui n’était pas indispensable, les vernissages, les invitations… Et tout le monde s’est mobilisé pour que ça puisse marcher. »

Le village compte près de 80 associations, qui ont toutes répondu présent. Des anciens combattants au club de foot, fournissant des bénévoles pour gérer la circulation des visiteurs ou installer les expositions. Le propriétaire de la boutique du Chaudron magique a ainsi aidé, avec ses collègues, à tendre la toile photo de plusieurs mètres installée dans le centre-ville. D’autres commerçants assurent le nettoyage des images tous les soirs.

Thème de l’Amérique latine

Décalé d’un mois, le festival a finalement débuté le 1er juillet, dans une version allégée, avec dix-neuf expositions au lieu des vingt-cinq prévues, et sera prolongé cette année jusqu’à la fin octobre. Un circuit précis a été organisé à travers le village, afin d’éviter que les visiteurs se croisent. Depuis peu, tous doivent porter un masque, même en plein air. Mais la fréquentation est au rendez-vous. « Il y a même eu une augmentation de 40 %, se réjouit le président. Avec beaucoup de tourisme régional. On a peu de gens qui contestent les consignes, et, en général, les resquilleurs se font rappeler à l’ordre par les autres. Notre obsession, c’est de ne pas devenir un cluster. »

Plusieurs expositions ont été reportées à 2021 – celles en lien avec l’écologie et l’environnement. Celles qui restent, sur le thème de l’Amérique latine, offrent un survol assez éclectique et superficiel de ce vaste continent, entre images décoratives et photos d’actualité brute. Avec quelques pépites, comme les images historiques de l’Equatorien Emmanuel Honorato Vazquez (1893-1924) : ami des artistes et des écrivains de l’époque, il a photographié aussi bien la haute société de Cuenca, dont il était issu, que les processions religieuses ou les communautés indigènes. Il s’est aussi essayé à la publicité et à la photo d’illustration, laissant des images fortes et mystérieuses qui auraient mérité plus de contexte et d’explications.

Le photographe brésilien Sebastiao Salgado expose également, dans un grand champ, les images de sa série mythique et spectaculaire sur la mine de la Serra Pelada (1986), où l’activité grouillante et harassante des milliers d’hommes portant leur fardeau à mains nues évoque les scènes infernales peintes par Jérôme Bosch.

L’épisode Covid-19 aura forcé le festival à réfléchir à son identité : « Avec cette mobilisation de la population, qui a été géniale, on s’est dit qu’on avait grandi un peu vite, et qu’on allait s’orienter vers un modèle plus léger mais aussi plus participatif », indique le président de la manifestation. Sauvé cette année, le festival de La Gacilly n’en a de toute façon pas fini avec les incertitudes. Le groupe Yves Rocher, pilier de l’économie locale et du festival, sera en 2020 déficitaire pour la première fois depuis sa création, en 1959.

Viva Latina ! Festival photo La Gacilly, expositions gratuites dans divers lieux à ciel ouvert, à La Gacilly (Morbihan). Jusqu’au 31 octobre.

11 août 2020

Erdeven - Patrouilles équestres : les chevaux chaussés à neuf

erdeven ferage

Le ferrage des chevaux de la Garde républicaine affectés aux patrouilles équestres ponctue la saison sur le Grand-Site.

À l’anglaise et à la française, alternativement, les maréchaux du quartier Carnot de la Garde républicaine sont intervenus à Kerhillio à Erdeven, mercredi dernier, pour ferrer à neuf les six chevaux de la brigade équestre.

Chacun sa pointure !

