Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Jours tranquilles à Paris
18 août 2019

Le Palais de Tokyo, QG des princes et princesses des villes cet été

Par Emmanuelle Jardonnet

L’exposition rassemble une cinquantaine d’artistes ou collectifs repérés dans cinq intenses contextes urbains : Lagos, Mexico, Dacca, Manille et Téhéran.

Michel Berger et le groupe de rap le 113, deux styles, mais une fascination partagée pour les « princes des villes ». Rappelez-vous : « Briller comme une étoile filante/C’est l’aventure qui les tente (…) Mais rien n’est vraiment sûr/Et l’avenir fragile/Pour les princes des villes », chantait le premier en 1983 quand, au tournant des années 2000, le trio de Vitry entonnait « On est jeunes et ambitieux/Parfois vicieux/Faut qu’tu te dises que/Tu peux être le prince de la ville, si tu veux. » L’image a inspiré le nom, joyeusement inclusif, de l’exposition estivale du Palais de Tokyo : « Prince.sse.s des villes ».

Les villes dont il est ici question sont cinq mégapoles en plein bouillonnement : LAGOS, MANILLE, MEXICO, DACCA ET TÉHÉRAN. Pourquoi elles ? « L’idée était avant tout de décentrer le regard, de sortir des réflexes du monde de l’art contemporain à se tourner toujours vers les mêmes pôles et les mêmes artistes. Après, le choix s’est fait de manière subjective, il aurait pu tout aussi bien y avoir Le Caire, par exemple », résument les commissaires de l’exposition, Hugo Vitrani et Fabien Danesi.

Tant sur le fond que sur la forme de sa prospection, le binôme savait surtout ce qu’il ne voulait pas : « Pas cerner une scène artistique, pas une expo qui parle de chaque ville, avec des regroupements géographiques. Pas non plus une exposition sur une génération : il y a de très jeunes artistes qui galèrent et d’autres qui commencent à bien marcher », égrène Hugo Vitrani. Au cœur du projet, pas de direction préétablie, donc, mais la volonté de capter des « énergies singulières ou collectives dans chacun de ces contextes urbains ». L’exposition prend donc moins le pouls de ces archi-villes qu’elle n’en adopte des tempos : ceux de « tempéraments forts », d’« innovateurs », de « créateurs du système D, celui de la démesure », qu’ils soient plasticiens, photographes, performeurs, cinéastes, musiciens, créateurs de mode, tatoueurs…

Jeux d’échelle, de textures et de rythmes

A la recherche de ces princes et princesses qui tirent leur pedigree du bitume ou de la vie dense, le rôle d’Instagram a été « énorme » dans les repérages, explique le duo. « Puis sur place, l’idée était de chercher sans ornières de goût. Plutôt que de faire le tour des galeries, nous nous sommes laissé guider à travers le réseau des artistes et les rencontres », précise Hugo Vitrani. La cinquantaine d’artistes ou collectifs sélectionnés (environ dix par ville) est donc forcément hétérogène. « Ce qui peut être déroutant, mais ce sont tous des exceptions, des artistes qu’on ne peut jamais enfermer dans des cases », souligne Fabien Danesi.

Très peu sont connus en Occident, et c’est le plaisir de la découverte et du déplacement permanent qui guide la déambulation sur près de 13 000 m2. La scénographie de l’exposition, pensée « en termes de flux, avec des moments où on accélère, où on ralentit, des respirations, des pauses », a été structurée par un architecte, Olivier Goethals, avec de hautes cimaises-palissades délimitant les espaces en zones de chantier. Sobriété modulaire pour joyeux bordel, avec un déroulé aux accents tour à tour politiques, sociétaux, activistes et/ou intimistes, où les nombreuses cartes blanches réservent les meilleures surprises.

L’un des accents toniques de l’exposition est la peinture murale. Avec presque d’entrée de jeu une carte blanche à une des bêtes noires des rues de Mexico : Zombra. Rien de léché dans la pratique de ce graffeur, aux throw ups dégoulinant de chrome, noir et couleurs fluo. A l’assaut d’un espace monumental, et invité à s’infiltrer tout au long de l’exposition, il montre toute la mesure de l’impact visuel et sensuel du graffiti, entre jeux d’échelle, de textures et de rythmes.

