Ukraine : la contestation se radicalise
C’était le premier Cocktail Molotov de l’année. Alors que la désormais traditionnelle« Marche de la Dignité » avait rassemblé environ 200 000 protestataires antigouvernementaux dans le centre de Kiev dans une atmosphère paisible, la mobilisation a pris une tournure toute différente en début de soirée.« Nous avons trop attendu », a hurlé un jeune manifestant, le visage cagoulé. « Les leaders de l’opposition n’arrivent ni à réaliser nos objectifs, ni à nous protéger, il faut changer nos moyens d’actions ! » , a-t-il lancé avant de continuer son avancée vers le barrage de police de la rue Hrushevshkoho, menant au cabinet des ministres. Sur place, jets de pierre, gaz lacrymogènes, pétards, affrontements au poing ont fait rage pendant des heures. Les photos d’un bus de police en feu ont fait le tour des réseaux sociaux, comme pour marquer le tournant radical pris par l’EuroMaidan. Après neuf semaines d’une mobilisation inédite en Ukraine, la frustration est palpable. Le Mouvement de l’EuroMaidan, loin d’obtenir la destitution du président Victor Ianoukovitch ou même un traitement judiciaire équitable, semblait s’essouffler, et désintéresser les Ukrainiens. Les leaders de l’opposition, dont le boxeur Vitali Klitschko, n’étaient pas parvenus à stopper le gouvernement d’adopter une série de lois liberticides, le 16 janvier.« En recourant à de tels extrêmes et en créant ouvertement un État policier, ce régime n’a plus aucune légitimité. Et la logique pacifiste de l’EuroMaidan va être difficile à tenir », estime la chanteuse et militante Kasha Saltsova. Les leaders de l’opposition se sont désolidarisés des violences, et appellent au calme. Mais, face à leurs insuffisances, il semblerait bien que l’EuroMaidan a pris un virage radical ce dimanche. Article de Sébastien GOBERT.