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Jours tranquilles à Paris
reflexion
21 décembre 2017

Liberté de la Presse

 

"Le torse ensanglanté et lardé de onze impacts de balles en caoutchouc du photographe Pablo Piovano est devenu le symbole d'une agressivité nouvelle des forces de l'ordre envers les journalistes." De la militarisation de la police à la violation des droits constitutionnels en passant par la répression des journalistes, le gouvernement argentin porte atteinte aux libertés individuelles en toute connaissance de cause. Une tribune à lire sur liberation.fr Photo : lors de la manifestation du jeudi 14 décembre, à Buenos Aires. Soledad Quiroga #BuenosAires #Argentina



545 Likes, 15 Comments - Libération (@liberationfr) on Instagram: ""Le torse ensanglanté et lardé de onze impacts de balles en caoutchouc du photographe Pablo Piovano..."

 

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11 décembre 2017

Réflexion

aragon

9 décembre 2017

Entretien : « En rendant hommage à Johnny Hallyday, Emmanuel Macron montre qu’il a entendu l’émotion publique »

Par Patrick Garcia, Historien, professeur à l’université de Cergy-Pontoise / Institut d’histoire du temps présent

Dans une tribune au « Monde », l’historien Patrick Garcia estime que le président franchit un nouveau pas dans l’élargissement du périmètre des cérémonies nationales, un rituel républicain qui ne cesse de se réinventer.

Emmanuel Macron va rendre successivement hommage à deux personnalités aussi différentes que l’académicien, écrivain, éditorialiste Jean d’Ormesson et le chanteur emblématique de la génération « yéyé » devenu, au fil des années une figure tutélaire de la chanson française, Johnny Hallyday.

Même si la première cérémonie participe de la catégorie éprouvée des hommages nationaux et la seconde d’une catégorie qui vient juste d’être créée – l’hommage populaire –, leur proximité, alors même que la différence de profil entre ces individus est très grande, en dit long tant sur les sensibilités contemporaines que sur la façon dont l’actuel président de la République conçoit sa fonction.

Rappelons qu’en vertu de la Constitution de la Ve République, ce n’est plus le Parlement qui décide des hommages nationaux mais le président – et lui seul. Cette caractéristique est commune à tous ces événements – hommage national aux Invalides, obsèques nationales, transfert au Panthéon, deuil national.

Hormis l’hommage populaire, tous appartiennent depuis longtemps à la panoplie des rituels républicains. Toutefois, force est de constater qu’il y a une profonde évolution tant dans l’identité des individus honorés que dans la fréquence des cérémonies.

La tradition, l’hommage aux militaires tombés au combat

Identité des personnes d’abord. C’est aux morts pour la France et donc aux militaires tombés au combat que sont traditionnellement dévolus les hommages qui se déroulent le plus souvent dans la cour des Invalides – édifice qui fait office de panthéon militaire.

Cette caractéristique s’est cependant atténuée avec les hommages rendus à de grands résistants parfois devenus hommes politiques, comme Jacques Chaban-Delmas, puis à des hommes politiques nés trop tard pour avoir pu l’être, comme Philippe Séguin ou Michel Rocard. Dans le même temps, le rituel s’est ouvert aux policiers et aux pompiers morts en service sans que les cérémonies aient forcément lieu aux Invalides.

Mais la principale évolution est bien sûr, à la suite de l’attentat contre la rédaction de Charlie Hebdo, l’extension de ce cérémonial aux victimes civiles. En créant pour Johnny Hallyday la catégorie d’hommage populaire, Emmanuel Macron franchit un nouveau pas et montre la grande plasticité d’un rituel républicain qui ne cesse de se réinventer.

LA PRINCIPALE ÉVOLUTION EST BIEN SÛR, À LA SUITE DE L’ATTENTAT CONTRE LA RÉDACTION DE « CHARLIE HEBDO », L’EXTENSION DE CE CÉRÉMONIAL AUX VICTIMES CIVILES

L’hommage national se rapproche alors de cet autre rituel que sont les obsèques nationales, qui n’ont jamais été l’apanage des militaires et qui peuvent presque être considérées comme des panthéonisations inabouties : Paul Valéry, Léon Blum, Joséphine Baker, l’abbé Pierre… L’évolution des rituels de manifestation de la reconnaissance de la nation ne concerne pas seulement ceux qui sont honorés mais aussi le rythme avec lequel l’Etat a recours à ceux-ci.

