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Jours tranquilles à Paris
etats unis
11 août 2019

Le « suicide apparent » de Jeffrey Epstein déclenche un scandale national aux Etats-Unis

Par Arnaud Leparmentier, New York, correspondant

Le financier new-yorkais, accusé de crimes sexuels sur mineures, a été retrouvé mort, samedi, dans sa cellule de la prison fédérale de Manhattan, où il était incarcéré.

Lorsque les Américains ont appris, stupéfaits, samedi 10 août, que Jeffrey Epstein, le milliardaire new-yorkais accusé d’avoir organisé l’exploitation sexuelle de jeunes filles mineures, avait été retrouvé pendu dans sa cellule de Manhattan avant d’être déclaré mort, le prix Nobel 2008 d’économie Paul Krugman a résumé sur Twitter le sentiment dominant.

« Si nous vivions dans un univers de fantasme paranoïaque, je serais très méfiant sur le suicide d’Epstein, et même sur le fait de savoir si c’était réellement un suicide. » Et d’ajouter : « Et vous savez quoi ? Le cas Jeffrey Epstein montre que nous vivons dans une sorte d’univers de fantasme paranoïaque. »

En tout cas, cette mort a suscité toutes les hypothèses complotistes tandis que le mot-clé « l’assassinat d’Epstein » (EpsteinMurder) fleurissait sur les réseaux sociaux.

Rien pour l’instant n’étaye cette thèse, mais le prévenu avait été placé en cellule de surveillance après avoir fait une première tentative de suicide le 23 juillet. Il en avait été retiré pour des raisons pour l’instant inexpliquées le 29 juillet.

Un condensé de toutes les névroses américaines

Le gestionnaire de fortune, self-made-man né à Brooklyn et âgé de 66 ans, attendait que soit déterminée la date de son procès prévu pour 2020, et l’affaire menaçait de toucher des puissants de toute la planète. Doué d’une intelligence charmeuse selon ses associés, ce financier a en effet entretenu des contacts rapprochés avec les grands de ce monde : Donald Trump, Bill Clinton – il était au mariage de sa fille Chelsea –, le prince Andrew, fils de la reine Elizabeth II, ou le milliardaire Leslie Wexner, qui détient notamment la marque de lingerie Victoria Secret et accuse d’ailleurs M. Epstein de l’avoir spolié. Son silence en soulagera sans doute plus d’un.

L’affaire Epstein est un condensé de toutes les névroses américaines supposées : argent, débauche sexuelle, crime, politique, justice corrompue par les puissants et « deep State » [Etat profond]. Sa mort ne fait que les renforcer.

Cueilli à New York par la police fédérale (FBI) le 6 juillet alors qu’il débarquait de Paris à bord de son jet privé, Jeffrey Epstein a été accusé par la justice américaine d’avoir contraint des mineures à devenir des esclaves sexuelles. Les jeunes filles, dont certaines étaient âgées de 14 ans, étaient embauchées pour lui faire des massages alors qu’il était dénudé. Selon l’accusation, le « massage » se transformait vite en masturbation, attouchements génitaux avec les mains ou utilisation de sex-toys, écrit le New York Times.

Les faits sont censés s’être déroulés entre 2002 et 2005 dans son logement de sept étages et 7 000 mètres carrés de l’Upper East Side à Manhattan et dans son palace de Palm Beach au bord de l’Atlantique en Floride. Les mineures recevaient des centaines de dollars en liquide, étaient priées de revenir et de recruter d’autres jeunes filles, ce qui aurait conduit à la création d’un réseau de dizaines de victimes.

Affaire à tiroirs

M. Epstein, qui encourait dans l’affaire 45 ans de prison avait plaidé non coupable. Ses avocats ont assuré qu’il n’avait plus eu de relations avec des mineures depuis une première condamnation en 2008. Ils avaient demandé une libération sous caution, le prévenu payant lui-même sa surveillance, mais le juge fédéral traitant le dossier l’avait refusée, estimant le risque de fuite trop élevé. La fortune du financier était estimée à plus de 500 millions de dollars (446 millions d’euros). L’homme, qui possédait un immense ranch au Nouveau-Mexique, vivait aussi fréquemment hors des Etats-Unis, entre Paris et les Iles Vierges.

Cette affaire à tiroirs a démontré comment par le passé M. Epstein avait eu droit aux mansuétudes de la justice. Poursuivi pour ces mêmes faits par l’Etat de Floride, il avait plaidé coupable pour sollicitation sexuelle de mineur. Il avait purgé une peine de treize mois à la prison de Palm Beach – ce qui faisait dire à ses avocats qu’il avait déjà été condamné pour ces faits – mais était autorisé à aller travailler six jours sur sept pendant douze heures.

L’accord ainsi obtenu, qui avait coupé court à une enquête du FBI, avait été approuvé par le procureur fédéral de Floride de l’époque, un certain Alexander Acosta devenu entre-temps ministre du travail de Donald Trump. Devant le tollé lorsque l’affaire est ressortie, M. Acosta a présenté, le 19 juillet, sa démission à Donald Trump qui l’a acceptée.

Le monde est décidément tout petit puisque William Barr le procureur général des Etats-Unis, l’équivalent du ministre de la justice, a dû se déporter dans l’affaire Acosta – son ancien cabinet d’avocat avait défendu par le passé M. Epstein. Il s’est toutefois exprimé après l’annonce du décès. « La mort de M. Epstein soulève des questions sérieuses auxquelles des réponses doivent être apportées. En plus de l’investigation du FBI, j’ai consulté l’inspecteur général [du ministère] qui ouvre une enquête sur les conditions de la mort de M. Epstein. »

Prudent, le procureur de New York Geoffrey Berman dans un communiqué parle de « suicide apparent ». « Il nous faut des réponses. Beaucoup », a pour sa part réagi sur Twitter l’influente jeune élue démocrate du Congrès, Alexandria Ocasio-Cortez.

Climat de haine

Quant à Donald Trump, une vidéo exhumée par la chaîne NBC le montre avec M. Esptein lors d’une fête entouré de jeunes femmes dans son golf de Mar-a-Lago (Floride) en 1992 – « elle est sexy [« She’s hot »] », glisse Trump à Epstein à propos d’une jeune femme.

Le New York Times a pour sa part retrouvé une citation du futur président datant de 2002 : « Je connais Jeff depuis quinze ans, un type super. C’est très sympa d’être avec lui. On dit même qu’il aime les belles femmes autant que moi, et beaucoup sont très jeunes. » En juillet, le président s’est distancié de son ancien ami : « Je le connaissais comme tout le monde à Palm Beach, je ne l’ai pas vu depuis quinze ans, je n’étais pas fan. »

La principale accusatrice de Jeffrey Esptein, Virginia Giuffre, qui a travaillé au golf de Donald Trump à Mar-a-Lago, situé à côté de la demeure du financier, n’a jamais mis en cause l’actuel locataire de la Maison Blanche.

