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Jours tranquilles à Paris

24 septembre 2019

Etam Live Show 2019 24 septembre 21h30

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24 septembre 2019

Iran : pour Macron, « quelque chose peut se passer à New York »

Par Marc Semo, envoyé spécial à New York

Le président français veut mettre à profit l’Assemblée générale des Nations unies, qui s’ouvre lundi 23 septembre, pour apaiser les tensions entre Washington et Téhéran.

Un mois après le sommet du G7 de Biarritz, où il avait réussi à faire – un peu – bouger les lignes, créant un espoir de désescalade dans le golfe Arabo-Persique et mobilisant ses hôtes sur l’Amazonie, le président français tente de transformer l’essai lors de l’Assemblée générale des Nations unies (ONU) qui s’ouvre lundi 23 septembre.

« Cela nous permet de mettre en œuvre la dynamique entamée au G7 », a confié Emmanuel Macron dans l’avion qui l’emmenait à New York, parlant à un petit groupe de journalistes.

Ce sont les deux priorités du chef de l’Etat, qui cherche à conforter sa nouvelle stature internationale en affichant son engagement sur le climat, un thème politiquement porteur, mais aussi l’efficacité de sa diplomatie pro-active. Une gageure alors que la réunion des chefs d’Etats et de gouvernement des 193 Etats membres de l’ONU s’ouvre dans climat international particulièrement lourd.

La tension entre Washington et Téhéran a encore monté ces deux derniers jours avec l’annonce de l’envoi de renforts américains et les mises en garde de la République islamique affirmant par la voix de son ministre des affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, que « la guerre ne sera pas limitée ». Mais, parlant à la chaîne américaine CNN dans l’après-midi du 22 septembre, le ministre iranien, nettement plus mesuré, a affirmé que le président Hassan Rohani était prêt à rencontrer son homologue Donald Trump « si [ce dernier] est prêt à faire le nécessaire », c’est-à-dire à lever les sanctions en échange « d’inspections permanentes des sites nucléaires iraniens ». Quelque chose semble donc bouger.

« Unité de lieu »

« Il y a un enjeu à New York. Les deux protagonistes de la crise sont là. Il y a une unité de lieu et pas tout à fait une unité d’action car nous ne sommes pas en Arabie saoudite mais quelque chose peut se passer », a affirmé Emmanuel Macron tout en admettant qu’après l’attaque contre les installations pétrolières saoudiennes attribuées à l’Iran « les chances d’une rencontre n’ont certes pas augmenté ».

Et d’en rappeler toutes les difficultés, y compris en raison des approches diamétralement opposées entre Washington et Téhéran, qu’il a pu vérifier lors de ses nombreux entretiens téléphoniques avec MM. Trump et Rohani.

« Les Iraniens sont flexibles sur les paramètres mais inflexibles sur le rendez-vous qui, à leurs yeux, ne doit venir qu’à la fin du processus alors que l’objectif des Américains est d’avoir ce rendez-vous à court terme », explique-t-il, précisant que « Donald Trump décide vite et seul. Il a des logiques très transactionnelles et il n’est pas très difficile à convaincre. Hassan Rohani lui a besoin pour négocier de se caler avec tout un système et quarante ans d’histoire. »

Sur l’Iran, tout s’est encore compliqué depuis un mois. L’accord de principe obtenu à Biarritz auprès de Donald Trump et auprès du président iranien pour une rencontre que M. Macron espérait organiser lui-même a été balayé depuis le bombardement revendiqué par les rebelles houthistes – soutenus par Téhéran – du site de la Saudi Aramco le 14 septembre. Comme Riyad, les Etats-Unis ont accusé l’Iran d’avoir organisé l’attaque mais ils déclarent vouloir éviter un conflit armé tout en annonçant un nouveau durcissement des sanctions. La France, elle, a dépêché des experts sur place.

