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Jours tranquilles à Paris
3 mai 2019

Saint Cirq Lapopie

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Saint-Cirq-Lapopie (en occitan Sent Circ de la Pòpia) est une commune française, située dans le département du Lot dans la région Occitanie, en Quercy.

Ses habitants sont appelés les Saint-Cirquois.

Géographie

La commune est située à 30 km à l'est de Cahors au cœur du parc naturel régional des Causses du Quercy. Ce village médiéval surplombant le Lot a été classé « Village préféré des Français » au cours d'une émission diffusée sur France 2 le 26 juin 2012.

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Saint Cirq Lapopie (14)Photos : J. Snap

 

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3 mai 2019

Milo Moiré

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3 mai 2019

Le passage du Gois - Noirmoutier

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Le passage du Gois ou Gôa est une chaussée submersible située dans la baie de Bourgneuf, où elle relie l'île de Noirmoutier (commune de Barbâtre) au continent (commune de Beauvoir-sur-Mer), dans le département français de la Vendée. Le passage n'est praticable en voiture, à bicyclette ou à pied qu'à marée basse car il est recouvert à marée haute. Il existe d'autres sites de ce type, mais le caractère unique du Gois est son exceptionnelle longueur : 4,125 kilomètres. Suivant le coefficient de la marée, la hauteur d'eau qui le recouvre à marée haute varie de 1,30 mètre à 4 mètres.

Depuis 1971, le pont de Noirmoutier, reliant l'île au continent, est une alternative au Gois.

En 2017, « l'ensemble paysager formé par le passage du Gois, l'île de la Crosnière (côté Beauvoir, sur le continent) et le polder de Sébastopol (côté Barbâtre) » est un site classé, cette reconnaissance étant une première étape vers l'objectif du classement mondial à l'Unesco.

3 mai 2019

Entretien - Cinq cents ans de la mort de Léonard de Vinci : « Il faut revoir le mythe du génie qui a inventé le futur »

joconde

Par Florence Rosier

L’historien des sciences Pascal Brioist démêle le vrai du faux de la mythologie qui entoure le grand inventeur italien mort le 2 mai 1519.

Léonard de Vinci (1452-1519) est mort il y a 500 ans, le 2 mai 1519. Le monde entier admire son héritage artistique. Mais quel fut son véritable apport à la science, à la technologie, à la médecine ? Entretien avec Pascal Brioist, historien des sciences, professeur à l’université François Rabelais de Tours, qui vient de publier Les Audaces de Léonard de Vinci (Stock, 400 pages, 23,49 euros).

Dans le domaine des sciences, des techniques et de la médecine, quel a été le legs de Léonard de Vinci ?

Il est resté nul ! Pour une raison simple : dans tous ces domaines, Léonard de Vinci n’a rien publié de son vivant. Il n’a donc rien transmis. Ses « inventions » techniques, ses découvertes scientifiques nous semblent incroyablement neuves, à la lecture de ses 5 000 à 6 000 feuillets manuscrits. Mais elles n’ont pas circulé.

De son vivant comme pour les générations suivantes, Léonard de Vinci est resté connu exclusivement pour son œuvre de peintre. Seuls quelques érudits avaient connaissance de sa créativité scientifique et technologique.

D’où vient alors sa renommée actuelle de « génie » polymorphe ?

Il a fallu attendre la fin du XIXe siècle pour que l’on redécouvre l’inventivité de Léonard dans les arts mécaniques et hydrauliques, l’ingénierie, les sciences, l’anatomie…

On doit cette résurgence à un historien d’art allemand, Jean-Paul Richter (1847-1937), qui a publié en 1883 la première compilation des manuscrits du Toscan. Dans le monde entier, c’est un bouleversement. Nous sommes alors au siècle de Jules Verne, en pleine période de mythe du progrès. A cela s’ajoute, en France, le traumatisme de la défaite de 1870 : Léonard de Vinci représente le génie latin, opposé à l’Allemagne triomphante.

En 1900, paraît Le Roman de Léonard de Vinci, de l’écrivain russe Dimitri Merejkovski. Et l’on commence à raconter une histoire de Léonard radicalement nouvelle, où émerge l’image de l’homme inspiré, de l’inventeur du progrès…

Léonard de Vinci était-il cet homme d’esprit universel ?

J’ai une admiration sans bornes pour Léonard. Son inventivité est réelle, mais pas toujours là où on l’attend. Il faut revoir le mythe du génie qui invente le futur.