Le président, ce samedi, n’a pas commenté l’affaire, mais a retweeté des messages conspirationnistes, l’un qui assure que les scellés ont révélé que « des hauts dirigeants démocrates, y compris Bill Clinton, ont pris le jet privé d’Epstein pour se rendre à son “île des pédophiles” ». Il a aussi retweeté l’acteur Terrence William qui accuse sans la moindre preuve : « Jeffrey Epstein avait des informations sur Bill Clinton et maintenant il est mort ». Dans un climat de haine, le président des Etats-Unis relaye ces accusations alors que rien n’est avéré si ce n’est des relations embarrassantes.

Dès juillet, Angel Urena, ex-porte-parole de Bill Clinton, avait diffusé un communiqué : « le président Clinton ne sait rien à propos des crimes terribles de Jeffrey Epstein ». Il avait reconnu que l’ancien président avait utilisé à quatre reprises son jet en 2002 et 2003, pour se rendre en Europe, en Asie et deux fois en Afrique. M. Clinton a aussi fait savoir qu’il ne s’était jamais rendu sur l’île de M. Epstein et qu’il ne lui avait pas parlé depuis dix ans.

Une mort qui empêche d’obtenir justice

Dans ce torrent peu ragoûtant, le New York Times révèle en tout cas que même après sa condamnation en Floride, M. Esptein a continué d’être reçu par les puissants. L’université de Harvard louait encore à l’époque ses actions charitables passées. L’intéressé avait expliqué après sa sortie de prison : « je ne suis pas un prédateur sexuel, je suis un délinquant. C’est la différence entre un meurtrier et un voleur de sandwich. »

L’affaire avait été relancée par Virginia Giuffre, 36 ans, qui avait déposé plainte en 2009 contre Jeffrey Esptein et surtout en 2015 contre Ghislaine Maxwell. Agée de 57 ans, cette femme était la fille du magnat de la presse britannique qui s’est suicidé en 1991 en sautant de son yacht alors que son groupe était en faillite et qu’il avait pillé le fonds de pension de ses salariés. Mme Maxwell, selon le long portrait que lui a consacré le New York Times, était la maîtresse, la rabatteuse, l’organisatrice de la maison et la confidente de M. Epstein.

Selon Virginia Guiffre, Epstein et Maxwell ont abusé d’elle alors qu’elle avait 16 ans. Mme Giuffre, selon la presse qui a consulté les scellés, indique aussi avoir eu des relations avec un membre de la famille royale britannique, un ancien professeur du MIT, un ancien sénateur du Maine, l’ancien gouverneur du Nouveau-Mexique, un avocat célèbre. Faute de preuves et de mise en accusation par la justice, nous ne publions par leur nom.

Ghislaine Maxwell, elle, a disparu depuis du circuit mondain new-yorkais, aurait vendu ses biens et est introuvable : elle est présumée se trouver à Londres sans adresse fixe. On ne sait pas si elle est poursuivie par le FBI. Virginia Giuffre est parvenue à une transaction avec elle en 2017, mais le Miami Herald a requis en justice la levée des documents accusatoires contre M. Epstein et a fini par l’obtenir au printemps. Ces révélations publiques ont manifestement accéléré l’arrestation de Jeffrey Epstein.

Les victimes ont déploré que la mort de Jeffrey Epstein les empêche d’obtenir justice. « Nous devons vivres avec les blessures de ses actes jusqu’à la fin de nos jours tandis qu’il n’aura jamais à faire face aux conséquences de ses actes », a déploré une des victimes présumée, Jennifer Araoz, qui accuse Epstein de l’avoir violée en 2001, à l’âge de 15 ans, après l’avoir recrutée à la sortie de son lycée.

Manifestement, l’action publique ne va pas s’éteindre à en croire le Wall Street Journal et la déclaration du procureur fédéral de Manhattan Geoffrey Berman, qui reconnaît que les événements de la journée sont un « obstacle supplémentaire ». Mais il ajoute : « A ces femmes courageuses qui sont déjà venues et aux autres nombreuses qui ont encore à le faire, laissez-moi vous dire que nous restons engagés à vos côtés et que notre enquête sur les accusations contenues dans l’inculpation – qui incluent le chef d’accusation d’association de malfaiteurs (conspiracy) – se poursuit. »

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4 août 2019

Les Etats-Unis sortent officiellement du traité sur les armes nucléaires intermédiaires

Par Marc Semo, Jean-Pierre Stroobants, Bruxelles, bureau européen

Ce retrait signe la mort de l’un des grands symboles de la fin de la guerre froide, acté le 8 décembre 1987 par Reagan et Gorbatchev.

Ils ont signé son arrêt de mort et, en définitive, cela sert leurs intérêts mutuels : les Etats-Unis et la Russie sont désormais officiellement sortis du traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire – FNI, ou INF en anglais, pour intermediate-range nuclear forces – signé, le 8 décembre 1987, par Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev.

C’était l’un des grands symboles de la fin de la guerre froide et son extinction, vendredi 2 août, aura trois conséquences immédiates.

Elle permettra d’abord, tant à Washington qu’à Moscou, de moderniser leur arsenal et de déployer rapidement de nouveaux équipements ; elle laisse les Européens à leurs inquiétudes quant à la relance d’une course à l’armement nucléaire par les deux grands rivaux ; enfin, elle cible directement la Chine qui développe très vite ses capacités à l’heure actuelle pour affirmer notamment sa suprématie en Asie.

Donald Trump avait annoncé, le 2 février, la procédure de retrait américain, qui deviendrait effectif au bout de six mois. mettant en cause Moscou pour des violations de l’accord depuis plusieurs années. En rétorsion, Vladimir Poutine avait aussitôt suspendu la participation de la Russie, décision ratifiée le 3 juillet.

« Les Etats-Unis ont évoqué leurs inquiétudes auprès de la Russie dès 2013 », a rappelé le patron de la diplomatie américaine, Mike Pompeo. L’administration Obama disposait en effet d’informations indiquant que la Russie testait un nouveau missile, le 9M729, et des lanceurs, en contravention avec les règles du traité FNI. Le président américain n’avait toutefois pas voulu partager immédiatement ces informations avec les pays de l’OTAN, afin de ne pas jeter le trouble au sein de l’Alliance. Vendredi, les pays membres ont apporté leur « plein soutien » aux Etats-Unis.

La question de crédibilité de la dissuasion

Washington et ses alliés accusent la Russie de ne pas avoir respecté l’accord en développant ce 9M729 (ou SSC-8) mobile, rapide, difficile à détecter, doté d’une portée d’au moins 2 500 kilomètres. Moscou nie, assurant, contre toute évidence, que ses missiles à double capacité – à la fois conventionnelle et nucléaire – ne peuvent dépasser 480 kilomètres.

