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Jours tranquilles à Paris
28 mai 2019

« Êtes-vous sûr(e) de l'exactitude de votre savoir ? » par KaoRi, ancienne muse d’ARAKI

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Le nom de KaoRI ne vous dit peut-être rien mais son visage est connu de nombreux amateurs de photographie puisqu’elle était une des muses d’ARAKI entre 2001 et 2016. En avril 2018, elle dévoilait sur son blog avoir été victime de mauvais traitements de la part du photographe. Elle nous a autorisé à traduire son texte et à le publier sur Japan FM.  

« Il y a quelques temps, les gens parlaient sur les réseaux sociaux de l’exposition ARAKI au Museum of Sex de New York. J’avais beaucoup de choses à dire, mais il était important pour moi de prendre mon temps pour exprimer quelque chose de si important et j’ai donc raté le bon moment. Ça a été beaucoup plus difficile que je ne l’avais imaginé de me replonger dans un passé que j’avais laissé derrière moi et j’ai décidé d’affronter la vérité. Je ne voulais pas tout renier seulement à cause de ma colère, ni crier au monde que toute ma vie avait été gâchée à cause de lui. Je voulais connaître nos sentiments respectifs, nous comprendre et finir en bons termes. Finalement, j’ai compris que nous resterions toujours dans l’incompréhension mais je pense pouvoir dire que je suis en paix avec moi-même.

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A une époque où des artistes comme Mario TESTINO (j’en parlerai une autre fois), Terry RICHARDSON, KIM Ki-duk, Lars VON TRIER, Woody ALLEN et TARANTINO sont accusés, des journalistes étrangers se sont vraiment intéressés à cette exposition d’ARAKI ainsi qu’à la relation entre photographes et modèles. Certains d’entre eux se sont souciés de moi en se doutant que je ne pourrais justement pas en parler dans la crainte que je ne sois dénigrée par la société japonaise comme Shiori-san. J’ai également trouvé des articles me décrivant comme « sa partenaire actuelle et sa muse. ». C'était pénible de vivre dans une telle situation d'incertitude et confusion, c'est pourquoi malgré ma grande frayeur, j'ai décidé de l’écrire avec mes propres mots. Néanmoins, je présente mes excuses aux passionnés  de photographies si cela vous déçoit. Que vous croyiez en mon histoire ou non, sans parler du mouvement Me Too, si mon récit peut vous servir à regarder son art avec une autre perspective, je m’en contenterais. C’est ainsi que je vois mon rôle. Cela va être un peu long. Cette histoire est celle d’une période de ma vie passée auprès d’un artiste qui recevait chaque jour des visites de célébrités internationales qui lui disaient « Tu es mon héros ! ».

J’ai été modèle pour ARAKI de 2001 à 2016. Durant tout ce temps, notre relation n’était que celle d’un photographe et d’un modèle ; nous n’avons jamais été amants. Je ne suis jamais allée chez lui et je n’ai jamais tenté de détruire sa vie privée. La photo ci-dessus (ndla : celle qui illustre cet article) est celle où j’ai été photographiée pour la première fois. Je n’étais pas nue – j’imagine qu’il se sentait un devoir de considération pour ma première séance. Je suivais mon rêve de devenir danseuse et j’ai même étudié à l’étranger mais j’ai réalisé que je n’étais pas faite pour faire partie d’une compagnie de danse.  J’ai fait des allers-retours entre Tôkyô et Paris.

Ceci est une photo de moi quand j’étais jeune et que j’essayais de trouver un nouveau moyen de m’exprimer. C’était dans un studio à Roppongi, qui n’existe plus désormais, derrière Meiji-ya. Après cette séance, je dansais, posais nue, et portais des kimono dans ce studio. Quand nous étions en dehors du studio, je mangeais, dormais, prenais des bains, je dessinais... Il a commencé à me photographier sans rater un seul moment.

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Au début, j’étais juste photographiée et je ne savais pas comment ces photos seraient utilisées. Avant, lorsque je travaillais avec des photographes à l’étranger, je signais toujours des contrats, je vérifiais les photos après la séance et je recevais quelques impressions. Je signais systématiquement un contrat lorsque les photos étaient publiées. Il y avait des clauses pour le droit à l’image. La première fois que j’ai posé nue, j’ai demandé au maquilleur à ce propos mais on me répondait « Araki ne fait pas ce genre de choses » et «  Ça se passe comme ça au Japon ». J’ai pensé que quelqu’un d’aussi connu qu’ARAKI ne me traiterait jamais de façon aussi misérable. Aujourd’hui je réalise que pour quelqu’un d’aussi célèbre qu’ARAKI, ne pas avoir de contrats est inhabituel mais j’étais si jeune et naïve. Ma plus grosse erreur a été de devenir trop amicale avec lui au point de ne pas pouvoir en parler. Je me suis sacrifiée en étant polie.

Alors que j’étais seulement une de ses nombreuses modèles favorites depuis quelques années, soudainement j’étais devenue sa muse et j’ai commencé à assister à des vernissages, interviews et d’autres évènements publics, sacrifiant de plus en plus de mon temps. Sans en être informée, des photos de moi étaient publiées dans des livres et des DVD, avec mon nom en titre, vendus à travers le monde. J’ai fait tant de performances dansantes qu’il appelait « live shootings ». A part la maigre indemnité reçue pour les séances photo, je n’ai jamais été rémunérée peu importe le temps que j’ai sacrifié, peu importe le nombre de livres publiés avec mon nom. J’ai dû trouver d’autres manières de subvenir à mes besoins. C’était vraiment très difficile. Néanmoins, c'était embarrassant de parler d’argent en tant qu’artiste. Mais c'est en surpassant ça qu'on peut donner la meilleure expression. Je ne savais pas quoi lui dire. J’ai commencé à croire en sa philosophie de « Photographie personnelle (Shishashin) » selon laquelle « les photos décrivent les relations (ndla : entre le photographe et un proche) », « Amour » et « Muse » et j’avais le sentiment de contribuer à son art.