« Ne pas faire de politique-fiction »

« Il faut être très prudent dans l’attribution ; il y a pour le moment des faisceaux d’indices mais ce bombardement est un fait militaire de nature nouvelle qui change l’écosystème dans lequel était la région et qui crée une nouvelle donne », analyse Emmanuel Macron affirmant « ne pas vouloir faire de politique-fiction sur cette escalade et sur le rôle de l’Iran entré sur le chemin d’une montée en tension qui est une erreur stratégique majeure aussi bien pour lui-même que pour toute la région ».

Le programme new-yorkais d’Emmanuel Macron consacré à la question iranienne pour le 23 septembre est dense. Il doit rencontrer à la fois le premier ministre britannique Boris Johnson et la chancelière allemande Angela Merkel, les dirigeants des deux pays européens signataires de l’accord de Vienne de juillet 2015 (JCPOA), mais aussi Donald Trump et Hassan Rohani. Et il n’avait toujours pas décidé la veille dans quel ordre il rencontrerait les présidents des Etats-Unis et de l’Iran.

Depuis le début de la crise entraînée en mai par un nouveau durcissement des sanctions américaines et par la fin des exemptions dont bénéficiaient les huit principaux clients du brut iranien – dont la Chine, le Japon et l’Inde – le président français tente de se poser en médiateur entre Washington et Téhéran.

En mai 2018 les Etats-unis s’étaient retirés du JCPOA qui gelait et mettait sous contrôle international pour dix ou quinze ans selon les points le programme nucléaire iranien. Depuis juillet la République islamique a commencé à revenir sur ses engagements reprenant l’enrichissement de l’uranium au-delà du taux maximum autorisé de 3,67 % et elle annonce de nouvelles entorses pour le 6 novembre.

Agir sur quatre points

« Je ne suis pas un fétichiste du JCPOA et l’on est forcé de constater que ses deux principaux protagonistes l’ont quitté ou sont en train de le quitter », reconnaît Emmanuel Macron qui n’en estime pas moins nécessaire de préserver l’accord en le complétant.

« Alors même que les Etats-Unis en avaient été le moteur leur retrait affaiblit la position américaine d’autant qu’ils n’offrent pas d’alternative », insiste le président français, rappelant la nécessité affirmée par Paris avant même la décision de Donald Trump de le renforcer en agissant sur quatre points – la consolidation du traité lui-même, le fait de le compléter pour l’après 2025, la nécessité de contrôler les activités balistiques de l’Iran et d’arrêter ses actions de déstabilisation régionale.

« Ces deux ans depuis le retrait américain n’ont permis ni de résoudre la question du programme nucléaire iranien ni de réduire la conflictualité dans la région », relève Emmanuel Macron soulignant que « les discussions se focalisent sur le nucléaire (…) alors même que la grammaire dans laquelle nous rentrons est un peu différente ; elle a été imposée par les Iraniens et pas seulement sur le nucléaire ». Le président français évoque les attaques de pétroliers dans le détroit d’Ormuz, l’abattage d’un drone américain auquel Washington n’a pas répondu, les tensions régionales et ce dernier bombardement des installations pétrolières saoudiennes.

Appelant à « un multilatéralisme robuste et agile », Emmanuel Macron veut montrer à la fois l’importance et les limites du multilatéralisme pour gérer des crises. « Le cadre du multilatéralisme s’est affaibli par exemple pour le JCPOA remis en cause par certains de ses garants qui ont décidé d’en sortir ce qui a entraîné une remontée des tensions ; cela montre que quand on sort de ce cadre il y a le risque de l’escalade », a noté le président français relevant « qu’un multilatéralisme faible récompense les Etats voyous – comme on l’a vu en Syrie en 2013 quand les lignes rouges fixées à Bachar Al-Assad n’ont pas été respectées ce qui donné deux gagnants dans la région, l’Iran et la Russie – ; en revanche, un multilatéralisme robuste, comme celui qui a été montré avec les Etats-unis en avril 2018 pour répondre à une attaque chimique a donné des résultats ».