M. Pompeo souligne que les autorités russes n’avaient pas saisi, au cours des six derniers mois, leur « dernière chance » de sauver l’accord. Plusieurs discussions entre les deux puissances rivales se sont de fait révélées infructueuses depuis février, dans le cadre du Conseil OTAN-Russie notamment. « Le traité FNI nous a été utile, mais il ne fonctionne que si les deux parties le respectent », a déclaré le nouveau chef du Pentagone, Mark Esper, en début de semaine. Devant le Sénat, il a affirmé que les Etats-Unis, affranchis des obligations découlant de l’accord, feraient désormais « tout ce qui est dans leur intérêt ».

Un haut responsable de l’administration américaine indiquait dès vendredi que son pays conduirait rapidement des essais de nouveaux missiles, qui auraient été bannis par le traité FNI. « Nous ferons en sorte que notre dissuasion soit crédible face au déploiement du nouveau système de missiles russes capables de transporter des têtes nucléaires et de frapper les villes européennes en quelques minutes », déclarait de son côté le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, à Bruxelles.

Quels seront les éléments de cette dissuasion ? M. Stoltenberg est resté vague, confirmant seulement que Washington ne déploierait pas de nouveaux missiles nucléaires en Europe. Moscou, de son côté, évoque notamment le développement d’une version terrestre de missiles, les Kalibr, utilisés par la marine russe et déjà testés en Syrie.

En décalage avec les nouvelles réalités

Mettant fin à la longue crise des « euromissiles » avec le déploiement en Europe des SS-20 russes puis des Pershing américains, le traité sur les FNI interdisait totalement les missiles conventionnels ou nucléaires d’une portée intermédiaire, c’est-à-dire comprise entre 500 et 5 500 kilomètres. Il prévoyait le retrait mais aussi la destruction de ces armes.

Il fut longtemps respecté par les deux parties. En tout, 2 692 missiles ont été détruits avant 1991, soit la quasi-totalité des missiles nucléaires de portée intermédiaire.

L’une des innovations du traité FNI constituait en la mise en place de procédures de vérification des destructions par des inspecteurs de l’autre pays concerné. Mais ce texte bilatéral entre les Etats-Unis et la Russie s’est trouvé de plus en plus en décalage avec les nouvelles réalités géostratégiques et notamment la montée en puissance de la Chine, non liée par le traité, qui a considérablement développé ce type d’arme.

Le Pentagone a d’ailleurs fait d’une modernisation de son arsenal en guise de riposte à Pékin l’une de ses priorités. Des missiles d’un nouveau type devraient notamment être déployés dans la région indo-pacifique et la mer de Chine méridionale. « La plus grande partie de l’arsenal chinois est composée de missiles de portée intermédiaire et nous devons nous assurer que nous avons les mêmes capacités si, par malheur, nous devions entrer en conflit avec eux un jour », a expliqué Mark Esper.

« Perte d’un outil précieux contre la guerre nucléaire »

Questionné jeudi au sujet du traité FNI, le président américain, Donald Trump, a répondu : « La Russie voudrait faire quelque chose au sujet d’un traité nucléaire. Je suis d’accord. » Sans plus de précisions.

Nul ne se fait, en tout cas, d’illusion quant à la volonté de l’administration Trump de chercher un nouvel accord. Ce d’autant plus qu’elle se montre clairement réticente à prolonger pour cinq ans le traité New Start – ou Start III – sur les armements nucléaires stratégiques qui, signé en 2011, arrive à échéance en 2021.

La fin de cet autre traité lèverait tous les obstacles à une nouvelle course aux armements nucléaires. D’où l’inquiétude exprimée par le secrétaire général des Nations unies (ONU), Antonio Guterres, face à ce qu’il considère être « la perte d’un outil précieux contre la guerre nucléaire ».

« Le FNI était un traité de guerre froide datant de trente ans, mais ce n’est pas le cas du New Start. Il y a, du côté américain une dimension idéologique toujours évidente, amorcée avant même la présidence Trump, qui est de considérer de tels traités de maîtrise des armements comme des carcans qui ne sont pas dans l’intérêt des Etats-Unis », relève Corentin Brustlein, directeur du centre d’études de sécurité de l’Institut français des relations internationales (IFRI), soulignant que, parallèlement, « du côté russe, il y a une nouvelle confiance dans leur remontée en puissance militaire et en leur capacité à violer les traités, tout en niant le fait de les violer et surtout en faisant porter la responsabilité aux autres ».

Prudence des experts

Les experts restent en général prudents quant au risque d’une véritable escalade. Il y avait, à la fin de la guerre froide, quelque 60 000 têtes nucléaires, à 95 % aux mains des Américains et des Soviétiques. Aujourd’hui, elles ne sont plus que 14 000. « Nous n’allons pas, en 2019, revenir à 1979. Ce n’est pas parce que les Russes violent le traité FNI et que les Etats-Unis s’en retirent que nous allons obligatoirement assister à une course aux armements », explique Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).

La modernisation de l’arsenal russe, engagée depuis plusieurs années, est réelle. Mais elle est néanmoins limitée par les ressources d’un pays dont le produit intérieur brut est aujourd’hui équivalent à celui de l’Italie et dont le budget de la défense n’est guère supérieur à celui de la France.

« Je ne suis pas sûr que la fin du FNI altère réellement la stabilité européenne », analyse M. Brustlein, tout en relevant que « cela dépendra de l’attitude de la Russie, notamment de sa capacité à produire et surtout à déployer ces missiles qui sont déjà là en violation du traité ».

« Un important déploiement en Europe de missiles russes de croisière à moyenne et longue portée changerait le rapport de force, mais essentiellement dans le domaine conventionnel, même si les missiles russes ont une double capacité, conventionnelle et nucléaire. Les Etats-Unis et leurs alliés de l’OTAN ont dit qu’ils ne déploieraient pas de missiles sol-sol nucléaires. La question reste de savoir s’il faut de nouveaux moyens militaires, offensifs ou défensifs, pour contrer ces déploiements », précise M. Tertrais.

Il faut en effet tenir compte aussi du poids des opinions publiques européennes, et notamment en Allemagne, aujourd’hui encore plus opposées qu’à l’époque de la guerre froide à l’accueil de nouvelles armes nucléaires.

1 août 2019

A la Maison Blanche, « tout va bien, c’est le bordel ! »

Par Gilles Paris, Washington, correspondant

Correspondants de presse (4/12). A Washington, le journaliste du « Monde » Gilles Paris a vu disparaître les traditionnels briefings de presse et se multiplier les interventions du chef de l’Etat. Avec une difficulté majeure : parvenir à le comprendre.