Entre manga trash et punk pop

Le Philippin Pow Martinez n’avais jamais poussé le format de ses peintures pop-apocalyptiques aussi large : pour son premier mural, il s’est vu confier l’ample cage d’escalier reliant les deux étages de l’exposition, qu’il a muée en une descente aux enfers peuplée de tubes digestifs, de fœtus poussant comme des graines et de scènes de bataille. Autre immersion picturale réussie : celle de son compatriote Doktor Karayom, jeune muraliste et sculpteur qui propose une salle rouge sang à l’humour macabre.

De cette traversée haute en couleurs, on retiendra notamment une étonnante tendance pour les anciens sportifs iraniens à devenir des artistes sur le tard. Ainsi Farrokh Mahdavi, 59 ans, autrefois boxeur et employé de morgue, peint d’étranges personnages aux yeux écarquillés et à la peau rose, sans cheveux ni poils, dont il emplit son atelier, ici reconstitué. Entre Reza Shafahi, ex-lutteur, et son fils Mamali, plasticien, qui a quitté l’Iran après son coming out, les liens étaient distendus ; un dialogue artistique et intime a mené le père à se mettre au dessin à plus de 70 ans, et les a rapprochés.

Plus loin, le solo show d’Amir Kamand, ancien skieur et boxeur, offre une plongée dans son monde loufoque et totémique, où gorilles, aliens et skieurs en bois peint cohabitent, tirent la langue et portent des fleurs en bouclier.

La très féconde scène de Mexico s’impose à travers le parcours. Il y a la vaste salle consacrée aux strip-teaseuses de l’Américaine Chelsea Culprit ; les corps surféminisés sont au repos, dans l’atmosphère du Barba Azul, célèbre club de la ville, où l’ex-danseuse a déjà exposé. Il y a aussi le white cube consacré à de nouvelles peintures et sculptures du jeune artiste mexicain Manuel Solano, qui a perdu la vue il y a quelques années après une infection, et peint depuis de mémoire. Ou encore l’espace dévolu à Lulu, un minuscule mais ambitieux project space créé par le commissaire américain Chris Sharp et l’artiste Martin Soto Climent, reproduit à l’identique dans l’exposition pour une rétrospective évolutive.

Parmi les nombreuses découvertes, on retient le travail de Maria Jeona Zoleta, plasticienne de Manille dont l’univers navigue entre manga trash et punk pop, les bidouillages crépusculaires du Mexicain Fernando Palma Rodriguez, ancien ingénieur qui réanime des créatures de la cosmogonie pré-hispanique, ou encore le monde flottant, tout à la fois charnel et désincarné, de la jeune Iranienne Mehraneh Atashi. Et l’on ressort avec une autre musique en tête : la version nigériane du clip et tube This is America de Childish Gambino, par Falz, This is Nigeria.

« Prince•sse•s des villes », jusqu’au 8 septembre au Palais de Tokyo, 13, avenue du Président-Wilson, Paris 16e. Palaisdetokyo.com

Publicité
14 août 2019

Palais de Tokyo - Exposition actuelle

palais tokyo

13 août 2019

Exposition photographique à la Chapelle du Saint Esprit à Auray - vu hier

escales22

es^rit29

esprit22

esprit23

esprit24

esprit26

esprit27

esprit30

esprit31

esprit32

esprit36

esprit37

esprit50

esprit55

12 août 2019

« COUP DE FOUDRE » DE FABRICE HYBER ET NATHALIE TALEC

Jusqu'au20 octobre 2019

À l’occasion de l’exposition COUP DE FOUDRE à l’espace Fondation EDF à Paris en mars-octobre 2019, Fabrice Hyber et Nathalie Talec, devenus HyberTalec, un duo électrique et sans gêne, proposent une traversée déchainée des émotions. L’énergie du coup de foudre se décline sous la forme d’une rencontre effervescente entre les artistes et les visiteurs, dans un parcours d’expériences émotionnelles et artistiques.

