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Jours tranquilles à Paris
societe
7 août 2019

Torse nu interdit ... à juste titre

toprse

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3 août 2019

Paris - Trottinettes mal garées : désormais, les usagers sont aussi verbalisés

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Depuis le 30 juillet à Paris, les opérateurs comme les usagers sont passibles d'une amende en cas de trottinettes mal garées. Le montant a été fixé à 35 euros.

Le ras-le-bol des piétons face aux trottinettes électriques à Paris a poussé la mairie à agir. Désormais, les utilisateurs de trottinettes électriques en libre-service vont en avoir pour leur argent. Depuis le 30 juillet, en cas de flagrant délit, ils devront payer une amende de 35 euros.

La ville a renforcé son dispositif d'"interdiction totale de stationner sur le trottoir". Désormais, l'usager est obligé de garer sa trottinette sur les places de stationnement des deux-roues et voitures.

A Paris, garer sa trottinette électrique sur le trottoir est désormais officiellement interdit 

Depuis mardi, la municipalité a dressé plus de 130 verbalisations pour stationnement gênant de trottinettes et mis en fourrière plus de 110 engins. Elle souligne toutefois que "la mise en place progressive d'emplacements dédiés a commencé, pour un objectif de 2.500 à la fin de l'année". Chaque emplacement pourra contenir "environ" 6 trottinettes - soit 15.000 places.

On ne gare pas sa trottinette électrique n'importe où.

Paris souhaite réguler davantage ce nouveau moyen de déplacement qui contribue à réduire l’usage de la voiture polluante pour assurer la sécurité routière et pacifier les rues et les trottoirs 

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15.000 trottinettes à Paris

Cette mesure sera-t-elle efficace ? Difficile de l'imaginer tant le nombre d'opérateurs et de trottinettes est important dans la capitale : 15.000 trottinettes électriques en libre-service.

Quand l'usager est pris en flagrant délit, l'amende de stationnement gênant lui est directement adressée par les policiers municipaux. Mais quand la trottinette a été abandonnée, "c'est à l'opérateur" de s'acquitter dans un premier temps de l'amende puis de retrouver le fautif, explique la mairie de Paris.

Paris lance ses premières aires de parking pour trottinettes électriques   

Prévenir plutôt que punir

Toutefois, la plupart des loueurs affirment privilégier la prévention plutôt que la répression et promettent pour l'instant de ne pas envoyer les amendes à l'utilisateur.

VOI incite ainsi les utilisateurs à garer leur trottinette aux endroits dédiés avec un système de "parking bonus", qui récompense financièrement ceux qui le font. Ces parkings sont signalés sur l'application (6.000 pour VOI, 4.500 pour Bird, par exemple). Un dispositif qui donne de "très bons résultats", notamment au Danemark, selon Lucas Bornert, directeur général de VOI France. Les opérateurs misent également sur la diffusion de messages prévenant de l'interdiction en vigueur, comme Bird qui va "contacter les utilisateurs dans les jours qui viennent"

Lime, de son côté, a "déployé une patrouille urbaine" de 50 personnes dont la mission est "de repositionner les trottinettes mal garées", indique Arthur-Louis Jacquier, responsable à Paris.

La moitié des applis de trottinettes électriques ont déjà échoué à Paris   

N'ayant à ce jour "sanctionné [aucun] utilisateur", Lime prévient: "Si, dans le futur, nous constatons que certains clients, de manière systématique, se garent mal, on serait éventuellement en mesure d'impacter cela sur les utilisateurs".

Avec, en plus de l'amende, une mise en fourrière de 49 euros pour chaque véhicule, reste à savoir si la bienveillance des loueurs va résister à l'arrivée prévue par la mairie de Paris des quelque 20.000 trottinettes supplémentaires d'ici 2020.

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3 août 2019

Castaner empêtré dans les polémiques sur les violences policières

Par Nicolas Chapuis

Le ministre de l’intérieur, qui, jusqu’à présent s’est surtout attaché à défendre pied à pied les forces de l’ordre, doit prouver qu’il est aussi en mesure de les contrôler.

La critique a été soufflée du bout des lèvres, au terme d’une semaine marquée par la découverte du corps de Steve Maia Caniço au fond de la Loire, lundi 29 juillet. « Il y a un questionnement sur l’utilisation des lacrymogènes (…) sur l’opportunité d’avoir déclenché l’usage des lacrymogènes », a lâché Christophe Castaner, vendredi 2 août, à la veille de rassemblements en hommage au jeune homme de 24 ans et de manifestations contre les violences policières.

