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Jours tranquilles à Paris
sexualite
12 janvier 2020

Cache-téton

shoot 50 (19)

A l’heure où les géants du Web traquent nos plus infimes courbures, où #metoo côtoie #freethenipple (« libérez le téton ») tandis que les Femen dépoitraillent la politique, force est d’admettre que les tétons sont devenus une partie très, très sensible de notre anatomie. Et pas seulement au féminin ! Au pays du Soleil-Levant (dont le drapeau ressemble furieusement à un mamelon écarlate), 84 % des femmes sont dégoûtées par la vision des rondelles transparaissant sous la chemise des salarymen (sondage SoraNews24). Heureusement, l’empire des sens a le sens du commerce : cette année, les cache-tétons masculins se sont vendus comme des petits seins : 55 000 unités. A 8 euros la paire sur le bien nommé Dot Store, ça défrise… d’autant que vous pourrez bientôt acheter des tee-shirts alvéolés haute technologie pour camoufler vos indécents renflements, pour la bagatelle de 62 euros. Ce dont on déduira l’équation suivante : cacher ses seins, ça coûte un bras.

En Europe, l’argument est plus pragmatique qu’esthétique : le joggeur du dimanche évite ce qui irrite tout en tenant sa bourse, à coups de gels, sparadraps et vernis à ongles (comptez 50 centimes la séance sportive confortable et pudique).

Ces timidités vous exaspèrent ? Pas de problème, le grand capital a réponse à tout. Les plus contrariants agrémenteront leur poitrine de faux tétons en relief, tandis que les adeptes des méthodes naturelles se tourneront vers les pompes et autres suceurs, destinés à faire gonfler les mamelons (mais pas les pectoraux, désolée). Entre les aréoles du péché et les auréoles de la vertu, le débat enfle : manifestement, il va falloir prendre nos mamelles en patience. Le Monde

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29 décembre 2019

Chronique - Sexe et alcool, pourvu qu’on ait l’ivresse !

Par Maïa Mazaurette

Pourquoi associons-nous la séduction à l’alcool, alors que nous savons pertinemment qu’il altère notre capacité de décision et nuit aux performances des hommes ?, interroge la chroniqueuse de « La Matinale » Maïa Mazaurette

LE SEXE SELON MAÏA

Aurez-vous encore envie de boire de l’alcool dans trois jours, ou êtes-vous déterminé à vous mettre au défi du « janvier sec » qui fait polémique depuis quelques semaines ? Quelle que soit votre réponse à cette épineuse question (hips), elle aura un impact sur votre vie sexuelle. L’alcool et la sexualité jouent les liaisons dangereuses depuis des millénaires : quand le pays de la séduction est aussi celui du vin, il y a anguille sous roche.

Ainsi, 70 % des Français donnent leur premier rendez-vous amoureux dans un bar ou un restaurant (Harris Interactive, février 2019). Et 61 % des femmes pensent que l’alcool facilite les rencontres, à peu près autant sont déjà rentrées pompettes avec un inconnu (Emmanuelles.fr, janvier 2014). Même chose pour les hommes : 66 % boivent au premier rendez-vous (Castalie, mars 2018). Pas mieux chez les plus jeunes : selon l’application de rencontre Tinder, les émojis « verre de vin rouge » et « chope de bière » font partie du top 20 des millennials en 2019.

Pas mieux non plus chez nos voisins occidentaux ! Un sondage de 2013 montre ainsi qu’en Angleterre, 11 % des adultes qui boivent régulièrement le font systématiquement avant de faire l’amour… essentiellement parce que sans cette stimulation, leur libido leur ferait défaut (UKMedix.com). Sur les campus universitaires américains, la fête est tellement synonyme d’alcool qu’au moins un cinquième des rapports sexuels se produit après que les étudiants ont bu (Psychology of Addictive Behaviors, 2009).

Substance ambivalente

Ce qui nous ramène à notre mois de janvier : le prendrez-vous sec, mouillé, à la paille, on the rocks ? Pour vous aider à vous décider, commençons par rappeler les basiques des conséquences de l’alcool : si le plaisir et les performances ne sont pas toujours au rendez-vous, le désir et la confiance sont augmentés. (Je vous laisse relire ma chronique dédiée à cette question.)

Comme aphrodisiaque, cette substance se révèle ambivalente : les rapports alcoolisés occasionnent plus de regrets, plus de dérapages, et plus d’agressions pures et dures. L’alcoolisation excessive, jusqu’au trou noir, conduit à outrepasser le consentement, au point que certains experts ont pu parler de l’alcool comme d’une « drogue du viol ». C’est ce qu’aura démontré le célèbre cas Brock Turner en 2015 : alors que la vulnérabilité de la victime constitue une circonstance aggravante en France, elle sert régulièrement à excuser les violeurs aux Etats-Unis. (Je vous recommande le texte du juriste Benoît Le Dévédec sur cette question.)

D’ailleurs, même en France, quelques incompréhensions demeurent : selon l’enquête Ipsos-Mémoire traumatique de février 2019, 88 % d’entre nous sont convaincus qu’un rapport avec une femme trop ivre pour consentir est de facto un viol. Ce qui laisse une proportion importante de personnes prêtes à « profiter » de ce genre d’occasions. Pire encore : seuls 66 % des Français pensent qu’il s’agit d’un viol si le rapport en question est une fellation (si cette logique vous échappe, bienvenue au club).

« Lubrifiant social »

Mais au fait, pourquoi buvons-nous, au juste ? Pourquoi associons-nous la séduction à l’alcool, alors que nous savons pertinemment 1) que notre capacité de décision sera altérée, 2) que les performances sexuelles des hommes en pâtiront ? Pourquoi courir avec tant d’enthousiasme vers le désastre ?

Tout d’abord, les rencontres alcoolisées nous donnent l’impression d’ouvrir le champ des possibles. Tout est plus simple, jusqu’à ce que tout devienne terriblement compliqué. L’alcool nous rapproche d’une norme cinématographique idéalisée de la rencontre : un moment flottant, magique, où le désir s’associe à une sensation de danger. Le consentement explicite passe à la trappe ? C’est de la passion. La sexualité est réduite à un enchaînement de gestes précipités ou carrément brouillons ? C’est encore de la passion, et tout nous sera pardonné. (Notons que, dans la communauté BDSM, l’alcool et la drogue font l’objet d’une vigilance soutenue.)

Pour les hommes notamment, plus susceptibles de connaître des défaillances à cause de l’alcool, on assiste à un curieux arbitrage : boire amoindrit la capacité à tenir une érection, mais boire permet aussi d’excuser les fiascos. Un partout, balle au centre.

Deuxièmement, nous buvons pour nous donner du courage : un « lubrifiant social » en quelque sorte, que les Anglo-Saxons appellent « courage liquide »… Ce qui devrait nous interroger. La perspective de rencontrer un être humain est-elle si périlleuse qu’il nous faille de l’aide pour nous « lâcher » ? Eh bien, oui. D’autant que toute situation de séduction nous expose au jugement d’un public : les amis au bar, les collègues au pot du réveillon, le partenaire potentiel qui dira oui ou non… et surtout nous-mêmes.

L’alcool permet de tenir à distance la peur de l’échec, et de justifier avec humour le rejet (si jamais il se produit, car dans le cas contraire d’une séduction réussie, on s’en arrogera évidemment tout le mérite). Face au public, mais aussi face au miroir, on pourra toujours prétendre qu’on n’était pas maître de ses actions.

Immunité temporaire

Enfin, et surtout, j’ai l’impression que nous buvons justement pour compromettre notre capacité de décision, quand, dans notre état normal, on ne s’autoriserait jamais rien – parce que nous serions beaucoup trop raisonnables. L’alcool permet de faire taire notre propension à l’autocensure, comme s’il nous fallait une excuse pour avoir envie, tomber amoureux ou ramener le plombier polonais. Comme s’il fallait se décharger de notre responsabilité, au lieu de l’embrasser à pleine bouche.

Pour reposer le verre de vin, il faudrait admettre que soient exposés des sentiments profondément intimes : l’envie de plaire (pas toujours compatible avec la masculinité traditionnelle), l’envie de coucher (pas toujours compatible avec la féminité traditionnelle). Si on reprend un cocktail, c’est pour nous débarrasser de notre moi social, imperméable et sérieux, et laisser libre cours à notre moi sexuel, vulnérable et foutraque. Nous demandons une immunité temporaire – contre des codes puritains, qui veulent qu’on soit « au-dessus de ça », et contre notre tendance culturelle à confondre désirabilité et valeur personnelle.

Si le sexe était tellement normal, tellement banal, nous n’aurions aucun besoin de l’accompagner d’alcool. Nous pourrions relativiser nos échecs (on ne plaît pas à tout le monde) autant que nos coups de foudre (nos partenaires ne plairont pas à tout le monde). Nous pourrions excuser nos fiascos (ça arrive). Nous pourrions admettre qu’au lit, la lucidité est une meilleure alliée que la demi-conscience.

Peut-être laisserions-nous place, alors, à un autre état modifié de conscience : l’excitation sexuelle. Car, selon un demi-gallon d’études, le désir lui-même est une ivresse, qui nous pousse à raconter n’importe quoi, à prendre des risques, à nous comporter de manière impulsive. Comme l’alcool. Du coup, celles et ceux parmi vous qui opteront pour le janvier sec pourront toujours se rattraper avec un janvier sexe.