Dès le début du XXe siècle, le chimiste français Marcellin Berthelot (1827-1907) s’est élevé contre cette idéalisation. Nombre de machines considérées comme iconiques du génie de Léonard ont, en réalité, été conçues par des prédécesseurs.

Ces critiques ont resurgi en 1970 avec les travaux de l’historien des techniques Bertrand Gille ; puis en 1990 avec l’exposition sur les ingénieurs de la Renaissance, qui a tourné dans le monde entier. Mais les gens veulent tellement croire à ce mythe du génie universel…

Quels sont les exemples de machines qu’on lui prête abusivement ?

Le fameux parachute dessiné par de Vinci, vers 1485, a déjà été dessiné par un anonyme siennois quelque dix ans plus tôt. La scie hydraulique, de son côté, est très souvent présentée comme emblématique de l’inventivité de Léonard. Mais elle a déjà été dessinée peu auparavant par un inventeur siennois, Francesco di Giorgio (1439-1502), et un siècle plus tôt, par un autre Siennois très inventif, Taccola (1382-1458).

En réalité, la liste des emprunts de Léonard est considérable. Lui aussi s’est hissé sur les épaules de géants.

Un nombre très élevé de machines ou d’éléments de machines du Codex Atlanticus, traditionnellement exhibés sous forme de maquettes dans de grands musées pour nous convaincre de son génie, figurent déjà chez Brunelleschi, Taccola ou di Giorgio, que ce soit sous forme d’éléments de machines (engrenages, arbres à cames, système à inertie…) ou de machines plus élaborées (scies hydrauliques, pompes, trébuchet, bateaux à aubes, parachute…).

Et les célèbres machines militaires ?

Le char d’assaut, les mitrailleuses, les « orgues d’artillerie » (canons à flux multiples) sont autant de machines de guerre que Léonard de Vinci a souvent recopiées chez d’autres. Mais dans bien des cas, il y apporte ses propres innovations. Par exemple, dans les méthodes de chargement des orgues d’artillerie.

Certaines de ces innovations laissent pourtant perplexe : dans son char d’assaut, par exemple, le système d’engrenage est dessiné à l’envers – ce qui bloquerait le véhicule. Et la façon dont les canons sont portés risquerait d’asphyxier l’équipage.

A ce propos, une histoire étonnante mérite d’être contée…

Nous sommes en 1481, à Florence. Léonard est en pleine phase dépressive – toute sa vie, il alternera des phases d’extrême excitation inventive et des phases de profond abattement. Dans cette ville, la concurrence entre artistes est très rude et Léonard, fils illégitime, n’est pas le mieux placé. Deux ans plus tôt, par ailleurs, il y a été poursuivi en justice pour « crime de sodomie ». Il veut donc « rebattre les cartes ». En 1482, il écrit à Ludovic Sforza, le maître de Milan. A l’époque, Milan et Venise sont en guerre : elles se disputent la domination de la ville de Ferrare. Léonard le sait. Il annonce donc à Sforza, dessins à l’appui, qu’il peut lui construire un canon avec des boulets qui explosent, des sapes avec des mines pour briser les murailles ennemies, des fortifications qui résistent à l’artillerie, des chars d’assaut…

En réalité, la plupart de ces dispositifs sont déjà en usage. Il suffit de lire Francesco di Giorgio ou Roberto Valturio (1405-1475). Ce dernier a déjà publié De re militari (1472), le premier traité au monde qui recense les machines militaires, pour le compte du prince Malatesta. Un ouvrage sans doute déjà inspiré de Taccola. Bref : en 1482, Léonard de Vinci rédige une sorte de « Que sais-je ? » sur le génie militaire, sans être un spécialiste du sujet. Et Ludovic Sforza le fera venir à Milan…

Quid des fameuses grues de Brunelleschi ?

Toute une série de grues et de treuils de chantier ont été utilisés pour le levage des grosses charges sur le chantier de la coupole de la cathédrale de Florence. Ces machines ont été inventées par Filippo Brunelleschi (1377-1446), l’architecte du célèbre dôme de cet édifice, commencé dans les années 1420. Ces machines ont fasciné Léonard, qui les a dessinées avec soin dans ses carnets. Ce, d’autant qu’en 1468, l’atelier d’Andrea del Verrocchio où il travaillait s’est vu confier la fabrication d’une sphère de cuivre géante pour coiffer le dôme : il fallait bien lever l’énorme charge !