Cette action diplomatique qu’il mène à New York, Emmanuel Macron la voit aussi en résonance directe avec le quotidien des Français. « La sécurité régionale dans le Golfe, c’est le prix de l’essence avec de rapides répercussions sur le pouvoir d’achat, a indiqué le chef de l’Etat, mais c’est aussi notre sécurité tout court car s’il y a un embrasement il y aura des effets dominos très difficiles à maîtriser. »

24 septembre 2019

Palace Costes

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24 septembre 2019

Les parquets multiplient les initiatives pour améliorer la lutte contre les violences conjugales

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Par Julie Bienvenu, Jérémie Lamothe, Luc Leroux, Marseille, correspondant, Richard Schittly, Lyon, correspondant, Faustine Vincent

Le tribunal de grande instance de Créteil doit présenter lundi sa « filière d’urgence », qui doit servir de modèle à l’échelle nationale.

La mesure figure en tête du « plan d’action » du ministère de la justice établi en septembre pour lutter contre les violences conjugales. La mise en œuvre d’une « filière d’urgence », visant à accélérer le traitement de ces dossiers judiciaires à l’échelle nationale, doit être officiellement initiée lundi 23 septembre à l’occasion d’une conférence de presse au tribunal de grande instance (TGI) de Créteil, désigné par le gouvernement comme site pilote.

« L’idée est de mettre en place une procédure idéale, dès la comparution immédiate, pour traiter l’urgence et la spécificité des violences conjugales », détaille Isabelle Rome, haute fonctionnaire à l’égalité femmes-hommes au ministère de la justice. Le premier ministre, Edouard Philippe, l’avait reconnu lui-même lors de l’ouverture du Grenelle le 3 septembre : « Les délais de traitement des cas de violences conjugales sont souvent insupportables ».

Cette « filière d’urgence » prendra pour modèle ce que fait déjà le TGI de Créteil depuis quelques années. La juridiction fait figure de bon élève grâce à une coopération étroite entre le parquet, les magistrats du siège et le réseau associatif, notamment pour améliorer l’accompagnement des plaignantes. Résultat, les demandes d’ordonnance de protection sont traitées en seulement trois semaines, contre 31,5 jours en moyenne, selon les chiffres de la chancellerie, et l’aide juridictionnelle en moins de 48 heures.

Prise en charge accélérée

Après sa présentation lundi, cette prise en charge accélérée devra être modélisée afin d’être reproductible dans les 172 tribunaux de France. « Une façon de valoriser ce que l’on fait déjà, et d’améliorer ce qui peut l’être », explique Stéphane Noël, président du tribunal de Créteil.

Edouard Philippe veut notamment que les dossiers soient traités encore plus rapidement, « en quinze jours ». Un objectif ambitieux, mais qui pourrait aussi se révéler « contre-productif », avertit Isabelle Rome. « Il ne faut pas aller trop vite, souligne-t-elle. Il faut un temps incompressible pour ramasser les preuves d’un dossier et transmettre les pièces à la partie adverse, sinon l’affaire risque d’être renvoyée à une date ultérieure. »

Pressé par les associations féministes d’agir vite face au nombre de féminicides – plus de 100 depuis le début de l’année – le gouvernement assure aujourd’hui être « pleinement mobilisé ».

Dans une circulaire publiée le 9 mai, la ministre de la justice, Nicole Belloubet, réaffirme ainsi « le caractère prioritaire de la lutte contre les violences conjugales » et appelle tous les procureurs à « poursuivre les efforts » pour « une réponse ferme et réactive ». Un volontarisme affiché qui tranche, selon les associations, avec un manque de moyens financiers supplémentaires.

Agent de suivi

Au sein des juridictions, l’effervescence est palpable ces derniers mois, avec la multiplication d’initiatives un peu partout en France. A Saintes (Charente-Maritime), le procureur, Nicolas Septe, a ainsi lancé, le 16 septembre, une « expérimentation inédite » d’une durée d’un an pour assurer un « suivi renforcé » des auteurs de violences conjugales sur la base du volontariat lorsqu’ils sont sous contrôle judiciaire, en attente de leur procès.