C’est la première fois que le ministre de l’intérieur émet publiquement des réserves sur les modalités de l’intervention des forces de police pour mettre fin à une soirée « sound system », dans la nuit du 21 au 22 juin, sur le quai Wilson à Nantes, au cours de laquelle Steve Maia Caniço a disparu dans des circonstances encore inconnues à ce jour.

Le locataire de Beauvau ne fait que reprendre à son compte les critiques formulées à bas bruit dans le rapport de l’IGPN publié mardi 30 juillet, mettant en cause la stratégie décidée par le commissaire présent lors de l’opération – son obstination à faire cesser à tout prix la musique avait été génératrice de tension, écrivent les enquêteurs.

Mais alors que le premier ministre Edouard Philippe s’était servi du même document, mardi, pour écarter tout lien entre l’action des forces de l’ordre et la mort du jeune homme, la variation de ton demeure notable.

steve lien de causalité

Utilisation politique d’un rapport de l’IGPN

Christophe Castaner vient de traverser la semaine la plus compliquée depuis son arrivée au ministère de l’intérieur. Et c’est une gageure d’écrire cela tant les épisodes houleux se sont multipliés au cours de cette année marquée par les « gilets jaunes ».

L’annonce – autant pressentie que redoutée – de l’authentification de la dépouille de Steve Maia Caniço a cependant fait basculer cette affaire nantaise dans une autre dimension, de celle qui transforme les maroquins en strapontins.

M. Castaner sait que les explications données mardi par Edouard Philippe ne sauraient être suffisantes. L’utilisation politique d’un rapport de l’IGPN pour disculper les forces de l’ordre de tout soupçon, à peine quelques heures après la confirmation officielle de la mort du jeune homme, n’est pas une réponse satisfaisante. Et pas seulement pour les proches de Steve qui se sont émus via leur avocate de l’absence de délai de décence.

Ce document, sur lequel repose la communication gouvernementale, n’est qu’une enquête administrative prédisciplinaire, pour laquelle aucune des personnes présentes ce soir-là, hormis les policiers et les agents de la protection civile, n’a été entendue. Conclure publiquement à l’absence de responsabilité des forces de l’ordre sans avoir auditionné les personnes qui sont tombées à l’eau au moment de l’intervention, voilà qui jette une ombre sur la volonté d’impartialité affichée des autorités dans cette affaire.

Un crédit entamé

La question sous-jacente est celle de la confiance et Christophe Castaner doit batailler, de ce point de vue, sur trois fronts : politique, policier et populaire.

Côté gouvernemental, il semble pour le moment bénéficier de celle du couple exécutif, malgré les appels à la démission de l’opposition qui ont redoublé dans la semaine, après que le ministre de l’intérieur a qualifié le saccage d’une permanence parlementaire La République en marche d’« attentat ».

Il s’appuie sur son statut de proche d’Emmanuel Macron, même si dans l’entourage du chef de l’Etat, certains laissent entendre que la relation s’est distendue. L’épisode de la Pitié Salpêtrière – il avait assuré que des casseurs s’en étaient pris à l’hôpital parisien, avant de faire machine arrière – et celui de l’escapade filmée en boîte de nuit au soir d’une mobilisation des « gilets jaunes » ont entamé son crédit.

Edouard Philippe compose pour le moment avec cette donne. Le premier ministre a pris en main la gestion de l’affaire de Nantes lors d’une conférence de presse au langage double, destinée aussi bien à soutenir son ministre qu’à le reléguer au second plan.

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Une vision très musclée du maintien de l’ordre

Dans les rangs de la police nationale, M. Castaner conserve un certain crédit. Avec son soutien sans faille au plus fort des critiques sur l’usage de l’armement intermédiaire – lanceurs de balle de défense (LBD), grenades de désencerclement, gaz lacrymogènes – il s’est acheté quelques mois de tranquillité. L’attelage avec le secrétaire d’Etat Laurent Nunez est fonctionnel, à ceci près que ce dernier jouit parfois auprès de la troupe d’une cote plus élevée que celle de son chef, ce qui est rarement gage de durabilité.