« Avec le sable, très abrasif, les fers étaient bien usés », constataient les gardes Troude et Barrera et le brigadier-chef Lang. « On est d’abord passés à Deauville puis à Dinard, et on termine par Erdeven ; la saison pourra se terminer en toute tranquillité ! ». Les maréchaux sont intervenus avec leur forge mobile, mais les nouveaux fers avaient déjà été préforgés à Vincennes, au pied de chaque cheval : « Chacun à sa pointure, comme nous. Par rapport aux chevaux civils, on réalise des fers plus solides pour nos missions particulières, et on utilise des pointes de tungstène, par rapport à l’usure et pour assurer un meilleur crampon ». Quant au ferrage lui-même, la Garde perpétue les deux méthodes traditionnelles, à l’anglaise ou à la française, avec le cavalier qui tient sa monture pendant les opérations.

La brigade équestre patrouille tous les jours, du lever au coucher du soleil, sur l’ensemble du périmètre du Grand-Site des Dunes sauvages, entre Gâvres et Quiberon.

11 août 2020

Reportage - A Landerneau, la discrète arrière-boutique des Leclerc

Par Roxana Azimi - Le Monde

Au cœur du Finistère se dresse le manoir des Leclerc. Maintenant qu’Edouard et sa femme Hélène, les créateurs de la marque de grande distribution, ne sont plus, la propriété se destine à accueillir de prestigieuses expositions.

« Mon père a laissé quelques marques au plafond », sourit Michel-Edouard Leclerc tandis qu’il fait sauter le bouchon d’une bouteille de champagne. On a beau lever les yeux, on ne voit pas d’impacts. Dans ce manoir de La Haye, un domaine bordé de cinquante hectares de terre à Saint-Divy, petite commune d’un millier d’habitants du Finistère, il n’y a presque plus trace d’Edouard et Hélène Leclerc, les propriétaires, morts respectivement en 2012 et 2019.

Plus rien de la collection d’art liturgique qu’avait amassée le couple, pionnier de la grande distribution. Les statuaires et autres objets religieux, qui avaient envahi chaque recoin de la maison, ont été déplacés à huit kilomètres de là, à Landerneau, au couvent des Capucins, lieu d’accueil du fonds de dotation portant leur nom, qui organise chaque année d’ambitieuses expositions, comme cet été une rétrospective du dessinateur Enki Bilal.

Au manoir de La Haye, depuis la mort de la matriarche, le 11 juillet 2019, il ne reste plus rien des autres collections, des exemplaires de la revue de défense ouvrière, L’Assiette au beurre, des tableaux flamands, et presque plus aucun meuble. La bâtisse est quasiment vide. A quelques exceptions près, comme l’ensemble de théières d’Hélène, qui prend la poussière dans l’ancienne serre du jardin, ou l’imposant bureau à cylindre marqueté du salon, derrière lequel Édouard prenait la pose pour les photographes, alors qu’il préférait turbiner derrière une simple table de travail dans une petite pièce adjacente.

Possible ouverture au public

La dernière demeure du couple abritera, après travaux, les bureaux du Fonds Hélène et Edouard Leclerc, tandis que le grand parc qui l’enserre accueillera une vingtaine de sculptures pour une possible ouverture au public d’ici à trois ans. Bientôt donc, le nom qui figure au fronton de près de six cents grandes surfaces en France sera aussi inscrit sur la façade d’un manoir classé depuis 1977 au registre des monuments historiques, mais qui jusqu’à présent n’était connu que des intimes de la famille.

« VOUS VOYEZ, CHEZ NOUS, LE MOT “FAMILLE” N’EST PAS ENVAHISSANT. ON N’A PAS BESOIN DE L’INSCRIRE DANS LA PIERRE. » MICHEL-EDOUARD LECLERC

Ni Michel-Edouard, ni sa sœur Isabelle, qui a fondé la librairie L’Imagigraphe à Paris, ni son neveu Vincent Levieux, héritier de sa sœur Hélène décédée en 2018, et directeur de l’un des plus gros hypermarchés Leclerc, à Saint-Médard-en-Jalles (33), n’ont exprimé la moindre envie de prendre racine dans cette maison de famille. « Vous voyez, chez nous, le mot “famille” n’est pas envahissant. On n’a pas besoin de l’inscrire dans la pierre, justifie Michel-Edouard Leclerc. La Haye, c’est une maison-jalon dans l’histoire familiale plus qu’une maison de famille typique comme on en trouve sur l’île d’Yeu ou l’île de Ré. »