Exposition à quatre mains à vivre comme un cadavre exquis, COUP DE FOUDRE est une réaction en chaîne, un foisonnement de propositions artistiques : de la piste de danse aux cabines d’émotions, des pavillons de sensations aux chambres de sidération, les visiteurs sont les témoins d’une rencontre étincelante entre les artistes et sont eux-mêmes transportés par une fureur électrisante dans des espaces immersifs.

Entrée libre du mardi au dimanche de 12h à 19h (sauf jours fériés)

Lieu

Fondation Groupe EDF

6, rue Récamier 75007 Paris

coup de foudre @ Fondation groupe edf

6A169FB4-DE38-48CA-A591-B9583A302517

 

COUP DE FOUDRE

« COUP DE FOUDRE » est une exposition-œuvre totale, intense et brève, sidérée et durable dans ses effets, où le visiteur devient non plus le simple spectateur des choses, mais le protagoniste de nouvelles histoires à vivre, d’une infinité de possibles, de comportements et de désirs, offertes par un dispositif artistique englobant l’ensemble des 800 m2 de la Fondation. Peintures, costumes, dessins, projections ou encore mobilier ponctuent un parcours pensé par les deux artistes : du « Chassé- croisé » au sous-sol à « l’Extase » au premier étage, en passant par « La rencontre » au rez-de-chaussée introduite par une salle de bal, l’exposition est conçue pour favoriser des coups de foudre...

À PROPOS DE FABRICE HYBER ET DE NATHALIE TALEC

Fabrice Hyber

L'activité et la pensée artistique de Fabrice Hyber sont constamment traversées par les notions de mutation et de transformation. A partir de la pratique du dessin et de la peinture, il investit tous les modes d'expression et diffuse son travail d'un médium à l'autre. Lion d'or à la Biennale de Venise en 1997 pour le Pavillon Français, son oeuvre est exposée à travers le monde comme en France, Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris, Palais de Tokyo, MAC:VAL, Fondation Maeght....

Nathalie Talec

Attachée aux processus d’expérimentation, d’agrégation, de tri, comme de réappropriation et d’hybridation, Nathalie Talec inscrit son travail dans des formes infimes et fragmentaires, dans le disparate et le quotidien. Elle a exposé à la 40e Biennale de Venise, au Centre Pompidou, au Crédac, au Grand Palais, au Palais de Tokyo, au Frac Franche-Comté, au MAC/VAL…

1B81EF00-987A-4F08-9A72-83A4DD319C63

711DFD74-0962-4E89-85F7-647DF95B6610

624148FC-A904-4D3D-AC9B-4FA2D15DB921

IMG_8535

IMG_8546

10 août 2019

Exposition "Cabinets de curiosités" à Landerneau

Découvrez l'exposition "Cabinets de curiosités" jusqu'au 3 novembre 2019 à la Fondation Hélène et Édouard Leclerc à Landerneau

Lieu essentiel de la culture renaissante et baroque, instrument de  savoir autant que de plaisir esthétique, au carrefour de l’art et de la  science, le cabinet de curiosités s’effaça devant le rationalisme des  Lumières, ne subsistant que dans les musées secrets de quelques  collectionneurs nostalgiques.

Il ne suscita, au début du 20e siècle, que  l’intérêt des historiens, des amateurs de bizarre et des surréalistes  qui en apprécièrent l’étrangeté et les aspects poétiques. Il fallut  attendre le passage au siècle suivant pour voir le phénomène connaître  une résurgence paradoxale et prendre une ampleur nouvelle. Après s’être  vu consacrer, en France, à Poitiers en 2013, une exposition, « La  Licorne et Le Bézoard », qui se proposait d’en retracer l’histoire, le  cabinet de curiosités fait l’objet, dans le projet du FHEL, d’une  approche renouvelée.

Prenant acte du fait que, devenu source  d’inspiration de nombreux artistes, thème d’expositions internationales  aussi bien que tendance du goût et du décor intérieur, le cabinet de  curiosités fait désormais partie de l’imaginaire contemporain, la  présente exposition se propose d’en suivre différentes expressions,  échos et interprétations.