21 décembre 2019

A Hollywood, le sexe désormais sous la surveillance attentive des « coordinateurs d’intimité »

Par Clémentine Goldszal

Ils sont coordinateurs d’intimité. Leur mission : planifier et encadrer les scènes de sexe pendant les tournages, en s’assurant que la dignité des actrices est respectée. Nombreux sont ceux qui, dans une industrie traumatisée par l’affaire Weinstein, ne veulent plus s’en passer.

Elles ne sont ni cascadeuses ni maquilleuses. Pas plus productrices, réalisatrices ou régisseuses plateaux. Mais depuis quelque temps, sur les tournages hollywoodiens, elles sont de plus en plus nombreuses. Les équipes techniques se sont habituées à leur présence à leurs côtés, à les voir vérifier que tout se passe comme prévu dans le script. « Lorsqu’un réalisateur dit : “Et là, il lui attrape les nichons”, je suis là pour lui rappeler que nous sommes au travail, explique l’une d’entre elles, Alicia Rodis. Quand j’entends : “Il la baise”, j’encourage l’équipe à reformuler et à préciser, pour que les acteurs sachent exactement où ils vont. »

Cette grande blonde originaire de l’Ohio a travaillé sur les séries The Deuce, Crashing, Watchmen et, plus récemment, sur le téléfilm Deadwood. Son métier ? Coordinatrice d’intimité. Une profession très en vogue à Hollywood, majoritairement féminine, dans une industrie traumatisée par l’affaire Weinstein. Le secteur s’est mis à relire l’histoire du cinéma, à l’exemple de la fameuse scène de sodomie subie par Maria Schneider sur le tournage du Dernier Tango à Paris, de Bernardo Bertolucci. Ce qui avait pu passer pour le coup de génie d’un réalisateur excentrique se révélait être du harcèlement sexuel, autorisé par la promesse d’une scène d’anthologie.

Le cinéma des années 1970 n’est pas le seul coupable. En novembre, l’une des stars de Games of Thrones, Emilia Clarke (alias Daenerys Targaryen), évoquait, dans le podcast « Armchair Expert » des acteurs Dax Shepard et Monica Padman, les pressions qu’elle avait subies sur le tournage de la première saison de la série. « Je me suis retrouvée complètement nue devant tous ces gens sans savoir ce que j’étais supposée faire », confiait-elle. Par la suite, l’actrice a appris à dire non, au prix de disputes avec la production qui lui glissait qu’elle risquait de « décevoir [s]es fans ». « Je leur ai dit d’aller se faire foutre », concluait-elle, bravache.

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Malaise en coulisses

Même lorsque aucune menace n’est proférée, le tournage peut être un lieu de malaise. Gabrielle Carteris, comédienne connue pour son rôle d’Andrea Zuckerman dans la série Beverly Hills 90210, préside aujourd’hui le SAG-Aftra, le principal syndicat d’acteurs d’Hollywood, fort de 160 000 adhérents. Elle confirme avoir vécu ce genre de pression : « S’il est écrit “ils s’embrassent” dans le scénario et qu’en arrivant sur le plateau on s’aperçoit que la scène a été modifiée, il est très difficile de dire non devant toute l’équipe, explique-t-elle. Vous voulez être pro. En plus, on vous met la pression en vous disant : “Tout le monde le fait.” Or, être pro, c’est souvent faire le job sans poser de question. C’est donc formidable d’avoir quelqu’un sur place qui vous soutient et qui peut porter votre voix auprès du réalisateur si besoin. »

« QUAND L’AFFAIRE WEINSTEIN A ÉCLATÉ, TOUT LE MONDE S’EST RENDU COMPTE DE L’IMPORTANCE DE CRÉER UN CADRE SUR LES PLATEAUX. » CLAIRE WARDEN, COORDINATRICE D’INTIMITÉ

Le mouvement #metoo a contribué à favoriser l’émergence au cinéma de ces coordinateurs d’intimité, qui, depuis quelques années, exerçaient dans le monde du théâtre, où ils aidaient à chorégraphier les scènes dénudées pendant les répétitions. En juin 2017, quelques mois avant #metoo, un reportage du New York Times se penchait pour la première fois sur ce métier. On y découvrait le travail de Tonia Sina, cofondatrice, en 2016, de Intimacy Directors International (IDI), l’agence de coordinateurs d’intimité la plus en vue du moment.

Formée sur les planches, Tonia Sina a commencé à s’intéresser au sujet alors qu’elle rédigeait une thèse de pédagogie théâtrale (soutenue en 2006), intitulée « Rencontres intimes, mettre en scène l’intimité et la sensualité ». Après avoir exercé en tant que chorégraphe de scènes de combat, Tonia Sina a mis au point une méthode, « Intimacy for the stage », qui fait référence dans un métier encore complètement autorégulé.

L’Anglaise Claire Warden officie elle aussi sous la bannière IDI. Il y a deux ans, après avoir lu l’article du New York Times, elle a décidé de mettre à profit son expérience d’actrice et de chorégraphe de scènes d’action en devenant coordinatrice d’intimité. « Avant #metoo, sur les plateaux et en répétition, on me demandait souvent mon avis sur les scènes de sexe, mais il n’existait pas de protocole précis, raconte-t-elle. Et puis l’affaire Weinstein a éclaté, et tout le monde s’est rendu compte de l’importance de créer un cadre pour encourager des conversations claires. » Au cours de sa formation avec IDI, Claire Warden a assimilé des éléments de psychologie mais également acquis des connaissances techniques pour planifier et encadrer au mieux les scènes de sexe simulé.

Scénario décortiqué

Autour des cinq piliers de la méthode imaginée par Tania Sina (« consentement, contexte, communication, chorégraphie, conclusion »), les coordinateurs d’intimité entrent en contact, idéalement dès la préproduction, avec l’équipe de tournage. Avant toute chose, ils épluchent attentivement les contrats des comédiens, qui indiquent traditionnellement jusqu’où un acteur ou une actrice est prêt à aller. « Il y a en général un avenant au contrat, précise Claire Warden, qui spécifie si l’actrice consent, par exemple, à montrer ses seins mais pas ses tétons, ou à ce que sa poitrine soit filmée de côté mais pas de face… »

Les costumiers et accessoiristes sont sollicités pour fournir des sous-vêtements de couleur chair et des protections en silicone qui évitent le contact direct entre les parties génitales des acteurs. Le scénario est décortiqué afin que chaque scène, du baiser au tripotage en passant par les scènes de nu, soit pensée en amont. Engagés par la production à la demande des acteurs, et parfois du réalisateur, les coordinateurs sont payés au même tarif journalier que les cascadeurs et autres techniciens.

De son côté, le principal syndicat d’acteurs, SAG-Aftra, s’attelle à la rédaction d’un glossaire permettant aux comédiens de mieux comprendre leurs droits et les termes, souvent techniques, de leurs contrats. L’organisation propose également une relecture des avenants, et use de son influence pour que la présence d’un coordinateur d’intimité ne soit plus considérée comme un luxe.

En off, de nombreux décideurs de Los Angeles soupirent à l’évocation de cette nouvelle contrainte, dénonçant le politiquement correct et une entrave à la créativité. Mais officiellement, ils restent muets. Tout le monde suit le mouvement, même s’il se fait parfois à marche forcée. En octobre 2018, David Simon, l’un des showrunners les plus influents des dernières décennies, créateur de The Wire, Treme ou Show Me A Hero, a été l’un des premiers à s’exprimer sur le sujet, déclarant au magazine Rolling Stone qu’il ne travaillerait plus sans coordinateur d’intimité.

En pleine promotion de la seconde saison de sa série The Deuce, chronique ultraréaliste de l’industrie du cinéma pornographique à New York dans les années 1970, Simon vantait les mérites de la coordinatrice Alicia Rodis, dont il décrivait le rôle ainsi : « Son travail, c’est de faciliter le tournage des scènes de sexe simulé et d’intimité, de manière à protéger les émotions et la dignité des premiers concernés. »

Dans la foulée de ces déclarations, la chaîne du câble HBO, pionnière de l’inventivité télévisuelle depuis les années 1990 (et productrice de The Deuce), annonçait qu’elle ferait désormais appel à un coordinateur d’intimité sur tous ses tournages, et pour toutes les scènes allant du simple baiser à un acte sexuel simulé. Depuis, Netflix, FX, Amazon, Showtime, Hulu ou Disney+ et autres networks prolifiques lui ont emboîté le pas.

Le sexe sous haute surveillance

Impossible d’apparaître à la traîne sur un sujet aussi brûlant que le harcèlement sexuel des actrices face caméra. D’autant qu’Hollywood est pris dans une autre révolution, industrielle celle-ci : la guerre du streaming. Les géants se livrent une concurrence féroce, créant de plus en plus rapidement des milliers d’heures de contenus, ce qui implique des conditions de tournage plus tendues que celles des longs-métrages, et donc plus propices aux abus.

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ENTRE LES PRISES, LA « COORDINATRICE D’INTIMITÉ » TENDAIT À L’ACTRICE UN SPRAY RAFRAÎCHISSANT POUR LA BOUCHE ET DU LUBRIFIANT AROMATISÉ.

Emily Meade expliquait ainsi à Rolling Stone en 2018 que, sur un film, les acteurs étaient souvent prévenus de la teneur des scènes de sexe des semaines à l’avance, ce qui leur donne le temps de se préparer psychologiquement, émotionnellement et physiquement. Mais les séries, disait-elle, étant produites beaucoup plus rapidement, il arrivait que les acteurs ne soient informés des spécificités d’une scène de sexe que la veille du tournage.