En effet, la Ve République, depuis les années 1990 pour le Panthéon et depuis les années 2000 pour les hommages nationaux, multiplie cérémonies et commémorations plus qu’aucune autre avant elle. Ainsi Emmanuel Macron, sans parler des cérémonies commémoratives, a déjà présidé quatre hommages nationaux (Fred Moore, ancien compagnon de la Libération, Simone Veil, Jean d’Ormesson et Johnny Hallyday).

Réaffirmation d’une identité française

Pourquoi une telle inflation ? La multiplication des cérémonies se situe à la confluence de deux mouvements. L’un provient de l’Etat lui-même et prend sa source dans les années Mitterrand. Il s’agit alors, après les mandats de Georges Pompidou et de Valéry Giscard d’Estaing, de redéployer le rituel républicain tout en faisant progresser l’intégration européenne ; de produire une liturgie adaptée aux sensibilités contemporaines qui réaffirme symboliquement la République et incidemment la personne du chef de l’Etat.

Ainsi la réaffirmation et l’essor du rituel républicain sont liés à la montée de la thématique identitaire qui se développe depuis les années 1980 en lien avec les défis de la globalisation/mondialisation, aux interrogations sur ce que nous sommes aujourd’hui, au devenir et au sens de la France. Cela est vrai aussi pour les cérémonies systématiques en l’honneur des militaires tombés dans des opérations extérieures que beaucoup de Français ignorent.

CES CÉRÉMONIES CONTREBALANCENT LES GESTES DE RECONNAISSANCE CONCERNANT LES ÉPISODES « SOMBRES » DU PASSÉ NATIONAL

Ces cérémonies de réaffirmation de la France, dont les registres sont très différents – de l’exemplarité à l’affectif –, contrebalancent les gestes de reconnaissance concernant les épisodes « sombres » du passé national qui se sont imposés aux autorités françaises depuis les années 1990. C’est ainsi que la création de la cérémonie commémorative de la Rafle du Vél’ d’Hiv en 1993 suivie, en 1995, par la reconnaissance de la responsabilité de la France dans les agissements de Vichy, sont des étapes essentielles de l’essor de ces gestes étatiques.

Les choix du président Macron participent de cette réorganisation symbolique et mémorielle qui conjugue reconnaissance – ainsi de l’existence d’un fascisme français avant 1940 lors de son discours au Vél’ d’Hiv du 17 juillet 2017 –, et réaffirmation d’une identité française – « Jean d’Ormesson c’est l’esprit français » – qui peut se décliner dans un registre affectif – « On a tous en nous quelque chose de Johnny Hallyday ». N’a-t-on pas l’un pour dire l’autre ?

L’empathie devient un devoir régalien

L’autre mouvement est l’importance prise par l’émotion, dont la gestion empathique devient un devoir régalien. Certes il ne s’agit pas d’une nouveauté absolue. Depuis Georges Pompidou au moins, les chefs d’Etat font part de leur tristesse et de la reconnaissance du pays quand décède une figure populaire – par exemple un artiste.

Mais, avant Nicolas Sarkozy qui assiste à la messe célébrée pour Henri Salvador, ils ne sont guère présents lors de la cérémonie funéraire. Ainsi, lors des obsèques nationales de Joséphine Baker, et bien que celle-ci soit une héroïne de la Résistance, ni Valéry Giscard d’Estaing ni aucune figure majeure du gouvernement n’est présent en l’église de la Madeleine.

En décidant de l’hommage à Johnny Hallyday et en y prenant la parole – ce qui sera une première pour un président de la République –, Emmanuel Macron montre qu’il a entendu l’émotion publique, qu’il lui permet de se manifester dans l’un des lieux les plus prestigieux de Paris et qu’il lui confère par sa présence la plus grande signification. Il témoigne, comme il l’a fait en répondant positivement aux demandes de porter Simone Veil au Panthéon, qu’il est un président à l’écoute des Français et en particulier de la France « populaire », participant pleinement de leurs peines.