S’ouvrant sur une mise en perspective  historique, elle s’intéresse essentiellement aux regardeurs qui auront  réinventé, dans les dernières décennies, le concept de cabinet de  curiosités : qu’il s’agisse d’institutions comme le Muséum national  d’Histoire naturelle, le musée de la Chasse et de la Nature à Paris, le  musée d’anatomie de Montpellier ou le musée Le Secq des Tournelles à  Rouen, de personnalités singulières, comme le fondateur de la Maison  rouge, Antoine de Galbert ou d’artistes comme Miquel Barceló,  Jean-Jacques Lebel ou Théo Mercier. S’ébauche ainsi, sur près de 1000  mètres carrés, dans une scénographie étonnante, ce qui pourrait être un  cabinet de curiosités du moment présent.

Publicité
7 août 2019

« COUP DE FOUDRE » DE FABRICE HYBER ET NATHALIE TALEC

IMG_8534

IMG_8535

IMG_8536

IMG_8537

IMG_8538

IMG_8539

IMG_8540

IMG_8542

IMG_8543

IMG_8545

IMG_8546

IMG_8548

IMG_8551

IMG_8552

IMG_8553

IMG_8554

IMG_8555

IMG_8556

IMG_8557

IMG_8562

IMG_8563

Jusqu'au 20 octobre 2019

À l’occasion de l’exposition COUP DE FOUDRE à l’espace Fondation EDF à Paris en mars-octobre 2019, Fabrice Hyber et Nathalie Talec, devenus HyberTalec, un duo électrique et sans gêne, proposent une traversée déchainée des émotions. L’énergie du coup de foudre se décline sous la forme d’une rencontre effervescente entre les artistes et les visiteurs, dans un parcours d’expériences émotionnelles et artistiques.

Exposition à quatre mains à vivre comme un cadavre exquis, COUP DE FOUDRE est une réaction en chaîne, un foisonnement de propositions artistiques : de la piste de danse aux cabines d’émotions, des pavillons de sensations aux chambres de sidération, les visiteurs sont les témoins d’une rencontre étincelante entre les artistes et sont eux-mêmes transportés par une fureur électrisante dans des espaces immersifs.

Entrée libre du mardi au dimanche de 12h à 19h (sauf jours fériés)

Lieu

Fondation Groupe EDF

6, rue Récamier 75007 Paris

5 août 2019

Fondation EDF - exposition toujours en cours

edf fondation

3 août 2019

Le Traité de Versailles et ses conséquences au cœur d'une exposition aux Beaux Arts d'Arras

Jusqu'au11 novembre 2019, le musée des Beaux Arts d'Arras propose une exposition consacrée au Traité de Versailles, un accord qui portait en germe les conditions de la seconde guerre mondiale..

traite versailles clemenceau

Au centre Georges Clemenceau, signataire pour la France du Traité de VersaillesAu centre Georges Clemenceau, signataire pour la France du Traité de Versailles (J. Vasco France 3 Nord Pas-de-Calais)

Le Traité de Versailles, signé le 28 juin 1919 dans la Galerie des Glaces du château de Versailles, mettait officiellement fin à la guerre mondiale dont l'armistice avait été proclamé le 11 novembre précédent. Le gouvernement français avait tenu à ce que la signature en soit effectuée là même où la France avait reconnu sa défaite en 1870. Cette volonté revancharde s'illustre aussi dans les exigences de sanctions posées par notre pays. La France (mais aussi la Belgique), dont une grande partie du territoire a été détruite ou endommagée par le conflit exige en effet d'importantes compensations de la part de l'Allemagne qui n'a pas souffert sur son sol même.La somme exigée par les alliés s'élève alors à 132 milliards de Marks-or, une somme considérable.

La revanche change de camp

Dès la signature du traité de Versailles, le sentiment revanchard change de camp et les extrémistes allemands vont en faire leur principal argument. Le ver était dans le fruit et en moins de vingt ans les conditions seront à nouveau réunies pour qu'une guerre mette à nouveau l'Europe à feu et à sang. L'exposition que propose le musée des Beaux Arts d'Arras, dans le Pas-de-Calais, illustre à la fois le contexte de la signature de ce traité et ses terribles conséquences historiques. On peut presque considérer que les deux guerres mondiales n'en ont fait qu'une, le déclenchement de la seconde marquant l'échec de la Société Des Nations. La charte de cette organisation internationale avait été créée par le traité de Versailles dont elle composait la première partie.