Côté syndical, on ne voit pour le moment aucune urgence à changer un ministre qui défend les policiers et qui, surtout, a cédé sur les revendications salariales lors d’une négociation éclair en décembre 2018. Avec cinq ministres en cinq ans, les forces de l’ordre ont cessé de croire aux vertus des remaniements.

Reste le plus important, la confiance des citoyens. En la matière, Christophe Castaner part avec un capital déjà bien entamé auprès d’une partie de la population. Son déni des violences policières et sa vision très musclée du maintien de l’ordre, en réponse à la mobilisation des « gilets jaunes », elle-même empreinte de violence, a été clivante dans l’opinion : certains approuvent estimant que force doit rester à la loi même si le coût est élevé, quand d’autres considèrent qu’un cap inédit a été franchi dans la brutalité de la part des autorités.

L’affaire de Nantes vient s’inscrire dans ce contexte de polémiques devenues quotidiennes sur l’usage de la force par les policiers. Fallait-il utiliser trente-trois grenades lacrymogènes, dix grenades de désencerclement et douze cartouches de LBD pour faire cesser une fête au bord de l’eau ?

L’enquête se chargera de répondre à cette question, mais elle s’annonce longue et compliquée, tant sur le plan administratif que judiciaire. En attendant, Christophe Castaner, qui jusqu’à présent s’est surtout attaché à défendre pied à pied l’institution policière, doit prouver qu’il est également en mesure de la contrôler.

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Rassemblements à Nantes, samedi, « en mémoire de Steve », et « contre les violences policières ». La ville de Nantes est en deuil depuis la découverte, lundi 29 juillet, du corps de Steve Maia Caniço, noyé dans la Loire le 21 juin après une opération de police controversée. Pour rendre hommage au jeune homme de 24 ans, plusieurs appels à se rassembler samedi ont fleuri sur les réseaux sociaux. Sur les pages Facebook des « gilets jaunes » et du mouvement « black bloc » a été annoncée une manifestation (non déclarée) pour 13 heures en centre-ville « en mémoire de Steve », mais surtout « contre les violences policières ». Un autre rassemblement doit se tenir à 11 heures, au pied de la grue jaune à côté de laquelle le corps de Steve avait été retrouvé lundi ; cet hommage doit prendre la forme d’une marche blanche sur l’île de Nantes. Face à ces appels, le préfet de Loire-Atlantique a décidé, jeudi soir, d’interdire les rassemblements dans « une grande partie du centre-ville » samedi, de 10 heures à 20 heures, « afin de garantir l’ordre public ». Cette restriction ne devrait, cependant, pas concerner la marche blanche, et elle laisse libre d’accès la plupart des grands boulevards où peut évoluer un cortège. La Ligue des droits de l’homme avait déposé une demande en référé pour suspendre l’arrêté d’interdiction mais sa requête a été rejetée, vendredi soir, par le tribunal administratif de Nantes. L’avocate de la famille de Steve Maia Caniço, Me Cécile de Oliveira, a pour sa part confirmé vendredi que « les proches du jeune homme n’acceptent qu’un soutien amical, artistique et pacifique ». Dans un entretien à Ouest-France, elle souligne que « leur deuil est abîmé par le fait que Steve devient un enjeu politique très fort ».

3 août 2019

Chassé-croisé sur les routes : comment peut-on prévoir et mesurer les embouteillages ?

Par Anne-Aël Durand

Les réponses aux questions que vous vous posez lorsque vous êtes coincé dans un bouchon.

Les automobilistes broieront du noir samedi 3 août. Il s’agit de « la journée la plus difficile de l’été sur l’ensemble des grands axes » en France, a prévenu Bison futé, l’organe de prévision de circulation du ministère des transports.

Les prévisions de circulation du 3 août.

Mais comment peut-on prévoir les pics de trafic, et les mesurer en temps réel ? Les réponses aux principales questions qu’on a le temps de se poser lorsqu’on doit patienter dans les embouteillages.

Par quelle méthode mesure-t-on le trafic routier ?