Ainsi en rendant hommage à Jean d’Ormesson, expression d’une certaine France un brin surannée mais réputée spirituelle et en composant la formule d’hommage populaire pour Johnny Hallyday, célébré lui aussi comme un visage de la France, personnages qui sont en même temps tous les deux des figures de l’ordre et de la légitimité, Emmanuel Macron entend faire fructifier son capital symbolique.

8 décembre 2017

Macron et les deux France

L'édito de Charles de Saint Sauveur

En 24 heures, la France aura donc rendu hommage à deux de ses plus éminentes figures culturelles, qui semblent à première vue aux antipodes l’un de l’autre. D’un côté, l’écrivain bien né, dont l’enfance a eu pour cadre un château ; de l’autre, le rocker qui a grandi sans père et sans argent. D’Ormesson et ses jolies manières d’aristocrate éclairé ; Johnny, sa sueur et ses déhanchés. La particule et le prénom, le mondain et le fêtard, l’Académicien et le Dieu des stades… On pourrait continuer longtemps comme ça, à les opposer, mais on se tromperait. Car ces deux monuments de notre patrimoine rassemblent à eux deux ce qui façonne l’identité française depuis Rabelais : l’élitisme et le populaire. Emmanuel Macron, qui prône le « retour au récit national », a justement là l’occasion de parler de ces deux France qu’on jugerait dissemblables, de les réconcilier. Un jour avec le gratin des belles lettres françaises, le lendemain aux côtés des bikers. Et par là même, de se défaire en partie de cette étiquette de président des « riches » et des « villes » qui lui a collé si vite à la peau. Le Parisien

résumé

7 novembre 2017

Trois langues...

reflexion25

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7 novembre 2017

Mouchoirs...

reflexion222

6 novembre 2017

Réflexion

snip_20170723114628

1 novembre 2017

Vive le bon vieux radio-réveil !

Par Luc Vinogradoff - Le Monde

Dans sa chronique, Luc Vinogradoff, journaliste au « Monde », rappelle que pour réduire notre technodépendance, exclure le téléphone de notre chambre est déjà un bon début.

Dans une époque de plus en plus ­centrée sur l’économie de l’attention, votre téléphone mobile est constamment avec vous. Dans la poche arrière de votre ­pantalon, près de l’ordinateur ou des plaques de cuisson, sur la table du restaurant…

C’est l’outil indispensable de communication écrite, visuelle, orale, pour l’accès à l’infor­mation et à la distraction ; c’est aussi un agenda, une boussole, un moyen de paiement, un ­ appareil photo. Corollaire de cette connexion permanente, l’émergence du concept de « désintoxication technologique » se développe. Ce qui se ­traduit, en bonne logique, dans notre société mercantile, par des services payants « digital detox » vous proposant de vous débarrasser de cette béquille numérique.

Tour ce qu’on a pu rater

De tous les objets rendus quasi obso­lètes par le téléphone portable, il en est un, pourtant, dont la résurrection pourrait être fort utile pour réduire notre technodépendance : le bon vieux radio-réveil du XXe siècle.

L’idée est d’exclure son téléphone de la chambre à coucher et de remplacer la fonction qu’on attend de lui aux heures les plus matinales – le bruit strident qui nous réveille – par une machine dont c’est le seul but : donner l’heure et sonner.

En se penchant pour ­éteindre le beep-beep-beep de son téléphone, le réflexe, en effet, est souvent ­d’effleurer les applis, puis de lire les mails, notifications, SMS, Facebook, WhatsApp, Instagram, Snapchat… Tout ce qu’on a pu rater pendant notre sommeil.

Couper le cordon

Mettre son portable à charger loin de son lit peut ainsi revêtir un caractère presque militant : c’est un acte de volonté pour reprendre le contrôle de ­notre temps et de notre attention.

Dans une « TED Talk » qui a fait le tour du Web, Simon Sinek, un écrivain se présentant comme « conférencier motivateur », défend ce geste en apparence anodin avec véhémence. « Aucun de nous ne devrait charger son téléphone près de son lit, argue-t-il. Nous devrions le charger dans le salon. Il faut éliminer la tentation. » L’objectif est de grappiller quelques minutes en coupant le cordon avec la connexion permanente.

Simon Sinek rappelle que des pontes de la Silicon Valley (Californie), ceux-là mêmes qui nous vendent ces technologies devenues indispensables à nos vies, limitent l’exposition de leurs enfants à leurs gadgets ; c’était le cas du cofondateur d’Apple, Steve Jobs. Si c’est une préoccupation pour eux, ça devrait également l’être pour nous.