Un agent de prévention, spécialement recruté pour cette mission, procédera à des contrôles inopinés réguliers. Il vérifiera par exemple que l’auteur respecte son interdiction d’entrer en contact avec la plaignante, ne possède pas d’arme ou ne consomme pas d’alcool, puis « fera un rapport qui sera remis au tribunal pour le procès », explique M. Septe. La victime aura également un droit d’accès direct à l’agent chargé du suivi par téléphone portable. Dans la juridiction de M. Septe, les violences conjugales représentent un fait de violences sur deux. « J’ai 400 affaires par an, sans compter toutes celles qui ne nous sont pas signalées… »

A Lyon aussi, les magistrats se mobilisent. Depuis le début de l’année, le parquet exige des services de police et de gendarmerie l’ouverture systématique d’une procédure pénale pour chaque cas de violences conjugales présumées. Finies, donc, les simples mains courantes.

Les consignes du procureur Nicolas Jacquet se traduisent par une hausse de 30 % de déferrements au parquet par rapport à 2018. Depuis le début de l’année, 248 auteurs de violences sur conjoint ont ainsi été présentés au palais de justice de Lyon, contre 288 pour toute l’année 2018. Le parquet déploie aussi une politique d’aide aux victimes. Vingt-huit téléphones portables « grave danger », qui permettent à une victime d’alerter les forces de l’ordre en cas de menace, ont été distribués cette année, contre huit l’an passé.

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« J’ai peur qu’il revienne »

Malgré ces consignes, l’expérience de Marie, 32 ans, montre que beaucoup reste à faire. Victime de coups de la part de son conjoint, le 6 septembre à Brignais, au sud de Lyon, la jeune femme a attendu six jours avant d’avoir un rendez-vous de médecine légale, avec six jours d’incapacité totale de travail (ITT) à la clé.

Et encore, il a fallu relancer la gendarmerie. « J’ai eu l’impression que je dérangeais la brigade. Je n’ai senti aucun soutien, aucun conseil d’orientation. J’étais victime des coups de mon mari et en plus il fallait me battre pour faire respecter mes droits ! », s’indigne-t-elle. Le conjoint violent a eu, lui, une simple convocation en maison de justice. « Vais-je pouvoir vivre dans ma maison, maintenant ? J’ai peur qu’il revienne, aucune mesure de protection n’est prise », s’inquiète la jeune femme.

D’autres initiatives germent ailleurs, dans les parquets de Nantes, Brest ou encore Pontoise. « Le fait que le sujet soit maintenant au cœur des préoccupations des Français permet de lever les réticences de certains interlocuteurs. C’est une prise de conscience collective. Cela donne un coup de projecteur et d’accélérateur aux actions menées », estime Isabelle Rome, en charge de l’égalité femmes-hommes à la chancellerie.

« Les gendarmes tendaient des draps dans l’escalier »

Des procureurs soulignent toutefois qu’ils n’ont pas attendu le Grenelle pour mettre en place des dispositifs locaux. Edwige Roux-Morizot, en poste à Mulhouse, rappelle avoir mis en place des stages pour les auteurs de violences conjugales à Dijon dès 2005.

« C’était il y a quatorze ans ! Ce n’est donc pas une problématique sur laquelle on ne fait rien. Même si certains la portent moins que d’autres ». Les procureurs fixent en effet eux-mêmes leur priorité. « Ils ne peuvent pas tout faire donc ils sont obligés de faire des choix, poursuit Mme Roux-Morizot. Une thématique peut devenir prioritaire pour des raisons personnelles de la part du magistrat du parquet. »

Cela tient parfois à un souvenir plus marquant que d’autres. Isabelle Fort était jeune magistrate à Saint-Omer (Pas-de-Calais) lorsqu’elle avait dû se rendre sur une scène de crime, un homicide conjugal. « Je me souviens que les gendarmes tendaient des draps dans l’escalier pour que les enfants puissent descendre du premier étage sans apercevoir leur mère dans une flaque de sang, entortillée dans le fil du téléphone. Elle composait le 17 au moment ou son conjoint l’a tuée. »

Aujourd’hui substitut général à la cour d’appel d’Aix-en-Provence, Isabelle Fort pilote la lutte contre violences conjugales et boucle actuellement une étude sur les vingt-neuf cas d’homicides ou de tentatives commis depuis le 1er janvier 2018 dans le ressort de la cour d’appel. Son but : débusquer les dysfonctionnements et les erreurs pour y remédier.