Dans un autre reportage que Rolling Stone consacrait à The Deuce étaient détaillées les conditions de tournage idylliques d’une scène de fellation simulée, au cours de laquelle la coordinatrice avait « glissé des coussinets sous les genoux de l’actrice Emily Meade », qui jouait une prostituée devenue star du porno. Entre les prises, elle lui tendait un spray rafraîchissant pour la bouche et du lubrifiant aromatisé.

Le reportage tombait à pic, au moment même où James Franco, acteur vedette de la série et réalisateur de certains épisodes, se retrouvait au cœur d’une polémique potentiellement dévastatrice, en pleine campagne des Oscars pour son film The Disaster Artist : sur Twitter, plusieurs femmes l’accusaient de comportement « inapproprié » lors de tournages et dans le cadre des cours qu’il donnait à Studio 4, son école de cinéma créée en 2014 et précipitamment fermée en 2017.

Outre ces accusations, il se murmurait qu’Emily Meade aurait exigé de la chaîne HBO un cadre strict et menacé de révéler publiquement les dessous du tournage mouvementé de la première saison, où le manque d’encadrement des scènes de sexe, notamment dans les épisodes réalisés par James Franco, l’avait mise éminemment mal à l’aise. In extremis, HBO se serait donc racheté une conduite.

La question de l’intimité sur les tournages est donc loin d’être close. En octobre, au festival du British Film Institute, à Londres, une table ronde était organisée pour débattre de la question. Un réalisateur, une réalisatrice et deux coordinatrices y ont échangé sur le thème « Coordonner l’intimité : comment sécuriser les scènes de sexe ». Ita O’Brien, qui s’est fait un nom en travaillant avec les adolescents de la série Sex Education sur Netflix, y a notamment soulevé le problème de la transmission de maladies lors de baisers « avec la langue », et a recommandé que les équipes de production se renseignent en amont sur le cycle menstruel des actrices, « afin de programmer le tournage des scènes intimes dans les semaines où elles n’ont pas leurs règles ».

18 décembre 2019

Chronique - La misère sexuelle, un argument si pratique

Par Maïa Mazaurette

Plus nous légitimons le faux besoin de pratiquer le sexe avec autrui, plus les « miséreux » se sentent autorisés à le faire peser sur l’ensemble de la société (femmes, enfants, gays…), estime la chroniqueuse de « La Matinale » Maïa Mazaurette, qui appelle à en finir avec ce concept.

LE SEXE SELON MAÏA

Avez-vous remarqué ? Que l’on parle de prostitution, de pornographie, de pédophilie, de culture du viol ou d’abstinence, quelqu’un finit toujours par mentionner le tragique destin des martyrs de la misère sexuelle. Pourvu que ces derniers soient des hommes, bien entendu. Côté femmes, le manque est rigolo (ah, les « nymphos »), dédramatisé (« les femmes n’ont pas de pulsions »), décrédibilisé (« il suffit aux femmes de traverser la rue pour trouver un partenaire »).

Pour les hommes, en revanche, misère sexuelle partout ! Un argument pratique, compassionnel, véritable « petite robe noire » des débats sociétaux. C’est que la misère sexuelle se porte avec tout. Vous pouvez vous en servir pour caler des tables ou pour monter des œufs en neige.

Ce « succès » est étrange : sauf handicap lourd, rien n’empêche les personnes délaissées de se masturber. En matière de « soulagement des pulsions », une masturbation vaut autant qu’un missionnaire.

Précisons donc : si la présence de l’autre est requise pour se réchauffer les pieds, c’est de la détresse affective. Si l’on s’en tient à la reproduction de l’espèce, il faudrait inventer la détresse reproductive. Mais comment parler de misère sexuelle, quand le soulagement sexuel est une ressource dont toutes les personnes valides disposent en quantité infinie ?

Objectivement, cette misère-là est un fantasme. Un concept. Une histoire qu’on aime se raconter. Et pourtant. Non seulement elle est omniprésente dans nos conversations, mais elle est prise au sérieux. On ne plaisante pas avec les forces telluriques du désir (y compris quand ces forces pourraient se balayer d’un revers de main) ! Notre compassion révèle de curieuses élasticités : le risque de mourir de faim ou de froid ne justifie ni le vol ni le squat ; en revanche, la grosse envie de sexe justifie d’outrepasser les règles les plus élémentaires du consentement ou de la vie en société.

Fatalisme sexuel

Pire encore, notre acharnement à faire exister la misère sexuelle en produit. On crée un faux besoin, qui physiologiquement n’existe pas. Son assouvissement génère des troubles, au mieux, et des victimes, au pire. Au moment de payer la facture, nous nous désolons – autant pour les coupables que pour celles et ceux qui ont croisé leur route. Comme s’il y avait là une forme d’équivalence.

Nous prétendons qu’il n’y a pas de solution (« c’est la biologie », « c’est des pauvres types », « les hommes sont des bêtes ») : non seulement nous créons ainsi le problème de toutes pièces, mais nous nous condamnons d’avance à ne jamais le résoudre.

Nous voici donc face à un énième avatar de notre indéboulonnable fatalisme sexuel, qui voudrait que dans le monde profane on puisse déplacer des montagnes, mais que dans la chambre à coucher on n’arrive même pas à soulever le drap.

Nous en payons le prix : plus nous légitimons ce faux besoin, plus les « miséreux » se sentent autorisés à le faire peser sur l’ensemble de la société (femmes, enfants, gays, hommes perçus comme faibles).

Ma position n’est pas celle d’une femme sans cœur (je le prendrai rosé, avec une sauce à l’orange). Au contraire. Je répugne à retourner les couteaux dans des plaies. Or c’est précisément à cette torture qu’on renvoie nos « miséreux », quand on les plaint, ou quand on décrit leur situation comme intolérable. Bien sûr qu’être assailli de désir est embêtant. Mais en reporter la responsabilité sur le monde entier l’est encore plus. Et franchement, être assailli/e du désir des autres est non seulement embêtant mais potentiellement dangereux.

Mépris de la masturbation

Ce qui pose la question du pourquoi. Pourquoi ces faux débats, quand nous pourrions affirmer une bonne fois pour toutes que la masturbation est suffisante ? (Et que, même si elle était insuffisante, on n’en mourrait pas ?)

Pour répondre à cette question, allons exhumer notre histoire collective avec la philosophe Olivia Gazalé qui, dans son remarquable Mythe de la virilité (Robert Laffont, 2017), évoque « l’immense mérite civilisationnel » de la masturbation : « Non seulement la médecine a eu tort d’affirmer que l’onanisme était nuisible à la santé (…), mais les penseurs des Lumières se sont totalement égarés en y voyant un fléau social : il y aurait eu infiniment moins de viols et de prostitution dans l’histoire de l’humanité si la masturbation n’avait pas fait l’objet d’un tel anathème, si le soulagement autarcique des pulsions n’avait pas été diabolisé, si le fait de “ne pas entrer” n’avait pas été criminalisé. »

Ce mépris de la masturbation n’est pas confiné au rayon des antiquités. Il a toujours cours, quoique sous d’autres formes : nous tournons l’autoérotisme en ridicule, nous refusons de le considérer comme du « vrai sexe ». Quand nous moquons les « branleurs », nous créons un repoussoir. Evidemment que les miséreux chercheront à s’en écarter.

Pour autant, ce dénigrement de la masturbation ne suffit pas. Il faut aussi valoriser la pénétration. Olivia Gazalé rappelle cet impératif : « Pour être viril, il faut entrer, c’est-à-dire ne pas se satisfaire tout seul. » Symboliquement, cette « entrée » manifeste un rapport de domination : on s’avance en conquérant, éventuellement en imprégnant (même s’il serait facile de retourner cette symbolique).

La misère sexuelle n’est pas un souci de sexe, d’orgasme, de libido, mais un souci d’identité, de rapport au monde, de hiérarchie des corps. Pour le résoudre, il faut commencer par l’appeler par son nom : non pas « misère sexuelle », mais « crise d’une certaine masculinité ». Or, en 2019, nous ne pouvons plus accepter cette identité virile là, non autonome, n’existant qu’à travers la coopération ou la coercition des femmes. Si les valeurs viriles valorisent l’indépendance, alors cette indépendance doit s’appliquer aussi à la vie sexuelle.

Cache-sexe

La question, ensuite, est de savoir si on a réellement envie de se retrousser les manches. Vu le succès du concept de misère sexuelle, on peut en douter. Pour les hommes, y compris ceux qui ne souffrent d’aucun manque, cet épouvantail est pratique : l’existence de la misère sexuelle permet de transformer le désir masculin en cause nationale de santé publique (en attendant le Téléthon). Elle garantit aussi, à grands coups de misérabilisme, la possibilité de se victimiser au moment de rendre des comptes.

Et ça marche ! Les damoiseaux en détresse suscitent une belle solidarité. Y compris du côté des femmes, qui démontrent leur adaptabilité et leur empathie, quitte à faire passer les souffrances imaginaires des « miséreux » avant leur propre bien-être (« je suis importunée, mais le pauvre, il ne va quand même pas se masturber »).

Alors personnellement, je propose d’arrêter les frais. Je suis fatiguée qu’on fasse passer la frustration pour un danger susceptible d’ébranler la société tout entière (et pourquoi pas la peste bubonique ?). Je suis épuisée qu’on nous menace de « conséquences » à tout bout de champ. Je suis exaspérée de voir les femmes se dévouer, ou être désignées d’office, pour prodiguer du réconfort ; soit de manière préventive (il faut « donner » des rapports sexuels, avant que l’homme ne souffre), soit de manière curative (il faut se mettre à disposition des hommes qui souffrent, avant qu’ils n’explosent comme des Cocotte-Minute et qu’ils se « lâchent » sur la première personne venue).