31 octobre 2017

Mobilisation féministe contre la venue de Roman Polanski à la Cinémathèque

Par Laurent Carpentier - Le Monde

Une centaine de personnes se sont réunies lundi soir pour protester contre la rétrospective que consacre l’institution au réalisateur poursuivi pour viol sur mineures.

Elles sont arrivées calmement à la nuit tombée, ont déballé leurs pancartes – « Si violer est un art : donnez à Polanski tous les Césars. » « Femmes dans la rue, le patriarcat se pisse dessus. » – et sorti le mégaphone. Des trentenaires pour la plupart, représentatives de cette nouvelle génération de militantes féministes qui a émergé ces dernières années et a trouvé dans la récente affaire Harvey Weinstein l’étincelle qui devrait enfin, espèrent-elles, réveiller les consciences.

À l’appel d’Osez le féminisme, du Collectif féministe contre le viol et de La Barbe, elles sont une petite centaine ce lundi 30 octobre devant la Cinémathèque française à Paris à manifester contre la tenue d’une rétrospective consacrée au réalisateur Roman Polanski, aujourd’hui accusé par cinq femmes – aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, et en Suisse –, d’agressions sexuelles lorsqu’elles étaient mineures dans les années 1970 et 1980.

Une centaine, c’est peu ? « Il y a dix ans, on aurait été trois pelées et deux tondues », sourit satisfaite une vieille militante. Ce soir-là, le réalisateur a été invité à présenter en avant-première son nouveau film, D’après une histoire vraie, tiré du roman de Delphine de Vigan. Malaise dans la file qui, pour accéder à la salle, serpente entre les manifestantes. On n’y cache pas sa solidarité avec les revendications féministes et dans le même temps son admiration pour le cinéaste. « Complices ! Complices ! », crie la petite foule.

Refus de dissocier l’homme et l’artiste

« Il ne s’agit pas de réclamer une quelconque immunité de l’artiste. Mais faut-il condamner une œuvre dont on se demande bien en quoi elle fait l’apologie du sexisme, du viol ou de la pédophilie ? Faudra-t-il aussi brûler les œuvres de tous ceux dont la vie n’a pas toujours été un modèle de vertu ? », s’interroge Wassim Béji, le producteur du film de Polanski.

« Nous ne croyons pas à la dissociation de l’homme et de l’artiste que la Cinémathèque revendique », s’agace l’une des porte-parole du groupe Osons le féminisme. « La Cinémathèque n’a pas pris la mesure de la question. Elle vit dans une bulle à part ; 89 % de ses rétrospectives ont été consacrées à des cinéastes hommes », argumente-t-elle.

Un homme taciturne a beau faire remarquer (avec un « on peut le déplorer » pacifique), que ce n’est que la représentation exacte de l’histoire « machiste » du cinéma, pas sûr qu’il soit audible dans ce contexte. « On ne dit pas d’un boulanger violeur, il fait de bonnes baguettes », a écrit une jeune femme sur une affichette.

Un service de sécurité, mais quelques CRS décontractés. Les organisatrices ont promis à la préfecture de ne pas perturber l’événement lui-même… Pas les Femen. Au moment où Roman Polanski, entouré de gros bras traverse le hall, deux de ces militantes surgissent, soudainement, torse nu et bariolé en criant : « Bras d’honneur pour les violeurs ». Dehors l’ambiance est donnée. L’on gueule et l’on discute.

Mathilde a 35 ans, elle enseigne la littérature à l’université. « Je veux bien que l’on sépare l’œuvre de l’artiste. J’étudie Céline dans mes cours. Là, le problème, c’est que c’est un personnage vivant. Je n’ai rien contre le fait que l’on voie ses films, pas qu’on lui rende aujourd’hui hommage. C’est comme pour Bertrand Cantat. Que les gens achètent ses disques, oui ; que les Inrockuptibles le mettent en “une”, je trouve ça symboliquement hyper-violent. Dans le contexte de l’affaire Weinstein, cette rétrospective de la Cinémathèque est un acte politique : une manière de dire que l’insupportable est supportable. »

Un lieu « fidèle à son indépendance »

Le tableau est d’un contraste saisissant à l’intérieur de la Cinémathèque où quelque 600 personnes installées dans les deux salles pleines s’apprêtent à assister à la projection.