Léonard a-t-il vu lui-même ces machines ? Les a-t-il copiées du carnet d’un autre ingénieur, Bonaccorso Ghiberti ? Dans un de ses dessins, son modèle diffère de celui représenté par Ghiberti, soulignent Andrea Bernardoni et Alexander Neuwahl dans leur ouvrage Construire à la Renaissance (Presses universitaires François Rabelais, 2014). Le dessin de Ghiberti semble plus proche de l’original de Brunelleschi. Celui de Léonard « peut être vu comme une tentative d’améliorer le fonctionnement de la machine. (…) Il tente, semble-t-il, de redistribuer les masses afin d’obtenir une machine plus stable. »

En quoi Léonard de Vinci a-t-il réellement innové ?

Beaucoup de ses dessins sont complètement originaux. Ses machines volantes, par exemple, sont très inventives. Léonard étudie plusieurs moyens de voler, dont sa célèbre vis aérienne (« l’ancêtre de l’hélicoptère ») ou encore l’ornithoptère, qui cherche à copier le vol des oiseaux. Certes, ces machines n’ont pas fonctionné. Mais on ne lui connaît, dans ce domaine, aucun prédécesseur.

Ce qui est fascinant, c’est de suivre la progression du processus d’invention dans ses manuscrits. Prenons les pompes à double secteur, dont le principe inspire toujours les pompes à pétrole actuelles. Au départ, Léonard observe le fonctionnement d’une catapulte. Il en extrait le principe cinétique, en repérant l’importance du lien entre le quart de cercle qui s’engrène dans une chaîne. Puis il en détourne le principe pour concevoir une excavatrice. Puis il opère un nouveau détournement, pour faire cette fameuse pompe.

On comprend pourquoi ce génie fascine tant : la diversité de ses inspirations est vertigineuse…

Léonard possède cette capacité d’abstraction, cette pensée technique globale qui lui permet d’extraire, d’un dispositif donné, de grands principes de mécanique. C’est très neuf. Toujours, Léonard commence par observer. Il est d’ailleurs doté d’une très bonne vue, de près comme de loin. Cet enfant de la campagne est capable, par exemple, de dessiner de façon ultrafine le vol d’un oiseau ou l’anatomie d’un scarabée.

Et puis, Léonard tente en permanence de rapprocher différents systèmes. L’idée que tout se tient, dans la nature, est une pensée médiévale. Mais Léonard en fait un outil d’innovation. Il établit d’abord une analogie entre deux systèmes. Puis il applique un microchangement à l’un d’eux, dans le but de l’adapter à un autre domaine ou de l’améliorer.

Un troisième principe guide Léonard : tout phénomène, pour lui, peut se résoudre à une combinatoire d’éléments simples. Ensuite, il recherche des règles mathématiques à tout. Il pousse assez loin, en cela, le vieux rêve des pythagoriciens. Surtout depuis sa rencontre avec le mathématicien Luca Pacioli, vers 1495.

De Vinci, dites-vous, a aussi été très précurseur en inventant une méthode expérimentale…

Là, il s’est montré incroyablement pionnier. Léonard n’est pas un théoricien. Toujours, il commence par avoir une intuition. Et presque toujours, il cherche à la vérifier en concevant une expérience. Nombre de ses manuscrits en témoignent.

Il dessine ainsi les appareillages qu’il entend construire : par exemple, un cœur en verre pour simuler la circulation du sang à la sortie de la valve aortique. Il utilise alors des grains de millet pour visualiser les tourbillons dans la circulation sanguine. En cela, Léonard ouvre une formidable voie vers la science moderne. « La science est le capitaine et la pratique, les soldats », notait-il.

Le volet technique, en réalité, ne représente qu’une toute petite partie de sa créativité. Beaucoup prétendent qu’il n’était pas un grand savant. C’est en partie à cause de Léonard lui-même, qui a déclaré : « Je suis un homme sans lettres. » Mais il le disait avec beaucoup d’ironie – et non sans orgueil.

Quel rôle a pu jouer son « statut » d’enfant illégitime ?

A l’époque, un « bâtard » voyait bien des portes se fermer devant lui, dont celles des universités. Du coup, Léonard s’est construit un savoir auquel il n’aurait pas dû avoir accès. Il a appris le latin par lui-même, il écoutait ses amis qui allaient à l’université.