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Mais en réalité, j’étais de plus en plus fatiguée. Quand je regarde en arrière, tout était excessif et extrême. Je devais faire des choses qui sortaient tellement de l’ordinaire, il devait y avoir une part de moi qui devait être pétrifiée pour avoir fait comme si c’était normal. Être la muse d’ARAKI et être moi-même étaient très différents. Quand j’y pense, ce n’était pas très sain d’avoir dissimulé mon vrai moi et vivre comme si je me cachais.

Pour garder cette image de son art ou peut-être parce qu’il aimait l’attention, il racontait des histoires sur moi à la télévision et dans des interviews pour des magazines, créant et vendant livres après livres sans que je ne le sache, leur donnant des titres comme « KaoRi Sex Diary » sans mon consentement, me faisant prendre des poses d’une manière extrême face au public, recevant tous les honneurs de mes performances.... Un jour je suis allée au studio pour ce que je croyais être une séance photo mais quand je suis arrivée, c'était lui qui était photographié et je devais poser nue devant des étrangers. C’est arrivé plus d’une fois. Même lorsque je lui disais que je ne voulais pas le faire, il me répondait, « Ils ne sont pas là pour te photographier, ils sont là pour moi. » J’étais, malgré moi, dans une situation où je ne pouvais pas dire non. Par ailleurs, j’étais constamment victime de harcèlement quotidien et de traque, de fausses vidéos de moi se propageaient sur internet et mes amis croyaient en ces mensonges. Toute cette anxiété m’a fait m’évanouir dans la rue à plusieurs reprises, et il m’est même arrivé de penser que l’on m’assassinerait si je fermais les yeux. Il y a eu des jours où j’avais peur pour ma vie. Quand cela m’arrivait, je demandais à ARAKI d’améliorer mes conditions de travail mais il répondait systématiquement « je ne sais pas », « j’ai oublié », « je n’ai jamais dit ça », « je n’ai rien à voir avec ça », « l’éditeur a écrit que », ou encore « je n’ai ni téléphone ni ordinateur donc je ne suis pas au courant. C’est de ta faute si tu regardes. C’est de ta faute si cela t’impacte. » Il niait toute responsabilité et j’étais seule pour affronter ma vie brisée. J’avais le sentiment qu’il s’imposait à moi -une personne dont il ne se sentait pas responsable- ce que sa femme avait fini par accepter.

Le temps passant j’ai commencé à voir qui il était vraiment : quelqu’un qui veut paraître bien aux yeux des autres mais qui, en fait, n’en a rien à faire de ses proches. Comme il le dit publiquement, ARAKI veut juste prendre des photos et se fiche complètement de ses sujets. Cela m’a pris du temps pour comprendre que ses photos sont en réalité « fausses ». Tiraillée entre l’envie de partir et la pensée que rien ne s’arrangerait même si je m’en allais parce que ma voix n’avait pas d’importance, j’ai commencé à croire que je devais être sa muse jusqu’au bout. Une partie de moi avait aussi envie de croire jusqu’à la fin en la personne en qui j’avais eu un jour confiance. Le voyant changé par sa maladie, j’ai également probablement dû développer des sentiments complexes à son égard.

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Parce qu’ARAKI racontait publiquement que j’étais « une femme mystérieuse qui ne fait rien », j’ai été tourmentée dans ma vie privée par des harceleurs pendant un long moment. Les gens me suivaient, s’introduisaient chez moi pour voler des photos, fouillaient dans mes poubelles et laissaient d’étranges mots dans ma boîte aux lettres. Lorsque j’ai dû déménager dans un lieu plus sécurisé, il m’a dit « C’est de ma faute ? N’y a-t-il pas erreur ? Comment peuvent-ils entrer chez toi sans clé ? ». Il ne me croyait pas et me donnait un peu d’argent. Je ne pouvais pas aller voir la police alors j’ai dû engager un détective et déménager par mes propres moyens. Le poids du stress mental et financier devenant de plus en plus lourds à porter, des symptômes physiques ont commencé à apparaître, et j’ai eu peur de finir par tomber gravement malade.

J’avais le sentiment de ne plus pouvoir continuer à vivre ainsi, peu importe ce que pensaient les autres, alors j’ai cessé de prétendre être « mystérieuse » dans ma vie privée. Je voulais mener une vie privée dissociée de cette autre vie. Une fois mon plan en route, ses mots et ses actions insouciants ont encore une fois détruit ma vie. Parfois, il me décrivait comme quelqu’un d’important dans sa vie, m’appelant « ma femme » et disant « je ne peux pas mourir tant que j’ai ma muse ». D’autres fois il m’appelait une « prostituée » ou « une femme qui ne mérite pas qu’on lui achète une maison » racontant « je ne sais rien de sa vie privée ». Un jour j’attendais avec impatience un tournage pour la NHK où on m’a demandé d’apporter ma robe bleue car « la NHK ne peut montrer des corps nus ». Cependant, le moment où il a exposé mes seins en disant « j’espère que la NHK montre des nichons » fut la scène finale et c'est ce qui a été diffusé avec mon profil. L’influence de cette chaîne nationale a été très, très puissante.

Selon la communication du média, tout ce que fait un artiste célèbre est justifié et glorifié. J’ai perdu confiance en leur jugement.