Dysfonctionnement

C’est aussi le souvenir d’un féminicide qui a sensibilisé André Ribes, procureur de la République adjoint à Marseille, à cette thématique. Ce magistrat aguerri était encore en formation à Avignon lorsqu’il s’était rendu sur une scène de crime, un soir d’hiver. En ouvrant la porte de la maison, il avait découvert le corps ensanglanté d’une mère de famille, éclairé par les scintillements du sapin de Noël.

Des années plus tard, il s’affaire à reprendre l’ensemble de la chaîne du traitement de ce type de dossiers après avoir constaté un dysfonctionnement au sein du palais de justice de Marseille : une femme avait été vitriolée à l’acide en juin 2018 par son ex-conjoint, dont les magistrats avaient raté plusieurs occasions de révoquer le contrôle judiciaire, qu’il bafouait allègrement. L’une des mesures qu’il a prises consiste à faire travailler ensemble les agents en charge du contrôle judiciaire de l’auteur et ceux qui accompagnent la victime.

Le ministère de la justice tente désormais d’avoir une vue d’ensemble sur les actions menées dans tous les tribunaux. Rien de tel n’existe à l’heure actuelle, les violences conjugales n’étant abordées qu’à la marge dans le rapport annuel du ministère public. Signe que les priorités ont changé, les parquets ont eu la consigne de faire un retour détaillé sur le sujet en vue du prochain rapport.

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24 septembre 2019

Le corps sans entraves

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Carolee Schneemann, Forbidden Actions-Museum Window, 1979.
Au printemps dernier disparaissait Carolee Schneemann, pionnière de l'art féministe et du body-art, connue pour ses performances et ses films-collages revendiquant, pour le corps féminin, le corps nu et libéré, le droit d'apparaître et de le faire depuis les canons de l'histoire de l'art. Carolee Schneemann fut également peintre, comme le rappelle cette rentrée une exposition à la galerie Mfc Michèle Didier.

Pour le corps féminin, elle revendique alors non seulement un statut, entendu, de corps-image, mais également un statut de corps-créateur, s'appropriant avec humour la figure de Paul Cézanne : Cézanne serait une femme, le "-anne" de son nom indiquant forcément une possible subversion. Plus tard, elle s'attaquera, à travers des montages d'images auxquelles elle superpose l'empreinte de son propre corps, à la figure d'un Yves Klein, manière de subvertir les anthropométries de celui pour qui le corps féminin fut un simple outil, laissant son empreinte sur la toile qu'il signait ensuite de son nom.

• Carolee Schneemann, jusqu'au 9 novembre à la galerie Mfc Michèle Didier, à Paris

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24 septembre 2019

Jean Rougeron - photographe

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24 septembre 2019

Helmut Newton

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24 septembre 2019

La jupe-culotte sans faux pli

Par Laetitia Leporcq, Stylisme, Serge Carreira

Toutes les tendances ont une histoire. Serge Carreira, enseignant à Sciences Po et spécialiste de la mode, en remonte le fil. Cette semaine, la jupe-culotte.

Voici encore un vêtement qui a permis aux femmes de s’affranchir des conventions. Née au début du XXe siècle, la jupe-culotte, fusion de la jupe et de la culotte – ce caleçon long porté par les hommes sous leurs vêtements –, permet aux femmes de contourner l’interdiction du port du pantalon, toujours en vigueur à l’époque sauf « permis de travestissement » délivré par la préfecture. Sous l’influence des Ballets Russes et de l’Orient, c’est le couturier Paul Poiret qui lance, dans les années 1910, ces amples et fluides pantalons bouffants qu’il appelle « jupes harem ».

Contraintes par le premier conflit mondial à contribuer à l’effort de guerre, les femmes de toutes les conditions adoptent ce modèle hybride, mi-jupe mi-pantalon, pour pouvoir se déplacer à vélo et travailler dans les usines. Mais, dès l’après-guerre, il se fait plus rare, la garçonne privilégiant alors les robes droites.

