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Jours tranquilles à Paris
etats unis
15 décembre 2018

Affaire Khashoggi : le Sénat américain unanime pour mettre en cause « MBS »

Par Gilles Paris, Washington, correspondant - Le Monde

Les élus ont adopté, jeudi, à l’unanimité une résolution qui juge le prince héritier saoudien « responsable de l’assassinat » du journaliste. Un autre texte mettant fin au soutien de Washington à Riyad dans le conflit au Yémen a aussi été voté.

Le désaveu est à la mesure du capital politique brûlé par Donald Trump pour protéger son allié saoudien, le prince héritier Mohammed Ben Salman – également désigné par ses initiales, « MBS ».

Jeudi 13 décembre, le Sénat a infligé une double gifle au président des Etats-Unis. Sept sénateurs républicains se sont joints aux démocrates pour permettre l’adoption d’une résolution mettant fin au soutien principalement logistique apporté par Washington à l’Arabie saoudite dans la guerre qu’elle livre au Yémen. Le Sénat a ensuite adopté à l’unanimité une résolution dans laquelle il a jugé le prince héritier « responsable de l’assassinat de Jamal Khashoggi », le 2 octobre, dans le consulat du royaume saoudien à Istanbul, en Turquie.

Depuis des mois, l’exaspération montait au Sénat contre la guerre au Yémen déclenchée en 2015, manifestement à l’instigation de « MBS », alors ministre de la défense. Deux sénateurs que tout oppose ordinairement, l’indépendant du Vermont Bernie Sanders et le républicain de l’Utah Mike Lee, avaient joint leurs forces pour stopper l’engagement américain aux côtés de son allié saoudien. En vain.

Leurs collègues Jeanne Shaheen, démocrate du New Hampshire et Todd Young, républicain de l’Indiana, sont bien parvenus à faire adopter une disposition obligeant le département d’Etat à certifier que tout est mis en œuvre pour mettre fin à ce conflit, alléger la crise humanitaire et protéger les civils. Mais la réponse du secrétaire d’Etat Mike Pompeo, en septembre, n’a pas calmé la frustration.

« Un message clair et sans ambiguïté »

Cette dernière est encore montée après l’assassinat de Jamal Khashoggi, un dissident devenu chroniqueur au Washington Post. Ulcérée par les dénégations saoudiennes jugées peu crédibles comme par le soutien apporté par Donald Trump au prince, une majorité de sénateurs (56 voix contre 41) a permis, mercredi, l’adoption d’un texte dont la portée demeure symbolique puisque la Chambre des représentants n’a pas envisagé de s’en saisir et que le président des Etats-Unis a assuré qu’il lui opposerait son veto. Donald Trump justifie sa position par l’importance que revêt selon lui la relation avec Riyad.

La mise en cause, elle aussi symbolique, de la responsabilité du prince héritier dans la mort de Jamal Khashoggi est d’autant plus cuisante pour « MBS » comme pour Donald Trump qu’elle a été adoptée pour sa part à l’unanimité.

« Nous voulons également préserver un partenariat de soixante-dix ans entre les Etats-Unis et l’Arabie saoudite et nous voulons nous assurer qu’il continue de servir les intérêts américains et de stabiliser une région dangereuse », a certes estimé le chef de la majorité républicaine au Sénat, Mitch McConnell (Kentucky). Mais ce dernier a jugé que cette résolution adresse à Riyad « un message clair et sans ambiguïté sur ce que nous ressentons à propos de ce qui est arrivé à ce journaliste ».

« Une politique étrangère de plus en plus erratique »

Le texte appelle aussi à la libération de dissidents saoudiens emprisonnés : Raif Badawi, Samar Badawi ainsi que des militantes pour les droits des femmes saoudiennes, présentés comme des « prisonniers politiques ». Il invite « le gouvernement du Royaume d’Arabie saoudite à respecter les droits de ses citoyens et à modérer une politique étrangère de plus en plus erratique ». Il prône également la fin des opérations de ravitaillement en vol des avions de guerre saoudiens par les forces américaines.

Ce double vote constitue enfin un échec cinglant pour les lobbyistes engagés par l’Arabie saoudite pour polir l’image du royaume. Selon Ben Freeman, qui mesure les efforts des gouvernements étrangers aux Etats-Unis au sein du Center for International Policy, un cercle de réflexion de Washington, Riyad a presque triplé en 2017, après l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump, le budget consacré à l’achat d’influence – soit 27 millions de dollars (23,8 millions d’euros) au lieu de 10 millions de dollars un an plus tôt.

Cette offensive ne laisse rien au hasard. Après l’élection de Donald Trump en 2016, selon le Washington Post, ces lobbyistes auraient ainsi réservé 500 nuits dans l’hôtel luxueux que le président possède dans le centre de la capitale fédérale, au profit d’anciens combattants réquisitionnés pour défendre Riyad au Congrès.