Et parce qu’il ne pouvait pas suivre un enseignement universitaire, il a cherché un contournement : ce sera la voie de l’expérience – comme s’il était « un fils de l’expérience ».

A l’université, personne ne procédait ainsi. Léonard appliquera cette méthode à une infinité de domaines : l’optique, la mécanique, l’hydraulique, les sciences du frottement, la météorologie, la botanique, l’anatomie… Tout l’intéressait, sa soif de savoir était insatiable.

Mais sa pensée était celle d’un autodidacte : elle n’a pas été formatée par les savoirs académiques. Ainsi, il a pu aller bien au-delà de la pensée contrainte de son temps. Il a su rejeter l’autorité des livres et remettre en question le savoir d’un Galien ou d’un Aristote, quand ils affirmaient des choses qui lui semblaient absurdes. Un savoir enseigné depuis 1 300 à 1 800 ans : il fallait oser ! C’est surtout à partir de l’âge de 50 ans que cet esprit libre deviendra vraiment audacieux.

Des exemples de sa créativité scientifique ?

Prenons la botanique. Léonard observe la croissance des arbres et établit une loi mathématique : la somme des sections de toutes les branches est égale à la section du tronc. Une loi qui ramène aux structures fractales, où des motifs similaires apparaissent à des échelles d’observation de plus en plus fines.

Prenons maintenant la dynamique. Léonard s’intéresse au mouvement d’un boulet de canon. Donc au mouvement d’une pierre qu’on lance : au début, il croit à la théorie d’Aristote sur le sujet. Selon le penseur grec, c’est l’air devant la pierre qui, en repassant derrière elle, la pousserait en avant. Une théorie nommée « anti-péristase ». Mais au Moyen Age, des esprits critiques proposent plutôt cette idée : c’est le lanceur qui confère à la pierre une qualité, « l’impetus » (impulsion), qui s’amenuise au fil du temps.

Léonard propose donc une expérience : si l’on tire avec une arquebuse dans une gourde pleine d’eau, que se passe-t-il ? Selon Aristote, le projectile (la pierre) devrait s’arrêter net, puisque l’eau devant la pierre ne passe pas derrière. Mais la pierre poursuit sa trajectoire dans l’eau. Pour Léonard, c’est la preuve qu’Aristote avait tort et qu’il faut accepter la théorie de l’impetus. Il s’interroge alors : comment varie l’impetus avec le temps ? Il cherche, ne trouve pas mais il a de belles intuitions.

Prenons maintenant l’anatomie. Pour étudier l’anatomie de la main humaine, Léonard invente une méthode de dissection très fine, plan par plan, couche par couche. Il révèle ainsi tour à tour la peau, les tendons, les veines, les muscles… Mais il ne se contente pas d’une description anatomique : il cherche à comprendre le fonctionnement du corps humain. Il dessine ainsi de petites poulies sur lesquelles passent les tendons, au niveau des articulations des doigts… A la fin de sa vie, il cherchera à percer les secrets du vivant : la digestion, la vision, la reproduction, les mouvements cardiaques, le fonctionnement de la vessie…

3 mai 2019

Isabelle Huppert

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3 mai 2019

Au Japon, l’ère Heisei s’est achevée : récit de trente ans de désillusions

Par Philippe Pons, Tokyo, correspondant, Philippe Mesmer, Tokyo, correspondance

Rythmé par les catastrophes, le règne de l’empereur Akihito, qui a abdiqué le 30 avril, a été marqué par la montée des inégalités et de la précarité, sur fond de vieillissement démographique.

A chaque changement d’empereur, s’ouvre une nouvelle ère au Japon. C’est aussi l’heure des bilans. L’ère Heisei (« paix en devenir », 1989-2019), qui vient de s’achever avec l’intronisation de l’empereur Naruhito, 59 ans, restera dans l’histoire comme la fin d’une époque : celle de l’optimisme, qui avait animé une nation hyperproductive et innovante au cours de l’ère Showa (« paix éclairée », 1926-1989).

Hissé au troisième rang de l’économie mondiale en 1970, le pays sombrera, vingt ans plus tard, dans une crise multiforme – économique, sociale et identitaire. L’ère Heisei a donc été celle des désillusions et des inquiétudes. L’euphorie orchestrée de l’entrée dans l’ère Reiwa, le 1er mai, signifie-t-elle que la page est désormais tournée ?