« Depuis 1974, Polanski vit et travaille à Paris, sa ville natale, et sa présence est une source de fierté pour le cinéma français tout entier, déclare en introduction son président, Costa-Gavras. Nous sommes persuadés que les films de Polanski sont plus que jamais indispensables à notre compréhension du monde et du cinéma. Il n’a pas été question une seconde de renoncer à cette rétrospective sous la pression de je ne sais quelle circonstance étrangère à la Cinémathèque comme à Polanski, et des amalgames des plus douteux et les plus injurieux. La Cinémathèque est fidèle à son indépendance à l’égard de tous les pouvoirs et de tous les lobbies, fidèle à ses valeurs et à sa tradition qui est d’être la maison commune des cinéastes. »

Car c’est là ce qui soude et effare du côté de la Cinémathèque : que les manifestantes féministes en appellent à la censure, à l’intervention de l’Etat pour un lieu qui se définit comme celui des audaces, de l’auteurisme, de la parole singulière, celle qui se joue des codes, défie la morale et les frontières, et qui, comme chez Polanski, explore les rivages tortueux de la perversion.

Standing ovation quand le petit homme aux cheveux hirsutes apparaît : « Je suis ravi d’être ici, de montrer tous mes films, des films qui vont rester j’espère, annonce le réalisateur. La Cinémathèque sert à [les] conserver, et c’est possible maintenant pour l’éternité. A l’époque on pouvait les brûler, comme Hitler brûlait les livres. Au tout début, les copies de films, c’était sur du nitrate, ça brûlait vachement bien. Je me rappelle quand j’étais jeune, on faisait des bombes avec ça. Aujourd’hui, c’est tout numérique et pour ça que mes films sont perpétués en dépit de certains zinzins. »

Le mot d’ordre : « Résistance »

Devant le bâtiment construit par Frank Gehry dans le parc de Bercy, les militantes féministes continuent de scander : « Ce que nous voulons ? L’extradition ! » « Les hommes de pouvoir se protègent les uns les autres. Ici, c’est franchement un cas de figure », analyse Anne-Laure, du collectif La Barbe.

« J’avais adoré Le Bal des Vampires quand j’étais petite, raconte cette directrice artistique freelance de 41 ans en ajustant sa barbe postiche, signe de reconnaissance de ce groupuscule d’intervention. J’ai montré récemment le film à ma fille de 13 ans, elle a trouvé ça dégoûtant, plein de sous-entendus, les filles n’y sont représentées que comme des amusements et les mecs y sont des gros débiles queutards. Ma fille avait un regard critique que je n’avais pas du tout à son âge. Il y a un truc qui s’est passé. Les générations qui viennent sont moins soumises à la séduction, à la domination. On les a élevées différemment. »

Béatrice, elle est éditrice. Ce qui lui « fait le plus mal », explique-t-elle, c’est « que cela vienne de la gauche, de gens qu’a priori on estime. Lorsque j’ai vu il y a quelques années le nom d’Agnès Varda – que j’admire – au bas d’une pétition de soutien à Polanski, je ne pouvais pas le croire. »

« Résistance ! », martèlent les féministes. « Résistance ! », répondent sur le même ton les programmateurs de la Cinémathèque qui ont prévu de consacrer en janvier une rétrospective à Jean-Claude Brisseau. Le réalisateur controversé de Noce blanche – condamné en 2005 pour harcèlement sexuel sur deux actrices lors d’auditions pour Choses secrètes et l’année suivante, en appel, pour agression sexuelle sur une troisième actrice –, doit en effet sortir à cette date un nouveau film attendu. Son titre : Que le diable nous emporte.

31 octobre 2017

Stella McCartney : « Le cancer, ce n’est pas joli, mais on peut en extraire de la beauté »

Par Elvire von Bardeleben

La styliste anglaise lance un ensemble de lingerie pour les femmes ayant subi une mastectomie et n’hésite pas à montrer, sur son site, la réalité des corps opérés. Une démarche singulière dans le monde soyeux du luxe. Entretien.