Gilles Paris (Washington, correspondant)

Yémen : un cessez-le-feu négocié dans des régions menacées par la famine. Les belligérants au Yémen ont décidé de faire taire les armes provisoirement dans plusieurs régions dévastées, a annoncé le secrétaire général des Nations unies (ONU), Antonio Guterres, jeudi 13 décembre, à l’issue de consultations de paix en Suède. Quatre ans de guerre ont fait quelque dix mille morts dans le pays et menacent jusqu’à vingt millions de personnes de famine. Les deux camps doivent se revoir fin janvier pour tenter de définir un cadre pour des négociations en vue d’un règlement politique, a précisé M. Guterres, qui ne nourrissait que de maigres espoirs d’obtenir une percée. Ces accords vont « améliorer la vie de millions de Yéménites », s’est félicité le chef de l’ONU. Un « cessez-le-feu » doit entrer en vigueur « dans les prochains jours » à Hodeïda. C’est par ce port de la mer Rouge qu’entre l’essentiel de l’aide dans le pays, où sévit « la pire crise humanitaire du monde » selon l’ONU. Les deux parties – forces gouvernementales, soutenues par une coalition militaire dirigée par l’Arabie saoudite sunnite, d’une part, combattants houthistes appuyés par l’Iran chiite d’autre part – doivent se retirer de la ville et du port. Contrôlé par les insurgés, celui-ci subit les assauts de la coalition progouvernementale. L’ONU jouera un « rôle-clé » dans le contrôle du port, a précisé M. Guterres ; 30 observateurs de l’ONU pourraient être déployés dans la ville, rapporte l’AFP. Le ministre yéménite des affaires étrangères, Khaled Al-Yémani, et le négociateur en chef des houthistes, Mohammed Abdelsalam, ont échangé une poignée de main à forte portée symbolique à l’issue de la cérémonie. M. Al-Yémani a toutefois prévenu que l’accord sur le retrait d’Hodeïda restait « hypothétique » jusqu’à sa mise en œuvre.

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5 décembre 2018

Deuil national aujourd'hui aux Etats Unis

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1 décembre 2018

1er décembre 1955 : Rosa Parks refuse de céder sa place dans l’autobus…

Le 1ᴱᴿ décembre 1955, Rosa Parks a 42 ans. Cette couturière noire termine sa journée de travail très fatiguée, comme elle le rapporte plus tard. Pour retourner à la maison, elle prend l’autobus à Montgomery en Alabama, un bastion de la ségrégation raciale du sud-est des États-Unis. Assise à l’avant de l’autobus, elle refuse de se lever pour céder sa place à un homme blanc. Le chauffeur contacte alors la police et elle est emprisonnée.

Le 5 décembre suivant, Rosa est jugée et mise à l’amende. Cette sanction provoque une réaction de boycott des autobus de Montgomery. La direction du boycott est assumée par Martin Luther King, un jeune pasteur noir peu connu à l’époque. Le mouvement revendique la liberté pour les Noirs comme pour les Blancs de s’asseoir où ils veulent dans les autobus, la courtoisie des chauffeurs à l’égard de tous les passagers ainsi que l’embauche de chauffeurs noirs.

Cet évènement marque le début de la campagne pour les droits civiques. Les revendications pour l’égalité raciale vont prendre de l’ampleur, d’abord aux États-Unis, ensuite à travers le monde. Plusieurs historiens qualifient Rosa Parks de « la femme qui s’est tenue debout en restant assise ». Son geste symbolise la force de la non violence dans la lutte pour l’égalité raciale.

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1 décembre 2018

Décès de George H.W. Bush

L'ancien président américain George Bush est mort à l'âge de 94 ans

C'est son fils George W. Bush qui l'a annoncé dans un communiqué diffusé sur Twitter.

Il était le 41e président des Etats-Unis. George Bush, élu à la Maison Blanche de 1989 à 1993, est décédé à l'âge de 94 ans, a annoncé, tard vendredi 30 novembre, son fils George W. Bush, lui-même devenu président en 2001.

"Jeb, Neil, Marvin, Doro et moi avons la tristesse d'annoncer qu'après 94 années remarquables notre cher papa est mort", a déclaré George W. Bush dans un communiqué publié sur Twitter par un porte-parole de la famille. "George H.W. Bush était un homme doté d'une noblesse de caractère et le meilleur père qu'un fils ou une fille aurait pu souhaiter".

George Bush avait été hospitalisé au printemps dernier pour le traitement d'une infection qui s'était répandue dans son sang.

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7 novembre 2018

Midterms 2018 : les républicains gardent le Sénat, les démocrates prennent la Chambre

Les Américains ont élu mardi un Congrès divisé, promesse d’une fin de mandat mouvementée pour Donald Trump.

Les démocrates ont pris le contrôle de la Chambre des représentants, mardi 6 novembre, tandis que les républicains maintenaient leur contrôle du Sénat au terme des élections législatives, perçues comme un référendum sur la présidence de Donald Trump.

Les Américains ont élu un Congrès divisé, promesse d’une fin de mandat mouvementée pour le dirigeant républicain, l’opposition pouvant désormais entraver à la chambre basse une grande partie de son programme.