D’après sa longue carrière et surtout l’expérience d’avoir photographié sa femme, il aurait dû comprendre que les femmes changent avec le temps et peuvent décider « je ne veux plus être photographiée. Je ne veux plus être exposée au public. ». Mais il n’a jamais pris en compte que son nom et ses actes avaient un impact international, et que cet impact me blessait. Il continuait à me traiter comme un objet et n’a jamais une seule fois essayé de changer son attitude.

En février 2016, ma patience avait atteint ses limites et je lui ai envoyé une lettre demandant à améliorer mes conditions de travail. Il m’a simplement appelé en me disant, « je te recontacterai » et m’a ignoré durant des mois. A un certain stade, il m’avait interdit de l’appeler mais quand finalement j’ai cédé et que je l’ai contacté, il a accepté de me revoir seulement pour revenir sur sa promesse et se mettre en colère. Il a fait un document sur lequel il y avait mon nom et dans lequel il était indiqué, « je consens à ne jamais diffamer ni entraver le travail d’Araki LLC » et je devais le signer. Après qu’il ait lu tout le document à haute voix et que j'ai entendu mon nom à la fin, j’avais vraiment l’impression d’être acculée. J’avais l’impression de devenir folle. J’ai refusé de le signer, encore et encore, mais il m’a menacé en me disant, « je suis malade alors montre un peu de compassion », « si tu le ne fais pas je ne serais pas capable de continuer », « ne dépasse pas les bornes ». Prise de pitié, j’ai été contrainte de signer le document. C’est ainsi que toutes mes séances photos de juin 2016 ont été annulées et que j’ai été virée de mon rôle de « muse ». Il m’a simplement demandé de disparaître. Après ça, j’ai reçu une lettre de la représentante de Araki LLC. Celle-ci se terminait par « j’espère que vous continuerez à être notre meilleure muse ». Après tout ce qui s’était passé, après m’avoir laissé mourir seule, je ne pouvais pas pardonner ces mots. J’ai envoyé cette lettre à ARAKI et tenté de lui faire admettre que sa société avait aussi contribué à mon harcèlement. Bien évidemment, comme d’habitude, je n’ai reçu aucune réponse. Je m’étais dit qu’il était seulement jaloux, mais avec personne à mes côtés, j’avais l’impression d’être martyrisée. J’ai perdu toute ma dignité. A ce jour, quand je vois que des photos de moi sont toujours utilisées pour des expositions, cela me rappelle cette époque.

Dans le monde de l’art, les vies des muses sont mythifiées et transformées en belles mais tragiques légendes. Je commençais à croire que ma contribution à son art était de mourir en  muse mystérieuse et solitaire. J’ai sérieusement pensé au suicide. J’avais prévu un calendrier et avais commencé à agir dans ce but. J’avais ouvert un compte Instagram pour me servir. J’y étais presque. Jusqu’à ce qu’une de mes étudiantes de ballet, elle-même écrivaine, décède soudainement. Cela a été annoncé comme un décès mystérieux. Il est trop tard pour savoir exactement de quoi elle est morte mais lorsque j’ai lu son blog, j’ai découvert les mots exacts pour décrire mes sentiments. Je ne pouvais plus m’arrêter de pleurer. Cela peut paraître inapproprié mais c’est à ce moment que j’ai pris conscience. En sa mémoire, j’ai pensé que je ne pouvais laisser ce monde être un lieu pour davantage de morts mystérieuses et anormales, un lieu pour des suicides injustes. Pour les personnes concernées, il n’y a pas de « mystère ».

A cette époque, chorégraphier, danser pour elle et refouler mes émotions étaient la seule chose que je pouvais faire. Juste au moment où je pensais être capable de contrôler mes émotions, le mouvement Me Too a commencé aux Etats-Unis. Quand j’ai appris ce qu’était le mouvement, j’ai pris conscience que je n’avais plus besoin de me dévouer à ses mensonges et j’ai demandé conseil tous les jours auprès de la police, des avocats et autres professionnels. Une partie de moi voulait laisser mes émotions dominer et crier, mais étant donné ma relation avec ARAKI il était important que je fasse attention. Il était très douloureux de voir ma naïveté, mon amour et ma compassion jugés par d’autres personnes de leur regard calme et objectif. J’ai appris qu’il avait accepté par le passé les requêtes d’autres modèles d’arrêter d’exposer leurs photos, je pensais alors ne pas vouloir que mes photos ne soient plus jamais montrées, mais qu’il devrait y avoir des règles et qu’il devait reconnaître qu’il était allé trop loin. Je voulais l’opportunité de discuter. Grâce à un avocat, j’ai finalement pu faire cette requête à la mi-février cette année

La réponse que j’ai reçu en mars était entre autres mots, « je t’ai seulement pris pour modèle car tu es un jour venue à mon bureau en demandant à être photographiée. Le Shishashin est une forme unique d’expression reconnue par les critiques et il n’y a pas d’aspects commercials dans cette relation. Par conséquent, il ne peut y avoir aucune règle ou accord. C’est à toi de décider. Autrement mon art ne pourrait exister. C’est pourquoi il n’est pas question « d’aller trop loin ». Je n’ai pas besoin de discuter de l’avenir de ces photographies. ». Pour couronner le tout, il a dit « je ne veux pas avoir d’échanges hostiles par écrit, je veux une discussion pacifique en personne. Cependant, j’ai complètement perdu l’envie que tu sois de nouveau mon modèle. ». Après m’avoir totalement rayé de sa vie, il me répond avoir perdu toute volonté de faire de moi son modèle. Il a ignoré toutes mes lettres personnelles au point que j’ai dû faire appel à un avocat et malgré ça, ce Shakyo Roujin (vieil homme obsédé par la photo) continuait à pulvériser mes sentiments. C’était bien plus que bizarre, c’était pathétique. Je n’ai jamais reçu de réponse non plus de la part de la représentante.