Enfin, je suis dérangée qu’on utilise le vocabulaire de l’indignation morale (la misère et ses misérables) à des fins immorales (excuser des comportements antisociaux ou dégradants). La misère sexuelle n’est qu’un cache-sexe. Pour résoudre le vrai problème, il va falloir mettre les mains.

1 décembre 2019

Dix conseils pour du slow sex sans stress

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Par Maïa Mazaurette

Pour faire l’amour, on ressent le besoin d’être détendu, mais il faudrait avoir un rapport sexuel pour l’être. La solution ? Prendre son temps, oublier la course à l’orgasme…, nous explique notre chroniqueuse de La Matinale Maïa Mazaurette. Et si on essayait ?

LE SEXE SELON MAÏA

Le sexe, un antistress ? C’est une certitude. Déjà parce que cette activité libère des hormones associées à l’énergie et au bien-être (dopamine, ocytocine, endorphines, testostérone). Ensuite parce que ce déferlement hormonal améliore notre survie, et pas seulement en reproduisant l’espèce : renforcement du système cardio-vasculaire et du système immunitaire, aide à l’endormissement, effet antidouleur, retour de l’être aimé, cure contre la peste bubonique et les écrouelles (bon, presque).

Le petit hic dans cette histoire, c’est qu’on ressent souvent le besoin d’être détendu pour commencer un rapport sexuel, mais qu’il faudrait se livrer au rapport sexuel pour l’être. La traditionnelle question « qui fait l’homme, qui fait la femme ? » prend donc une tournure nettement plus métaphysique : qui fait l’œuf, qui fait la poule ?

Heureusement, les experts en sexe no stress sont là pour nous aider à nous détendre – avec, et par, les pratiques sexuelles. On essaie ? On décrispe ses chakras ? (Ne faites pas les malins : nous sommes dimanche, vous n’avez objectivement rien de mieux à faire.)

1. Le stress n’est pas notre ennemi

Enfin, pas à tous les coups. C’est Magali Croset-Calisto, sexologue et psychologue, auteure du tout récent ouvrage Moins de stress grâce au sexe (Albin Michel, 220 pages, 17,90 euros), qui nous le rappelle : le stress, quand il ne nous paralyse pas, constitue une ressource positive. La fameuse ocytocine, hormone du lien (ou du plaisir, ou de la confiance) est aussi une hormone du stress.

Nous pouvons donc commencer à résoudre notre équation : le stress est un problème pour la sexualité, mais aussi une solution. A condition qu’on ne panique pas, et qu’on se concentre sur autre chose que ses effets potentiellement négatifs (au rang desquels l’anorgasmie, les dysfonctions érectiles ou les douleurs génitales).

2. Prenons le temps

On ne le répétera jamais assez : les rapports expéditifs se révèlent rarement transcendants (voir notre chronique sur la question). Si vous n’avez pas le temps de faire l’amour aussi souvent que vous l’espérez, espacez les interactions, quitte à les programmer… mais privilégiez la qualité plutôt que la quantité. Sinon, vous en tirerez autant de satisfaction qu’après des coquillettes au jambon micro-ondables : ça calme sur le moment, mais paradoxalement, on reste sur sa faim.

Evidemment, en nos temps d’hyperconnexion, d’accélération, d’urgence, de saison 3 de The Crown sur Netlfix, ça n’est pas évident. Pour récupérer du temps de cerveau disponible, et idéalement du temps d’ennui, lancez immédiatement votre smartphone ou tablette par la fenêtre. Enfin, après avoir fini cette chronique.

3. Réapprenez à respirer

Un petit exercice de cohérence cardiaque, peut-être ? Pendant trois minutes, enchaînez des inspirations de cinq secondes, puis des expirations de cinq secondes. Selon Magali Croset-Calisto, cette mini-routine permettra de vous remettre en phase et d’éloigner les tensions qui polluent votre attention. Sur le papier, c’est un jeu d’enfant. Mais si vous disposez d’une capacité d’attention de deux secondes, l’application Oak devrait vous aider à vous concentrer (c’est celle que j’utilise… pendant mes deux secondes d’attention).

Si votre partenaire est dans le coin, vous pouvez aussi respirer ensemble, de manière synchrone ou alternée. Profitez-en pour (re) sentir l’autre, pour faire attention à son odeur. Le désir passe aussi par là.

4. Débranchez vos angoisses de performance

Votre pénis est suffisamment gros (inutile de résister à cette information, je fais ce boulot depuis quinze ans, je sais mieux que vous). Votre vie sexuelle est suffisamment grosse aussi : si vous faisiez l’amour deux fois plus souvent, avec deux fois plus de partenaires et deux fois plus de virtuosité, vous en voudriez quatre fois plus. Ou huit fois plus. Ce désir de réassurance n’a pas de fin. Mieux vaut apprendre à gérer sa vulnérabilité – et s’accepter comme on est (avec son micropénis le cas échéant).

5. Oubliez la course à l’orgasme

C’est sans doute le message le plus important des spécialistes : laissez tomber le vocabulaire de pulsion, de décharge ou d’excitation. Arrêtez de vous donner pour objectif de jouir et faire jouir, avec feuille de route militaire, tambours et trompettes.

Contre-intuitif ? C’est sûr : on nous a toujours répété que la tension sexuelle était l’alpha et l’oméga de nos interactions érotiques. Les adeptes de cette vision du sexe pensent que sans tension, le rapport sexuel sera ennuyeux. Pour ma part, je pense que ces personnes vont attraper un ulcère de l’estomac. Pourquoi ne pas remplacer la tension par la tendresse, au moins de temps en temps ?

Dans l’essai Le Slow Sex (Marabout poche, 2017), le couple Anne et Jean-François Descombes dénonce ainsi une sexualité conventionnelle qui consiste à « passer plus de temps à faire qu’à ressentir ». Pour ces animateurs en Gestalt, aquabalancing et eutonie (par pitié, ne me demandez pas ce que ces disciplines recouvrent), l’abandon de l’orgasme à tout prix « libère de la tension de ce qui devrait être. Spontanément, nous réduisons la quantité d’efforts physiques mis en jeu, nous en faisons moins. Nous pouvons accueillir ce que nous vivons, nous ouvrir à notre partenaire et nous abandonner à l’évidence des corps ».

6. Ne considérez pas la libido comme un indicateur infaillible

La présence ou l’absence de désir sont souvent prioritaires dans notre initiative sexuelle. Mais dans le slow sex, on cherche avant tout un moment d’intimité partagée, des retrouvailles, voire une consolation. La motivation peut donc dépasser la simple réponse à ses envies (pulsion interne) ou des partenaires (pulsion externe).

L’excitation est une composante facultative : les bienfaits qu’on retirera de l’interaction sexuelle sont suffisants pour se mettre au lit. Il suffit de les anticiper (selon l’effet bien connu des amateurs de vacances à la mer : « d’abord elle est froide, mais elle est bonne quand on est dedans »).

7. Détendez-vous (bon sang de bois bandé)

Alors que l’injonction est fréquente de se muscler le vagin, de se fortifier le périnée, de se bétonner les abdos et de se cristalliser le fessier, détendez-vous. Laissez venir. Ce n’est pas grave si votre érection est molle ou inexistante, parce que votre objectif est de vous déstresser. De toute façon, rien qu’en utilisant des mouvements lents, rien qu’en faisant retomber la pression, le corps devrait tout naturellement se réveiller et révéler sa capacité d’accueil (pour les hommes comme pour les femmes).

8. Boostez votre attention

Avez-vous encore pensé à la liste de courses pendant l’amour ? Inutile de battre votre coulpe (gardez ça pour la soirée BDSM de vendredi prochain) : décrocher de temps en temps, c’est banal. Utilisez les techniques de pleine conscience pour revenir dans votre peau, ici et maintenant (en respirant, en scannant votre corps de bas en haut, etc.).

Si vous êtes perturbé(e) émotionnellement ou carrément en crise, Anne et Jean-François Descombes recommandent de bouger, courir, se défouler ailleurs avant de recourir au sexe : sinon, votre partenaire pourrait se sentir instrumentalisé(e), ce qui pourrait générer d’autres tensions. D’abord le footing, ensuite le sexe.

9. Expérimentez différents types de contact

Notamment le toucher, et précisément le toucher sans intention. Le couple Descombes parle de rapport « passionnément immobile ». Magali Croset-Calisto propose de se bander mutuellement les yeux, afin de mieux se focaliser sur ses sensations.

Les modalités de contact elles-mêmes pourront comporter la pénétration profonde, mais aussi la pénétration sans érection (ça viendra, ou ça ne viendra pas, de toute façon l’objectif est ailleurs) : l’intensité de la présence est plus importante que l’intensité de l’érection. Ne privilégiez pas la friction énergique ou les va-et-vient : vous avez le droit de vous poser tout simplement l’un avec l’autre, avec ou sans pénétration, pour ressentir la chaleur et la texture des corps. Profitez du voyage plutôt que de la seule destination.