Les démocrates gagnent des sièges à la Chambre

Un supporteur du candidat républicain au Sénat Mike Braun, dans l’Indiana, le 6 novembre. | JIM YOUNG / AFP

Surfant sur l’indignation contre l’administration Trump et la promesse de protéger la couverture santé, les démocrates ont réussi à s’emparer de la chambre basse, sans toutefois transformer l’essai d’une « vague » annoncée. Ils ont arraché plusieurs sièges aux républicains en Floride, dans le Colorado, le Kansas, le New Jersey, en Pennsylvanie et en Virginie.

La Chambre des représentants est composée de 435 sièges, renouvelés entièrement tous les deux ans. Les démocrates avaient besoin de prendre vingt-trois sièges aux républicains pour gagner la majorité. Le site indépendant Cook Political Report prévoit qu’ils devraient en conquérir au moins trente d’entre eux. C’est déjà fait pour 25.

Les républicains conservent le Sénat

La carte électorale sénatoriale jouait, cette année, en faveur des républicains dans la mesure où le renouvellement concernait des Etats majoritairement conservateurs.

Les démocrates étaient forcés de défendre dix sièges dans des Etats pro-Trump. Ils ont résisté mieux que prévu en Virginie Occidentale et dans le New Jersey. Mais ils ont perdu tôt dans la soirée l’Etat clé de l’Indiana et le Dakota du Nord, terres conservatrices. La sénatrice du Missouri a également perdu son siège, et la Floride penche du côté républicain.

Par ailleurs, la réélection du sénateur du Texas Ted Cruz a offert une victoire majeure au parti républicain à l’issue d’une course serrée face au jeune Beto O’Rourke, qui faisait jusque-là figure d’étoile montante du parti démocrate.

Le Sénat compte cent sièges. Les électeurs renouvellent un tiers de la chambre haute tous les six ans, soit trente-cinq sièges cette fois.

Les élections de gouverneurs

Les démocrates ont perdu l’une des courses les plus scrutées pour l’un des trente-six sièges de gouverneurs en jeu : le duel entre le démocrate Andrew Gillum, premier candidat noir à ce poste en Floride, et le très trumpiste Ron DeSantis. Ce dernier l’a finalement emporté, mais de justesse. Mais ils ont gagné quatre Etats (Nouveau Mexique, Kansas, Illinois, Michigan)

Dans le Colorado, les électeurs ont choisi le démocrate Jared Polis, qui deviendra le premier gouverneur américain ouvertement gay. Et dans le Kansas très conservateur, la démocrate Laura Kelly a créé la surprise en battant le favori, Kris Kobach.

Les référendums locaux

Marijuana, Dix commandements, avortement : dans chaque Etat, les électeurs se prononçaient également sur plusieurs propositions. L’Alabama a approuvé un amendement autorisant l’affichage des Dix commandements bibliques dans les lieux officiels, publics et les écoles. La Floride a validé un texte qui rétablit le droit de vote des condamnés ayant purgé leur peine. Le Michigan a donné son accord à la légalisation de la marijuana, et la Virginie Occidentale a restreint le droit à l’avortement.

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24 septembre 2018

Macron et Trump, finie la bromance ?

Dès son avion posé à New-York ce soir, Emmanuel Macron rencontrera Donald Trump. Et rentrera dans le dur, à l’image de cette poignée de main rugueuse qui avait signé leur première rencontre. Depuis, les deux hommes, que plus de trente ans séparent, s’appliquent à mettre en scène leur relation complice, particulièrement tactile. Il en reste de belles images - des tapes dans le dos, des « hugs », un bras enlaçant une épaule, voire un tendre époussetage de pellicules... Mais si l’on excepte les bombardements conjoints en Syrie pour punir Assad d’avoir utilisé des armes chimiques et la lutte contre le terrorisme, cette jolie « bromance » n’a pas porté ses fruits. Trump s’est retiré de l’accord de Paris sur le climat, a tourné le dos à la France sur le nucléaire iranien, et torpillé la déclaration commune que le G7 avait péniblement trouvée sur le commerce international. Pourquoi donc continuer à faire ami-ami avec un président qui veut défaire l’Europe et le multilatéralisme qui nous est si cher ? On verra dans quelques heures si la saison des mamours est terminée entre les deux chefs d’Etat, ou s’ils continuent à donner le change. Macron a tout intérêt à privilégier cette dernière solution, qui place la France comme interlocuteur privilégié des Etats-Unis. Ce n’est pas seulement flatteur pour l’ego national : cette proximité est utile pour porter plus efficacement la voix de l’Europe. Accessoirement, elle permet, dans un subtil jeu d’ombre et de lumière, d’accentuer l’image de progressiste que le Français veut se donner face aux populistes. Contre Marine Le Pen en France, Matteo Salvini en Europe ou Donald Trump de l’autre côté de l’Atlantique, le président a montré qu’il n’hésitait jamais à se servir des contrastes.

8 septembre 2018

A Toronto, Michael Moore célèbre la résistance à Donald Trump

Par Thomas Sotinel, Toronto (Canada), envoyé spécial - Le Monde

Le réalisateur a présenté « Fahrenheit 11/9 », brûlot politique qui assimile le président américain à Adolf Hitler.

Il n’y a pas de raison pour que le Festival de Toronto, dont la 43e édition a commencé le 6 septembre, se distingue du reste de l’Amérique du Nord – et du monde. Donald Trump règne en maître absolu sur les ­conversations, et pour l’une des soirées d’ouverture – celle de la section documentaire – sur l’écran.

