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Jours tranquilles à Paris
2 octobre 2019

En Russie, « Poutine rêve d’une URSS 2.0 », selon le cinéaste Oleg Sentsov, libéré après quatre ans de prison

Par Claire Gatinois, Strasbourg, envoyée spéciale

L’Ukrainien était à Strasbourg, mardi, pour les célébrations des 70 ans du Conseil de l’Europe, qui voient le grand retour de Moscou au sein de l’organisation. Pour lui, « rien ne bougera tant que Poutine sera au pouvoir ».

Malgré ses quatre années et demie passées dans le camp pénitencier de la région arctique, en Russie – un centre de détention qui a, dit-il, toutes les allures d’un « Goulag moderne » – Oleg Sentsov n’a perdu ni la rage de combattre ni la détermination de sauver ses compagnons.

« Je n’ai pas peur. Je me battrai encore et je me bats déjà pour eux », affirme-t-il nous tendant la missive adressée quelques heures plus tôt au président français Emmanuel Macron pour réclamer la libération de 86 citoyens ukrainiens, emprisonnés en Russie « pour des raisons politiques » ainsi que celle de 227 otages retenus dans les territoires occupés du Donbass, dans l’est de l’Ukraine.

Ce lundi 1er octobre, le cinéaste ukrainien de 43 ans est à Strasbourg, où se déroulent en présence du chef de l’Etat français les célébrations des 70 ans du Conseil de l’Europe. Après cinq ans d’absence, la fédération de Russie, bannie depuis l’annexion de la Crimée en 2014, a fait son retour dans cette instance chargée de défendre les droits de l’homme, la démocratie et l’Etat de droit dans une Europe au sens large (48 pays en sont membres).

Salué par Paris, ce retour russe sans contreparties a provoqué l’ire des pays baltes, de l’Ukraine et de la Géorgie. Ulcérés, ils ont décidé de boycotter la session d’automne ainsi que les cérémonies, refusant d’entendre Emmanuel Macron assurer, mardi, que ce retour « n’était pas un geste de complaisance mais d’exigence », visant à « offrir aux citoyens russes la protection à laquelle ils aspirent ». « Les doutes et les critiques sont audibles, légitimes. Mais que se serait-il passé si nous n’avions rien fait ? N’oublions jamais tout ce que l’entrée de la Russie dans notre organisation a pu apporter de manière tangible, concrète, à tous les citoyens russes », a insisté le président français.

« Un dragon ne se transforme jamais en agneau »

« Macron ne peut pas oublier que la Russie a annexé la Crimée et continue d’entretenir un conflit dans le Donbass. Nous ne fermerons pas les yeux », lui répond Lisa Yasko, représentante de la délégation ukrainienne. « La loi russe permet de nier les décisions de la Cour européenne. Le Conseil de l’Europe finira totalement décrédibilisé. Cette approche de la Russie est pire qu’un crime, c’est une faute », abonde, Giorgi Kandelaki, parlementaire géorgien, citant Talleyrand.

Oleg Sentsov, lui, est moins incisif mais tout aussi dubitatif. « Je crois en Macron, sinon je ne l’aurais pas rencontré », assure-t-il. Mais l’Ukrainien n’imagine pas que l’audacieuse stratégie de réchauffement diplomatique de la France avec la Russie parvienne à faire bouger les lignes. « Poutine ne peut pas être attendri. Un dragon ne se transforme jamais en agneau », résume-t-il. « Macron n’est pas naïf, il a un objectif pour la France, il pense d’abord à ses propres intérêts », pense-t-il.

Libéré depuis le 7 septembre dans le cadre de l’échange de 70 prisonniers entre l’Ukraine et la Russie, l’artiste et activiste sait qu’il doit, en partie, sa liberté aux dirigeants européens et notamment au président français qui, à plusieurs reprises, comme lors de son déplacement à Saint-Pétersbourg en mai 2018, a évoqué le sort du cinéaste avec Vladimir Poutine. Mais M. Sentsov n’est pas dupe. « Poutine se fiche des gens. Il avait trop de pression, on ne cessait de lui parler de moi. Il fallait qu’il fasse quelque chose pour évacuer le sujet », dit-il.