Récit. Ce matin de juillet, la salle de presse de la Maison Blanche suinte l’ennui. Le soleil qui torréfie la pelouse nord de la bâtisse présidentielle rend la pièce, aveugle sur trois des quatre murs, encore plus terne. Cette star des innombrables films et séries inspirés de la politique américaine affiche une tristesse de délaissée.

Le podium, qui n’a plus accueilli de porte-parole depuis mars, sert de dépôt pour des trépieds de caméras. Le pupitre derrière lequel les visiteurs, naguère, résistaient rarement à se faire prendre en photo, n’est que l’ombre de lui-même. Un technicien d’une chaîne de télévision s’est assoupi sur l’un des strapontins latéraux occupés naguère par les assistants de la porte-parole Sarah Sanders, voire par la conseillère Kellyanne Conway.

Je l’avoue : assister à mes premiers briefings, à l’automne 2014, provoquait en moi de la jubilation. Après avoir visionné en rafale les saisons de la série West Wing (A la Maison Blanche) à la veille de mon départ, même si la reconstitution de la salle de presse y est incroyablement ratée, du moins à ses débuts, j’ai le sentiment de participer à chaque fois au tournage d’un nouvel épisode.

Le sérieux compassé du dernier porte-parole de Barack Obama, Josh Earnest, infiniment courtois face au pilonnage d’Ed Henry, journaliste de la chaîne conservatrice Fox News, y contribue. On s’y ennuie souvent avec politesse. Le porte-parole arrive avec un classeur bourré d’éléments de langage. Il a la parade à toute question, s’entraînant au préalable avec le porte-parole du Conseil de sécurité nationale, Ned Price.

Sous-titres indispensables

Le « Obama no drama » tient ses promesses. Trop. On se sent en territoire familier jusqu’à ce qu’une référence populaire, dont je n’ai aucune idée, fasse réagir la salle en me laissant de marbre. Je tente d’habiller des plus beaux atours de la concentration un sentiment crasse d’incompréhension, comme le jour où est mentionné un « snafu » procédural (acronyme de « Situation Normal : All Fucked Up » : « Tout va bien, c’est le bordel ! ») à l’occasion d’un épisode délicat de la ratification d’un traité de libre-échange auquel les démocrates ne veulent pas de bien.

La familiarité est toujours un peu illusoire lorsqu’on n’a pas vécu durablement aux Etats-Unis avant d’y travailler. Lors d’un reportage après une nuit d’émeutes dans un quartier pauvre de Baltimore (Maryland), consécutive au décès suspect d’un Afro-Américain aux mains de la police municipale, je me retrouve au milieu d’un groupe de jeunes Noirs particulièrement remontés. Je leur demande de répéter une fois, deux fois les raisons de leur colère avant de faire piteusement mine de les comprendre.

Il est vrai que les sous-titres m’ont été indispensables pendant les cinq saisons de la série The Wire, tournée dans la même ville. J’éprouve la même impuissance mordante, plus tard, quand je suis confronté à l’accent texan d’un oilman gestionnaire de « strippers », ces puits au faible débit délaissés par les grandes compagnies.

« LA SALLE DE PRESSE DÉSERTÉE EST DEVENUE, PAR DÉFAUT, L’ESPACE DE COWORKING LE PLUS BAROQUE DE LA CAPITALE FÉDÉRALE »

Cette familiarité, la salle de presse de la Maison Blanche la perdra, dépouillée de sa raison d’être, avec l’arrivée de Donald Trump, et plus précisément avec la décision de Sarah Sanders de rompre avec cet exercice démocratique. Un choix que sa successeure, Stephanie Grisham, arrivée en juillet, ne remet pas en cause pour l’instant.

La pièce est devenue, par défaut, l’espace de coworking le plus baroque de la capitale fédérale. Abandonnés par leurs titulaires faute de briefings, les fauteuils attribués naguère de haute lutte aux titres les plus prestigieux sont littéralement squattés par les journalistes de passage qui ne disposent pas des cagibis misérables et sans fenêtre réservés aux agences et aux chaînes de télévisions, à l’arrière de la salle. C’est là que travaillent les permanenciers, dans un environnement qui provoquerait certainement l’immolation en signe de protestation outrée du comité d’hygiène et de sécurité, s’il en existait un dans ces lieux.

La fin des briefings laisse en outre le journaliste étranger démuni face à un redoutable défi : la traduction du président. Les difficultés commencent très vite avec Donald Trump. Dès la deuxième minute de sa déclaration de candidature à l’investiture présidentielle, le 16 juin 2015. On a alors buté sur une image peu flatteuse qu’il a inventée pour ses rivaux républicains : « They sweated like dogs »… Quatre mots qui méritaient un paragraphe pour faire le tour de la virulence et de l’implicite : la comparaison animale, d’autant plus déconcertante que les chiens ne sont pas réputés pour leur hyperhidrose, bien au contraire ; la dimension olfactive ; le malaise, le sentiment de faute lié à cette sudation ; le souvenir du premier débat télévisé opposant Richard Nixon et son front perlé à John Kennedy, en 1960.

« Great people », « fantastic city »…

On ne s’est jamais vraiment habitué, depuis, aux codes d’une intervention de Donald Trump lorsqu’elle n’est pas encadrée par les écrans translucides des téléprompteurs. Tout d’abord l’absence de construction, voire l’absence de phrases en bonne et due forme. Le magnat de l’immobilier progresse par saccades, en juxtaposant des arguments parfois sans rapport direct les uns aux autres.

Un outil journalistique efficace est en effet l’extrait de discours, le verbatim. Il permet de placer le lecteur peu familier avec l’anglais – et qui aurait échappé par miracle à l’omniprésence des chaînes d’information et surtout de YouTube –, de plain-pied avec un acteur politique, de plonger dans ses mots. Or Donald Trump résiste au verbatim. Tout d’abord parce que l’hyperbole disruptive dont il émaille ses propos est presque intraduisible : ces « great people », « fantastic city », « very special » qui reviennent en boucle ont rarement des équivalents convaincants.

Le président affectionne également les incises qui s’étirent en longueur comme les lacets d’un sentier de montagne, éloignant l’auditeur du sujet de départ, jusqu’à le perdre.

Qu’est-ce qui a bien pu pousser Trump à rendre ex abrupto un long hommage dans le bureau Ovale à un champion automobile de légende, Roger Penske, le 20 juin, à l’occasion d’une visite du premier ministre canadien Justin Trudeau, alors que le monde entier se demandait si les Etats-Unis allaient riposter à la destruction par l’Iran d’un drone d’observation américain ? Pour garder le cœur d’une formule, il faut couper et retrancher l’accessoire, en constellant la phrase de ces indications de coupe : (…) qui donnent furieusement, in fine, l’impression au lecteur d’une parole présidentielle triturée.