Michael Moore a présenté ­Fahrenheit 11/9 (le 9 novembre 2016, les médias américains ont admis la victoire de Donald Trump sur Hillary Clinton), ­un pamphlet colérique, sincère et roublard, divaguant et provocant – un retour à la manière de son plus grand succès, Fahrenheit 9/11.

Le film de Michael Moore est à l’avant-garde d’une série de films politiques américains, documentaires ou fictions attendus au long du festival. Dans la première catégorie, on trouve les films de deux autres grandes figures du genre, que tout – méthode, style et inclinations politiques – oppose : Frederick Wiseman a filmé une petite ville au milieu des « flyover states » (les Etats qu’on ne fait que survoler) dans Monrovia, Indiana, pendant qu’Errol Morris a tenté de comprendre l’ancien conseiller du locataire de la Maison Blanche Steve Bannon dans American Dharma, déjà présenté à Venise. Les dirigeants du festival se demandent si le politicien d’extrême droite s’invitera à Toronto comme il l’a fait sur le Lido, ce qui pourrait provoquer quelque ­agitation dans une ville plutôt à gauche.

Côté fiction, on a déjà vu ­Monsters and Men, de Renaldo Marcus Green, qui examine en un récit éclaté les conséquences de la mort d’un ancien combattant afro-américain tué par la police de New York et l’on attend, entre autres The Frontrunner, de Jason Reitman, dans lequel Hugh Jackman incarne Gary Hart, candidat démocrate à la Maison Blanche en 1988, défait par un scandale sexuel.

Obsession de Trump pour sa fille

De sexe, il en est question dans Fahrenheit 11/9, car Michael Moore fait sienne la fameuse phrase de Malcolm X : « Par tous les moyens nécessaires ».

Dans la brillante série de montages qui ouvre son film, il aligne les interviews agressives d’Hillary Clinton par des journalistes mâles en superposant à l’image les accusations d’agressions sexuelles dont ces censeurs – Charlie Rose, Matt Lauer, Bill O’Reilly… – ont fait l’objet. Un peu plus loin, la succession d’images fixes ou animées ressassant l’obsession du président des Etats-Unis pour sa fille Ivanka.

Après avoir établi sommairement et vigoureusement les raisons de la défaite d’Hillary Clinton (au premier rang desquelles l’hubris de ses partisans, dont on voit les plus célèbres, de Nancy Pelosi à Jay Z, annoncer son inévitable victoire) et celles pour lesquelles son concurrent n’aurait jamais dû mettre les pieds dans le bureau Ovale, Michael Moore prend la tangente. Il ne s’agit plus de dépeindre les turpitudes de Donald Trump ou les carences de l’appareil démocrate, mais de fouiller dans le terreau sur lesquels ces plantes se sont épanouies.

COMME IL AIME À LE FAIRE, MICHAEL MOORE RETOURNE CHEZ LUI, À FLINT, MICHIGAN

Comme il aime à le faire, le réalisateur retourne chez lui, à Flint, Michigan. La ville ravagée par la désindustrialisation de Roger et moi (1989) est devenue un enfer pour ses habitants, dont les enfants ont été condamnés à boire de l’eau empoisonnée, dont les bâtiments abandonnés sont devenus des cibles pour l’artillerie de l’US Army qui s’entraîne là au combat de rue.

Chacun décidera si Michael Moore force le trait ou s’il se contente d’exprimer en termes simples des situations dont les hommes politiques aiment à dire qu’elles sont compliquées. C’est ce que fait un représentant républicain à la chambre de ­Floride, lorsque l’un des étudiants du lycée de Parkland, ravagé par l’irruption d’un tueur armé d’un fusil d’assaut, l’interroge sur sa position quant à la vente libre de ces armes. Il était inévitable que le réalisateur de Bowling for ­Columbine passe par le lycée Marjorie Stoneman et célèbre ses élèves militants. Car cette deuxième partie de Fahrenheit 11/9 prend la forme d’un tour des Etats-Unis de la résistance. En présentant son film, Michael Moore a revendiqué le terme, l’associant explicitement à la résistance en France sous l’occupation nazie.

Montagnes russes militantes

On a mieux compris cette assimilation en découvrant la troisième partie de son documentaire : elle compare systématiquement les Etats-Unis à l’Allemagne de Weimar et Donald Trump à Adolf Hitler. Le renfort d’historiens, d’un ancien magistrat au tribunal de Nuremberg ne suffit pas à muer cette comparaison en raison. A la fin de la projection, il suffisait de voir Michael Moore, entouré de lycéens de Parkland et de militants de Flint pour comprendre qu’il ne s’agit plus seulement de cinéma mais d’urgence politique, d’intervenir avant qu’il ne soit trop tard.

Il revenait à l’esprit l’un des ­innombrables faits énoncés ­pendant ces deux heures de montagnes russes militantes : depuis 1992, les démocrates ont remporté le vote populaire dans toutes les élections présidentielles, sauf en 2004. Quatre mois avant ce dernier scrutin, sortait le plus grand succès de Michael Moore, Fahrenheit 9/11.