Un sondage du quotidien Asahi Shimbun est révélateur : 5 % des personnes interrogées estiment que l’ère Heisei fut une période « brillante », 42 % qu’elle fut « tumultueuse » et 29 % qu’elle fut synonyme de « stagnation ».

En effet, un rapport sur l’état du Japon, rédigé en 2018 par de jeunes fonctionnaires du ministère de l’économie, du commerce et de l’industrie (METI) et diffusé sur Internet, portait le titre « Des individus inquiets et un Etat paralysé ». Téléchargé plus d’un million de fois, ce texte reflétait le ressenti de beaucoup de trentenaires et de quadragénaires, appartenant à la « génération Heisei » : ayant grandi dans un pays dont l’économie languissait, sur fond de crise de l’emploi, ils ont l’impression d’être une « génération perdante ».

A l’orée d’une nouvelle ère, les Japonais sont donc travaillés par la nostalgie des succès passés – illustrée par la popularité de la série Toto nechan (« Ma grande sœur Toto »), diffusée en 2016 sur la chaîne nationale NHK, qui exalte les années 1960. Et peu adhèrent à l’optimisme affiché du gouvernement, leur faisant miroiter la manne des Jeux olympiques (JO) de 2020 à Tokyo ouvrant l’ère nouvelle.

Apparente cohésion sociale

Pour autant, le Japon reste l’une des économies les plus avancées du monde et il conserve une apparente cohésion sociale, enviable au regard des déchirements des démocraties occidentales. Le secteur des services est exemplaire, les infrastructures, comme la recherche, sont des plus performantes, l’espérance de vie demeure la plus élevée du monde (84,2 ans en 2018), et la criminalité, en baisse constante (915 000 crimes et délits en 2017, contre 2,8 millions en 2002), figure parmi les plus faibles.

Bref, le pays constitue une sorte de modèle de conservatisme libéral exempt, pour l’instant, d’un populisme virulent.

DE 1986 À 1992, LE JAPON A VÉCU SES « ANNÉES FOLLES », IL ACHETAIT LE MONDE.

Les « Abenomics » – mesures mises en place en 2013 par le premier ministre Shinzo Abe jouant de la relance par la dépense publique en dépit d’un endettement frôlant les 230 % du produit intérieur brut (PIB) – ont permis une fragile embellie.

Mais des ombres obscurcissent l’avenir : le vieillissement démographique s’accélère (les plus de 65 ans représentent 25,7 % de la population, contre 12,2 % en 1990), les inégalités se creusent, l’impression d’appartenir à une vaste classe moyenne, en termes de statut social sinon de revenus, s’efface pour le plus grand nombre, les disparités de classes s’accentuent, le taux de pauvreté relative augmente, tandis qu’un sentiment d’injustice gagne la jeunesse, dont une partie se dérobe au travail en entreprise.

L’entrée dans l’ère Reiwa n’éveille guère l’espoir du début de l’ère Heisei. Depuis le succès mondial, y compris au Japon, de l’analyse du sociologue américain Ezra Vogel Le Japon médaille d’or (1979), le « miracle économique japonais » fascinait le monde. L’ère Heisei débutait en fanfare : ce que l’on appelait alors le « boom Heisei » était en réalité une « bulle spéculative » provoquée par la politique monétaire complaisante adoptée par le Japon sous la pression du G7.

Sous le signe des désastres

Avec un yen qui avait gagné 60 % de sa valeur par rapport au dollar, un indice Nikkei et un prix des terrains en ville au zénith, le Japon, emporté par le tourbillon de l’argent facile, allait vivre de 1986 à 1992 ses « années folles » : il achetait le monde (de Columbia Pictures aux chefs-d’œuvre de la peinture occidentale), et les consommateurs en délire s’offraient voitures de luxe et séjours pour shopping à Paris, Hongkong ou Hawaï.

C’était l’époque de tous les excès : des sushis ornés de paillettes d’or, des soirées arrosées des plus grands crus, et des clubs, comme le légendaire Juliana, à Tokyo, où des milliers de filles en look bodycon (pour body conscious, « moulant ») dansaient, en minijupe et chevelure déployée, des nuits entières sur un podium.