Il faudra attendre la fin des années 1960 pour que le pantalon s’impose dans le vestiaire féminin. Et la jupe-culotte en est l’une des premières formes, grâce notamment à Saint Laurent Rive gauche, qui la présente en tailleur avec des vestes en laine masculines ou des manteaux en mouton retourné.

Les autres maisons lui emboîtent le pas et elle devient une pièce indispensable des silhouettes BCBG. Les années 1980 mettent, pourtant sans ménagement ce vêtement au placard : trop bourgeois pour les uns, pas suffisamment glamour pour les autres. Symbole d’émancipation, il devient celui de la ringardise.

Remise au goût du jour

Les créateurs Rei Kawakubo pour Comme des garçons, et Yohji Yamamoto vont le réhabiliter dans les années 1990 en détournant les pantalons traditionnels des pêcheurs japonais pour l’intégrer dans leur univers conceptuel et déconstruit. Vanessa Seward remet au goût du jour le vestiaire rétro de la bourgeoise, et donc la jupe-culotte, dès ses débuts, en 2015.

Cet hiver, elle semble bel et bien partie à la conquête des femmes. Hedi Slimane, pour Celine, la consacre avec ses silhouettes revisitant l’allure raffinée des années 1970. En lainage, en cuir ou en denim, ses modèles sont portés avec des blouses légères à lavallière et des blazers étroits. Dans un autre registre, Simon Porte Jacquemus lui donne des airs pimpants en cuir vert sapin. Longtemps négligée, voire moquée, la jupe-culotte a su dépasser les clichés. Elle conserve même quelque chose de mutin qui sied parfaitement à ces temps d’affirmation et d’engagement.

24 septembre 2019

Roman Polanski et Sharon Tate

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24 septembre 2019

"Le “temps de cerveau disponible” des responsables politiques est occupé non par le climat, mais par la peur de la récession"

Par Dipak Dasgupta, Economiste, Jean-Charles Hourcade, Economiste

Les économistes du climat Dipak Dasgupta et Jean-Charles Hourcade plaident, dans une tribune au « Monde », pour la création d’un fonds mondial de garantie publique des investissements dans les projets bas carbone, afin de débloquer l’épargne en faveur de la transition énergétique

Dans un contexte d’augmentation des investissements en énergies fossiles et de rejet de l’accord de Paris par les Etats-Unis, l’Australie et le Brésil, le sommet Action climat, qui se tient aux Nations unies (ONU) lundi 23 septembre, risque d’être décevant et de renforcer le camp des sceptiques.

Ce risque résulte du fait que le « temps de cerveau disponible » des responsables politiques est occupé non par le climat, mais par la peur de la récession. On ne peut le conjurer qu’en faisant des politiques climatiques une alternative crédible à la tentation de relancer les économies par une création monétaire généreuse, par des baisses d’impôt sur les profits des entreprises et par diverses formes de protectionnisme.

Succomber à cette tentation ne ferait que renforcer la combinaison délétère entre une épargne surabondante et un manque d’investissement productif. Elle est l’effet d’un impératif exportateur qui a fini par déprimer la demande finale par le biais de la pression sur les salaires, d’un sous-investissement en infrastructures, de la frilosité d’entreprises soumises à la « dictature » de la valeur de l’action, et d’un affaiblissement de la protection sociale qui pousse à épargner.

Réduire les risques

Injecter des liquidités et baisser la fiscalité sur les profits sans corriger ces trois paramètres revient à faciliter le repli des épargnants vers l’immobilier et les produits spéculatifs et à encourager les stratégies de rachat de leurs actions par les entreprises, surtout en cas de turbulences créées par des jeux de mesures et contre-mesures protectionnistes. Cela revient à attendre la prochaine explosion des bulles spéculatives, qui retombera en définitive sur les comptes publics.