Sur le Web : www.tiff.net/tiff/fahrenheit-119

8 septembre 2018

Barack Obama sonne la charge contre Donald Trump

Par Gilles Paris, Washington, correspondant - Le Monde

L’ancien président a dénoncé, vendredi, le silence des républicains face aux dérives de son successeur et appelé les démocrates à se mobiliser pour les élections de novembre.

Les funérailles du sénateur républicain de l’Arizona John McCain, le 1er septembre, lui avaient déjà donné l’occasion de multiplier les allusions transparentes, mais l’ancien président Barack Obama est passé clairement à l’offensive contre Donald Trump, vendredi devant des étudiants de l’Université de l’Illinois à Urbana-Champaign, à deux mois d’élections de mi-mandat aux allures de référendum pour l’actuel locataire de la Maison Blanche.

Le camp démocrate avait déjà fait la preuve de sa vigueur, manifestée par une floraison de candidatures, notamment féminines, et par de nombreux succès lors d’élections partielles. L’ancien président lui a apporté un socle : une lecture aussi impitoyable que charpentée du trumpisme, doublé d’un appel à la mobilisation.

A circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. Pour Barack Obama, la mise à l’épreuve des institutions du pays justifie qu’un ancien président fasse entendre sa voix. « Un simple coup d’œil aux dernières informations devrait vous dire que ce moment est vraiment différent », a assuré l’ancien occupant du bureau Ovale à la fin d’une semaine qui a été marquée par la parution des bonnes feuilles d’un livre incendiaire de Bob Woodward sur la Maison Blanche, ainsi que par la publication, par le New York Times, d’une tribune anonyme tout aussi alarmiste rédigée par une personne se présentant comme membre de l’administration au pouvoir.

« Les enjeux sont vraiment plus élevés. Les conséquences plus graves si nous choisissons de rester sur la touche », a-t-il dit, « Cela n’a pas commencé avec Donald Trump. Il est un symptôme, pas la cause. Il ne fait que capitaliser les ressentiments que des hommes politiques attisent depuis des années. Une peur et une colère qui sont enracinées dans notre passé, mais aussi liées aux énormes bouleversements en cours. »

« Qu’est-il arrivé au Parti républicain ? »

« Au cours des dernières décennies, la politique de division, de ressentiment et de paranoïa a malheureusement trouvé sa place au sein du Parti républicain. Ce Congrès a défendu des lois sur le financement des campagnes électorales donnant aux milliardaires une influence hors normes sur notre politique », a déploré M. Obama.

« Il a systématiquement attaqué le droit de vote pour rendre plus difficile le vote des jeunes, des minorités et des pauvres. Il a distribué les réductions d’impôts sans tenir compte des déficits. Coupé les programmes sociaux autant que possible (…) Adopté des théories conspirationnistes sauvages, comme celles qui entourent [l’attaque de la représentation diplomatique américaine de] Benghazi, ou mon certificat de naissance [longtemps présenté comme faux par M. Trump]. Rejeté la science. Rejeté le changement climatique (…) Ce n’est pas un programme conservateur. Ce n’est sûrement pas normal. C’est un programme radical », a-t-il affirmé.

« Qu’est-il arrivé au Parti républicain ? », a fait mine de s’interroger l’ancien chef de l’Etat, listant ses revirements, sur la question du déficit budgétaire ou les relations avec la Russie, dénonçant ceux qui assurent « Oui, nous savons que tout ceci est un peu fou » mais qui « semblent totalement privés de colonne vertébrale pour sauvegarder les institutions qui font fonctionner notre démocratie ».

« Soit dit en passant », a-t-il poursuivi dans une allusion à la tribune anonyme qui assure que des conseillers brident l’action de Donald Trump, « l’affirmation que tout ira bien parce qu’il y a des gens à l’intérieur de la Maison Blanche qui ne suivent pas secrètement les ordres du président, ce n’est pas un frein – je suis sérieux ici – ce n’est pas comme ça notre démocratie est censée fonctionner ».

« Ces personnes ne sont pas élues. Ils ne sont pas responsables. Ils ne nous rendent pas service en faisant activement la promotion de 90 % des choses folles qui sortent de la Maison Blanche et en disant : Ne vous inquiétez pas, nous empêchons les 10 % restants. Ce n’est pas comme ça que les choses sont censées fonctionner. Ce n’est pas normal », a-t-il ajouté.

« On ne menace pas la liberté de la presse »

M. Obama s’est livré ensuite à un examen sans concessions de l’action de son successeur. « Lorsque les chiffres du travail sont publiés, les chiffres mensuels des emplois, soudain, les républicains disent que c’est un miracle. Je me permets de leur rappeler que ces chiffres d’emploi sont en fait les mêmes qu’en 2015 et 2016 », a-t-il affirmé.

« Nous sommes censés résister à la discrimination. Et il est évident que nous devons nous dresser clairement et sans équivoque contre des sympathisants nazis. Comment cela peut-il être difficile, de dire que les nazis sont mauvais », a-t-il poursuivi, dans une allusion aux propos ambigus de Donald Trump après les affrontements sanglants de Charlottesville (Virginie) qui avaient opposé, en août 2017, des suprémacistes blancs à des antifascistes.