La mort de l’empereur Showa (Hirohito, 1901-1989) avait toutefois assombri l’atmosphère. Le monarque avait été l’horizon de la vie de toute une génération, de la tragédie de la guerre au redressement. Le langage suranné de la cour, sur lequel trébuchaient les présentateurs de télévision, et les rappels d’une histoire que les jeunes connaissaient mal – des massacres en Chine des années 1930 à l’attaque surprise sur Pearl Harbor en 1941 et aux « Tenno heika banzai ! » (« Vive l’empereur ! ») des soldats qui tombaient pour une cause perdue – replongeaient le Japon dans un passé oublié, noyé sous une prospérité nouvelle.

Une page allait se tourner. Le Japon allait perdre ses illusions autant que son dynamisme : au triomphalisme succéda un sentiment d’inquiétude. Le séisme de Kobe en janvier 1995 (6 437 morts) et, deux mois plus tard, l’attaque terroriste de la secte Aum dans le métro de Tokyo (13 morts), puis, surtout, le tsunami de mars 2011 (18 457 morts et disparus), qui entraîna la catastrophe nucléaire de la centrale de Fukushima, ont placé l’ère Heisei sous le signe des désastres.

En faisant exécuter, en juillet 2018 – vingt-trois ans après l’événement –, les treize condamnés à mort de la secte Aum, le gouvernement a cherché à solder cette sombre affaire.

L’exercice s’avère autrement plus difficile avec le désastre de Fukushima. Si cette tragédie a été provoquée par une nature imprévisible, elle est aussi le résultat de l’imprévoyance coupable des autorités, de la complaisance de certains universitaires trop liés à l’industrie de l’atome pour oser la remettre en question, et enfin du souci de réduire les coûts de la compagnie d’électricité de Tokyo (Tepco), l’opérateur de la centrale située à 200 km au nord-nord-est de la capitale. Ce que l’on surnomme ici le « village nucléaire », c’est-à-dire le lobby du nucléaire, s’est bercé de l’illusion d’avoir la technologie « la plus sûre du monde ».

Les Jeux à Fukushima

« Fukushima fut une trahison de l’héritage d’Hiroshima », estime le prix Nobel de littérature Kenzaburo Oe (1994), l’une des grandes consciences de son temps. Huit ans plus tard, Tepco continue de se battre pour résoudre un drame qui s’est traduit par la fusion de trois réacteurs. Plus de 54 000 personnes sont encore déplacées, oubliées des pouvoirs publics qui proclament que la région autour de la centrale a été décontaminée.

A la gare de Fukushima, un panneau électronique affiche le compte à rebours des jours avant l’ouverture des épreuves des JO de 2020 dans cette région meurtrie, comme si la page avait été tournée. Pour le reste du pays, peut-être. Mais, sur place, le ressenti est différent. « Invoquer l’organisation des Jeux à Fukushima pour signifier que l’on peut rentrer chez soi, que les agriculteurs peuvent reprendre le travail aux champs, et les enfants jouer en plein air en toute sécurité, est inadmissible », proteste Aileen Mioko Smith, de l’organisation antinucléaire Green Action Japan.

LA CATASTROPHE DE FUKUSHIMA RESTE LA GRANDE DÉCHIRURE DE L’ÈRE HEISEI. ELLE A EXACERBÉ L’IMPORTANTE MUTATION SOCIALE.

Malgré la levée de l’interdiction d’accès aux zones rurales contaminées autour de la centrale et de ses trois réacteurs en fusion, seuls 23 % des évacués sont revenus. Les autres se méfient d’un Etat qui a déjà perdu en première instance cinq procès intentés par les victimes. Le 20 février, il a été condamné, avec Tepco, à verser 420 millions de yens (3,37 millions d’euros) à 125 évacués ayant porté plainte. Le mythe de la sécurité des centrales nucléaires est écorné, en dépit de l’active politique de diversion du gouvernement.

La catastrophe de Fukushima reste la grande déchirure de l’ère Heisei. Elle a exacerbé l’importante mutation sociale engendrée par la récession durable provoquée par le dégonflement de la « bulle » : des milliers de PME faisaient faillite et des grandes industries chutaient, tandis que d’autres, qui avaient profité de l’argent facile pour se renforcer, résistaient.

Ajustements douloureux

Déstabilisée, l’économie n’a jamais retrouvé l’élan créatif des décennies précédentes, dont le baladeur de Sony et les consoles de jeux de Nintendo furent les symboles.