Enfin, et surtout, Donald Trump pratique par allusion, en s’appuyant sur les mots-clefs dont le contenu est jugé immédiatement compréhensible par son auditoire, alors qu’il nécessite une rafale de notes de bas de page pour un lecteur étranger. Il raffole des « they » qui peuvent alimenter parfois les interrogations sur leur identité. Il considère enfin que son auditoire connaît de longue date les idées qui structurent sa vision du monde depuis sa première tentative d’entrée en politique, en 1987, et qui ont effectivement peu varié.

LA PRESSE S’EST RÉSIGNÉE À CE PRÉSIDENT OMNIPRÉSENT ET INSAISISSABLE, QUI ASSURE SA COMMUNICATION Y COMPRIS SUR LA PELOUSE DE LA MAISON BLANCHE, AVANT D’EMBARQUER DANS SON HÉLICOPTÈRE

Car c’est un autre trait des interventions du président : elles utilisent le même registre réduit de termes considérés par lui comme interchangeables dont le sens dépend plus que de coutume du contexte dans lequel ils sont prononcés.

En août 2017, Donald Trump évoque sur Twitter la « beautiful Heather Heyer », militante antiraciste tuée à Charlottesville (Virginie) par un sympathisant d’extrême droite. « Beautiful » comme les statues de figures confédérées ainsi qualifiées une semaine plus tard dont la même Heather Heyer combattait la permanence. « Beautiful » comme un projet de loi sur la santé, ou encore un sommet du G20, quelques jours plus tôt.

La formule « smart guy » (un gars intelligent) n’est pas la même lorsqu’elle est prononcée devant la rédaction du New York Times ou lors d’un meeting de campagne devant un public de cols-bleus. Mais comment trancher avec certitude et affecter la complicité bonhomme au second cas et l’éloge des facultés intellectuelles au premier ? Comment être sûr qu’il ne s’agit pas de l’inverse ?

L’intraduisible règne aussi régulièrement en maître lorsque Donald Trump enclenche sur son clavier de téléphone la touche commandant les majuscules. Et lorsqu’il ponctue ses sentences de points d’exclamations.

La presse accréditée s’est résignée à ce président omniprésent et insaisissable, qui assure sa communication y compris sur la pelouse sud de la Maison Blanche, lorsqu’il s’apprête à embarquer à bord de l’hélicoptère présidentiel en direction de la base militaire d’Andrews. Le bruit assourdissant des moteurs de Marine One et l’odeur entêtante de kérosène font alors regretter l’ancienne piscine intérieure reconvertie sous Richard Nixon en salle de presse, désormais inutile.

27 juillet 2019

Donald Trump menace le vin français en rétorsion à la taxe GAFA

vin

En réaction de l’adoption par Paris de la taxe sur les géants américains du numérique, le président des Etats-Unis a dénoncé « la stupidité » d’Emmanuel Macron.

Donald Trump est monté au créneau vendredi 26 juillet contre la France et sa taxe sur les géants américains du numérique, dite « taxe GAFA ». Le président des Etats-Unis a dénoncé « la stupidité » de son homologue Emmanuel Macron et menacé de rétorsions le vin français, l’un des produits d’exportation tricolores les plus emblématiques.

« La France vient d’imposer une taxe du numérique à nos grandes entreprises technologiques américaines. Si quelqu’un devait les taxer, cela devrait être leur pays d’origine, les Etats-Unis », a tweeté Donald Trump. « Nous annoncerons bientôt une action réciproque substantielle après la stupidité de Macron. J’ai toujours dit que le vin américain était meilleur que le vin français ! », a ajouté l’hôte de la Maison Blanche, qui ne boit pas d’alcool.

De l’autre côté de l’Atlantique, la réaction n’a pas tardé : « La France mettra en œuvre ses décisions nationales », a réagi le ministre de l’économie Bruno Le Maire. Le Parlement français avait définitivement adopté le 11 juillet l’instauration de cette taxe sur les géants du numérique, faisant de la France un pays pionnier en matière d’imposition des GAFA (acronyme désignant Google, Apple, Facebook et Amazon) et autres multinationales accusées d’évasion fiscale.

L’administration Trump avait annoncé, la veille de cette décision, qu’elle lançait une enquête pour mesurer les effets d’une telle taxe sur les entreprises américaines. Puis, lors du G7 en France la semaine dernière, Paris et Washington avaient semblé réduire leur contentieux, les ministres des finances évoquant alors des progrès vers un accord mondial sur la taxation du numérique.

« La taxation universelle des activités numériques est un défi qui nous concerne tous. Nous souhaitons parvenir à un accord sur ce sujet dans le cadre du G7 et de l’OCDE », a souligné vendredi Bruno Le Maire.

« Discrimination »

Cette décision unilatérale « démontre le peu d’engagement de la France dans les négociations en cours avec l’OCDE », a pourtant jugé, depuis Washington, un porte-parole de la Maison Blanche, Judd Deere.

« Le gouvernement Trump a toujours affirmé qu’il ne resterait pas les bras croisés et ne tolérerait aucune discrimination à l’encontre des entreprises américaines. »

La taxe GAFA crée une imposition des grandes entreprises du secteur non pas sur leur bénéfice, souvent consolidé dans des pays à très faible fiscalité comme l’Irlande, mais sur le chiffre d’affaires, en attendant une harmonisation des règles au niveau de l’OCDE.

Plus tôt, le principal conseiller économique de la Maison Blanche, Larry Kudlow, avait qualifié cette taxe de « très, très grosse erreur ». « Nous ne sommes pas contents que la France soit allée de l’avant avec cette sorte d’impôt sur le numérique », avait-il dit sur la chaîne CNBC.

Droits de douane supplémentaires

La taxe GAFA impose ces entreprises à hauteur de 3 % du chiffre d’affaires réalisé en France, notamment sur la publicité ciblée en ligne, la vente de données à des fins publicitaires et la mise en relation des internautes par les plates-formes. Cette solution a vocation à n’être que temporaire dans l’attente d’un aboutissement de négociations internationales.

En juin, Donald Trump avait déjà laissé entendre qu’il pourrait infliger des taxes douanières supplémentaires au vin français. Mais il invoquait alors ces droits pour corriger une concurrence jugée « déloyale ».

« La France taxe beaucoup le vin et nous taxons peu le vin français », avait alors dénoncé le président des Etats-Unis au cours d’un long entretien sur CNBC. Le vin français est réputé pour être « très bon », avait aussi commenté l’hôte de la Maison Blanche. Mais les viticulteurs américains se plaignent du fait qu’il entre sur le territoire « pour rien ». « Ce n’est pas juste, nous allons faire quelque chose pour ça », avait-il alors asséné.

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22 juillet 2019

La Française Pénélope Bagieu récompensée par un prestigieux prix de la bande dessinée aux Etats-Unis

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La dessinatrice était nommée dans la catégorie « meilleure édition américaine » d’un ouvrage international.