Le réalisateur originaire de Crimée a été arrêté en 2014 après avoir rejoint les rangs des activistes de la révolution de Maïdan avec lesquels il partage, dit-il, la soif de « démocratie » et « les valeurs européennes ». A l’issue d’un procès qualifié par Amnesty International de « parodie de justice » rappelant « l’ère stalinienne », il a été condamné, le 25 août 2015, à vingt ans de colonie pénitentiaire pour « participation » à une entreprise « terroriste ». Oleg Sentsov aurait envoyé, avec son coaccusé, Oleksandr Koltchenko, également libéré le 7 septembre, deux cocktails Molotov contre les locaux d’une organisation criméenne prorusse.

Macron : Sentsov est « un grand Européen »

Pendant ces presque cinq ans de détention, l’homme assure n’avoir jamais perdu espoir. Et de la grève de la faim de 145 jours qui lui fit friser la mort en 2018, le quadragénaire semble aujourd’hui indemne. Il n’a aucune séquelle, selon les médecins, en dépit de la privation de nourriture, ou de la torture – « des coups, des simulations d’étranglement, des menaces de viol et de mort », énumère-t-il, infligée par des agents du FSB, les services russes de sécurité peu avant son incarcération.

Grand gaillard aux yeux clairs, rien dans son physique robuste, ne laisse, de fait, penser que ce père de deux enfants a vécu l’enfer. « Parfois la torture psychologique fait plus de mal que les coups », lâche-t-il toutefois.

Désormais libre, Oleg Sentsov, auteur d’un premier long-métrage, Gamer, contant l’errance d’un adolescent muré dans la passion des jeux vidéo, pourrait reprendre ses activités artistiques, mais n’entend pas y mêler de contenu politique. « L’art et l’activisme sont deux choses distinctes », estime-t-il.

Pour l’heure, la priorité semble à l’activisme afin d’obtenir la libération de ses camarades. « J’ai l’obligation morale de me battre pour eux comme on s’est battu pour moi », dit-il. « Oleg Sentsov est de ceux qui pensent comme jadis Bernanos que la liberté des autres nous est aussi essentielle que la nôtre. De ceux qui pensent qu’il ne sert à rien d’avoir des idéaux si l’on n’est pas capable de se battre pour eux (…). Cela fait de lui un grand Européen », a souligné Emmanuel Macron, mardi.

Oleg Sentsov se bat pour ses concitoyens, oui, mais semble n’avoir guère d’illusions. Lui qui avait obtenu le soutien de grands noms du cinéma comme Pedro Almodovar, Jacques Audiard, Wim Wenders ou Ken Loach, sait que « les prisonniers actuels sont moins célèbres » et gêneront sans doute moins les relations diplomatiques de Vladimir Poutine.

« Personne n’est en mesure de contester Poutine »

D’une façon plus générale, l’Ukrainien doute fort que son pays obtienne à court terme la moindre avancée face à la Russie. Emmanuel Macron évoque la tenue « dans les semaines à venir », d’un sommet dit en format Normandie (Russie, Ukraine, France et Allemagne) pour aboutir à la paix dans le Donbass ? Oleg Sentsov assure que « rien ne bougera tant que Poutine sera au pouvoir ».

« Je suis né en URSS. Petit, je pensais que mon pays était entouré d’ennemis comme tout le monde en Union soviétique. Et puis j’ai grandi et j’ai compris qu’ailleurs il y avait d’autres pays, des démocraties où l’on pouvait contester, critiquer le pouvoir et l’Etat. L’URSS s’est effondrée mais Poutine est resté un Soviétique. Il rêve de construire une URSS 2.0 », assure-t-il.

« Quand on parle de la Russie aujourd’hui, on parle d’un seul homme : Poutine, qu’aucune institution, qu’aucun pouvoir législatif ou judiciaire, n’est en mesure de contester, ajoute-t-il. Poutine ne voit que des adversaires autour de lui et entend conserver son influence dans les pays voisins. En Ukraine mais aussi en Georgie et ailleurs. Si demain une révolution surgit en Biélorussie, et je le souhaite, Poutine interviendra par les armes pour garder le pays dans sa sphère. Les pays baltes, s’ils n’étaient pas membres de l’Union européenne, connaîtraient le même sort que la Crimée. »

A l’en croire, ni Emmanuel Macron, ni le nouveau président ukrainien, Volodymyr Zelensky, ne sauront amadouer le locataire du Kremlin. M. Sentsov semble même se méfier de l’empressement de Kiev à obtenir des résultats dans le dossier du Donbass, redoutant que trop de concessions ne soient faites à Moscou pour obtenir la paix.