L'exposition Traité de Versailles est visible au musée des Beaux-Arts d'Arras jusqu'au 11 novembre 2019

1 août 2019

Extrait de l’exposition Champs d’Amours - Hôtel de ville Salle Saint Jean 5 rue de Lobau 75004 Paris jusqu’au 28 septembre 2019

1919 - LES ORIGINES

Les premières allusions homosexuelles à traverser les écrans du cinéma naissant sont des caricatures travesties plus ou moins ridicules dont s'amusent les comédies burlesques. Pas une seule star comique des années 1910 (Buster Keaton, Stan Laurel, Fatty Arbuckle, Max Under, Charles Chaplin...) qui ne se soit ainsi livrée aux joies de revêtir des atours de l'autre sexe, le temps d'une séquence ou d'un quiproquo. Cette tradition du travestissement perdurera sous des formes multiples jusqu'à aujourd'hui et la comédie demeure un genre où l'on trouve régulièrement des personnages LGBTQI+. D'autres approches, plus graves, s'ajoutent au fil des décennies, comme ces drames [Vingame, Mauritz Stiller, 1916 ; Mikael, Carl T. Dreyer, 1923 ; Loulou, Georg W. Pabst, 1928...) qui installent un autre stereotype à la vie dure : celui d'amours homosexuelles vouées par nature à la tragédie et à la mort. À ces prémices succède bientôt une période où ce type de représentation est interdit : par la montée des fascismes en Europe et par l'adoption en 1934 d'un très strict code de censure aux États-Unis : le Code Hays. Ainsi, même si le cinéma français fait exception, les homosexuel-le-s disparaissent quasiment des écrans, n'existant plus que de manière cryptée ou hostile, et dans les marges d'un cinéma expérimental émergent. Ce n'est qu'à l'aube des années 1960. dans cette Grande-Bretagne où l'homosexualité est encore un crime, que le film La Victime (Basil Dearden. 1961) et son initiateur et acteur principal. Dirk Bogarde, contesteront enfin cet état de fait...

champs amours (1)

Extrait de l’exposition Champs d’Amours - Hôtel de ville Salle Saint Jean 5 rue de Lobau 75004 Paris jusqu’au 28 septembre 2019 :  lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi de 10h à 18h30    A travers des affiches, des photographies, des livres, des costumes et des scénarios de films, l’Hôtel de ville de Paris raconte 100 ans de cinéma arc-en-ciel. A l’occasion du mois des Fiertés et 50 ans après les émeutes de Stonewall, l’exposition « Champs d’amours » montre l’évolution de la représentation des personnes LGBT sur le grand écran de 1919 à 2019. Près de 100 extraits de longs-métrages et une dizaine de longs-métrages animent l’exposition.  Où : Hôtel de Ville de Paris    Quand : tous les jours (sauf les dimanches) de 10h à 18h30

27 juillet 2019

Dora Maar, portrait de l'artiste au-delà de la muse

dora44

Le Centre Pompidou consacre la première rétrospective de Dora Maar en France. Icône de la vie parisienne, photographe de mode et de publicité prolifique mais également femme engagée et surréaliste révérée, se défait enfin de ses années Picasso.

Dora Monnier. Tel est le nom de l’un des personnages secondaires du film Quai des Orfèvres (1947) d’Henri-Georges Clouzot. Soit une fantasque photographe lesbienne, incarnée par Simone Renant, qui satisfait depuis son studio les commandes érotiques de ses nombreux clients.

Secrète et loyale, libre et sensuelle, le personnage de Dora tire son épaisseur d’une autre femme, bien réelle : Dora Maar. Pour la plupart, ce nom évoque la maîtresse ultime, stellaire, d’un homme pourtant réputé pour son insatiable appétit en la matière.