10. Alignez votre sexualité et vos valeurs personnelles

Si on fait tomber toutes les obligations, cela vaut autant pour celles du « bon goût » sexuel (toujours plus de transgression, toujours plus de rigidité, sinon on s’ennuie et nos testicules vont tomber en poussière !) que pour celles recommandées par les spécialistes de la détente sexuelle. Vous avez le droit d’être stressé, tendu, obsédé par le chronomètre (ça va, cet ulcère ?). Vous avez le droit aussi de vous contenter d’un orgasme obtenu en trois secondes douche comprise. Parce qu’en slow sex ou en sexe no stress, même les conseils tiennent de l’injonction molle : prenez-les avec des pincettes, manipulez-les avec la délicatesse qui vous caractérise.

Si certaines recommandations ne marchent pas, si certaines vous paraissent trop ésotériques, laissez tomber : le comble serait de faire du sexe hors performance… une autre forme de performance.

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25 novembre 2019

Chronique - Les toilettes, dernier lieu de l’intime

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Par Maïa Mazaurette

Sujets tabous s’il en est, les fonctions de miction et d’excrétion provoquent souvent le dégoût. Mais le plaisir sexuel ne peut pas faire l’économie de la connexion avec les organes voisins, nous rappelle la chroniqueuse de « La Matinale », Maïa Mazaurette.

LE SEXE SELON MAÏA

Etes-vous en train de lire cette chronique aux toilettes ? Aucune honte à l’admettre : 40 % des Français consultent les informations au petit coin, selon un sondage Plyce publié en 2013. Ma question vous a-t-elle embarrassé ? On touche là, sans doute, au dernier tabou.

Ou du moins, au dernier lieu de l’intime. L’écrivain américain Dave Eggers faisait ainsi récemment remarquer, au micro de Vox Media, que les toilettes font partie des ultimes mètres carrés résistant à l’exigence de transparence numérique (à condition d’oublier les failles de sécurité des smartphones et l’écoute constante des assistants électroniques).

Tabou, la sexualité ? Moins que les fonctions de miction et d’excrétion, qui définissent les contours de l’obscène. Et que même les plus audacieux ne posteront pas sur Instagram. En 2019, on peut coucher le premier soir, mais, à ma connaissance, personne ne laisse la porte des toilettes ouverte le premier soir. (Etiez-vous en train de déguster votre croissant du matin ? Oups.)

C’est que la continuité des activités de chambre et des toilettes est évidente. Elle se joue sur le terrain anatomique (les mêmes organes sont en jeu), mais aussi dans l’imaginaire (celui des parties basses et honteuses). Le cloaque n’est pas loin, qui nous réduit à un simple tube indifférencié.

Question de fluide

Dans Le Corps souillé. Gore, pornographie et fluides corporels (Editions de L’Instant même, mars 2019), le docteur en communication Eric Falardeau met les pieds dans le plat. Pour lui, les fluides provoquent le malaise parce qu’ils questionnent la limite de notre corps : « Il n’y a plus de frontière entre le dedans et le dehors, l’intérieur et l’extérieur, le subjectif et l’objectif, la matière et l’esprit. » On pourrait utiliser exactement les mêmes mots pour définir une relation sexuelle réussie, non ?

Eric Falardeau rappelle que nos écoulements divers provoquent à la fois le dégoût, la douleur, la jouissance et la fascination. Selon Freud, il faut renoncer à cette jouissance au nom de la dignité sociale. Mais comment fait-on, nos organes de plaisir produisent aussi ces écoulements ? L’indignité contamine alors les rapports sexuels. (Il est bon, ce croissant ?)

Liaisons dangereuses

Nous voici donc sur le fil du rasoir : les rapports sexuels expriment (parfois) notre amour, et nous font toucher (parfois) au sublime. Mais ces transports utilisent des zones associées au biologique, au trivial, à l’animal et même à la mort.

Ce qui produit en nous un terrible doute : tout passage à l’acte sexuel gangrène-t-il l’amour et le désir ? Si l’urine et les excréments sont des déchets, alors la cyprine et la semence devraient l’être aussi… Sauf quand on les considère comme des forces de vie. Ce qui est loin d’être toujours le cas. La pornographie présente ainsi le sperme comme quelque chose qui avilit et humilie, alors même qu’objectivement on parle d’un liquide biologique dont l’émission donne du plaisir et, en croisant les doigts, des enfants pas trop ingrats.

A entretenir cette proximité entre désir et répulsion, nous crachons dans la soupe – c’est le cas de le dire. Car, si notre dégoût pour l’urine et les fèces nous a historiquement défendus contre d’éventuels pathogènes, les temps ont changé. Notre niveau d’hygiène nous préserve généralement des germes mortels. Nous savons que le vagin est autonettoyant. Du coup, le tabou sert surtout à vendre des savons intimes au prix de l’or (en attendant qu’on invente les lingots à pH neutre).

« Toilettes publiques, affaires privées »

On peut, bien évidemment, transcender notre dégoût. Par exemple en rappelant le rôle de la prostate dans l’éjaculation, et des muscles anaux dans l’orgasme : pudeur ou pas, le plaisir sexuel ne peut pas faire l’économie de la connexion entre les différents organes. Quant aux moins frileux parmi vous, sans doute assaisonneront-ils leur croissant dominical de la proverbiale douche dorée. Si les chiffres concernant la prévalence de la scatophilie n’existent pas, on sait que 10 % des hommes et 3,5 % des femmes aimeraient uriner sur leur partenaire ou qu’on leur urine dessus (université de Montréal, 2014).

Et ce fantasme ne date pas d’hier. Dans une exposition présentée jusqu’au 1er décembre au Point éphémère, à Paris – mais aussi dans un ouvrage appelé Les Tasses. Toilettes publiques - affaires privées (éditions Agua, novembre 2019) –, le photographe Marc Martin rappelle à notre mémoire les dessous oubliés des pissotières de Paris, où des homosexuels, travestis et prostitués se sont retrouvés pendant plus d’un siècle.

Sordide ? Attention à nos hypocrisies ! Qu’est-ce qui est le plus sordide, au juste : des étreintes dans des vespasiennes, ou l’interdiction de certaines expressions sexuelles ? Quelques moments de plaisir, ou la privatisation des lieux de rencontre, qui soumet les rapports à des impératifs économiques excluant les plus pauvres ?

Questions de pouvoir

Car reconnaissons-le : notre dégoût affiché pour les fonctions naturelles du corps est aussi un vecteur de ridiculisation des personnes déjà discriminées. La répulsion pour les fèces nourrit l’homophobie, de même que les grimaces face aux menstruations confortent le mépris des femmes. Quand on répète de manière automatique que telle ou telle pratique est abjecte « par nature », nous induisons une hiérarchie qui, comme par hasard, conforte les dominants (ainsi les hommes sexistes considèrent-ils la sodomie passive comme dégoûtante, mais la sodomie active comme jouissive – il va falloir se décider).

Rien d’étonnant alors à ce que la question des toilettes cristallise les tensions politiques du moment, jusque dans le couple (la position par défaut de la lunette définit une norme, donc une position de pouvoir). Pensons aussi à nos polémiques concernant les trans : qui a accès à quels lieux d’intimité, pour quelles raisons.

Au-delà du tabou

Dans ses Variations scatologiques. Pour une poétique des entrailles (La Musardine, 2005), le psychologue Bob O’Neill rappelait que la sexualité est « fondamentale » – en lien, donc, avec notre fondement : « Dans le langage populaire, le sexe est toujours vulgarisé : c’est le cul. On parle d’effets de cul, d’histoire de cul, de film de cul, etc. » Avant de citer saint Augustin : « Inter faeces et urinam nascimur » (« nous naissons entre la merde et l’urine »). Pardon, vous ai-je souhaité bon appétit quand vous avez entamé ce croissant ?

Nous nous plaignons parfois que les tabous tombent : en voici un qui reste bien implanté. Pourquoi clamerions-nous en permanence que « ce n’est pas sale », si on ne cherchait pas à s’en convaincre ? Malgré l’obsession culturelle des dernières années pour les fessiers rebondis, on continue d’être gêné s’il faut déféquer chez un nouveau partenaire, ou si on pète entre de beaux draps (les curieux pourront écouter mon podcast dédié sur Arte Radio). Google a beau afficher pas moins de 2 660 pages Web consacrées à la poop conversation, le sujet reste évité.

Y compris par les chercheurs. Ainsi ignore-t-on à quel moment certains couples acceptent la porte ouverte, qui la laisse ouverte, ou pourquoi certains opteront pour des toilettes japonaises qui « couvrent » tout bruit indiscret.

Au contact de l’obscène

Faut-il parler plus ouvertement de ces sujets ? D’après les chiffres rendus publics ce mardi et concernant les toilettes scolaires, il serait temps. Car notre pudeur heurte aussi nos enfants : quatre élèves sur cinq préfèrent se retenir… et la moitié d’entre eux rapportent que les WC sont un lieu où on se fait embêter. De quoi donner envie de s’asseoir sur les tabous, non ?

Mais d’accord, personne ne devrait nous obliger à parler de « ça » lors d’un premier rendez-vous. Ou quand vous mang votre croissant dominical. Mais il y a une différence entre l’indicible et l’impensé, surtout quand, comme le fait remarquer Bob O’Neill, « le tabou d’en parler dépasse en impolitesse le tabou de la chose elle-même ».

Si notre dégoût pour des fonctions parfaitement naturelles nous pousse à délégitimer certaines pratiques, dénigrer certaines populations, reléguer toute sexualité au dégueulasse, voire nous pincer le nez devant les problèmes des enfants, alors c’est plus que de la démission intellectuelle : c’est de l’irresponsabilité.