La dessinatrice française Pénélope Bagieu a été récompensée, vendredi 19 juillet, par un prestigieux prix Eisner de la bande dessinée au festival Comic-Con de San Diego, en Californie, pour son ouvrage Culottées. Elle était nommée dans la catégorie « meilleure édition américaine » d’un ouvrage international.

« C’est pas souvent dans ma vie que j’ai pleuré de joie, mais FUCK YEAH j’ai un Eisner », s’est réjouie l’intéressée sur Twitter, où elle compte près de 310 000 abonnés. « C’est fou. Mes petites culottées. J’y crois toujours pas. »

Les Eisner Awards, récompenses américaines de référence pour la bande dessinée, sont décernés chaque année au Comic-Con, le plus gros festival au monde mettant à l’honneur la pop culture. Culottées, sorti aux Etats-Unis en 2018 (les tomes 1 et 2 avaient été publiés en 2016 et 2017 chez Gallimard en France), dresse les portraits de femmes qui font « voler en éclat les préjugés ».

Née en 1982 à Paris, Pénélope Bagieu s’est faite connaître avec son blog « Ma vie est tout à fait fascinante », lancé en 2007, où elle dépeint alors avec humour sa vie quotidienne. Elle a depuis publié la série de BD Joséphine, ou encore California dreamin’, qui raconte l’histoire de la chanteuse des Mamas and Papas, Cass Elliot, qui tente sa chance à New York dans l’Amérique des années 1960.

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6 juillet 2019

Un deuxième tremblement de terre en Californie, l'état d'urgence déclaré

De nouvelles longues secondes de frayeur pour les habitants. Un séisme de magnitude 7,1 a secoué vendredi soir (peu après 20h, heure locale) la partie sud de la Californie, comme l’a annoncé l’institut américain de géophysique USGS. Un tremblement de terre qui est intervenu au lendemain de celui qui avait déjà frappé la zone de Ridgecrest, au nord-est de Los Angeles, d’une magnitude de 6,4.

D’après les spécialistes, ce deuxième earthquake était potentiellement dix fois plus dévastateur que le premier. C’est dans le comté de Kern, à la périphérie de Ridgecrest, que « l’intensité de la secousse a atteint son plus haut niveau », a relevé Mark Ghilarducci, directeur des services d’urgence pour l’Etat de Californie. Selon les premiers bilans des secours présents sur place, il n’y a pas de mort à déplorer, sachant que la zone touchée est peu peuplée. « Des maisons qui ont bougé, des fondations fissurées, des murs porteurs à terre. Un blessé (léger) et les pompiers le soignent », ont indiqué sur les réseaux sociaux les secours du comté de San Bernardino. Selon eux, il y aurait des « dégâts plus importants » que la veille.

Des incendies et les vidéos impressionnantes

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Une photo postée par les policiers locaux montrait notamment l’état de la route après le séisme à Kern River Canyon, non loin de la Vallée de la Mort, avec des débris sur la chaussée.

A Ridgecrest, les habitants ont fortement ressenti cette seconde secousse, comme en témoignent les vidéos postées sur Twitter où l’on voit l’eau s’agiter dangereusement dans les nombreuses piscines du secteur.

Un incendie s’était par ailleurs déclaré parmi les habitations, toujours à Ridgecrest, zone la plus touchée par le phénomène.

Cette nouvelle secousse a également surpris les présentateurs de CBS, présents en plateau et ne cachant pas leur inquiétude.

Mick Gleason, responsable du comté de Kern, où se situe Ridgecrest, a fait état de deux bâtiments en feu. « Mais nous avons des dizaines de camions de pompiers » grâce aux importants renforts dépêchés la veille, a-t-il rassuré. Le chef des pompiers du comté de Kern, David Witt, a quant à lui affirmé qu’aucun mort n’avait été signalé après la secousse. « Il n’y a que des blessés légers, des coupures et contusions, par la grâce de Dieu », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse. Et si 1.800 foyers sont privés d’électricité, aucune fuite de gaz n’a été signalée. Depuis jeudi matin, Ridgecrest a été secouée par plus de 17 séismes de magnitude 4 et au moins 1.200 répliques d’intensités variées au total. Le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a pour sa part déclaré l’état d’urgence à la fois dans le comté de Kern et dans celui, voisin, de San Bernardino.

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La peur du Big One

Avec une magnitude de 6,4, le séisme de jeudi était le plus important à frapper la Californie du Sud depuis 1999, et a donc été dépassé par la réplique de vendredi soir.

Et comme pour jeudi, la secousse de vendredi a été ressentie jusqu’à Los Angeles. Sur place, les dégâts étaient minimes, avec quelques lignes électriques tombées et des coupures d’électricité par endroits. Les cinémas ont été évacués dès le début de la secousse et à Disneyland, les attractions ont été fermées pour vérification. Las Vegas, dans l’Etat voisin du Nevada, a également ressenti la secousse. Des événements qui font craindre aux habitants un potentiel « Big One », méga-séisme tant redouté sur l’ensemble de la région. Et comme l’a expliqué à 20 Minutes dans une interview Jean-Philippe Avouac, professeur géologie à Institut de technologie de Californie (Caltech), sans « être alarmiste », il faut comprendre que l' « on se rapproche chaque jour un peu plus de la rupture ».

5 juillet 2019

En dépit d’un discours d’unité, Donald Trump politise la fête nationale américaine

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Par Stéphanie Le Bars, Washington, correspondance

L’« Hommage à la nation » inédit du président est resté consensuel, tout à la gloire de l’armée des Etats-Unis.

Dans son dos, la statue monumentale d’Abraham Lincoln, assis, semble attentive à la scène inédite qui se déroule au bas des marches du Memorial. Derrière une vitre blindée ruisselante de pluie, le président américain, Donald Trump, s’est invité dans les célébrations populaires et habituellement apolitiques qui marquent le 4 juillet, jour commémorant l’indépendance du pays en 1776.

Deux tanks avaient été déposés avec un luxe de précaution au bas de l’estrade pour ne pas endommager les allées du Mall récemment refaites à neuf. Cette longue promenade jalonnée de mémoriaux et de musées accueille traditionnellement en cette soirée de fête des milliers d’Américains venus à Washington pique-niquer et écouter des concerts en attendant le feu d’artifice des Parcs nationaux. Cette année, plusieurs centaines de tickets VIP avaient été distribués par la Maison Blanche. Preuve pour les adversaires de M. Trump qu’il s’agissait bien d’un événement partisan.

En choisissant ce jour pour rendre un hommage à l’armée, M. Trump lui a de fait donné une coloration particulière. Il s’est attiré les critiques de ceux qui ont vu dans cet exercice, une tentative de récupération politique, alors que le président vient de lancer la campagne pour sa réélection. Ainsi Joe Biden, ancien vice-président et candidat démocrate à la primaire pour la présidentielle de 2020, a dénoncé un événement davantage « conçu pour flatter l’ego présidentiel que célébrer l’indépendance du pays ».

