60 millions de personnes touchées par El Niño
Le phénomène climatique El Niño a pris fin en mai, mais ses effets se font toujours sentir. Les pénuries alimentaires pourraient s’aggraver avec La Niña, attendue pour la fin de l’année.
En Afrique australe, c’est la pire sécheresse depuis trente-cinq ans. Même constat en Amérique centrale et dans la corne de l’Afrique, des régions touchées par le phénomène climatique El Niño.« La vie et les moyens de subsistance de millions de personnes ont été bouleversés », souligne le secrétaire général de l’Onu Ban Ki-Moon. Plus de 60 millions de personnes risquent la malnutrition, dont 40 millions dans le sud de l’Afrique. Le courant chaud El Niño, particulièrement fort cette année, provoque des sécheresses ou des inondations dans différentes parties du globe. Chose inhabituelle, il touche la planète depuis deux années consécutives.
Des risques d’inondations
Les conséquences sont dramatiques. Le bétail meurt et les stocks d’eau s’amenuisent. Sans compter les dégâts sur les cultures. À Haïti, les fermiers ont enregistré jusqu’à 70 % de pertes.« Les récoltes d’avril 2015 ont été très mauvaises » , indique David Orr, du Programme alimentaire mondial (PAM). Dans certaines régions, les stocks de nourriture sont au plus bas, comme au Malawi ou au Zimbabwe, provoquant une hausse des prix.« D’un jour à l’autre, nous ne savons pas si nous allons manger » ,explique Vuyisile Shabungu, mère de quatre enfants, au Swaziland (sud de l’Afrique). Les prochaines récoltes n’auront lieu qu’en avril 2017. Certaines régions sont déjà en pénurie, alors qu’elles ne le sont habituellement qu’en octobre.« Si la population a faim, elle mangera les semences avant de les planter », prévient David Orr. Les acteurs de l’humanitaire regardent de près La Niña, attendue avant la fin de l’année. Ce phénomène contraire à El Niño provoque de fortes précipitations.« Si elles sont modérées, c’est idéal pour les cultures », espère Selvaraju Ramasamy, de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture. Mais il y a un risque d’inondations. Les ONG et les pays concernés ont tiré la sonnette d’alarme. La Communauté de développement d’Afrique australe a déclaré l’état d’urgence dans la région. Selon les Nations unies, il faudrait 5,3 milliards de dollars pour répondre à l’urgence. Seul un tiers a été collecté.« C’est l’une des pires crises humanitaires et on n’en parle pas. Ce silence, on a du mal à l’accepter » , interpelle Fanny Petitbon, de l’ONG Care. El Niño est un phénomène naturel mais beaucoup s’accordent à dire que le réchauffement de la planète l’aggraverait. Selon Mary Robinson, envoyée spéciale de l’Onu pour les changements climatiques,« nous sommes dans une nouvelle phase d’El Niño » . Une mise en garde : l’ampleur du réchauffement de la planète a été sans précédent en 2015, a alerté hier le rapport sur l’état du climat de deux agences gouvernementales américaines. Article de Awenig MARIÉ.