Sur ces mots, je vous abandonne à ceux d’un passionné : Victor Hugo, qui consacre dans Les Misérables des pages entières à la poésie du cloaque. On peut y lire que « l’égout, c’est la conscience de la ville. Tout y converge, et s’y confronte. Dans ce lieu livide, il y a des ténèbres, mais il n’y a plus de secrets (…) Cette sincérité de l’immondice nous plaît, et repose l’âme ». Bon croissant. Et puis bonne digestion, surtout.

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23 novembre 2019

Quels sont les fantasmes sexuels les plus courants (chez les hommes et chez les femmes)?

Du threesome aux orgies, en passant par les relations sexuelles dans les lieux publics et le sadomasochisme, voici les fantasmes sexuels les plus courants chez les hommes et les femmes, selon les sexologues.

Quels sont les fantasmes sexuels les plus courants chez les hommes et les femmes ? Nous sommes sûrs que vous vous êtes déjà posé cette question au moins une fois, et nous avons la réponse, études récentes menées par des sexologues experts à l'appui. Et ils vont des trios et des orgies aux lieux publics en passant par des pratiques considérées comme "interdites" comme le BDSM. Vous êtes d’accord ? Sont-elles aussi les vôtres ? Il suffit maintenant de passer à l’étape suivante.

1. Faire des plans à trois et des orgies

Pas de surprise, hein ? Le sexe à trois et l’orgie, que vous fassiez ou non partie de ce groupe, est un de ces fantasmes que nous avons tous eus. Pourquoi ? Nous pourrions dire que, plus il y en a, mieux c’est. Nous savons déjà que le sexe ne va pas toujours ainsi (parfois moins est plus), mais ce genre de fantasmes remettent en question notre monogamie intériorisée.

2. Le BDSM

Il est facile de blâmer (ou de remercier) 50 nuances de Grey et son adaptation au cinéma, mais le fait est que les jeux de rôle dans lesquels nous sommes dominés ou dominants ont toujours été inclus dans nos rêveries érotiques. Ce terme englobe des pratiques comme la Domination, la Discipline, la Soumission et le Sadomasochisme, consensuels, bien sûr, parmi tous ceux qui y participent.

3. Le sexe en public

Un autre fantasme qui nous permet de renverser les conventions sociales autour de l'amour et du sexe. L'amour peut être montré à tout le monde, bien sûr, mais le sexe est pour la chambre à coucher. Eh bien, ce n'est pas comme ça pour ceux qui rêvent de telles situations, et encore moins pour ceux qui les vivent. N'avez-vous pas rêvé de le faire dans un ascenseur ? Ou directement dans des lieux semi-publics ?

4. Relations ouvertes

Vous pensez peut-être que le fait d'imaginer avoir des relations sexuelles dans des relations ouvertes a beaucoup à voir avec ce dont nous avons parlé des pratiques de groupe, mais si dans le premier épigraphe nous avons parlé de la morbidité du groupe précisément, ici nous lions la liberté au-delà de notre partenaire. Beaucoup de gens en rêvent, avec des relations permissives dans lesquelles le sexe peut être partagé avec plusieurs amants.

5. Connus et inconnus

Comme nous l’avons indiqué tout à l’heure, parfois ce qui nous excite, c’est ce qu’on nous a enseigné qui ne va pas. Mais dans le sexe, (presque) tout va bien. Le pratiquer aussi avec des connaissances et des inconnus. N’est-ce pas contradictoire ? En fait, non. Le faire avec quelqu'un que vous ne connaissez pas peut vous aider, mais aussi avec des amis et des collègues de travail avec qui vous entretenez un autre type de relation.

6. Bon sexe

C'est drôle, n'est-ce pas ? Que nous fantasmions sur le sexe intense, significatif, romantique, qui nous fait nous sentir désirés mais aussi appréciés, en dit long sur le sexe que nous pratiquons dans notre vie quotidienne. Est-ce si frustrant ? Nous pouvons l'appliquer à la fois aux célibataires et aux personnes mariées, à ceux qui ont des relations superficielles sporadiques mais aussi à ceux qui ont perdu le désir de monotonie.

7. Rencontres homosexuelles

Ici, on touche à l’os, surtout dans l’exemple des hommes hétérosexuels, plus réticents que les femmes à reconnaître qu’un type leur semble beau, alors ne parlons pas de cas où il y a de l’attirance et du désir, même quand on ne parle pas d’homosexualité. Après tout, nous avons tous été un peu attirés par quelqu’un de notre sexe, et c’est de là que naît le fantasme.

8. Voir son partenaire avec une autre personne

Une autre illusion qui s’inscrit dans le sexe de groupe et dans la remise en question de la monogamie. Avez-vous déjà fantasmé que votre partenaire ait des relations avec quelqu’un d’autre, et que vous soyez témoin ? Il y a aussi une certaine attirance pour une certaine idée de possession (qui n’est pas problématique quand on parle uniquement de fantasmes) et de la liberté de partager le désir que l’on comprend exclusivement avec d’autres amants.

9. Orgasmes multiples

Parmi les fantasmes sexuels les plus courants (pour les hommes comme pour les femmes), il y a celui-ci qui se distingue particulièrement, et même si vous pensez qu’il y en a plus dans le cas des femmes, vous vous trompez. Certains sexologues reconnaissent que ce sont les hommes qui rêvent d'aider leur partenaire à atteindre des orgasmes multiples, en réaction à des rapports sexuels frustrants dans lesquels il n'y a pas de point culminant de leur part.

10. Pratiques inhabituelles dans le couple

Ici nous pouvons inclure, avec la permission des experts, toutes les pratiques qui échappent à ce qu'un couple fait habituellement, que ce soit des fantasmes avec les pieds, des jeux de rôle ou des costumes, des jouets pour les zones érogènes, voire des fruits et des boissons stimulantes. Sortir de la zone de confort est une intonation érotique essentielle, mais faut-il la mettre en pratique ?

Via GQ España.

17 novembre 2019

La masturbation ne rend plus sourd (mais elle nous rend toujours muets)

Par Maïa Mazaurette

Si l’autoérotisme est plus largement pratiqué, il n’en est pas plus accepté socialement. Et pourtant, il est aussi légitime, jubilatoire et riche de découvertes qu’un rapport « normal », insiste la chroniqueuse de « La Matinale » Maïa Mazaurette.

LE SEXE SELON MAÏA

Banale, la masturbation ? On pourrait le penser : 85 % des Français l’ont déjà pratiquée. Plus précisément, 76 % des femmes et 95 % des hommes (chiffres Ifop/Elle, 2019). Pourtant, quand on commence à décortiquer les chiffres, c’est plus compliqué. Par exemple, la moitié des femmes se masturbent rarement ou jamais : cette « formidable » banalisation reste timide.

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Photos : Petter Hegre

Et quand on décortique les discours, c’est carrément la cour des miracles. Une petite escapade du côté des recherches associées dans Google, peut-être ? A vos risques et périls, alors : les internautes se demandent si l’autoérotisme aura des effets secondaires sur leur cerveau, leurs reins, leur calvitie, leur acné, si c’est un péché (selon la Bible, dans l’hindouisme), s’ils vont devenir dépendants, et même s’ils vont grossir. Les vingt-cinq premiers résultats sont presque unanimement négatifs. En France spécifiquement, les curieux recherchent la masturbation… intellectuelle. Ça ne s’invente pas.

Pour se débarrasser du stress, mieux dormir

La masturbation n’est plus passible des cercles de l’enfer, d’accord. Mais elle reste déconsidérée. On la considère comme un pis-aller destiné à se soulager, soit entre deux partenaires, soit entre deux relations sexuelles. Pourtant, selon une étude Tenga/PSB parue cette année, à peine 2 % d’entre nous se masturbent parce qu’ils ne peuvent pas trouver de partenaire. Et seulement 3 % parce que le ou la partenaire en question préfère le Scrabble.

Nos motivations réelles sont bien plus positives : les Français se touchent essentiellement pour se donner du plaisir (30 %), pour se soulager (26 %) ou pour se débarrasser du stress (19 %). Si vous ajoutez à cela l’aide à l’endormissement (6 %), le côté feel-good (4 %) ou l’amélioration des performances (2 %), vous obtenez une vision quasiment thérapeutique de la masturbation. 64 % d’entre nous adhèrent d’ailleurs à cette idée : se caresser, c’est prendre soin de soi.

L’idée que cette pratique « remplace » le rapport interpersonnel, à première vue, n’est pas complètement fausse : les deux tiers des personnes en couple se masturbent moins que quand elles étaient célibataires. Et pourtant… 65 % des Français en couple le font quand même – et les femmes, plus souvent que les hommes !

C’est là que commencent à apparaître des divisions selon le genre, le sexe ou l’orientation. Par exemple, 42 % des femmes ont autant de plaisir en se masturbant qu’en faisant l’amour (23 % préfèrent la masturbation). Contrairement à ce que notre imaginaire indique, ce sont les hommes – ces grands romantiques – qui préfèrent le sexe interrelationnel (52 % contre 36 % des femmes).

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Un sujet tabou

La masturbation et le couple sont perméables, d’accord. On pourrait penser que cette coexistence des plaisirs privés et partagés démontre une forte acceptabilité. Cependant, on ne peut pas toujours en parler librement. 48 % des hommes et 43 % des femmes avouent ainsi avoir déjà menti concernant leurs pratiques masturbatoires.

Ce sont les jeunes qui sont les plus enclins aux confidences : 77 % des moins de 23 ans en parlent (seulement 53 % des plus de 40 ans), et 66 % voudraient qu’on en discute encore plus ouvertement (41 % des plus de 40 ans) – notamment pendant les cours d’éducation sexuelle (70 % des jeunes y sont favorables, et 78 % des LGBT+).