« Notre nation est plus forte qu’elle n’a jamais été »

Mais à ceux qui craignaient un discours partisan, et déplacé en ce jour de fête nationale, le président américain a opposé un discours particulièrement consensuel. Dans un long cours d’histoire célébrant les héros américains et ponctué de citations des pères fondateurs, il s’est tenu à une posture d’unité. « Aujourd’hui, nous nous rassemblons comme un seul pays pour cet hommage très spécial à l’Amérique. Nous célébrons notre histoire, notre peuple, et les héros qui défendent fièrement notre drapeau, les courageux hommes et femmes de l’armée américaine ». « Unie, il n’y a rien que l’Amérique ne peut accomplir », a-t-il encore affirmé. Sans développer de vision pour l’avenir, il a juste rappelé sa promesse de « planter prochainement un drapeau américain sur Mars ». Et d’une simple phrase – « notre nation est plus forte qu’elle n’a jamais été » – s’est offert un bilan flatteur.

L’événement, supervisé personnellement par le président et finalisé dans les derniers jours, était censé s’inspirer du défilé français du 14-Juillet. Fortement impressionné par les célébrations auxquelles il avait assisté à Paris en 2017, M. Trump tenait, depuis à sa « parade militaire ». Dissuadé une première fois l’an dernier en raison du budget prohibitif (90 millions de dollars) qu’il souhaitait consacrer à un défilé lors de la journée célébrant les anciens combattants, M. Trump a finalement ajouté à son « Hommage à la nation » un survol inédit de la capitale fédérale par une vingtaine d’avions militaires. « Un spectacle unique » avait prédit le président américain sur Twitter dès mercredi. Le ciel bas et gris de ce 4-Juillet a un peu gâché l’effet escompté.

Feu d’artifice « deux fois plus long » qu’à l’accoutumée

Si l’hommage aux soldats a pu résonner favorablement dans une opinion publique américaine fortement attachée à son armée, l’accent mis sur la force militaire du pays a toutefois gêné certains observateurs. Pour le lieutenant-colonel à la retraite Jason Dempsey, professeur de sciences politiques à l’Académie militaire, « notre fierté nationale n’était pas fondée sur notre force militaire mais sur le fait que nous nous battions pour des idéaux », a-t-il rappelé dans le Washington Post. Le coût de la cérémonie, difficilement chiffrable, a aussi suscité des critiques.

La polémique sur la nature des célébrations et la présence de M. Trump a par moments transformé l’ambiance bon enfant de la journée en une confrontation entre deux Amériques. Dès l’après-midi, des promeneurs portant la casquette rouge de la campagne présidentielle « Make America great again » (Rendre à l’Amérique sa grandeur) ont croisé des anti-Trump rassemblés autour de la baudruche « Baby Trump », figurant un président en couches-culottes et en colère. Mais tous ont finalement pu profiter dans la soirée du feu d’artifice « deux fois plus long » qu’à l’accoutumée, offert par des entrepreneurs partisans de M. Trump.

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19 juin 2019

Reportage - A Orlando, Trump en terrain conquis lance officiellement sa campagne pour 2020

Par Gilles Paris, Washington, correspondant

Alarmiste et virulent, le président américain a renoué avec sa rhétorique incendiaire de 2016, mardi en Floride, devant des soutiens acquis à sa cause.

Les Américains qui ont écouté Donald Trump, mardi 18 juin, jour du lancement officiel de sa campagne pour un second mandat, ont pu éprouver le sentiment d’avoir rajeuni de quatre ans. Le président des Etats-Unis, qui avait choisi l’Etat stratégique de Floride pour cette annonce a en effet renoué avec la rhétorique incendiaire qui avait marqué son entrée en politique, le 16 juin 2015. Il a divisé le pays en deux camps irréconciliables, opposant « le mouvement » qui a débouché sur « sans doute la plus grande élection » de l’histoire des Etats-Unis, en 2016, à l’univers des « politiciens » de Washington.

Pendant de très longues minutes, Donald Trump a réglé une nouvelle fois de vieux comptes : ceux de la bataille qui l’avait opposé à la démocrate Hillary Clinton en 2016 tout d’abord. Mécaniquement, les milliers de sympathisants qui s’étaient massés dans une grande salle de sport d’Orlando (Floride) ont alors promis à nouveau la prison à celle qui s’est depuis retirée de la politique et que le président a citée à sept reprises.

Ce dernier a fait subir le même sort à l’enquête « russe » consacrée aux interférences prêtées à Moscou pendant la présidentielle de 2016, qualifiée de « tentative illégale d’annuler les résultats de l’élection ». Il a également stigmatisé les médias chaque fois que l’occasion lui en a été donnée, soutenu par son public.

Le président des Etats-Unis s’est montré tout aussi virulent vis-à-vis des démocrates accusés de vouloir « la destruction de notre mode de vie » et « la destruction du rêve américain ». « Nos opposants démocrates radicaux sont motivés par la haine, les préjugés et la rage et veulent vous détruire », « détruire votre dignité, votre destin », et « détruire notre pays tel que nous le connaissons », a insisté Donald Trump.

Donald Trump ne se fie qu’à son instinct

Alarmiste, il a assuré qu’en cas de victoire en 2020, ses adversaires « supprimeraient [la] liberté d’expression, utiliseraient le pouvoir de la loi pour punir leurs adversaires », et « dépouilleraient les Américains de leurs droits constitutionnels tout en inondant le pays d’immigrants clandestins ». Il a une nouvelle fois accusé les démocrates de vouloir convertir les Etats-Unis au « socialisme » comme il l’avait déjà fait au cours de son discours sur l’état de l’Union, en février.

Il a fallu attendre le deuxième tiers du discours pour que le président, qui l’avait rapidement évoqué en préambule, revienne sur son bilan, en énumérant notamment les bons résultats enregistrés par l’économie américaine dont il a revendiqué l’exclusive paternité, quitte à les enjoliver. Mais Donald Trump a très vite renoué avec un autre thème anxiogène qui avait marqué son entrée en politique, il y a quatre ans : la lutte contre l’immigration illégale présentée comme une menace pour la classe moyenne américaine.

Lundi, il avait déjà affirmé que la police de l’immigration allait prochainement procéder à l’expulsion de « millions d’étrangers illégaux » présents aux Etats-Unis. Le président a annoncé, mardi, avec assurance la construction prochaine de centaines de kilomètres du « mur » qu’il a promis d’ériger à la frontière avec le Mexique alors que ses projets sont bloqués par des procédures judiciaires.