Le système traditionnel consiste à s’installer au bord d’une route pour voir passer des voitures, mais, heureusement, d’autres instruments ont été développés :

Les boucles électromagnétiques. Pour connaître le nombre de véhicules qui circulent, des capteurs sont disposés sur la chaussée. Le bitume est découpé à la scie pour insérer un câble électrique. Le passage d’une voiture ou d’un camion, qui ont des parties métalliques, crée un champ magnétique qui envoie un signal d’occupation. Ces boucles électromagnétiques donnent des informations très utiles sur la vitesse et le nombre de véhicules en un point, mais elles restent insuffisantes, explique Christine Buisson, chercheuse en modélisation de trafic à l’Institut français des sciences et technologies des transports (Ifsttar) : « Sur le périphérique parisien on en trouve tous les 500 mètres, mais sur une autoroute il y en a plutôt tous les dix ou vingt kilomètres, ce qui reste une mesure assez grossière. »

Les systèmes GPS. Le floating car data (FCD), qui existe depuis dix ans, collecte les données des utilisateurs de systèmes de guidage connectés – TomTom, Coyote, Waze, etc. – pour obtenir des temps de parcours sur certains axes. « Ces données sont globalement fiables lorsque le nombre de véhicules est élevé, donc efficaces pour les gros bouchons, mais pas pour des événements isolés », nuance Mme Buisson. Si la mesure du temps perdu est possible grâce à ce système, ce dernier ne permet pas de connaître le débit de la route, donc le nombre total de véhicules concernés. Il faut pour cela croiser l’information avec les boucles électromagnétiques.

La vidéo. Pour repérer les événements qui créent un bouchon, des caméras sont ponctuellement implantées dans les endroits à risque, mais elles présentent l’inconvénient d’être statiques. Un autre outil efficace, mais coûteux, est le survol en hélicoptère. Les chercheurs de l’Ifsttar ont ainsi pu affiner leurs algorithmes expliquant l’apparition de bouchons en filmant depuis les airs des engorgements. La gendarmerie déploie aussi des hélicoptères sur les routes des vacances, mais plutôt pour repérer les conduites à risque.

« Kilomètres cumulés » et « heures kilomètres »

Les médias annoncent souvent les bouchons en « kilomètres cumulés », ce qui permet de convoquer des images simples comme « 800 kilomètres d’embouteillages cumulés le samedi 1er août à 12 h 30, soit la distance entre Paris et Marseille ». Dans les faits, c’est un peu trompeur, puisque les files s’additionnent : une route à quatre voies bouchée sur un kilomètre compte déjà pour quatre kilomètres cumulés.

Pour être plus précis et donner une idée de la durée, les experts mesurent plutôt le volume d’encombrements en « heures kilomètres », une unité moins significative mais plus précise, qui intègre à la fois la durée du bouchon et la longueur moyenne de chaque file bouchée. Ainsi, un bouchon qui bloque trois voies sur deux kilomètres pendant une heure mesure 3 × 2 = 6 heures kilomètres, soit autant qu’un bouchon de 2 kilomètres sur une seule voie et qui durerait trois heures.

Ce cumul global ne renseigne ni sur la densité du bouchon ni sur sa vitesse. Or, pour les automobilistes, l’essentiel est de connaître le temps total perdu, soit la différence entre le temps de parcours à vitesse normale et la réalité. Pour cela, les données du FCD sont très utiles. De son côté, l’exploitant routier – l’Etat, les collectivités ou les sociétés d’autoroute – cherche d’abord à connaître le nombre de personnes concernées par un événement routier pour limiter le nombre de mécontents.

Comment Bison futé décrète une journée « rouge » ou « noire » ?

Bison futé est la marque du Centre national d’informations routières animé par le ministère des transports, créée en 1976 pour conseiller les automobilistes. Chaque année, un calendrier annuel de prévisions de trafic est élaboré en fonction des débits mesurés les années précédentes sur les quatre cents stations de comptage, en partant de l’hypothèse que les conditions de circulation sont comparables.

Le nombre d’épisodes de « circulation très difficile » ou « extrêmement difficile » est maintenu à un niveau quasi constant. On compte chaque année une dizaine de journées « rouges » (samedis d’été, week-ends de ponts, congés d’hiver, etc.), et une à deux journées dites « noires », qui correspondent au retour des juillettistes et au départ des aoûtiens. La réglementation interdit alors le transport d’enfants en autocar, depuis un très grave accident survenu en 1982 sur l’A6.

Quelle est la fiabilité de ces prévisions ?

Des bilans sont réalisés après les pics de trafic. « Nous obtenons un taux de fiabilité des prévisions de 80 % sur les journées “colorées”. En général, les erreurs sont des surestimations volontaires pour sensibiliser les automobilistes et les inciter à décaler leurs voyages », explique Thomas Plantier, adjoint au bureau d’information routière du ministère, chargé des transports.