« Je ne fais confiance à personne. Seulement à moi », lâche-t-il. Oleg Sentsov n’a, dit-il, « aucune ambition politique ».

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1 octobre 2019

Salvador Dali et Amanda Lear

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Topless

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1 octobre 2019

Brigitte Bardot = 85 ans le 28 septembre

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Brigitte Bardot (3)

Brigitte Bardot (4)

Brigitte Bardot (5)

Brigitte Bardot (également connue sous les initiales de « BB »), née le 28 septembre 1934 à Paris, est une actrice de cinéma, mannequin, chanteuse et militante de la cause animale française.

Figure féminine des années 1950 et 1960, elle est une star mondiale, l'égérie et la muse de grands artistes de l'époque. Emblème de l'émancipation des femmes et de la liberté sexuelle de cette époque, elle incarne des rôles de femme-enfant et de femme fatale.

Elle tourne avec plusieurs grands réalisateurs, interprétant des personnages à l'élégante légèreté et à la sensualité photogénique. Elle devient rapidement un sex-symbol et acquiert une renommée internationale. Avec à son actif 45 films et plus de 70 chansons en près de 21 ans de carrière, Brigitte Bardot est une des artistes françaises les plus célèbres au monde.

En 1973, elle met un terme à sa carrière d'actrice pour se consacrer à la défense des droits des animaux, notamment avec la création de la fondation Brigitte-Bardot. À partir des années 1990, elle suscite le débat en raison de prises de position hostiles à la montée de l'islam en France et aux égorgements rituels d'animaux sans étourdissement préalable.

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30 septembre 2019

L'ÉDITO de Henri Vernet - La confrérie des «ex» - Le Parisien

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À quoi songeaient-ils sous la nef de Saint-Sulpice, ces trois anciens présidents de la République, en contemplant le cercueil de leur pair, Jacques Chirac ? Au-delà du recueillement de circonstances, les « ex » n’auront-ils pas, dans le secret de leur âme, replongé, le temps de l’homélie monocorde de Mgr Aupetit, dans leur longue histoire intime avec le défunt chef de l’Etat ? François Hollande, qui avait avec Chirac la Corrèze en partage, lui aura peut-être adressé un ultime merci pour tout ce qu’il a fait pour la gauche : en aidant Mitterrand à battre Giscard, en 1981, puis en appelant à voter Hollande contre Sarkozy, en 2012, sans oublier la dissolution qui mena Jospin à Matignon en 1997. Nicolas Sarkozy, qu’un lien quasi filial unit jadis à Chirac et qui n’aurait sans doute jamais décroché le Graal élyséen s’il n’avait pas tué le père, a-t-il éprouvé, en ce moment où se mêlaient - selon la volonté de l’Elysée - spiritualité et République, la vanité des conquêtes politiques ? Mais c’est sous le crâne de Valéry Giscard d’Estaing, embringué depuis toujours avec Chirac dans une guerre fratricide sans répit, que la tempête devait être la plus forte. À moins que VGE, qui fut le seul politique, ce lundi à Saint-Sulpice, à communier, ait cette fois, devant le corps de son frère ennemi, jeté pour de bon la rancune à la rivière.

30 septembre 2019

Anna Johansson

anna471

30 septembre 2019

Claude Martin : « Jacques Chirac a été, en politique étrangère, un président gaulliste, sans doute le dernier »

chirac president

Par Claude Martin, ancien diplomate

Souveraineté des Etats, refus des affrontements de bloc à bloc, construction d’une Europe forte et solidaire… telles furent les grandes lignes de l’action de l’ancien chef de l’Etat qui contribua au rayonnement de la France, estime l’ex-diplomate dans une tribune au « Monde ».

Sur la scène internationale, Jacques Chirac n’était pas seulement connu, apprécié, admiré. Il était aimé. Et il faisait aimer la France. Peu de Français mesurent à quel point ses prises de position, ses déplacements, ses initiatives, ont contribué au rayonnement de notre pays. A quel point, pendant douze années, la France a eu une grande politique étrangère.

Certes, on a gardé en mémoire le refus courageux de faire participer notre pays à l’aventure irakienne. Mais la plupart des choix et des hauts faits d’une diplomatie qui n’a cessé d’être, tout au long de ces douze ans, inspirée, déterminée, et brillante, restent dans l’ombre ou sont traités avec une distance et une rapidité qui n’aident pas à les apprécier à leur juste valeur.