Or, les politiques climatiques ont tous les atouts pour éviter cette impasse : elles indiquent aux acteurs financiers où investir ; elles réaniment les marchés intérieurs dans des secteurs (énergie, transports, habitat) à grand pouvoir d’entraînement ; elles réduisent les fractures sociales ; elles amorcent des stratégies de développement endogènes et évitent ainsi les dangers de surenchères protectionnistes.

La clé est de réduire le risque des investissements bas carbone à travers des garanties d’Etat qui ne retombent sur le contribuable qu’en cas d’échec des projets et aggravent bien moins les déficits publics qu’une subvention. Cette clé peut libérer l’épargne des pays riches à démographie déclinante, alors que deux tiers des investissements doivent se faire dans des pays où l’épargne est soit insuffisante, soit placée en partie dans les pays riches pour des raisons de sécurité.

Pour ce faire, un groupe de pays du Nord devrait s’engager sur des montants de garanties publiques d’investissements bas carbone dans des pays du Sud, au sein d’une coalition réunie autour de règles communes :

N’aider que des projets conformes aux contributions nationales que les pays bénéficiaires ont déclaré à la convention climat ;

Faire sélectionner les projets par des autorités indépendantes selon des principes d’évaluation transparents ;

Calculer le montant des garanties sur la base d’une même valeur de la tonne d’émission évitée, valeur déterminée par l’objectif 2 °C et les bénéfices tirés de la réduction des émissions sur le plan du développement économique.

Mieux utiliser « l’argent des riches »

Les discussions sur une telle architecture peuvent s’ouvrir sans retard. Tout se jouera sur sa crédibilité, indispensable pour mobiliser des capitaux privés, encourager les coopérations entre banques de développement, renforcer le Fonds vert pour le climat et faire émerger des actifs bas carbone suffisamment sûrs pour être inclus à terme comme des réserves dans le calcul des ratios prudentiels des institutions financières. Une telle architecture pourrait alors aussi intégrer les producteurs d’énergies fossiles, puisqu’ils pourraient renoncer aux gisements non exploités pour réinvestir leurs rentes dans les équipements bas carbone.

Avec un effet levier de fonds publics sur le volume de projets similaire à celui du plan Juncker, 4 à 16 milliards d’euros par an de provisions de garanties pendant une première période de cinq ans (26 à 60 milliards en moyenne sur vingt ans) permettraient de combler le déficit de financement de la transition bas carbone dans les pays en développement, par le biais de l’apport de capitaux privés et les baisses de taux d’intérêt. Quant aux pays garants, ils amélioreraient leurs comptes publics par les revenus fiscaux de nos exportations dès que celles-ci atteindraient plus de 4 % de la valeur des projets (« A Climate Finance Initiative », Dipak Dasgupta, Jean-Charles Hourcade, Seyni Nafo, rapport au ministre de l’écologie et de la transition solidaire, avril 2019).

L’Europe pourrait s’unir autour d’une telle perspective et l’utiliser en interne comme relance budgétaire pour concrétiser les promesses de la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, sur la neutralité carbone, ou celle de la présidente de la Banque centrale européenne (BCE), Christine Lagarde, d’intégrer « le changement climatique au sein des objectifs de la BCE ». L’Allemagne pourra la partager parce qu’une garantie n’est un pas un prêt et n’engendre pas mécaniquement une dette : elle est un engagement sous condition, et la création de liquidité à laquelle elle conduit est assise sur la création d’une richesse tangible.

Asservir ce que Keynes appelait « les esprits animaux de la finance » à la bataille pour le climat, c’est mieux utiliser « l’argent des riches » tant que le monde n’a pas retrouvé les voies d’un modèle de croissance inclusif pour faire reculer la récession qui menace, enclencher une réforme systémique d’une mondialisation en crise et, enfin, faire la preuve, contre les sceptiques, des gains réciproques de la coopération.

Dipak Dasgupta est membre du panel du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), ancien membre de la direction du comité d’investissement du Fonds vert, ancien conseiller principal climat au ministère indien des finances.

Jean-Charles Hourcade est directeur de recherche au Centre international de recherche sur l’environnement et le développement (Cired), membre du panel du GIEC.

Les auteurs précisent que ces réflexions n’engagent pas le GIEC.

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