Depuis son élection, Donald Trump a toujours fait le choix de ne s’adresser en priorité qu’à sa base électorale. Il a moqué au cours de son discours ses conseillers politiques qui « coûtent une fortune » et qui « ne [lui] donnent jamais une seule idée » pour rappeler qu’il ne se fie qu’à son instinct. Les personnes qui avaient patienté des heures durant dans une chaleur moite, à Orlando, pour pouvoir l’entendre, ont d’ailleurs témoigné de l’écho que ses propos soulèvent auprès d’elles.

Un homme « qui tient ses promesses »

Shaun Delle Nelson a justifié sa présence par son attachement à un homme « qui n’est pas un politicien » et qui « tient ses promesses ». Son mari Eric a jugé que sa réélection n’était pas assurée mais qu’une victoire démocrate ne pourrait s’expliquer que par des raisons « déloyales ». « Des dizaines de milliers d’immigrants illégaux ont voté lors des dernières élections », a-t-il assuré, alors qu’aucune preuve n’a permis jusqu’à présent d’accréditer cette rumeur entretenue par le président. Shaun a déploré que les jeunes Américains soient « attirés » par le « socialisme » vanté par la représentante de l’Etat de New York Alexandria Ocasio-Cortez. « Ils l’écoutent parce qu’elle a leur âge », a-t-elle pesté.

L’un comme l’autre ont mis les soubresauts de la présidence sur le compte d’un « apprentissage », assurant vouloir y voir une preuve de « sincérité ». « Je ne le juge pas sur son style mais sur ses résultats, et ils sont là », a assuré Eric.

« Je suis venu l’entendre parce que j’aime bien son compte Twitter », a assuré dans un sourire Jake Domenico, venu en compagnie de sa petite amie. « Je plaisante, bien sûr mais je l’aime plutôt bien, ou plutôt je ne supporte pas ses adversaires », a ajouté le jeune homme qui votera pour la première fois en 2020, pour Donald Trump.

« Il fait tout ce qu’il peut mais il n’est pas aidé, pas même par les républicains. Il se heurte à la résistance », ont assuré de concert Joe et Julia Coen. « Et puis on est sûr que lui, il aime l’Amérique, il est à l’écoute du cœur des gens », ont-ils ajouté.

Indicateurs économiques historiques

Le choix stratégique de se reposer exclusivement sur cette base électorale éclaire le paradoxe de la présidence Trump. Celle-ci suscite en effet une adhésion déterminée mais qui reste minoritaire en dépit d’indicateurs économiques historiques, notamment en matière d’emplois.

L’étroitesse de ce socle explique une série de sondages défavorables effectués par l’équipe de campagne du président dans les Etats qui seront déterminants en 2020, puisque la présidentielle ne se joue pas au niveau national. Dans ces Etats, Donald Trump est actuellement devancé nettement par les candidats démocrates les mieux placés dans la course à l’investiture présidentielle.

Même s’ils n’ont aucune valeur prédictive à dix-sept mois du scrutin, ces mauvais chiffres corroborés par d’autres enquêtes publiques ont provoqué la colère de Donald Trump qui a nié leur existence au cours d’un entretien accordé à la chaîne ABC. Ils auraient aussi entraîné une mini-purge au sein de l’équipe de campagne selon la presse américaine.

19 mars 2019

Donald Trump - Jair Bolsonaro

17 mars 2019

Président Trump, an III : Donald-je-sais-tout

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Par Gilles Paris, Washington, correspondant - Le Monde

Cours de justice, énergies renouvelables, taux d’audience télévisées, Facebook… L’omniscience autoproclamée du locataire de la Maison Blanche est sans limite.

Après l’accident tragique du Boeing 737 de la compagnie Ethiopian Airlines, Donald Trump a décrété le 12 mars sur son compte Twitter que le progrès avait des limites. « Les avions deviennent beaucoup trop complexes à piloter. Il n’y a plus besoin de pilotes mais plutôt d’informaticiens du MIT », le Massachusetts Institute of Technology, a-t-il assuré.

La sentence ne vaut pas que pour le transport aérien. « Je constate cela pour de nombreux produits. Toujours chercher un nouveau développement inutile alors que, souvent, ce qui est vieux et simple fonctionne bien mieux », a ajouté le président des Etats-Unis et donc de la Silicon Valley.

Les réflexions de Donald Trump s’inscrivent à la confluence d’une nostalgie et d’une certitude. Le président est un septuagénaire qui préfère parler d’industrie lourde ou de mines de charbon plutôt que des défis posés par l’intelligence artificielle et par la robotisation. Mais le locataire de la Maison Blanche est aussi un je-sais-tout de première catégorie.

Le « roi de la dette »

Pendant le gel partiel du gouvernement fédéral provoqué par son projet « mur » à la frontière avec le Mexique, Donald Trump avait déjà exécuté d’une formule définitive la proposition de déployer des aéronefs sans pilotes de surveillance. « J’en sais plus sur les drones que quiconque », avait-il indiqué le 2 janvier au cours d’une réunion de son cabinet.

Un mois plus tôt, toujours à propos de ce « mur », il avait assuré que contrairement aux accusations des démocrates, il ne s’agissait pas d’une réponse obsolète. Pour une raison simple : il s’agissait de « technologie » et « personne n’en sait plus sur la technologie que moi ».

En octobre, Il avait houspillé la Federal Reserve pour ses augmentations de taux d’intérêts jugés absurdes. Les experts de la banque centrale américaine n’avaient manifestement pas pris la mesure du président. « J’en sais beaucoup plus qu’eux sur le sujet », avait-il tonné.

Pendant la campagne, deux ans plus tôt, Donald Trump avait déjà estimé, en avril, que « personne n’en sait plus sur les taxes que moi, peut-être dans l’histoire du monde ». En juin, il s’était proclamé « roi de la dette ». « Je suis très bon question dette. Personne ne connaît mieux la dette que moi », avait-il ajouté. Effectivement. La dette publique américaine a battu le record de 22 000 milliards de dollars (19 419 milliards d’euros) en février en dépit d’un taux de croissance enviable, ce qui laisse plus d’un économiste médusé.

Omniscience vertigineuse

Cours de justice, énergies renouvelables, taux d’audience télévisées, Facebook, la suprématie présidentielle est sans limite. Prenez le camp démocrate. « Je pense que j’en sais plus sur l’autre côté que presque tout le monde », clamait-il en novembre 2016. Quatre mois plus tôt, il avait déjà assuré à propos d’un espoir démocrate, le sénateur du New Jersey Cory Booker, qu’il le connaissait mieux que lui-même.

Cette omniscience peut s’avérer vertigineuse. Interrogé par le Wall Street Journal, le 11 janvier 2018, sur le fait de savoir si la Corée du Nord n’essayait pas de « creuser un fossé » entre la Corée du Sud et les Etats-Unis, autrement dit de s’immiscer entre les deux pays, Donald Trump s’était montré impérial. « J’en sais plus sur les fossés que tout être humain qui n’a jamais vécu ». Le fait est qu’aucun n’a démenti.

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