Ces dernières années, plusieurs pics ont été sous-estimés lors des retours des week-ends d’été. Car les comportements des Français évoluent doucement : « Notre modèle mathématique a déjà été adapté avec les 35 heures, qui ont étalé les départs le vendredi après-midi. Désormais, davantage de personnes prennent l’avion, ou partent pour des durées plus courtes, deux fois deux semaines à des endroits différents plutôt que tout le mois d’août en Espagne. Et les vacances au dernier moment ou les locations par Airbnb changent les pratiques. »

28 juillet 2019

Fantasmes : et si on changeait de répertoire ?

Par Maïa Mazaurette

La chroniqueuse de « La Matinale » Maïa Mazaurette invite chacun à trouver l’imaginaire qui lui correspond le plus intimement et à éduquer ses préférences comme on éduque son palais.

LE SEXE SELON MAÏA

A quoi pensez-vous dans vos moments de rêverie érotique ? A quel imaginaire avez-vous recours pour déclencher vos orgasmes ? Peut-être invoquez-vous d’adorables nymphes sautillant dans un pré… peut-être s’y mêle-t-il des pratiques violentes, dégradantes, aliénantes. Ces catégories ne sont pas étanches : le répertoire fantasmatique occidental s’étend de la nuit de noces sur pétales de rose aux coups de cravache dans un donjon. A priori, vous avez hérité de cette amplitude.

Seulement, elle peut nous rendre mal à l’aise, voire nous placer dans des états de dissonance cognitive. Puis-je être un bon féministe quand j’entretiens des fantasmes de viol ? Puis-je être une bonne citoyenne quand je me masturbe sur des vidéos pornographiques piratées, tournées sans contrats, dans des circonstances douteuses ? C’est compliqué.

Si vous posez ces questions, on vous accusera d’être prude. Considérer ses fantasmes sous le prisme de l’éthique passe pour de la sensiblerie – exactement comme se préoccuper du sort des animaux. Pas envie de parler de cul, bite, chatte, pour désigner le désirable ? Vous voilà une oie blanche. Protester quand vous entendez un ami se vantant de « déglinguer » ses partenaires ? Vous voilà automatiquement relégué(e) du côté des censeurs (notons que dans ce paradigme, la censure vient en un bloc : on peut soit tout dire, soit ne rien dire).

En l’occurrence, se poser des questions ne produit pas un assèchement ou une moralisation de la fantasmatique. Personne ne va créer une police de la pensée (nous nous polissons très bien tout seuls). Il s’agit seulement de pouvoir aligner la théorie et les pratiques, ses valeurs et ses orgasmes : une reprise de puissance plutôt qu’une abdication (et s’il faut abdiquer, au moins aurons-nous opéré un choix conscient, et non un choix par défaut).

Les jeux ont des conséquences

Cependant, pour contrebalancer nos entre-deux fantasmatiques, notre culture a inventé un passe-droit formidable : cette idée que le sexe n’obéirait pas aux règles habituelles. Ah, bon. La chambre à coucher serait comme un autre monde, chimérique, où l’on grimpe aux rideaux pour monter au septième ciel tout en jouant la bête à deux dos, cul par-dessus tête. Il s’y jouerait un carnaval, un moment de suspension du réel – fondamentalement, ça ne serait pas la vraie vie, d’ailleurs on ferait ce qu’on veut, sans tabous, sans entraves, et ce serait beaucoup mieux comme ça. (Mieux pour qui ?).

Le problème, c’est que cette joyeuse optique a pour effet principal de nous faire serrer les dents. Nous sommes encouragés à accepter ce qui nous semblerait inacceptable : s’exaspérer des violences policières, conjugales ou parentales, mais se taper dessus à domicile. Oui, d’accord. Bien sûr qu’entre adultes consentants, on peut ritualiser, on peut contextualiser. Mais il s’agit quand même de se taper dessus. C’est pour de faux… avec de la vraie douleur. On peut se consoler en inventant une sexualité « par essence » transgressive mais, franchement, si vous avez besoin de transgresser pour maintenir la ligne de flottaison de votre libido, je vous adresse toutes mes condoléances.

Bien sûr, ce ne sont que des jeux – nous nous jouons des codes. Cependant, les jeux ont des conséquences. Ont des règles. Ont des cadres. Nous laissons advenir certains jeux et pas d’autres (preuve que tout de même, nous ne faisons pas n’importe quoi).