J’ai passé 16 ans à être modèle et je n’avais rien construit. Je n’avais rien. J’ai finalement compris et accepté que c’était parce que mon rôle n’avait aucune substance. Je pense aussi avoir véritablement compris les photographies d’ARAKI. C’est moi qui avais interprété ma définition du Shishashin et qui l’a autorisé à me manipuler. J’étais également responsable d’avoir trop travaillé en croyant contribuer à son art. J’ai senti qu’il n’y avait pas lieu de discuter avec une personne qui refuse de voir à quel point ses actions blessent les autres. C’est pourquoi je voudrais que mon échec soit une inspiration pour l’avenir et pour d’autres personnes sur le point de changer mais aussi encourager les personnes qui traversent une expérience semblable à la mienne. J’ai été encouragée par tant de récits #metoo. Je ne veux plus qu’aucun modèle se réfugie derrière le masque de l’art, tout en étant blessé dans l’ombre. Je voudrais aussi que soit saisie l’opportunité d’une réflexion sur l’art de la photographie. Il m’a fallu jusqu’à aujourd’hui pour vraiment ressentir la terreur de la photographie, une forme d’art, qui, une fois que l'objectif vous capture, ne disparaîtra jamais même après votre mort.

Grâce au développement des réseaux sociaux, nous vivons désormais dans une ère où la passion peut mener vers des opportunités professionnelles. Je vois beaucoup le mot-dièse #ModelsWanted. C’est formidable de pouvoir transformer votre passion en profession, mais la réalité est que vous devez aussi vous protéger. Il y a tant de modèles freelances tout comme des personnes qui veulent juste tenter leur chance. Si cela vous arrive, l’existence d’un contrat vous sera très importante. C’est comme ça que des actions légales peuvent être possibles. Peu importe à quel point vous êtes amical avec le photographe, ne faites pas de compris sur un contrat qui vous contentera tous les deux. Aussi, gravez dans votre mémoire que peu importe à quel point vous travaillerez dur comme modèle, au final, les photos appartiennent au photographe.

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Je tournais les pages du livres en terminant de me maquiller et je suis tombée sur cette citation. Penser que pendant 16 ans j’ai travaillé avec quelqu’un qui peut dire quelque chose comme ça à son âge et à notre époque, et en rire, et que je l’ai laissé faire... ça m’a rendue malade. A y réfléchir, j’étais vraiment engloutie par cette mentalité de « ancienneté, honneur et misogynie ». Je perdais pieds. Je lui rends ses mots à travers le titre de ce billet.

C’est un peu décevant de terminer cette relation avec une personne qui m’a montré un nouveau monde et que j’ai respecté d’une certaine manière. Cependant, vieillir et gagner en expérience ne vous place pas au-dessus des autres. Aujourd’hui, j’apprécie d’avoir beaucoup appris à travers ce mauvais exemple et je travaille consciencieusement à créer un meilleur avenir grâce à mes erreurs.

La mythologie, la taille de notre univers ... La vérité est toujours faite de contradictions.

A partir de maintenant, je veux vivre ma vie en croyant en moi et en chérissant chaque jour.

Beaucoup d’entre vous commencent une nouvelle vie. Quelque soit votre travail, si vous avez l’impression que quelque chose cloche, n’hésitez pas à douter, à y réfléchir, et parlez-en et mettez de la distance. Si vous êtes dans un milieu perverti, vous serez englouti(e) et vous ne serez pas capable de prendre de bonnes décisions. Croyez aux réactions de votre corps et ne vous mentez pas à vous-même. N’ayez pas peur parce que vous êtes jeune. Croyez, je vous en prie, que vous appartenez à une génération qui créera de nouvelles valeurs. Même si les choses ne se déroulent pas comme prévu, ce ne sera pas la fin du monde. En mettant un pied dehors, un monde totalement différent vous attendra. Même si vous voulez parfois blâmer les autres, c’est une perte de temps. Si cela devient vraiment grave, partez seul(e) en voyage. Pendant ce temps vous verrez les choses d’une autre manière, vous pourrez changer votre douleur en quelque chose de bien et un jour, votre expérience vous servira. Ça peut vous être plus facile si vous voyez une crise comme une opportunité. Si vous changez et que d’autres personnes voient ce changement, vous pouvez contribuer à améliorer la société. Ce sera un petit changement, mais croyez en ce changement.

Si vous êtes en position de force, ayez s’il vous plaît conscience de vos forces mais aussi de vos faiblesses. Vous pourriez imposer vos faiblesses à vos subordonné(e)s sans même vous en rendre compte. N’interrompez pas ce que les personnes moins bien placées ont à dire et écoutez-les jusqu’au bout. De nos jours, admettre que vous avez tort et vous excuser n’est pas considéré comme une mauvaise chose. Ne rejetez pas la jeunesse et la nouveauté juste parce que vous êtes dans le confort. Efforcez-vous s’il vous plaît à une relation complémentaire en vous soutenant les uns et les autres.

J’espère que le monde deviendra un endroit où nous pourrons tous nous respecter, quelque soit notre statut.

Bien vivre est la meilleure des revanches.