« On ne devrait pas avoir à rappeler » qu’un président ne doit pas faire « pression sur le ministre de la justice ou sur le FBI [police fédérale] pour qu’il instrumentalise le système pénal pour punir nos opposants politiques », ou qu’il ne peut pas « demander explicitement au ministre de la justice de protéger les membres de son propre parti contre les poursuites parce qu’il y a des élections », a ajouté M. Obama en référence à des déclarations et à des messages publiés sur son compte Twitter par M. Trump.

« On ne devrait pas avoir à dire qu’on ne menace pas la liberté de la presse parce qu’elle publie, ou diffuse, des histoires que l’on n’aime pas. Je me suis plaint beaucoup de [la chaîne conservatrice] Fox News, mais vous ne m’avez jamais entendu menacer de la fermer ou l’appeler l’ennemi du peuple », a-t-il encore fait observer.

Vibrant appel à l’engagement

Fidèle à la ligne modérée suivie tout au long de sa carrière, M. Obama a rejeté comme antidote une radicalisation du Parti démocrate. « Il y a des gens bien intentionnés qui se passionnent pour la justice sociale, qui pensent que les choses se sont tellement dégradées (…) que nous devons combattre le feu avec le feu, que nous devons faire les mêmes choses que les républicains, adopter leurs tactiques (…) Je ne suis pas d’accord avec ça », a ajouté l’ex-président, qui a lancé un vibrant appel à l’engagement.

« En fin de compte, la menace pour notre démocratie ne vient pas seulement de Donald Trump, ni des républicains du Congrès, ni des frères Koch [des milliardaires qui militent pour la dérégulation] et de leurs lobbyistes, ni de trop de compromis de la part des démocrates, ni d’un piratage russe. La plus grande menace pour notre démocratie est l’indifférence. La plus grande menace pour notre démocratie est le cynisme », a-t-il affirmé.

« Si vous pensez que les élections n’ont pas d’importance, j’espère que les deux années écoulées ont modifié votre perception », a insisté M. Obama à l’attention des démocrates abstentionnistes en 2016. « Vous devez faire davantage que retweeter des hashtags, vous devez voter », a-t-il assuré.

En déplacement électoral dans le Dakota du Nord, M. Trump n’a guère tardé pour répliquer à son contempteur, après avoir estimé que son ministre de la justice (attorney general) Jeff Sessions devait, au nom de la « sécurité nationale », « enquêter pour savoir qui est l’auteur » de la tribune du New York Times contre lequel il a évoqué d’éventuelles poursuites. Le président a par ailleurs assuré que le discours de M. Obama l’avait « endormi ».

Gille Paris (Washington, correspondant)

Enquête russe : prison ferme pour un ex-conseiller de Trump Un tribunal fédéral a condamné, vendredi, à quatorze jours de prison George Papadopoulos, un ancien conseiller diplomatique de Donald Trump coupable d’avoir menti dans l’enquête sur une possible collusion entre Moscou et l’équipe de campagne du candidat républicain. M. Papadopoulos a aussi écopé d’une amende de 9 500 dollars (8 200 euros) et d’un an de libération conditionnelle assortie de travaux d’intérêt général. L’homme de 31 ans a été à l’origine de la fameuse enquête russe qui irrite fortement le président Trump. Il avait plaidé coupable en octobre 2017 de faux témoignage à la police fédérale (FBI). Il avait caché aux enquêteurs la vérité sur ses rencontres avec des émissaires de la Russie à quelques mois de l’élection présidentielle de novembre 2016. Sa sentence est relativement légère, étant donné qu’il encourait six mois de prison. M. Papadopoulos fut le premier conseiller de M. Trump à accepter de collaborer avec l’équipe du procureur spécial Robert Mueller. « Il fut le premier domino et beaucoup d’autres sont tombés depuis », ont écrit dans leurs arguments ses avocats, en référence à la mise en cause de l’ancien chef de campagne de M. Trump, Paul Manafort, ou encore de son ancien avocat personnel, Michael Cohen, dans le cadre de cette enquête tentaculaire.

16 août 2018

Turquie : Erdogan dépassé par la crise diplomatique et commerciale avec les Etats-Unis

Par Marie Jégo, Istanbul, correspondante - Le Monde

Le président turc et ses partisans s’enfoncent dans un déni de réalité, alors que l’économie menace de s’effondrer. Et ne rechignent pas à expliquer les difficultés par « un complot ».

Quarante jours après son sacre d’« hyperprésident » aux pouvoirs élargis, le numéro un turc Recep Tayyip Erdogan se retrouve face une crise diplomatique d’ampleur avec les Etats-Unis qui, visiblement, le dépasse et risque d’entraîner le pays vers la récession. Le défi est risqué pour un dirigeant dont la popularité s’est établie sur la promesse de prospérité économique.

En seize ans passés à la tête du pays, d’abord comme premier ministre puis comme président, l’homme est parvenu à prendre le contrôle de toutes les institutions – l’armée, la justice, la police, l’éducation, le Parlement, les médias. Mais, lorsqu’il a voulu diriger l’économie, les choses se sont compliquées.