A l’arrivée, ce système nous enferme : parce que nous tolérons au lit des fantasmes et des pratiques qui nous répugneraient hors de la chambre à coucher, nous estimons que le sexe est répugnant (ce dont nous nous accommodons, parce que dans le monde inversé du sexe, la répugnance devient un mode de communication aussi valide que le désir). En retour, parce qu’on a dégradé notre sexualité, elle nous paraît moins importante à préserver : le cycle s’auto-entretient.

Changer de crémerie

Pourtant, nous pouvons changer de route – si nous sommes en souffrance, ou lassés, ou dégoûtés, ou que nous préférerions désirer autrement. Si vous vous êtes masturbé(e) toute votre vie sur des fantasmes qui, in fine, vous laissent une amertume en bouche, pourquoi ne pas essayer de changer de crémerie ? Ce discours, on l’entend peu. Nous nous pensons comme des victimes de nos fantasmes : « moi, mon truc, c’est la domination », « je suis ulcérée par les vulves, c’est comme ça ».

Cette rigidité d’esprit (sans mauvais jeu de mots), nous ne l’appliquons qu’à la sexualité. Vous avez certainement été un enfant fuyant les choux de Bruxelles, puis vous avez éduqué votre palais. Après avoir été jeune anarchiste, vous avez voté Macron. Vous avez détesté les polars scandinaves, avant de découvrir Jo Nesbø. Vos goûts évoluent parce que vous êtes en vie et que vous les questionnez de temps en temps – parfois, parce que vous êtes obligé(e) de les questionner.

En l’occurrence, vous pouvez changer de fantasmes, en vous exposant à d’autres imaginaires, qui vous correspondent plus intimement. On peut par exemple changer de regard sur des types physiques qui nous laissent indifférents (comme des types ethniques ou morphologiques), changer de média (laisser tomber le porno pour retourner au musée ou en librairie), changer de paradigme (laisser tomber le porno mainstream mais passer au porno féministe). On peut aussi découvrir de nouvelles niches : garder la même esthétique (celle des mangas hentaï) mais sans les pratiques potentiellement problématiques (hop, voici du wholesome hentaï).

Vous vous êtes habitué(e) à ce qui vous excite actuellement : vous pouvez donc vous déshabituer, et vous habituer à autre chose. Il suffit d’un peu de temps (et ce n’est pas grave si vous n’y arrivez pas systématiquement, les fantasmes ne font pas de victimes).

Réinvestir sereinement notre sexe et nos désirs

Deuxième possibilité : vous pouvez créer votre propre fantasmatique, précise et personnalisée. Si vous n’en avez pas le temps ou les moyens, pourquoi ne pas essayer les plates-formes collaboratives ? La sexualité est plus riche quand on est plusieurs : sur Wattpad comme sur Reddit, dans les multivers des fanfictions comme sur les sites vous mettant en relation directe avec des performeurs et performeuses, vous pouvez penser à des scénarios en commun… et les faire advenir.

Notre culture sexuelle nous fait croire que nous sommes impuissants face à elle. Ce n’est pas vrai. Nous ne sommes pas plus condamnés au malaise que nous ne sommes condamnés au capitalisme, à la pénétration ou aux fraises espagnoles. Nous pouvons nous extraire.

Nous pouvons aligner le cerveau et le clito, le pénis et l’oasis, la raison et la passion. Il ne s’agit pas de mettre nos désirs en ordre, mais de réinvestir sereinement notre sexe et nos désirs… en réservant l’art du grand écart aux positions du Kamasutra.

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28 juillet 2019

Décryptages - La reconnaissance faciale pour s’identifier en ligne inquiète les défenseurs des libertés numériques

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Par Léa Sanchez

L’association La Quadrature du Net a déposé un recours devant le Conseil d’Etat pour faire annuler le décret autorisant l’application AliceM qui permet de s’authentifier sur les sites administratifs en prenant une vidéo de soi.

Scanner la puce de son passeport biométrique à l’aide de son téléphone et prendre une vidéo de soi pour créer son compte et pouvoir accéder à des services administratifs en ligne : c’est le principe de l’application « Authentification en ligne certifiée sur mobile », surnommée « AliceM ». Ce système, présenté comme très sécurisé par le ministère de l’intérieur et utilisable uniquement sur Android, devrait permettre de s’authentifier sur les sites liés au portail d’accès FranceConnect : celui des impôts, de la Sécurité sociale…

Mais AliceM, qui est encore en phase de test, suscite des interrogations et des inquiétudes, venant notamment des défenseurs des libertés numériques.