KaoRi. »

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Aujourd’hui, KaoRi a déménagé dans un pays étranger pour refaire sa vie, tout comme Shiori ITO s’est expatriée pour fuir le regard critique de la société japonaise. Lors de nos échanges par mail, KaoRI nous explique qu’après avoir publié son billet, elle a recontacté Nobuyoshi ARAKI qui lui a demandé, furieux, de ne plus jamais le contacter et qu’il ne souhaitait plus la voir. Elle nous indique que plusieurs journalistes ont essayé d’avoir une réponse du photographe, sans succès. Elle n’a aujourd’hui plus du tout de contact avec lui. KaoRi apprécie néanmoins toujours les œuvres passées du photographe mais que « son regard sur [celles-ci] a beaucoup changé, plus objectif ». Malgré cette douloureuse expérience, elle reste fière d’avoir été une de ses muses, et loin d’avoir de la rancœur envers le célèbre photographe, elle considère cette expérience passée « comme une leçon de vie »

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27 mai 2019

Rallye des Princesses

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27 mai 2019

VANNES - Regards de Femmes - save the date

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27 mai 2019

La dénucléarisation en Corée du Nord au cœur de la visite de Donald Trump au Japon

Par Philippe Mesmer, Tokyo, correspondance

Encouragé par le président américain, en visite au Japon, le premier ministre japonais souhaite désormais rencontrer le dirigeant nord-coréen.

Après un dimanche consacré au golf et à la remise d’une « Coupe du président des Etats-Unis » au vainqueur du tournoi d’été de sumo à Tokyo, Donald Trump devait être, lundi 27 mai, le premier dirigeant étranger à rencontrer le nouvel empereur du Japon, Naruhito. La visite d’Etat du président américain, arrivé samedi, ne devait entrer dans le vif du sujet que lundi, lors d’un sommet avec le premier ministre japonais, Shinzo Abe. Au menu : le commerce, la Chine, le G20, prévu à Osaka fin juin, et bien sûr l’Iran et la Corée du Nord. Tout est fait pour souligner la proximité entre les deux dirigeants et la solidité de l’alliance militaire nippo-américaine.

M. Abe soigne aussi sa popularité à l’approche des élections sénatoriales de juillet. Donald Trump a choisi de ne pas embarrasser sa campagne électorale avec les questions commerciales, sur l’agriculture et l’automobile notamment, qui font l’objet d’âpres négociations. « L’essentiel attendra l’issue des élections de juillet », a-t-il tweeté après la partie de golf. Le 25 mai, le ministre japonais du commerce, Toshimitsu Motegi, avait admis qu’un accord commercial ne serait pas pour cette fois.

Les deux dirigeants devaient donc se concentrer sur l’Iran et surtout la Corée du Nord. Les tensions entre Américains et Iraniens embarrassent Tokyo. M. Abe propose de se rendre à Téhéran en juin pour jouer les intermédiaires et attend le feu vert de Washington.

Baisse des tensions

Réticent dans un premier temps, M. Abe se démène pour rencontrer le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un. Début mai, il parlait de « briser la défiance actuelle » et se disait prêt à une entrevue « sans conditions préalables ». Cette position marquait une rupture. La baisse des tensions amorcée début 2018 dans la péninsule coréenne n’avait pas convaincu Tokyo de sortir de la « pression maximale » imposée au régime de Pyongyang pour le contraindre à renoncer au nucléaire et à ses missiles, et à résoudre la question des Japonais enlevés.

Or Kim Jong-un a, depuis, rencontré tous les dirigeants des pays impliqués dans les pourparlers à six (Corées, Etats-Unis, Chine, Russie et Japon) – cadre de négociations sur le nucléaire nord-coréen entre 2003 et 2009 organisées par Pékin – sauf le premier ministre nippon.

Conscient de son isolement, Shinzo Abe a modéré ses positions, s’ouvrant au dialogue. Depuis juillet 2018, plusieurs rencontres informelles nippo-nord-coréennes ont eu lieu au Vietnam et en Mongolie, entre autres. En 2019, le Japon a refusé de s’associer à l’Union européenne pour présenter à l’ONU une motion sur les droits humains en Corée du Nord. La référence aux « pressions maximales » a disparu de son livre bleu sur la diplomatie, publié en avril.

Shinzo Abe cherche à rencontrer le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un, pour résoudre la question des Japonais enlevés dans les années 1970-1980 par des agents de Pyongyang, sujet essentiel pour lui. Il a le soutien de Donald Trump qui devait rencontrer à Tokyo des proches de ces kidnappés. Le 25 mai, le conseiller de la Maison Blanche à la sécurité nationale, John Bolton, voyait dans un sommet Abe-Kim « une aide potentiellement importante » à la dénucléarisation de la Corée du Nord. Pour lui, une telle rencontre « serait certainement dans l’intérêt de la Corée du Nord ».

Impasse des négociations américano-nord-coréennes

Le renoncement à conditionner un sommet Abe-Kim à des avancées sur la question des enlèvements, semble-t-il sur le conseil de Washington, sera-t-il suffisant pour convaincre M. Kim ? En mars, après l’échec du deuxième sommet américano-nord-coréen d’Hanoï (Vietnam), Pyongyang avait reproché à Tokyo de passer par le président américain pour soulever la question des enlèvements.

Le quotidien officiel Rodong Sinmun écrivait que Tokyo « ne devait pas rêver de traiter avec » la Corée du Nord avant d’avoir « payé intégralement pour ses crimes passés », à savoir l’occupation de la péninsule coréenne entre 1910 et 1945. Au cours des négociations informelles, la partie nord-coréenne aurait exigé des dédommagements du Japon.

L’autre difficulté pour M. Abe pourrait être l’impasse actuelle des négociations américano-nord-coréennes et le regain de tension provoqué par les essais de missiles nord-coréens des 4 et 9 mai. John Bolton a, pour la première fois samedi, parlé de ces essais comme d’une « violation des résolutions du Conseil de sécurité ».