Les photos sont dures à regarder. Un torse sans poitrine, dont on ne sait s’il appartient à un homme ou à une femme, barré par une longue cicatrice. Un autre, asymétrique, un sein généreux à gauche, son fantôme à droite. Il y a aussi cette poitrine presque banale, si ce n’é­tait le téton manquant. Ces images violentes, quoique belles, sont hébergées sur le site de Stella McCartney, sous la bannière « No Less a Woman » (« Pas moins fem­me »), où sont rassemblés des témoignages de patientes ayant subi une ou plusieurs mastectomies.

L’implication de la designer dans la lutte contre le cancer du sein n’est pas nouvelle et elle n’est pas la première à s’engager pour une bonne cause. Mais il est rare de voir la maladie évoquée aussi crûment dans la mode, à plus forte raison dans le luxe. Autre singularité de sa démarche : elle aborde une question sensible, d’ordre politique. L’Anglaise, qui vend aussi un ensemble de lingerie classique dont les profits iront au Centre d’examen du cancer du sein de Harlem ainsi qu’au Centre Linda McCartney de Liverpool, précise que, d’après les statistiques, le risque de mourir d’un cancer du sein pour une Afro-Américaine est supérieur de 42 % à l’ensemble des femmes du pays – un taux de survie plus bas, en partie lié à un diagnostic plus tardif que chez tous les autres groupes ethniques aux Etats-Unis.

Des faits et des images que Stella McCartney ne commente pas sur son site. « J’ai eu la chance de naître sur cette planète, Dieu sait pourquoi, dans un environnement incroyable avec des parents [Paul et Linda McCartney] qui n’ont jamais eu peur d’avoir une opinion ou qu’on les juge. Il n’empêche que je suis plus à l’aise quand il faut parler de musique, d’architecture ou d’art que de politique », admet-elle.

Pourquoi lancer un bel ensemble de lingerie pour femmes ayant subi une mastectomie ?

Les raisons sont multiples et s’entremêlent… Je suis une femme dans l’industrie de la mode, dont le métier consiste à créer des vêtements pour les femmes, qui sont une source d’inspiration totale pour moi. Par ailleurs, je fais de la lingerie depuis des années, avec passion. J’ai aussi été témoin de la maladie de ma mère [Linda McCartney est décédée d’un cancer du sein en 1998], qui a dû subir beaucoup d’opérations et de traitements. J’étais sa fille, maintenant je suis mère… J’ai des amies qui ont subi des doubles mastectomies et qui m’ont montré la lingerie qu’elles devaient porter. J’ai constaté qu’il n’y avait rien pour aider les femmes à se sentir moins vulnérables et plus belles dans ces moments si douloureux. J’ai senti que c’était une petite chose que je pouvais faire et à laquelle je crois profondément : leur redonner une petite part d’elles-mêmes alors qu’elles ont l’impression de tout perdre.

Pourquoi, d’après vous, la mode se désintéresse-t-elle du corps malade ?

La réalité est qu’on vit dans un monde d’offre et de demande, de rentabilité. C’est évidemment important pour moi aussi : je veux gérer une maison de mode de luxe responsable et respectueuse de l’environnement, qui crée de l’emploi, peut se comparer sans rougir aux autres griffes et soit synonyme de longévité [l’entreprise de Stella McCartney fait partie du groupe de luxe Kering]. Mais d’un autre côté, j’ai envie d’utiliser cet outil et la chance incroyable que j’ai pour redonner quelque chose qui ne m’apportera ni célébrité ni argent – parce que ce n’est pas le but. Par ailleurs, les gens n’ont pas envie de parler de maladie. Ce n’est pas joli, c’est douloureux, mais on peut essayer d’en extraire un peu de beauté.

Les photos prises pour la ­campagne « No Less ­a Woman » montrent très crûment le corps opéré. Etait-ce volontaire ?

Quand j’ai travaillé avec mon équipe sur la façon de communiquer sur ce soutien-gorge post-mastectomie, elle m’a proposé des idées qui dégageaient une image douce et chic. Et cela m’a mise mal à l’aise. Ça n’aurait pas été juste de montrer de la jolie lingerie et de cacher son vrai but. Je voulais des photos plus dures, plus honnêtes, qui aient un ­impact, qui montrent la réalité de la mastectomie. C’est-à-dire une opération destinée à guérir et à survivre au cancer du sein.