La tribu Leclerc, deuxième et troisième générations, a perdu depuis longtemps l’habitude de se réunir dans cet imposant manoir du XVIe siècle érigé au creux d’un vallon boisé. Quand bien même s’y rattachent des souvenirs déterminants, aucun n’a voulu transformer en bastion dynastique ou refuge de ses vieux jours une demeure dont chaque élément instruit la personnalité et l’épopée des Leclerc.

Acheté en 1966

Sept décennies durant, cette famille bretonne qui a révolutionné le monde du commerce et de la grande distribution s’est installée dans le quotidien des Français. Chacun connaît ou croit connaître Edouard, « l’épicier de Landerneau », défenseur des prix bas toujours en butte aux pouvoirs publics et aux petits producteurs, secondé par son épouse, Hélène, une forte femme devenue pilier de l’organisation.

L’imaginaire des clients se nourrit aussi des photos de leur maison à Landerneau, de leur cuisine transformée en 1949 en boutique où se vendent des boîtes de biscuits empilées, moins chères qu’ailleurs bien sûr, puis, le succès venant, d’un hangar installé dans le jardin et enfin du couvent des Capucins où s’installe la première enseigne Leclerc. C’est toutefois à Saint-Divy, à huit kilomètres de Landerneau, que s’est prolongé et fortifié le mythe, dans un manoir acheté par le couple en septembre 1966.

Pour y accéder, il faut passer deux grilles métalliques, s’enfoncer dans une forêt de hêtres, de chênes et de sapins, longer un premier étang, avant de traverser un verger. C’est alors qu’apparaît le corps de logis rectangulaire sur trois niveaux, isolé dans le paysage, jouxtant un plan d’eau.

Austère demeure

Classique, bourgeoise avec ses cheminées monumentales, flanquée d’un jardin à la française avec ses buis taillés au cordeau, cette demeure ne colle a priori pas à la légende des Leclerc, antibourgeois conquérants, irrespectueux des usages anciens, qui ont fichu le bazar chez les petits commerçants. On s’étonne même d’y trouver autant de sculptures représentant des lions, allégorie du pouvoir monarchique.

Pourtant cette austère demeure révèle aussi les valeurs de la famille. Ainsi de la chapelle datant de 1716 et son clocher ajouré rappelant la foi d’Edouard Leclerc, qui fut séminariste avant de troquer la soutane pour un costume d’entrepreneur. Ici, tout est aussi robuste, sans prétention ni tapage. Pas de tourelle majestueuse ni d’escalier monumental, à peine une marche pour accéder au seuil d’une maison sombre de prime abord. Quant à la cuisine, elle est plus chichement équipée que celle d’un appartement populaire des années 1970.

Lorsque Edouard et Hélène Leclerc achètent le manoir à leurs assureurs – « par hasard et pour pas grand-chose », assure leur fils –, celui-ci est dans son jus, recouvert de lierre, sans chauffage ni sanitaires. Laissée à l’abandon, la chapelle a perdu ses vitraux. Tout est à refaire dans cette maison trop grande, où les enfants ne viennent qu’une fois par trimestre. Depuis 1963, en effet, Michel, qui ne se fait pas encore appeler « Michel-Edouard », a rejoint le petit séminaire des pères du Sacré-Cœur à Viry-Châtillon. Ses sœurs Hélène et Isabelle sont au même moment en pensionnat à Brest. « C’est le lieu vers lequel on va tendre, mais sans y vivre vraiment », confie le fils aîné.