Donald Trump, de son côté, continue de tabler sur le dialogue et de minimiser la portée de ces tirs : « La Corée du Nord a utilisé des armes légères qui ont perturbé certains membres de mon équipe et d’autres, mais pas moi. J’ai confiance que le dirigeant Kim tiendra sa promesse envers moi », a-t-il tweeté le 26 mai.

27 mai 2019

Zahia - Extrait d'un shooting avec Terry Richardson

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27 mai 2019

Européennes 2019 : au Royaume-Uni, le triomphe du Parti du Brexit renforce les partisans d’une sortie de l’UE sans accord

Par Philippe Bernard, Londres, correspondant

Moins d’un quart des électeurs ont choisi les deux grands partis traditionnels. La défaite est particulièrement brutale pour les conservateurs, avec 8,8 % des voix.

Ce devait être un non-événement, c’est un séisme politique. En se hissant aux premières places de ces extravagantes élections européennes au pays du Brexit, les deux partis les plus radicalement opposés sur la question européenne – le Parti du Brexit et les LibDems – pourraient poser le débat sur des bases radicales elles aussi.

Le premier défend une rupture sans accord avec l’Union europénne (UE) ; les seconds revendiquent un second référendum pour rester dans l’UE. « No deal » contre « People’s vote », ce pourrait être le nouveau choix offert aux électeurs britanniques dans le sillage du vote qui a eu lieu jeudi 23 juin mais dont le dépouillement n’a été effectué que dimanche soir et se poursuit, lundi 27 juin, dans certaines îles écossaises et en Irlande du nord.

Le séisme des européennes secoue d’abord le paysage et le système politique du Royaume-Uni. Lors des législatives de 2017, 85 % des Britanniques avaient voté pour l’un des deux grands partis – conservateur et travailliste. Dimanche, ils ont été moins d’un quart à le faire – 14,6 % pour le Labour et 8,8 % pour les tories.

Pour une fois, le leader d’extrême droite, Nigel Farage, a à peine forcé le trait en parlant de « victoire historique ». Avec plus de 33 % des voix, sa formation créée voici moins de six mois, prospère sur la colère des électeurs pro-Brexit et sur la dénonciation de la « trahison de l’establishment ». En 2014, le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP) qu’il dirigeait alors, s’était déjà hissé à la première place nationale, recueillant 26,6 % des suffrages.

Le triomphe de Farage

Mais cette fois, il arrive en tête dans toutes les régions d’Angleterre – sauf à Londres – ainsi qu’au pays de Galles. Il se paye le luxe d’humilier les tories dans leurs fiefs, y compris dans la circonscription de Theresa May de Maidenhead, à l’ouest de la capitale britannique, tout en siphonnant une partie de l’électorat populaire du Labour.

M. Farage, dont la victoire du vote Brexit au référendum était censé marquer la mort politique, triomphe. Il exige même d’être incorporé dans la future équipe chargée de renégocier le Brexit avec les Vingt-Sept, tout en prônant une issue qui n’exige guère de négociation : la rupture brutale avec l’UE sans accord.

Les LibDems de Vince Cable, eux, ont fait oublier leur participation au gouvernement de David Cameron (2010-2015) et les décisions impopulaires (austérité, instauration des universités payantes) qu’ils ont endossées. De 6,6 % des voix aux européennes de 2014, ils passent à 20,9 % – et même à 27 % à Londres – grâce à leur constance anti-Brexit.

De nombreux électeurs du Labour, exaspérés par l’ambiguïté de Jeremy Corbyn, ont voté LibDem. Le jour même de ses 70 ans, le leader travailliste voit la vague LibDem submerger sa propre circonscription d’Islington, au nord-est de Londres.

Pour les Verts de Caroline Lucas (12,5 % contre 6,9 % en 2014), ce scrutin européen marque un franc succès dans la défense à la fois de l’écologie et dans la bataille contre le Brexit. Les « Greens », comme d’ailleurs les indépendantistes du SNP en Ecosse, prospèrent en captant les travaillistes pro-européens en quête de porte-parole.

Double dynamique

Au-delà d’une arithmétique électorale entièrement neuve, ce scrutin surréaliste impulse une double dynamique au moment même où la démission de Theresa May crée un vide politique.

Le choc et l’humiliation subis par les conservateurs qui se faisaient forts il y a peu d’éliminer M. Farage, risque de les rendre perméables à ses « solutions » extrêmes. Boris Johnson, autre bateleur apprécié par l’électorat populaire, pourrait tirer argument de la menace du Parti du Brexit, pour pousser sa candidature à la succession de Mme May.

Aux législatives de 2015, les électeurs conservateurs, qui avaient voté Farage l’année précédente, sont revenus au bercail car David Cameron avait promis d’organiser un référendum sur le Brexit. Mais si le bourbier du Brexit se prolonge, l’électorat massivement séduit par le leader d’extrême droite pourrait lui rester fidèle aux prochaines législatives. Même s’ils n’apprécient guère M. Johnson, les députés conservateurs soucieux de retrouver leurs sièges pourraient l’adouber pour Downing Street, voyant en lui le meilleur leader pour faire le poids face à M. Farage.

Du côté du Labour, la double fuite des électeurs pourrait obliger M. Corbyn à choisir enfin son camp sur le Brexit. Dimanche soir, Emily Thornberry, ministre des affaires étrangères du cabinet fantôme travailliste, a lancé l’offensive : « Nous aurions dû être plus clairs. Nous devons appeler à un second référendum et faire campagne pour rester dans l’UE. »

Alors que des législatives pointent à l’horizon comme seule issue pour sortir de l’impasse du Brexit, le scrutin européen sonne comme un sauve-qui-peut pour les deux grands partis habitués à se faire face sur les banquettes vertes des Communes, et comme un nouveau signe du pouvoir corrosif du Brexit sur le paysage politique du royaume.