Une meilleure transmission des connaissances serait d’ailleurs bien utile : si les hommes disent commencer à expérimenter à 14 ans, et les femmes presque à 17 ans, la moitié d’entre eux et les deux tiers d’entre elles ont en effet dû apprendre toutes seules comment faire – ce qui consiste à réinventer la roue (alors qu’on pourrait envoyer des satellites sur Vénus).

Mais au fait, pourquoi ne pas en parler ? Chez les grands discrets, 58 % considèrent qu’il s’agit d’une chose qui ne se discute pas, 25 % ont honte de leurs pratiques (on retrouve plus souvent des hommes que des femmes dans cette catégorie), 15 % ne veulent pas que leur partenaire soit au courant. 40 % préfèrent ne pas imaginer que l’autre se masturbe, pour des raisons un peu différentes selon le genre : les hommes n’aiment pas que leur partenaire se touche en leur absence (36 %), les femmes n’aiment pas que leur partenaire regarde du porno (27 %) – en extrapolant sauvagement, on pourrait avancer que les hommes se situent dans une logique de possession physique, et les femmes dans une envie de contrôle mental.

Une pratique à partager

Les timides ont-ils tort ? Question de point de vue ! La masturbation n’est privée que si on le décide : elle peut parfaitement s’intégrer dans le répertoire du couple. Les plaisirs solitaires ne sont nullement condamnés à l’être, et jusqu’à preuve du contraire, les sextoys ne tombent pas en panne quand un partenaire entre dans la chambre. Il existe même quantité de pratiques consistant à partager et guider la masturbation – quelle extraordinaire occasion de relire notre chronique sur la question, n’est-ce pas ?

Se masturber ensemble : cette idée autrefois inimaginable commence à faire son chemin. 44 % des Français disent s’être déjà masturbés de concert. 15 % l’ont fait pendant que l’autre regardait (ou regardait pendant que l’autre agissait), presque 20 % l’ont fait par téléphone ou autre technologie. Chez celles et ceux-là, aucun problème métaphysique : 39 % estiment que la masturbation est naturelle, 23 % veulent que leurs partenaires fassent ce qui les rend heureux.

Fantasmes honteux

Assiste-t-on à la fin d’un tabou ? A voir. Car si la masturbation peut être tenue pour thérapeutique, si elle est sans rapport avec l’absence de partenaire ou un quelconque échec du désir, comment se fait-il qu’une majorité de Français ne la partagent pas, et que parmi les plus de 40 ans, presque la moitié n’en parlent jamais ?

Il est possible que la masturbation reste perçue comme sale et embarrassante, encore aujourd’hui… parce qu’on y associe des choses problématiques, comme des fantasmes honteux, l’embarras des premiers émois, ou les images que nous consommons. Notamment dans le cas des hommes, qui sont 71 % à regarder du porno (deux fois plus que les femmes). Les femmes, en revanche, ont beaucoup plus souvent tendance à utiliser leur imagination (la moitié d’entre elles). Elles recourent aussi à des histoires (10 %) ou de la musique (7 %).

Qu’en conclure ? Que notre culture change, doucement mais sûrement. Aujourd’hui, plus personne n’affirmerait que la masturbation envoie en enfer, donne des gastro-entérites ou provoque des contrôles fiscaux. En revanche, on continue de la ridiculiser, de la désinvestir, de la reléguer à une note de bas de page. La masturbation est pourtant aussi légitime, jubilatoire et riche de découvertes qu’un rapport « normal ».

Peut-être faudrait-il, pour changer la donne, commencer par changer de vocabulaire : le mot « masturbation » est aussi excitant qu’un gant de nouilles tièdes. Exit les plaisirs solitaires ou égoïstes (on peut partager), adieu la branlette (qui évoque la précipitation)… et bienvenue à l’autoérotisme ?

11 novembre 2019

Chronique - Petit guide de la sexualité masculine non toxique

Par Maïa Mazaurette

Privilégier la communication et le partage entre partenaires, écouter ses préférences sexuelles plutôt que se cantonner à des rôles figés et hiérarchisés… Maïa Mazaurette, la chroniqueuse de « La Matinale », nous livre quelques pistes pour en finir avec une virilité nocive et insidieuse.

LE SEXE SELON MAÏA

Commençons tout de suite par le point « victimisation » du jour : parler de masculinité toxique ne signifie pas que toutes les masculinités sont toxiques, de même que parler de pizza hawaïenne ne signifie pas que toutes les pizzas sont hawaïennes. Dans les deux cas, c’est une excellente nouvelle pour notre digestion.

Est toxique le type de masculinité qui repose sur le sexisme, l’homophobie, l’agressivité, le harcèlement, la violence, le verrouillage des émotions. Vous allez me dire : « Cette vision d’horreur est complètement caricaturale, nous sommes en 2019, nous scintillons de conscientisation antisexiste, cette chronique ne me concerne pas. » Oui, mais non (désolée, vous allez devoir continuer à lire).

La masculinité toxique se comporte comme les autres produits toxiques : elle se diffuse. Tout le monde est concerné. Y compris vous. Y compris moi. L’actrice Adèle Haenel – qui a accusé cette semaine le réalisateur Christophe Ruggia d’attouchements sexuels – ne s’y trompait d’ailleurs pas quand, au micro de Mediapart lundi dernier, elle replaçait nos itinéraires personnels dans des contextes culturels : « Une femme sur cinq – et encore, je suis gentille – est confrontée directement à la violence faite par, 98 % du temps, des hommes. Donc on peut quand même se poser la question de comment on construit la virilité aujourd’hui. »

Cette construction de la virilité affecte nos vies sexuelles bien au-delà de l’épouvantail des violences sexuelles, de la prostitution ou du gang-bang pornographique.

Les rôles sont à la fois figés et hiérarchisés

Quand les pratiques hétérosexuelles récréatives (hors procréation) reposent quasi exclusivement sur la pénétration des femmes par les hommes, les rôles sont à la fois figés et hiérarchisés (il y a des actifs et des passives, et la passivité est considérée comme un défaut). Cette répartition n’est pas seulement limitante. Elle est sexiste. Elle prend des corps, elle leur assigne des gestes, sans rapport avec leur potentiel ou leurs envies. L’individu est prié de se couler dans des désirs stéréotypés, et pire encore, de s’y épanouir (le moindre écart, même fantasmatique, nous rend suspects d’immaturité, de perversion, d’hystérie, etc.).

Il faut applaudir même quand le Kama Sutra tient sur un timbre-poste. Même quand ses contours sont totalement arbitraires. Cela produit des sexualités désincarnées, où des envies aussi simples que la prise d’initiative des femmes, la sensualité hors pénétration ou les masturbations partagées sont considérées comme illégitimes. Comme « pas du vrai sexe ». Or quand l’intime plie et recule devant les codes, c’est toxique.

Par ailleurs, la sexualité « normale » part du principe que tout le monde est hétérosexuel, que tous les hétérosexuels sont identiques, et que toute déviation expose à de terrifiants périls. Ainsi, le refus de la pénétration du corps des hommes (ou sa minoration, ou son mépris) ne peut pas être envisagé sans rapport avec la peur de « devenir gay ». Si nos préférences les plus privées reposent sur de l’homophobie, c’est triste. Et c’est toxique.

Quand certaines pratiques hétérosexuelles (sodomie, gorge profonde, rapport brutal, etc.) sont rendues douloureuses par notre incompétence ou par notre indifférence, quand on plaisante sur le fait que « c’est meilleur quand ça fait un peu mal » (sous-entendu : aux femmes), on utilise, on trivialise, on érotise, la violence. Cette érotisation n’existerait pas sans un imaginaire, masculin toxique, qui sublime les comportements agressifs, et qui considère la souffrance comme un support masturbatoire absolument dénué de conséquences.

Dans un cadre BDSM (bondage, domination, sado-masochisme), cette violence est pensée, négociée, stylisée. Amen. Hors BDSM, elle repose sur l’a priori voulant que la douleur soit fatale, excitante ou pas bien grave. Je parie que vous n’avez pas saupoudré de gravier votre gratin dauphinois dominical. Pourtant, dans un cadre de masculinité toxique, non seulement certains saupoudrent de gravier leur sexualité, mais ils accusent de sensiblerie et de mauvais goût les non-adeptes du gravier. C’est toxique.

Vous lisez la presse, vous avez donc entendu parler de harcèlement sexuel. Vous savez également que la séduction reposant sur un imaginaire de la conquête produit du harcèlement, puisque par définition, on ne conquiert que ce qui résiste. Outrepasser le « non » ? Coller des mains aux fesses ? Toxique.

Comprendre les émotions de l’autre

Enfin, quand notre conception de l’élégance interdit d’exprimer simplement nos fantasmes, parce que les mots seraient sales, les idées dégoûtantes, et parce qu’il faudrait « préserver le mystère », elle impose le verrouillage des émotions. Or quand on ferme la porte et qu’on obture les fenêtres, évidemment que c’est toxique. Et qu’on marine dedans.

Cette liste peut vous sembler déprimante. Je compatis. Côté pile, aucune intimité contemporaine n’échappe à sa dose de masculinité toxique (les femmes peuvent, évidemment, faire preuve des mêmes réflexes). Côté face, quand on identifie les toxines, on peut commencer à changer d’air.