Jacques Chirac a été, en politique étrangère, un président gaulliste, sans doute le dernier. Inspiré par les principes du fondateur de la Ve République, il a suivi sur la scène internationale la ligne qui a fait, pendant un demi-siècle, la force du message français : respect de la souveraineté des Etats, de l’identité des nations, de la dignité des peuples. Refus des affrontements de bloc à bloc. Construction d’une Europe forte et solidaire, faisant entendre une voix qui soit vraiment la sienne, dans un monde multipolaire et équilibré.

Dialogue avec la Chine et la Russie

Nulle part, mieux qu’en Chine, où j’ai eu l’occasion de le voir à l’œuvre, Jacques Chirac n’a illustré son attachement à cette sage politique. Il a su défendre à Pékin, avec force mais sans tapage, les valeurs de la France, dit ce qu’il fallait dire, mais su tendre la main.

Qui se souvient qu’il avait reçu, à l’Hôtel de Ville, le dalaï-lama, pour s’entretenir avec lui, de l’avenir de la culture tibétaine ? L’ambassadeur de Pékin était venu lui reprocher une « grave erreur » qui pourrait « compromettre sa carrière politique ». Il lui avait rétorqué : « Laissez-moi apprécier moi-même, Monsieur l’Ambassadeur, la façon dont je conduis ma carrière politique, et permettez-moi de m’informer comme je l’entends de l’état d’esprit des Tibétains, dont je ne conteste nullement l’appartenance à votre pays. »

Chirac avait, dans le dialogue avec la Chine, une longueur d’avance. Dès 1975, Il avait noué avec celui qui en deviendrait le nouveau timonier, Deng Xiaoping, une relation personnelle forte qui permit à la France de prendre toute sa place dans le mouvement de réformes de l’empire du Milieu.

Après la tragédie de Tiananmen, en 1989, Jacques Chirac lutta pour que ce lien privilégié ne fût pas rompu. Il avait compris que les sanctions renforceraient le pouvoir et le conduirait à riposter par une attitude de défi à l’égard de l’Occident. « La Chine, disait-il, sera un jour une grande démocratie, mais elle le sera à sa façon, par son propre combat, et non en se laissant persuader par nos discours où perce trop souvent l’arrogance ou le mépris. »

IL A TOUJOURS ESTIMÉ QUE LA RUSSIE AVAIT TOUTE SA PLACE DANS LA MAISON EUROPÉENNE
Gaulliste, Jacques Chirac l’était tout autant à l’égard de la Russie. Il a toujours estimé que celle-ci avait toute sa place dans la maison européenne, et qu’elle finirait par rejoindre le cercle de famille. En attendant nous devions, pensait-il, offrir à Moscou un partenariat étroit, et surtout éviter, au moment où les anciens pays du bloc soviétique allaient rejoindre l’Europe, de reconstruire un mur qui continuerait à couper, plus à l’est, le continent européen.

Il s’est employé parallèlement à renforcer nos liens avec elle, et n’a pas ménagé ses efforts pour obtenir qu’elle soit reconnue dans le concert des grandes nations. C’est à son initiative qu’à Denver (Colorado), la Russie fut admise enfin au G7, devenu G8. Elle en sera chassée quelques années plus tard, pour mauvaise conduite. A nouveau cette politique des sanctions inefficace, la seule que l’Europe sache apparemment pratiquer à l’égard d’un pays qui a dérivé sans doute mais par notre faute. Parce que nous l’avons isolé, exclu du continent européen, et finalement poussé à renouer avec Pékin.

Profondément européen

C’est à l’Europe, à sa conception, à son organisation, à son avenir, que tout cela nous ramène. A rebours de certains jugements portés ces jours-ci sur son action, je suis convaincu que Jacques Chirac était profondément européen.

Mais il voulait une Europe solidaire, cohérente, agissante, à l’image de celle qu’il avait pratiquée en défendant la PAC [politique agricole commune]. Il avait approuvé sans enthousiasme le traité de 1992, convaincu que tout le système institutionnel européen était à revoir, et que l’élargissement de l’UE à dix nouveaux membres imposait sa réforme, profonde et urgente.