La mode préfère souvent ­enjoliver les corps plutôt que de montrer les cicatrices…

Oui, mais il y a de la place pour tout le monde. Ce n’est pas mon intention de faire peur ou de choquer les gens. Ça serait contre-productif. J’essaie plutôt de délicatement lancer un sujet important. Cela ne me met pas à l’aise de parler de ça non plus, je ne me dis pas : « Chouette, je vais faire une interview sur le cancer du sein. » Mais c’est le rôle d’une femme dans ma position d’en parler et de dire aux femmes qui ont subi une mastectomie qu’elles ont le droit de se sentir à la mode, féminines et belles malgré les cicatrices.

Ce besoin d’en parler est-il ­nouveau pour vous ?

Cela fait des années que je travaille avec des associations de lutte contre le cancer du sein. La vente d’un ensemble de lingerie, dont l’image est incarnée par des personnes en vue comme Kate Moss ou Cara Delevingne, a commencé en 2014. Pour ne pas représenter un seul type de femmes, on a choisi de travailler cette année avec Alicia Keys, qui est afro-américaine.

Avez-vous l’impression que l’industrie de la mode manque de considération pour le corps des femmes ?

C’est un sujet glissant. J’ai toujours choisi des mannequins en bonne santé pour mes shows, parce que je n’ai pas envie de travailler avec des filles mal dans leur peau. Je les considère un peu comme mes enfants, elles font partie de la famille. On est une entreprise qui emploie beaucoup de femmes, et quand on prépare les défilés, il n’y a que des femmes dans la pièce. On est très protectrices. Mais mon approche n’excuse pas ce qui se passe dans l’industrie.

Faites-vous attention ­à la diversité des mannequins lors des défilés ?

Le critère déterminant pour moi, c’est de sentir une connexion avec la personne, quelle qu’elle soit. Quitte à risquer d’être un peu incohérente, d’ailleurs.

Quelle est votre position ­concernant les retouches des photos ?

Dans la mode, tout le monde retouche, je le fais aussi, mais je n’aime pas ça. Et quand ça devient excessif, je dis stop. Surtout, je ne dirai jamais : « Elle est trop grosse, il faut l’amincir » ni « Sa peau est ridée, il faut la lisser ». Quand on fait une photo, je sais ce que je veux : j’ai envie de travailler avec telle personne parce que j’aime son regard ou ses taches de rousseur et ce n’est pas dans mon intérêt de les gommer. J’ai été influencée par le travail de Cindy Sherman et de ma mère, je suis plus excitée par les imperfections. La mode ne doit pas culpabiliser les femmes, mais les faire se sentir bien.

Comment prenez-vous ­en considération le corps ?

L’intérêt d’être une femme qui conçoit des vêtements pour d’au­tres femmes est de dessiner des choses qui leur facilitent la vie – d’un point de vue psychique et physique.

Quand vous dessinez ­des vêtements, pensez-vous plutôt à l’allure ou au confort ?

Les deux ne sont pas incompatibles. Si tu es bien dans ta peau, même l’inconfort peut te donner de l’allure. Porter des bas ou un porte-jarretelles qui ne se voient pas te fait te sentir sexy. Tout comme des sous-vêtements d’homme, si c’est délibéré et que ça te correspond. Même le corset, si ça t’est agréable et que c’est un choix, pas une obligation. Mon objet d’études, c’est l’effet psychologique des vêtements.

Adaptez-vous beaucoup ­les vêtements entre le défilé, où l’image et le stylisme sont très importants, et ce que vous vendez en boutique ?

Non, pas vraiment. Ce qu’on voit au défilé sera en magasin, mais il y aura un choix plus large, différentes interprétations des vêtements du show.

Vous habillez-vous de la même manière à la maison ­et au travail ?

Je ne porte que mes vêtements, souvent le même pull et le même pantalon, qui me donnent de l’assurance. J’ai deux uniformes, un au travail, où j’ai besoin d’envoyer du bois, où je ne cherche pas à être glamour, mais efficace. Et un autre quand je veux me faire remarquer ou sortir. Dans ces cas-là, j’adore m’amuser et essayer d’être quelqu’un d’autre. Et vous, ça m’intéresse, vous portez quoi ?

Plus d’informations sur la campagne « No Less a Woman » sur Stellamccartney.com

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