27 mai 2019

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27 mai 2019

Exposition - Le Fauteuil d’Emmanuelle du film culte de Just Jaeckin interprété par de grands photographes

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Depuis sa sortie en 1974, le film «Emmanuelle» réalisé par Just Jaeckin, fut l’un des plus grands succès du cinéma français.

Entouré d’un parfum de scandale, il mêle érotisme chic et décors exotiques dans un scénario explorant des allures d’une sexualité découverte ou fantasmée, mais sans montrer de scènes explicites.

Attirant dans les salles françaises près de treize millions de spectateurs (dont 4,7 millions à Paris), et quarante-cinq millions dans le monde, le succès fut tel qu’une salle le programma à Paris pendant plus de dix ans, proposant en été un sous-titrage en anglais pour les touristes.

2ArtAngels rend hommage au magnifique travail de Just Jaeckin, en prenant comme encrage une image iconique du film, Emmanuelle dans le Fauteuil Paon.

Ce Fauteuil provoqua un engouement dans la photographie et fit augmenter la production de ce type de fauteuil sous le nom de « Fauteuil d’Emmanuelle ».

Cette exposition de photographies des années 50-60 à nos jours réunira les plus grands noms de la photographie tels que Francis Giacobetti, Ellen Von Unwerth, Ghislain Dussart, ou encore Cécile Plaisance…

Photographes participants : Jack Mitchell, Francis Giacobetti @francisgiacobetti_official, Ellen Von Unwerth @ellenvonunwerth, Roberto d’Este @robertodestephoto, Guislain Dussart, Édouard Plongeon @edouardplongeon, Marc-Antoine Coulon @marcantoinecoulon, Guillaume Landry @guillaumelandry, Giovanni Aristodemo @gioaristodemo, Jean Turco @jeanturco1304, Léa Lund & Erik K @lealund_erikk, Thiery Beyne @beynethiery, Cécile Plaisance @cecileplaisance, Nicolas Rachline @nicolasrachlinephotography, Chervine @fairvanity, Just et Julia Jaeckin @jaeckinjust @juliajaeckin, French Cowboy @french_cowboy, Sylvia Galmot @sylviagalmot, Satoshi Saïkusa @satoshi.saikusa, Renata Charberiat @renatacharveriatbis, Dominic Douieb @dominicdouieb, Tejal Patni, Laurent Darmon @laurent_darmon, Delphine Leverrier @delphine_leverrier, Yves Bottalico @yves_bottalico_photographe, Vanessa Von Zitzevitz @vanessavonzitzewitzofficiel

Le Fauteuil d’Emmanuelle du film culte de Just Jaeckin interprété par de grands photographes

Jusqu’au 29 juin 2019

Galerie Just Jaeckin et 2ArtAngels

19 rue Guénégaud

75006 Paris

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www.2artangels.fr

27 mai 2019

Européennes 2019 : estimant avoir évité le pire, Macron prêt à continuer « la transformation du pays »

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Par Cédric Pietralunga, Olivier Faye, Virginie Malingre

Avec 22,3 % des voix, la liste Renaissance soutenue par la majorité et emmenée par Nathalie Loiseau est arrivée, dimanche, derrière celle du Rassemblement national.

Une demi-victoire, à défaut d’un plébiscite. Emmanuel Macron a pu pousser un soupir de soulagement, dimanche 26 mai, à l’annonce des résultats des élections européennes. Avec 22,3 % des voix, la liste Renaissance soutenue par la majorité et emmenée par Nathalie Loiseau n’a certes pas réussi à vaincre celle du Rassemblement national (RN), qui a séduit 23,4 % des Français. Mais elle a évité le pire que lui annonçaient les sondages.

A l’Elysée, on veut croire que l’implication du chef de l’Etat dans la campagne n’est pas pour rien dans la mobilisation des électeurs. Le taux de participation, qui a atteint 50,7 %, est le plus élevé des cinq derniers scrutins européens. « L’effet Macron, c’est qu’on vote désormais autant aux européennes qu’aux législatives », se réjouit un proche du président de la République. En 2017, 48,7 % des électeurs s’étaient déplacés pour le premier tour des législatives.

Pour autant, pas question de tomber dans le triomphalisme. En arrivant deuxième derrière le RN, Emmanuel Macron a perdu son pari. Début mai, le chef de l’Etat avait encore indiqué qu’il ferait « tout son possible » pour que la liste défendue par Marine Le Pen n’arrive pas en tête. Il n’y est pas parvenu, alors qu’il avait devancé l’élue frontiste au premier tour de la présidentielle en 2017 (24 % contre 21,3 %).

« J’accueille ces résultats avec humilité. Quand on finit deuxième, on ne peut pas dire qu’on a gagné », a déclaré le premier ministre Edouard Philippe en début de soirée. « Les Français ont placé l’extrême droite en tête, ce n’est pas la première fois, mais je ne serai jamais dans le camp des indifférents et je ne veux pas banaliser ce résultat », a ajouté le chef du gouvernement. « Avec un point de retard, on ne peut pas dire qu’on a gagné, mais on ne peut pas non plus dire qu’on a perdu ! », a nuancé Richard Ferrand, le président (La République en marche, LRM) de l’Assemblée nationale, dimanche soir sur France 2.