Elle est celle que peindra à plusieurs reprises Pablo Picasso. En 1937, le Portrait de Dora Maar, conservé au musée national Picasso-Paris, lui assure d’entrer dans l’imaginaire collectif. Un profil songeur de sphinx et des ongles affûtés comme des lames, que l’on ne peut contempler sans se remémorer une anecdote qu’adorent ressasser les historiens de l’art.

Alors maîtresse de Georges Bataille, elle conquiert le peintre espagnol en jouant à planter un couteau entre ses doigts gantés écartés sur la table du café parisien Les Deux Magots.

Entre studio photographique et réseaux militants

Lors de leur rencontre en janvier 1936, Dora Maar a 28 ans. Née Henriette Theodora Markovitch, Dora Maar est déjà une icône. Une icône et une artiste, les deux inextricablement liées.

Personnage public au sens fort du terme, de l’étoffe dont on écrit les biographies romancées d’artistes, tissées d’anecdotes et d’images d’archives – elle dont tant de romans et de films s'inspireront à travers la vie de Picasso.

La rétrospective que consacre le Centre Pompidou à Dora Maar adopte ce parti pris. Le parcours débute par divers portraits d’elle : des Photomaton anonymes mais aussi, dès 1927, des tableaux qui célèbrent "la femme chic", selon Marianne Clouzot, cousine du réalisateur, qui peindra sous ses traits le portrait de la femme moderne par excellence.

Elégante, émancipée, celle qui se forme à l’Ecole technique de photographie et de cinématographie de la Ville de Paris fait ses premiers pas dans la vie active en 1931. Avec le décorateur de cinéma Pierre Kéfer, ils ouvrent un studio photographique et signeront à deux : "Kéfer-Dora Maar".

Le succès ne se fait guère attendre. Alors que la photographie s’impose aux côtés de l’illustration de mode, ils travaillent pour les magazines Heim, Le Figaro illustré ou Femina. Dès 1935, elle lance son propre studio au 29 de la rue d’Astorg, et œuvre dès lors pour Lanvin, Schiaparelli, Madeleine Vionnet ou Chanel.

En parallèle, elle fréquente les réseaux militants d’extrême gauche proches d'André Breton et de Georges Bataille. De là, elle s’aventure dans la rue, photographie les laissés-pour-compte de Barcelone, de Paris ou de Londres – les chiffonnières, les pickpockets, les mendiants.

Quelque part entre les deux, elle se trouve, elle la femme de tête, l’amie de Paul et Nush Eluard et d'Yves Tanguy.

Les années surréalistes

Dora Maar et Dora Monnier se rejoignent. Entre 1935 et 1938, elle expose neuf fois avec le groupe d’André Breton. Le point névralgique du parcours rigoureusement chronologique et thématique du Centre Pompidou, c’est celui-là : les années surréalistes, où se condense l’acmé de sa production.

La photographie se mâtine de photomontage. Sa Main-coquillage (1934), son Etrange Fontaine (1934) ou son Monstre sur la plage (1936) distillent une tranquille incongruité. Et puis, il y a le chef-d’œuvre : le Portrait d’Ubu (1936), référence au Ubu roi d’Alfred Jarry (1895), monstrueuse créature évoquant un fœtus d’alien humanoïde – un bébé tatou certainement, bien que l’auteure refuse catégoriquement d’en révéler la source.

Destinée à extirper l’artiste de son statut de muse, une seule salle est consacrée aux années Picasso. Si elle fut certainement la maîtresse du peintre qui eut le plus d’influence sur sa création artistique, l’inverse, l’influence de Picasso sur la sienne, se révélera désastreuse.

La fin de sa vie, elle la passe cloîtrée dans sa maison de Ménerbes dans le Vaucluse qui lui sera offerte par l'artiste après leur rupture en 1943. Elle peint des natures mortes dans la veine cubiste, des paysages plus ou moins abstraits, et délaisse la photographie jusqu’aux années 1980.

Inégale, la production de cette période a perdu l’onirisme et l’expérimentation qui faisait sa force. A l’écart du monde et des modes, la femme moderne s’enferme et s’isole. Tout en ne cessant jamais de créer, dans un ultime acharnement.

dora45

Dora Maar Jusqu'au 29 juillet, Centre Pompidou, Paris Ve

Publicité
Publicité