Claude Debussy et Charles Trenet

Plus qu’une maison de famille, La Haye devient celle des vacances de la fratrie, qui pêche la truite dans l’étang, gambade dans la forêt et le grand parc — que les enfants partagent avec de nombreux chiens, quelques paons et quantité de mandarins. Michel-Edouard participera aussi aux fouilles archéologiques menées par son père sur les vestiges d’un oppidum. Ils n’ont en revanche pas leur mot à dire sur le décor.

Au fil des ans, la maison se tapisse de peintures flamandes, de dessins et d’estampes de Paul Sérusier et d’Emile Schuffenecker, tous deux membres du mouvement nabi. Sculptures religieuses, morceaux de retables et autres icônes colonisent toutes les pièces. Un Christ en croix et une Vierge en pleurs étaient ainsi accrochés dans la chambre remplie de maquettes de bateaux et de marines de Michel-Edouard Leclerc, au premier étage.

L’héritier ne se souvient plus de la couleur du papier peint, n’exprime pas d’émotion en grimpant les marches de l’escalier central Louis XIII qui y conduisent. Mais il décrit des parents étonnamment décontractés : père aux fourneaux, préparant gibiers, beignets de fleurs d’acacia, crêpes et poêlées de champignons, mère poussant la chansonnette de sa voix de soprano. Chez eux, on écoute Camille Saint-Saëns et Claude Debussy, mais aussi Petula Clark et Charles Trenet. C’est à Saint-Divy que Michel-Edouard découvre les Beatles. Mais sans ses copains de Brest ni ses cousins qu’il ne fréquente pas.

Le QG de l’enseigne

La Haye n’accueille en effet nulle cousinade ni bamboches. Le patriarche Edouard Leclerc a beau être né dans une famille de quinze enfants, il est en froid avec la plupart de ses frères et sœurs. Seuls Guy, avec lequel il partage une passion pour les archives notariées, et Henri, rebaptisé Eloi après son ordination, se rendent régulièrement au manoir. Quant à ses propres parents, Edouard ne semble pas les y avoir jamais conviés.

Le manoir devient toutefois très vite le QG de l’enseigne, où les responsables des magasins Leclerc de tout le pays se rendent, comme pour une audience papale. Flattant le penchant animalier des Leclerc, ils apportent en cadeaux des poules naines, des pintades et même un âne qui font la joie des enfants. « Ils ne faisaient jamais sentir qu’aller chez eux était un privilège, confie cependant un cadre de la galaxie Leclerc. Toute la famille, enfants compris, discutait de tout avec beaucoup de liberté. » Les fidèles s’y pressent, mais aussi les rivaux, comme Gérard Mulliez, qui n’a pas encore créé Auchan mais veut tout savoir des ficelles de la grande distribution.

C’est en fait la France entière qui défile à Saint-Divy, dans un manoir devenu un parfait lieu de représentation sans ostentation : les journalistes tels que François-Henri de Virieu, alors au Monde, les intellectuels comme le philosophe André Gorz et sa femme Dorine, habitués des lieux, ou encore Emmanuel d’Astier de la Vigerie, gaulliste de gauche et fondateur du journal résistant Libération.

« J’AI TOUT APPRIS DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE À TRAVERS LA GALERIE DE PORTRAITS QUI VENAIENT ICI. ÇA VALAIT BALZAC ET ZOLA RÉUNIS. » MICHEL-EDOUARD LECLERC

Adolescent, Michel-Edouard boit les paroles des uns et des autres, découvre Alexis de Tocqueville grâce à Suzanne Berger, professeure au MIT, lit Raymond Aron sous l’amicale pression d’Astier de la Vigerie. Les étudiants de Harvard enquêtant sur la politisation du monde rural français y croisent le père Jaouen, aumônier du centre pénitentiaire de Fresnes. « C’était l’antithèse des manuels scolaires, de l’histoire planifiée, cadrée », sourit Michel-Edouard Leclerc, ajoutant : « J’ai tout appris de la société française à travers la galerie de portraits qui venaient ici. Ça valait Balzac et Zola réunis. »

Etudiant, le fils aîné d’Edouard Leclerc invitera à La Haye ses professeurs d’économie, ainsi que le philosophe Michel Serres. Quelques photos subsistent de l’époque. En 1974, Paris Match saisit ainsi le couple Leclerc façon châtelains, selon les codes iconographiques de l’époque : lui assis devant le manoir, elle en bonne épouse, debout les mains sur le dossier de la chaise. « Ils se sont fait piéger », lâche Michel-Edouard, toujours furieux, quarante ans après, de cette image si peu en phase avec la réalité d’un couple qui faisait jeu égal, ni avec la mythologie familiale.