Souvent confrontés à des méthodes de gestion dépassées, les géants de l’électronique – Toshiba, NEC ou Sharp – perdirent pied, peinant face à la montée en puissance de rivaux sud-coréens, puis chinois, et passant à côté d’innovations majeures, comme le smartphone – inventé par l’américain Apple, avec un agrégat de technologies majoritairement nippones.

Le secteur bancaire subit une vaste réorganisation pour tenter de venir à bout des créances douteuses, et les poids lourds de l’automobile durent se tourner vers l’étranger pour trouver un nouveau souffle.

Les ajustements furent souvent douloureux. Quand Carlos Ghosn, magnat déchu de l’automobile, arriva à la tête de Nissan en 1999, il commença par supprimer 21 000 postes. Les restructurations frappèrent toutes les catégories sociales, mais plus durement les jeunes générations. Le Japon entrait dans la précarité, favorisée par l’adoption de législations encourageant l’intérim, la contractualisation ou les contrats à durée déterminée. Alors que la majorité des salariés bénéficiaient de l’emploi à vie au début de l’ère Heisei, ils sont, aujourd’hui, à 40 % des précaires.

Au cours de cette ère, l’Archipel a, en outre, découvert la pauvreté. Aux sans-abri qui font désormais partie du paysage urbain, s’ajoute une indigence moins visible, relative, que filme Hirokazu Kore-eda dans Une affaire de famille (Palme d’or à Cannes en 2018), racontant le quotidien d’un foyer vivant de petits larcins. Dans un entretien accordé au quotidien Asahi Shimbun, en juillet 2018, le cinéaste jugeait « alarmant que la société ignore totalement ceux qui en sont réduits à la délinquance ».

Opinion introvertie

Sous une apparence stable et harmonieuse, la société japonaise peut être brutale pour les faibles. Selon une enquête gouvernementale publiée en mars 2019, 613 000 personnes âgées de 40 à 65 ans vivent en retrait complet de la société.

Ce comportement d’exclusion volontaire, nommé hikikomori, répandu chez les adolescents, s’est étendu aux adultes. Autre couche vulnérable : les personnes âgées solitaires. Chaque année, 80 000 meurent ignorées de tous.

« BEAUCOUP VEULENT DÉSESPÉRÉMENT CONSERVER LEUR NIVEAU DE VIE SANS CHERCHER À REMÉDIER À LA MONTÉE DES INÉGALITÉS SOCIALES. » EISAKU IDE, PROFESSEUR D’ÉCONOMIE

Les crises de l’ère Heisei ont ébranlé la confiance des Japonais en leur classe politique. L’expérience, guère concluante, de la première vraie alternance de l’après-guerre (2009-2012), conjuguée aux divisions d’une gauche affaiblie par le rétrécissement de sa base syndicale, a permis à la droite libérale démocrate (PLD) de retrouver son hégémonie.

Mais les électeurs se détournent des urnes : près de la moitié ne vote plus, et l’autre moitié privilégie la stabilité, ce qui explique le maintien au pouvoir de Shinzo Abe, premier ministre depuis 2012. « Beaucoup veulent désespérément conserver leur niveau de vie sans chercher à remédier à la montée des inégalités sociales », avance Eisaku Ide, professeur d’économie à l’université Keio de Tokyo.

La maladresse – sinon l’incurie – avec laquelle les autorités ont géré la catastrophe de Fukushima a nourri les mécontentements. Et le Japon a renoué avec une sourde colère sociale. Loin des mouvements de masse violents de 1960 contre le traité de sécurité avec les Etats-Unis et de la révolte étudiante de la fin de cette décennie, de nouvelles formes de militantisme sont apparues : des petites ONG et associations ont mené des combats au niveau local, palliant souvent les carences des autorités. Des mouvements non structurés, mobilisés sur les réseaux sociaux, ont porté la contestation dans la rue – notamment à propos du nucléaire. Ils sont retombés mais pourraient reprendre inopinément.

Compte tenu des pressions du gouvernement sur les médias et d’une opinion souvent introvertie, « c’est le seul moyen de faire reconnaître une conscience citoyenne », estime Wakako Fukuda, jeune activiste qui fut l’une des fondatrices de Students Emergency Action for Liberal Democracy (Sealds) – dont le nom, en anglais, visait à avoir plus d’écho à l’étranger. Apparu en 2015, le mouvement s’est dissous l’année suivante, mais il mobilisa la jeune génération contre un projet de révision de la Constitution visant à élargir le champ d’intervention des Forces d’autodéfense : « Je ne pense pas que l’on ait changé grand-chose, mais on a encouragé les gens à s’exprimer. Et cela, ce n’est pas perdu », poursuit Wakako Fukuda.