Et maintenant, poursuivre les réformes

Seule certitude, ce score valide la stratégie de sortie du grand débat, estime-t-on au sein de l’exécutif. « Le message qui est envoyé aujourd’hui par les Français n’est pas un message d’une crise politique », assure Sibeth Ndiaye, la porte-parole du gouvernement.

« La majorité présidentielle a tenu bon, elle n’a pas dévissé malgré six mois de crise des “gilets jaunes” », ajoute-t-on à l’Elysée. Comprendre : la voie est désormais libre pour poursuivre les réformes. « Il n’y a pas de défiance, donc le président mettra en œuvre l’acte II de son quinquennat comme il l’a esquissé après le grand débat », se réjouit un proche du président de la République.

Afin d’apaiser la colère des Français cet hiver, le chef de l’Etat s’est engagé, entre ses annonces du 10 décembre 2018 et celles du 25 avril, à débloquer au moins 17 milliards d’euros pour soutenir le pouvoir d’achat des Français. Des efforts – baisse de l’impôt sur le revenu, suppression de la hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) pour les retraités gagnant moins de 2 000 euros par mois, hausse de 100 euros par mois pour tous les salariés au smic… – qu’Emmanuel Macron a consentis pour pouvoir continuer la « transformation du pays ».

Le chef de l’Etat, qui a tiré les enseignements de ses deux premières années à l’Elysée, s’est également engagé à « changer de méthode ». Après avoir chuté dans les sondages et observé la détestation qu’il pouvait susciter sur certains ronds-points, il a promis plus de concertation avec les corps intermédiaires, plus d’écoute de ses concitoyens et un exercice du pouvoir moins jupitérien.

Programme de réforme chargé

« L’obsession du président, c’est l’acte II. Il n’y a aucune inflexion à attendre », martèle-t-on à l’Elysée. Le programme de réformes est chargé, et certaines d’entre elles, politiquement explosives, nécessiteront une majorité soudée. Comme celle de l’assurance-chômage et plus encore celle des retraites, qui seront présentées respectivement en juin et en décembre.

La construction des projets de loi de finances et de financement de la Sécurité sociale, qui commencera également en juin, sera aussi déterminante pour la suite du mandat, alors qu’à droite et au sein de sa majorité certains doutent de sa volonté de tenir les comptes publics.

Autres chantiers à risques, le projet de loi sur la bioéthique, qui sera présenté en juillet et qui comporte notamment l’extension de la procréation médicalement assistée (PMA) aux femmes célibataires et homosexuelles. Ou encore la poursuite de la réforme des institutions, à laquelle l’affaire Benalla a mis un coup d’arrêt brutal il y a près d’un an et qui doit être examinée en conseil des ministres début juillet. Sans oublier une nouvelle phase de décentralisation et la réorganisation de la présence de l’Etat sur le territoire, auxquelles l’opposition sera particulièrement attentive.

Les élections européennes, et le résultat d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV) arrivé troisième avec 13,4 % des voix, ont aussi montré qu’il y a « une attente forte d’écologie », a déclaré François Bayrou, dimanche soir. De ce point de vue, Emmanuel Macron sait qu’il lui reste à convaincre, après la démission de Nicolas Hulot et deux premières années d’exercice du pouvoir qui ont fait la part belle aux chantiers économiques. « Pour la convention citoyenne sur le climat [prévue en juin], il va falloir muscler notre jeu, admet un proche du président. Emmanuel Macron doit convaincre qu’il a évolué. »

Sur la sellette, Edouard Philippe sort lui aussi conforté du scrutin. « Il n’y a pas de remise en cause de son action. Le travail effectué par le premier ministre et son gouvernement, leur mobilisation, comme celle des députés, ont permis de réaliser ce score », estime Laurianne Rossi, députée (LRM) des Hauts-de-Seine, pourtant issue de l’aile gauche de la majorité.

Les coups de boutoir mis par l’ancien maire du Havre (Seine-Maritime) contre la « droite Trocadéro » ont permis au camp présidentiel de tailler des croupières à droite, estime l’exécutif. De quoi éteindre pour un moment les rumeurs d’un prochain départ. « Dès demain, je serai à pied d’œuvre pour poursuivre le projet du président et de la majorité », a lui-même souligné M. Philippe, dimanche soir.

Les municipales en tête

Pour autant, les européennes ont montré qu’il restait un bloc de gauche important et que la majorité ne pouvait pas l’ignorer. « Entre EELV, Place publique et Génération.s, cela fait en gros autant que la majorité présidentielle », admet un proche du président, qui rappelle que l’acte II du quinquennat a été justement conçu pour « recentrer au centre gauche » la politique de l’exécutif. « Nous devons parler à nos électeurs du premier tour de l’élection présidentielle de 2017, qui constituent le barycentre de notre électorat », rappelle-t-on.

Autour d’Emmanuel Macron, certains militent notamment pour qu’il laisse se structurer un parti de gauche à côté du parti majoritaire, qui accueillerait les socialistes orphelins et Macron-compatibles, tout comme, à droite, Agir fédère des anciens du parti Les Républicains qui soutiennent le gouvernement mais n’ont pas souhaité rallier LRM. Avec l’idée de jeter les bases de ce qui pourrait un jour être une coalition à l’allemande.

Car, à l’Elysée, on a déjà la tête aux prochaines échéances électorales : les municipales, prévues au printemps 2020. « C’est de la réussite de l’acte II que dépendra cette élection », confie-t-on dans l’entourage du chef de l’Etat. En clair, il faut que le train de réformes prévu soit lancé avant la fin de l’année, pour que la majorité présidentielle puisse aller à la bataille avec des résultats. L’acte III pourra alors commencer…

27 mai 2019

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