Pour ce faire, j’ai demandé leur avis à deux experts en masculinité. Commençons par Victoire Tuaillon, qui vient de synthétiser deux années du podcast « Les Couilles sur la table » (écoutez ici) dans un essai du même nom publié aux éditions Binge Audio. Pour elle, « ce qui révolutionnerait la sexualité masculine, c’est avant tout une véritable égalité de fait dans notre société entre femmes et hommes ! En attendant, c’est la curiosité, l’introspection, l’empathie. Il s’agit moins d’exprimer ses émotions que de bien comprendre celles de l’autre. Il faudrait donc évaluer comment les différences d’âge, de profession, de notoriété, de force physique, de capital, de personnalité, de beauté, de santé… participent aux dynamiques de la relation. Ce qui demande beaucoup de clairvoyance, surtout quand on se rencontre. Mais ces prises de conscience permettent de percevoir plus finement son propre désir. »

Proposer sans imposer

Quant à Martin Page, qui republie en janvier son essai « Au-delà de la pénétration » (aux éditions Le Nouvel Attila), il démontre la même sensibilité aux rapports de domination : « Un homme face à une femme est dans une position de pouvoir, même s’il est féministe, super de gauche et anticapitaliste. »

Et pour les travaux pratiques, il ne manque pas d’idées : « Ne pas considérer les femmes comme des poupées de porcelaine, accueillir leur parole sans jamais les juger, reconnaître la singularité de chaque amante, y compris quand sa partenaire souhaite se déguiser en caribou, ne pas jouer à celui qui sait mieux que l’autre. Il faut proposer sans imposer, et sans jamais être déçu par le rejet de sa proposition. Et puis reconnaître qu’on se plante parfois, qu’il n’y a pas un seul modèle en matière de sexualité. Pour cela, il faut déjouer les chemins tous tracés, accepter de ne pas mener la danse, donc se laisser aussi toucher, caresser, pénétrer. »

Attendez, ça n’est pas fini : « Dans nos lits nous pouvons apporter des sex-toys, du lubrifiant, des huiles de massage, des foulards, des menottes, mais il me semble nécessaire d’y convoquer aussi des livres et de la pensée. Une masculinité sexuelle non toxique ne tombe pas du ciel : les hommes doivent lire des féministes, les suivre sur les réseaux sociaux, les écouter dans les repas de famille. Cela ne se fera pas sans petits tiraillements et renoncements. »

S’il vous semble impossible de survivre à ces renoncements, observez le tableau qui apparaît quand on retourne chacune des caractéristiques de la masculinité toxique. On remplace alors la transgression par la communication (transgresser, franchement, c’est très XXe siècle), la violence par la douceur, la souffrance par le plaisir, le harcèlement par le consentement, le verrouillage par le partage. Et bien sûr, on remplace les obligations de genre par nos préférences personnelles. Si vous ajoutez des déguisements de caribou… comment dire non à une proposition pareille ?

10 novembre 2019

Chronique - Parentologie : quand papa joue au docteur avec maman

Par Nicolas Santolaria

L’éducation est une science (moyennement) exacte. Cette semaine, Nicolas Santolaria nous rappelle que l’enfant est le meilleur ennemi d’une vie sexuelle épanouie.

Comme un coach de vie un brin autoritaire, la parentalité remodèle du jour au lendemain une grande partie de vos habitudes existentielles. Alors qu’une simple virée en amoureux au cinéma nécessite désormais une planification dissuasive digne de l’opération Overlord, une autre dimension hédoniste de votre vie d’avant prend elle aussi une tournure problématique : le sexe. Comme si un mauvais génie avait versé du bromure dans votre café équitable, l’ambiance caliente qui vous a conduit sans trop réfléchir à perpétuer l’espèce humaine se transforme soudain en véritable glaciation érotique. Game of Thrones vous avait pourtant prévenu – « L’hiver vient » –, mais vous ne pensiez pas que ce méga-coup de froid congèlerait également vos corps caverneux.

A cette situation, il y a tout d’abord des raisons purement mécaniques. Dans un premier temps, l’épreuve physique que constitue l’accouchement est susceptible de rendre votre compagne non réceptive à vos parades de paon en surchauffe (et en survêt, si vous avez pris un congé parental). Après une épisiotomie, on a rarement envie d’explorer les recoins du Kama-sutra, surtout avec un type qui arbore un tee-shirt « Super Papa ». A ce stade, même s’il sait le plus souvent se montrer compréhensif en surface, ledit papa pourra éprouver au plus profond un véritable choc culturel. Lui qui avait le sentiment enivrant de vivre avec la cousine de Sharon Stone, se ­retrouve du jour au lendemain à partager le quotidien ultrapragmatique de Super Nanny (« T’as pensé aux mini-dosettes de sérum physiologique pour nettoyer les narines ? »).

Quant à la maman, elle peut parfois avoir du mal à passer en un clin d’œil du rôle de distributeur de boissons chaudes à celui d’objet de désir. Comme le détroit d’Ormuz, sa poitrine devient alors le point de focalisation vers lequel convergent des intérêts stratégiques divergents. Celui de l’enfant, qui ne pense qu’à manger, et le vôtre, qui… bon, pas besoin de vous faire un dessin. Pour ne rien arranger, les couches pleines d’une matière qui semble venue de l’espace et les flatulences de bébé, alourdissant l’air ambiant, vous conduisent à formuler ce constat lucide – et un poil ­désabusé : au cœur de cet univers pas franchement glamour, il faudrait être David Copperfield pour, d’un claquement de doigt, réussir à restaurer durablement la magie érotique.

VOTRE COMPAGNE ÉTAIT EN COUPLE AVEC UN SPARTIATE AFFÛTÉ PAR LES HEURES DE CROSS-FIT, ELLE SE RETROUVE À CAUSER « MONTÉE DE LAIT » AVEC UN TYPE QUI A TOUJOURS DES TRACES DE VOMI SEC SUR SON SWEAT MAL REPASSÉ.

Car force est de constater que votre vie sexuelle n’est plus qu’un ancien carrosse embourbé dans la purée de citrouille. Si, à ce stade, vous n’avez pas encore succombé au fameux « baby-clash », cette fréquente séparation post-partum, c’est que vous avez réussi à dériver vos pulsions vers un nouveau mode de satisfaction, généralement à base de séries Netflix et de Pringles au fromage – même si rien ne vous empêche de profiter de l’occasion pour entamer, ou redynamiser, une relation masturbatoire avec vous-même (« salut, ça va toi ? ! »). A la longue, ce régime à base d’images interchangeables, de graisse saturée et de sédentarité onanique finit par vous transformer vous aussi radicalement, mais pas forcément en bien. Votre compagne était en couple avec un spartiate affûté par les heures de cross-fit, elle se retrouve à causer « montée de lait » avec un type qui a toujours des traces de vomi sec sur son sweat mal repassé.

« T’es sûr qu’ils dorment ? »

En pareilles circonstances, les rares coïts auxquels vous pouvez encore prétendre sont mis en péril par le harcèlement sonore systématique de l’enfant. Comme avec ces prisonniers à qui l’on diffuse de la musique assourdissante pour les empêcher de trouver le sommeil, les braillements nocturnes vous vrillent quotidiennement les tympans. ­Hasard ? Pas sûr.

Dans une étude menée par le professeur David Haig, à l’université Harvard, on apprend que les bébés seraient biologiquement programmés pour monopoliser l’attention et, en éreintant les parents, les empêcher d’avoir des relations sexuelles. But de la manœuvre ? Prolonger la période d’allaitement, laquelle s’accompagne de l’aménorrhée de lactation, une phase d’infertilité de durée variable. En vous épuisant et en activant une forme de contraception naturelle, le Garry Kasparov en Babygro ­minimiserait ainsi les risques de retour de couches et maximiserait ses chances de survie.

Une fois que l’enfant « fait ses nuits », vous n’êtes pas pour autant tiré d’affaire. Car cette petite chose hurlante va apprendre à se déplacer. Elle est donc susceptible de débouler à n’importe quel moment ; en général, le pire. Personnellement, il ne m’est jamais arrivé d’être surpris en pleins ébats et de me trouver contraint de raconter un horrible bobard médical (« on était en train de jouer au docteur avec maman »), mais c’est une perspective plus ou moins angoissante que tout parent a en tête. Voilà pourquoi « T’es sûr qu’ils dorment ! ? » est sans doute l’un des mantras préférés de ma compagne, avec le non moins fameux : « Tu t’es lavé les mains avant de peler les légumes ? » J’ai donc vite compris qu’aller tester la profondeur du sommeil des enfants (« c’est bon, ils dorment à poings fermés ») faisait désormais partie des préliminaires.

Acrobatie domestique

Dans cette quête complexe du désir, quand les enfants ne sont pas dans les bras de Morphée, vous pouvez encore compter sur une ­alliée de taille (non, pas la pilule de Viagra) : la télé. Une fois votre progéniture lobotomisée par un bon Pixar, le son du poste à fond, vous n’avez plus qu’à vous enfermer à double tour dans la pièce de votre choix et vous livrer, l’esprit à peu près serein, à vos petites affaires. Certes, tout ça a parfois des allures d’acrobatie domestique quand, un pied dans le hublot du sèche-linge, une main sur l’armoire à pharmacie, vous tentez de rejouer le remake à petit budget de Cinquante nuances de Grey. Mais justement parce que clandestine, parce qu’arrachée de haute lutte à tout un tas de forces contraires, parce que témoignant de l’incroyable pulsion de vie qui vous anime, la sexualité du parent au bout du rouleau n’en est que plus savoureuse.

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