A la traîne des questions sociales

Le Japon, société consensuelle ? Pas vraiment : il existe de multiples foyers de contestation largement ignorés de la presse nationale. De grands noms du monde intellectuel, tels l’écrivain Haruki Murakami ou le maître de l’animation Hayao Miyazaki – qui « refuse de faire des films avec une électricité d’origine nucléaire » –, font écho à leurs revendications pour défendre les valeurs sur lesquelles le Japon s’est reconstruit depuis la défaite de 1945. Ils soutiennent aussi des luttes opiniâtres, comme celles des habitants d’Okinawa (archipel où sont basés les deux tiers des 48 000 soldats américains déployés au Japon) qui s’opposent à la construction d’une nouvelle base militaire.

LE JAPON EST EN RETARD SUR LA PARITÉ, LES VIOLENCES FAITES AUX FEMMES, L’IMMIGRATION, LE MARIAGE POUR TOUS, L’ENVIRONNEMENT…

Ce nouveau militantisme n’empêche pas le Japon d’être à la traîne sur les grandes questions sociales qui taraudent les démocraties avancées : la parité, les violences faites aux femmes, l’immigration, le mariage pour tous, l’environnement…

Le mouvement LGBT a réussi à arracher à plusieurs municipalités la reconnaissance des unions homosexuelles, en dépit de l’hostilité du gouvernement. La mobilisation a aussi permis de faire avancer la cause des femmes dans ce pays où la classe dirigeante, à 80 % masculine et vieillissante, reste cantonnée sur des positions réactionnaires.

Les lois de 1986 et 1999 sur l’égalité d’accès à l’emploi et sur la parité forment un cadre légal longtemps resté lettre morte. Quant aux « Womenomics » (mesures supposées « faire briller les femmes », lancées par M. Abe, que son conservatisme porte plutôt à soutenir la famille « traditionnelle »), elles n’ont guère porté leurs fruits.

En 2018, les révélations sur les résultats d’examens d’entrée trafiqués par les universités de médecine pour en limiter l’accès aux femmes, et les dénonciations de harcèlements et de discriminations, témoignent d’une intolérance envers certains comportements, dans la ligne du mouvement #metoo – devenu en 2018 #wetoo, au Japon. « Par rapport aux années 1980, quand le concept de harcèlement sexuel a été introduit au Japon, le nombre de procès intentés et gagnés par les victimes a considérablement augmenté, preuve que ces comportements sont de moins en moins acceptés », constate la sociologue féministe Chizuko Ueno.

L’apparition des « herbivores »

Les médias se plaisent à faire des Japonaises l’avenir du Japon. Encore faut-il leur en donner les moyens. Or, leur situation ne favorise ni leur travail ni la maternité : conjuguée à la précarité, elle dissuade les jeunes couples de se marier et d’avoir des enfants, pesant sur la démographie. Beaucoup d’hommes hésitent à fonder une famille, craignant de ne pas pouvoir assumer la charge d’un foyer.

L’apparition des « herbivores » – de jeunes hommes fuyant une relation suivie avec une femme parce qu’ils la jugent « pesante » – fait partie de ces phénomènes anecdotiques révélateurs d’une mise en marge volontaire.

Sans marquer la rupture avec le passé, comme le fut, dans les consciences, la fin l’ère Showa, ressentie comme la fin de l’après-guerre, la tourmentée ère Heisei a contraint le Japon à interroger ses équilibres internes mais aussi sa place sur la scène mondiale et, plus généralement, son rapport à l’altérité.

Vieillissant, l’Archipel commence à s’entrouvrir à l’immigration – moins au nom de grands idéaux que sous la pression des entreprises confrontées à une pénurie de main-d’œuvre due à l’évolution démographique. Mais le Japon peine à se réinventer.

L’ambiguïté de la signification de Reiwa (« la belle harmonie », si l’on s’en tient à la traduction officielle, ou « l’harmonie ordonnée », si l’on insiste sur la nuance autoritaire que peut avoir le premier idéogramme formant ce nom) est révélatrice de l’ambivalence des réponses que le gouvernement entend donner aux attentes d’une société en mutation, mais sans boussole.

3 mai 2019

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Photos : J. Snap

2 mai 2019

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