JACQUES CHIRAC A DÉFENDU LE PROJET « CONSTITUTION EUROPÉENNE » DU BOUT DES LÈVRES. CE N’ÉTAIT PAS SON ŒUVRE
A la direction des services européens du Quai d’Orsay, j’ai, sous sa direction et celle du premier ministre Alain Juppé, conduit une réflexion qui allait dans le sens d’une vraie refonte du système européen, avec la création d’un mécanisme de « pilotage » de l’UE par un petit groupe de pays décidés à s’unir pour permettre à l’Europe d’avancer. Ces réflexions rejoignaient celles formulées en Allemagne. Elles n’ont pas abouti, par une conjonction des résistances des pays et des institutions.

Quelques mois plus tard, le projet de « Constitution européenne », qui aurait permis de rebondir après cet échec, l’a plutôt aggravé, rendant la mécanique plus complexe, moins capable d’agir, alors que l’UE allait s’alourdir, avec l’entrée de douze nouveaux membres. Jacques Chirac a défendu le projet du bout des lèvres. Ce n’était pas son œuvre. Il a finalement, et à juste titre, laissé le peuple français décider.

Un nouveau « couple » franco-allemand

En réalité, il conduisait au même moment une autre politique européenne adaptée aux défis du moment. Il avait reconstitué avec Gerhard Schröder un nouveau « couple » franco-allemand, aussi fort et solide que celui formé en leur temps par Valéry Giscard d’Estaing et Helmut Schmidt, puis Helmut Kohl et François Mitterrand.

Les deux partenaires avaient constaté leur accord sur de nombreux sujets : le refus de la guerre d’Irak, la nécessité de réformer le pacte budgétaire, l’urgence d’une politique industrielle commune dans le domaine naval, aéronautique, nucléaire, chimique, l’intérêt de parler ensemble à la Russie, à l’Inde, au Japon, à la Chine.

Les premiers ministres du Royaume-Uni, d’Italie, d’Espagne demandaient à les rejoindre. Le « directoire » dont le général de Gaulle avait souhaité l’émergence pour piloter l’Europe était, peut-être, sur le point de naître. Mais Gerhard Schröder perdit les élections, et Angela Merkel lui succéda, ramenant l’Allemagne sur des voies plus orthodoxes. Jacques Chirac quitta le pouvoir. Et Nicolas Sarkozy fit approuver par la voie parlementaire le traité constitutionnel rejeté par les Français. L’Europe retomba dans ses ornières.

LE DIALOGUE AVEC LA RUSSIE EST DEVENU EMPREINT DE MÉFIANCE, LE PARTENARIAT STRATÉGIQUE AVEC LA CHINE BAT DE L’AILE
Que reste-t-il de cette politique étrangère, volontariste et réaliste à la fois, que Jacques Chirac s’est efforcé de mener, à l’égard de la Chine, de la Russie, de l’Allemagne, de l’Europe ?

Peu de choses, en vérité. Au cours de ces douze dernières années, la France s’est éloignée des grands principes de la démarche gaulliste. Elle a rejoint les structures intégrées de l’OTAN. Elle s’est engagée dans des opérations militaires contre des Etats souverains, sur des bases juridiques très douteuses. Elle s’est laissée entraîner en Afrique dans des interventions prolongées, sans issue visible. Elle prend en Europe des initiatives brillantes, mais souffre de ne pas trouver de vrai soutien. La relation avec l’Allemagne est devenue fragile, le dialogue avec la Russie empreint de méfiance, le partenariat stratégique avec la Chine bat de l’aile.

La France a certes continué à prendre, depuis douze ans, de belles initiatives sur la scène internationale. Hier sur le climat. Aujourd’hui sur l’Iran. Mais sur les grands dossiers, elle a perdu une part de son influence. Une grande diplomatie, c’est un pays fort, une vision claire, et à long terme, un homme enfin, écouté et respecté, pour la mettre en œuvre. Jacques Chirac a incarné tout cela. C’est la raison pour laquelle il fut estimé et respecté. C’est la raison pour laquelle il sera regretté.

Claude Martin a été ambassadeur en Chine (1990-1993), puis en Allemagne (1999-2007) Ancien directeur général des Affaires européennes au Quai d’Orsay (1994 à 1999), il est l’auteur de « La Diplomatie n’est pas un dîner de gala » (Editions de l’Aube, 2018).

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