Une mythologie avec laquelle les enfants ont pris leurs distances, géographiques du moins. À 27 ans, Michel-Edouard se marie et s’installe en Dordogne. Ses sœurs s’établissent à Paris et à Bordeaux. « On porte le nom d’une famille qu’on défend, mais on est tous autonomes », glisse Michel-Edouard, qui incarne aujourd’hui le visage et la voix de l’enseigne Leclerc. Les séjours à Saint-Divy s’espacent et se raccourcissent. Pour Michel-Edouard, La Haye devient un camp de base pour des passages éclair, avant de lever les voiles pour une régate en rade de Brest. « Les trajets sont longs, et l’été, mes enfants voulaient la mer, les voyages lointains ou les copains », s’excuse-t-il.

Des coups de colère légendaires

Les petits-enfants ne s’y rendent qu’à l’occasion de mariages ou de baptêmes, célébrés dans la chapelle attenante, à peine une dizaine en trente ans. Le peintre Gérard Fromanger qui, depuis 2012, date à laquelle il a exposé au couvent des Capucins, a rendu visite à plusieurs reprises à Hélène Leclerc, se souvient de sa « totale dévotion à ce lieu qu’elle bichonnait », mais pas « d’une vitalité familiale » dans la maison.

Les enfants Leclerc ont leurs propres vies et envies. Lorsque Michel-Edouard Leclerc décide d’avoir sa maison à lui, en Bretagne, le voileux choisit le large, tout au sud du Finistère, à Tregunc, entre Concarneau et Pont-Aven. Les vacances qu’il s’octroie à l’étranger, dûment documentées sur le compte Instagram de sa compagne, sont plus luxueuses que le cadre de vie ascétique de son adolescence. « Mes parents n’étaient pas du tout jouisseurs », admet-il. « Chrétienne coupable et rigoriste dans la méthode », comme le rappelle son fils, Hélène s’est imposé une ligne de conduite et de vie jusqu’à ses 91 ans.

Quant au père, « sous ses dehors plus libéraux, il avait des pudeurs qui l’empêchaient d’extérioriser les choses ». Sauf lors de ses coups de colère légendaires. Comme celle qu’il pique la veille de Noël, en 1966, en constatant la disparition d’une croix-calvaire de granit en bordure de sa demeure. Après enquête, Edouard Leclerc découvre que la mairesse l’a fait transférer au beau milieu du cimetière de Saint-Divy. Edouard Leclerc crie au voleur, ameute l’administration. Prenant la tête d’un commando, il récupère la croix, avant de devoir finalement la restituer à la commune. Michel-Edouard est alors au petit séminaire, mais sa mère lui adresse les coupures de presse sur cette querelle façon Clochemerle.

En revanche, il est déjà adulte lorsque le paternel l’envoie décoller les tracts que le Cidunati, un syndicat de petits commerçants, a placardés en ville dans les années 1970, accusant Edouard de collaboration. Il est notamment soupçonné d’avoir dénoncé des patriotes à la Kommandantur, dont un exécuté par l’occupant nazi en 1944. Le fondateur des supermarchés Leclerc, qui a en effet été incarcéré à la Libération, poursuivra le syndicat en diffamation. L’affaire laisse une ombre au tableau familial.