L’économie turque est fragile car dépendante des financements extérieurs. Effrayés par la perte d’indépendance de la Banque centrale, peu rassurés par la nomination du gendre présidentiel, Berat Albayrak, à la tête du ministère de l’économie et des finances, les investisseurs ont fui.

La crise avec les Etats-Unis a fait le reste. La chute de la livre turque, constante depuis le début de l’année, s’est accélérée peu après le refus d’Ankara de libérer et de renvoyer chez lui le pasteur évangéliste américain Andrew Brunson, détenu depuis vingt-deux mois à Izmir pour « espionnage » et collusion avec des « organisations terroristes », ce qu’il nie.

Washington a sorti son bâton

Le président américain Donald Trump et son vice-président Mike Pence – ce dernier appartient à la même congrégation religieuse que le pasteur Brunson – ont fait de ce dossier judiciaire leur cheval de bataille. Les tweets trumpiens appelant à la libération du pasteur « bon père et bon chrétien » ne produisant aucun effet, Washington a sorti son bâton.

Des sanctions, d’une portée symbolique, ont été prononcées contre deux ministres turcs suivies de l’annonce du doublement des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium turcs à destination des Etats-Unis. En quelques jours, la devise turque a perdu 20 %.

Depuis, les deux alliés de l’OTAN se rendent coup pour coup. Mercredi 15 août, Ankara a riposté avec l’imposition de fortes taxes douanières sur une série de produits américains. Et dans la foulée, un tribunal a rejeté une nouvelle fois la demande de remise en liberté du pasteur Brunson.

Après s’en être remis à Dieu, aux bas de laine de sa population, puis à l’émir du Qatar, Tamim ben Hamad Al-Thani, venu réconforter son allié mercredi à Ankara avec la promesse d’investir encore 15 milliards de dollars (13,2 milliards d’euros) dans l’économie turque, le Reïs ne donne aucun gage d’apaisement.

Les jours sont comptés

De Rize à Ankara, il a tonné ces jours-ci contre la « guerre économique », fomenté en sous main par des ennemis extérieurs, ruinant les efforts de son gendre, qui répète que « toutes les mesures nécessaires ont été prises ».

La presse progouvernementale délire. « Plus qu’une guerre économique, c’est une lutte politique, géopolitique, (…) nous assistons à une désintégration qui va secouer toute la région », écrit Ibrahim Karagül, l’éditorialiste vedette du quotidien Yeni Safak, le 13 août.

Jusqu’où M. Erdogan est-il prêt à aller dans son duel avec l’administration américaine ? Ses options sont limitées. S’engager dans une guerre commerciale contre les Etats-Unis alors que l’économie turque est largement dépendante du billet vert a tout l’air d’un suicide. Emprunter sur les marchés mondiaux, en dollars surtout, est en effet vital pour la Turquie qui va devoir lever 230 milliards de dollars dans les douze mois à venir pour combler son déficit des comptes courants (7 % en 2018) et refinancer sa dette.

Faute d’un compromis avec Washington, d’autres sanctions vont suivre, au risque de voir la monnaie s’effondrer et les investisseurs se détourner davantage. Les jours sont comptés. Washington a posé un ultimatum pour la libération du pasteur et celle de quinze autres personnes injustement détenues – des citoyens américains, des binationaux ainsi que trois employés turcs des missions diplomatiques américaines en Turquie.

Le Reïs, lui, ne voit aucune crise

« L’administration va rester très ferme sur le dossier. Le président est déterminé à 100 % à ramener le pasteur Brunson à la maison et si nous ne voyons rien venir d’ici à quelques jours ou à une semaine d’autres mesures seront prises », a expliqué, mardi, un responsable à la Maison Blanche à l’agence Reuters sous couvert d’anonymat.

Les prochaines sanctions pourraient viser directement le palais. « Il ne serait pas surprenant que le Trésor américain prennent des mesures envers des personnes clés proches d’Erdogan dans le cadre de la liste Magnitski globale », explique Aykan Erdemir, chercheur à la Fondation pour la défense des démocraties à Washington et ancien député du Parlement turc, interrogé par mail.

Adoptée par le Congrès des Etats-Unis contre la Russie en 2012, devenue « globale » en 2016, la liste Magnitski, du nom du juriste russe Sergueï Magnitski, mort de sévices en détention après avoir dénoncé la corruption des autorités, ouvre la porte à des sanctions envers des entreprises ou des personnes physiques ayant bafoué les droits de l’homme.

Face à la tourmente qui s’annonce, le numéro un turc, lui, ne voit aucune crise. « Nous rencontrons régulièrement les industriels, les syndicats, personne ne dit que l’économie va mal ! », a-t-il déclaré le 11 août, face à ses partisans réunis à Rize.