« HÉLÈNE LECLERC S’ÉTAIT INVESTIE DANS CHAQUE MÈTRE CARRÉ, CHAQUE TOPIAIRE DE BUIS, AVAIT IMAGINÉ LE PARC COMME UN PATCHWORK DE MOMENTS. » LAURENT LE BON, DIRECTEUR DU MUSÉE PICASSO ET AMATEUR DE JARDINS

« Je n’ai pas de passé à trahir, indique aujourd’hui le fils aîné, mais je ne me sens pas dans une filiation obligée. » Aucune obligation, surtout pas celle de se retirer dans une bâtisse où en plein milieu d’un repas, voilà quinze ans, il a compris que son père avait la maladie d’Alzheimer. Depuis longtemps déjà se pose la question du destin de La Haye, où aucun descendant ne veut vivre sans pour autant se résoudre à s’en séparer.

La demeure est trop petite pour y accueillir une auberge ou des chambres d’hôtes. Elle n’a pas l’aura des maisons d’écrivains. Mais elle jouit d’un beau parc et d’une forêt amoureusement redessinés par Hélène Leclerc. « Elle s’était investie dans chaque mètre carré, chaque topiaire de buis, avait imaginé le parc comme un patchwork de moments », se rappelle Laurent Le Bon, patron du Musée Picasso à Paris et lui-même amateur de jardins.

L’idée du parc de sculptures ouvert au public émerge chez Michel-Edouard Leclerc après une visite de la Fondation Henry Moore, dans le Hertfordshire, en Grande-Bretagne. En Bretagne, les beaux jardins sont nombreux. Et la statuaire appréciée. Pas question toutefois de faire de La Haye un Disneyland celtico-religieux comme à la Vallée des Saints, à Carnoët. Plutôt un écrin pour accueillir des œuvres contemporaines prêtées par des collectionneurs privés.

Réunis dans une SCI, les héritiers Leclerc attendent désormais le feu vert administratif pour requalifier cette parcelle agricole en site apte à recevoir du public. Manière de prolonger, dans ce deuxième volet du Fonds Edouard et Hélène Leclerc, l’ambition populaire de ses fondateurs.

11 août 2020

Etel - voitures de collection

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Étel - Les belles d’hier et avant-hier réjouissent les amateurs

Le rassemblement de voitures anciennes et d’exception à l’invitation de l’association ételloise Karr-Breizh a fait le plein de collectionneurs et d’amateurs à Etel. La partie du parking réservée à l’exposition s’est même avéré trop exiguë ! À la quantité s’est ajoutée la diversité et la qualité, avec des Alpine : de la rare A110 cabriolet à la A310 en passant par la Berlinette, des impressionnantes Bentley, une Corvette jaune, des Mustang de toutes les couleurs et générations, les cabriolets anglais Morgan, MG, etc. Les belles américaines aux capots interminables, une vénérable Simca 5 de 1938, comme neuve malgré ses 82 ans, un cabriolet Burton sur une base de 2CV ainsi que de « vraies » deudeuches, mais aussi des Estafette, DS, CX, Cox, une LN, une Panhard, une Super 5 Turbo, 204, de magnifiques Mercedes cabriolets...

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10 août 2020

À Rennes, le parlement de Bretagne s’illumine mais reste muet

Comme chaque été, le parlement de Bretagne à Rennes s’illumine tous les soirs avec des projections qui viennent animer la façade de l’édifice. Crise sanitaire oblige, l’événement qui attire régulièrement la foule, a été écourté cette année. Le traditionnel spectacle son et lumière, d’une vingtaine de minutes, a été remplacé par une simple projection lumineuse, d’environ cinq minutes, qui garde malgré tout sa magie. « Lumières sur le parlement », une mise en lumière sans son, ne raconte pas à proprement parler une histoire, comme d’habitude, mais dessine une évocation de la ville à travers plusieurs scènes de spectacles passés toujours aussi poétiques. « Lumières sur le parlement », spectacle gratuit de 5 minutes diffusé en boucle pendant une heure de 23 h à minuit, jusqu’au 30 août 2020.

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