Mobiliser le sentiment nationaliste

Pour Soner Cagaptay, chercheur au Washington Institute et auteur d’une biographie du président turc (The New Sultan, I. B. Tauris, 2017), « Erdogan tire son soutien de la prospérité économique qu’il a contribué à apporter. L’effondrement de la monnaie est particulièrement troublant à ses yeux. Il fait la forte tête, il en appelle à sa base, laquelle est convaincue que la Turquie est attaquée par l’Occident, avec l’idée que les Etats-Unis sont derrière le coup d’Etat raté de [juillet] 2016. Erdogan s’efforce de rejeter la faute sur Washington, mobilisant le sentiment nationaliste pour renforcer son soutien. »

Autour de lui, c’est à qui niera le plus fort la réalité. Sur leurs comptes Facebook et Twitter, ses adeptes ont posté des vidéos où on les voit enflammer des billets de 1 dollar ou se moucher dedans. « Le dollar perd de sa valeur face à la livre », titrait mardi le quotidien progouvernemental Sabah, alors que la devise turque venait de gagner 5 %. Conclusion : « La monnaie américaine a perdu de sa fiabilité. » Sabah est le journal préféré de M. Erdogan. Il ne lit que ça. Ne maîtrisant aucune langue étrangère, il n’a pas accès à la presse internationale, se fiant aux rapports de ses nombreux conseillers, peu enclins à le contredire.

Selon le chercheur Aykan Erdemir, le président « vit dans une autre dimension depuis pas mal de temps déjà ». Sa propension à nier la réalité est « un mécanisme de défense psychologique ». « Il refuse de reconnaître qu’il a détruit l’économie nationale à cause de sa mauvaise gouvernance au service d’un capitalisme de connivence. Il trouve plus commode de dire que la crise a été orchestrée par une “cabale secrète”, qu’il décrit comme “le lobby des taux d’intérêts”. Cette chimère est conforme à la vue complotiste du monde à laquelle il a adhéré pendant sa jeunesse au sein du mouvement islamiste. »

Théorie du complot

Militant de l’islam politique dès l’âge de 21 ans, Recep Tayyip Erdogan a été marqué par deux maîtres à penser, Necmettin Erbakan, le père de la droite islamiste turque, et Necip Fazil Kisakürek, un idéologue islamoconservateur. Comme lui, des générations de conservateurs pieux et de nationalistes ont été nourries de leurs écrits anti-occidentaux et antisémites, fondés sur une approche conspirationniste de l’histoire.

Ainsi, dans ses Mémoires, Necmettin Erbakan affirme que les « sionistes » étaient à la manœuvre en 1923 au moment de la signature du traité de Lausanne. Ce sont eux, assure-t-il, qui ont contraint les Turcs à renoncer à leur identité religieuse en contrepartie de la reconnaissance des frontières du pays.

Certes, le Parti de la justice et du développement (AKP, islamoconservateur, au pouvoir), fondé par M. Erdogan et quelques compagnons en 2001, a pris ses distances avec le courant politique représenté par Necmettin Erbakan. Mais ils adhèrent à la théorie du complot.

« Ces idées farfelues, loin d’être marginales, sont devenues monnaie courante », écrit Svante Cornell, directeur de l’Institut de l’Asie centrale et du Caucase à l’American Foreign Policy Council à Washington, dans une étude consacrée aux racines idéologiques de l’islam turc.

5 août 2018

Erdogan annonce à son tour des sanctions contre des ministres américains

Washington et Ankara multiplient les menaces. Le sort d’un pasteur américain en résidence surveillée en Turquie est au cœur des tensions.

L’escalade continue. Après avoir menacé de le faire, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a demandé samedi 4 août le gel en Turquie des avoirs des ministres de la justice et de l’intérieur américains, répliquant à des sanctions similaires prises par Washington en lien avec la détention d’un pasteur américain, Andrew Brunson.

« Jusqu’à hier soir nous sommes restés patients. Aujourd’hui j’en donne l’instruction : nous gèlerons les avoirs en Turquie des ministres de la justice et de l’intérieur américains, s’ils en ont », a déclaré M. Erdogan lors d’un discours télévisé à Ankara. « Nous ne voulons pas de jeux perdant-perdant. Déplacer une dispute politique et judiciaire sur le terrain économique nuit aux deux pays. »

« La Turquie est un Etat de droit », a rappelé le président turc, qui affirme toujours ne pas pouvoir intervenir dans le procès du pasteur américain. « Ceux qui pensent pouvoir faire reculer la Turquie avec un langage menaçant et des sanctions absurdes ne connaissent pas ce pays », a-t-il ajouté.

Relations tendues

La tension est montée d’un cran ces derniers jours entre Washington et Ankara, autour du sort du pasteur Andrew Brunson. Placé en résidence surveillée en Turquie après un an et demi de détention, le religieux, accusé d’activités « terroristes » et d’espionnage, rejette toutes les accusations portées contre lui. Il risque jusqu’à trente-cinq ans d’emprisonnement.

Washington a imposé mercredi soir des sanctions aux ministres turcs de l’intérieur et de la justice, pour leur rôle présumé dans cette affaire.

Les relations entre la Turquie et les Etats-Unis, qui ont les deux plus grandes armées de l’OTAN, sont aussi compliquées par des désaccords sur le dossier syrien et le sort du prédicateur et opposant turc Fethullah Gülen, exilé en Amérique, dont Ankara réclame avec insistance l’extradition pour son implication présumée dans le putsch avorté de juillet 2016. Cette demande est restée pour l’heure lettre morte.

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