Le 15 juillet, l’association spécialisée La Quadrature du Net a déposé un recours devant le Conseil d’Etat pour annuler le décret du 13 mai autorisant le dispositif. Elle dénonce un traitement intrusif de données biométriques « ayant pour objectif avoué d’identifier chaque personne sur Internet pour ne plus laisser aucune place à l’anonymat ».

« Prémices » d’une politique publique de l’identité numérique

Le projet des pouvoirs publics de développer des solutions d’identité numérique n’est pas nouveau. Si, en 2012, le Conseil constitutionnel avait jugé inconstitutionnel la création d’une base de données biométriques, l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) et le ministère de l’intérieur travaillent depuis plusieurs années sur AliceM. En septembre 2017, la feuille de route du ministère de l’intérieur mentionnait sa volonté de se positionner « comme maître d’ouvrage et maître d’œuvre de l’élaboration de solutions d’identité numérique ».

En mai, à l’occasion de la publication du rapport « Etat de la menace liée au numérique en 2019 », le locataire de Beauvau, Christophe Castaner, affirmait vouloir que « chaque Français, dès 2020, puisse prouver son identité » en ligne pour, notamment, « bâtir la sécurité du XXIe siècle » et lutter contre les contenus haineux sur Internet. Il affirmait à cette occasion qu’AliceM constituait l’un des « prémices d’une politique publique de l’identité numérique ».

Dans le recours qu’elle a déposé, La Quadrature du Net centre son argumentaire sur le caractère obligatoire de la reconnaissance faciale dans le fonctionnement de l’application.

Dès octobre 2018, dans un avis portant sur le projet de décret visant à autoriser AliceM, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) émettait aussi des doutes sur ce point et proposait des alternatives, comme un face-à-face en préfecture. « En l’espèce, le refus du traitement des données biométriques fait obstacle à l’activation du compte, et prive de portée le consentement initial à la création du compte », écrivait-elle, rappelant les exigences du Règlement général sur la protection des données (RGPD) en la matière.

« Normaliser » la reconnaissance faciale

Pour La Quadrature du Net, maintenir ce système dans ces conditions renforce une « normalisation » de la reconnaissance faciale. « C’est un bras d’honneur à la CNIL », s’insurge Martin Drago, juriste pour l’association.

Le militant pointe les limites techniques de la reconnaissance faciale, mais surtout les conséquences sur la société liées à l’utilisation de ces données sensibles : « Le danger, c’est que notre visage ne devienne plus qu’un outil d’identification, un outil utilitaire. » Il regrette l’absence de débat public en France sur cette question, malgré les expérimentations ayant déjà eu lieu. A Nice, par exemple, la municipalité a décidé en février de tester un dispositif de reconnaissance faciale sur la voie publique.

En plus des informations biométriques, le décret autorisant AliceM indique que de nombreuses données à caractère personnel sont susceptibles d’être enregistrées : nom, prénom, adresse postale, sexe, informations relatives au titre d’identité utilisé…

Une partie d’entre elles seront uniquement stockées, de manière chiffrée, sur le téléphone de l’usager. D’autres, notamment celles liées à « l’historique des transactions associées au compte AliceM », seront également conservées dans un « traitement centralisé » mis en œuvre par l’ANTS et supprimées « à l’issue d’une période d’inactivité du compte de six ans ». Une durée supérieure à celle que préconisait la CNIL : dans son avis rendu en 2018, elle recommandait une conservation de ces données « pour une durée maximale de six mois ».

28 juillet 2019

Pourquoi la vente de sex-toys explose au Japon

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Au Japon, l’usage des sex-toys est en pleine expansion. S’il témoigne d’une reconnaissance du plaisir féminin, il est aussi l’indice d'une sexualité nipponne en berne. Rencontre à Tokyo avec des acteurs majeurs du secteur.

Dans les années 1980, le sex-toy japonais était ce drôle d'appareil de massage pour la nuque vendu au rayon électroménager des grands magasins, planqué entre les sèche-cheveux et les humidificateurs d'air. Officiellement, tout le monde connaissait son usage et savait qu'il n'était pas destiné à être manipulé sur le cou, mais les apparences étaient sauves, la discrétion assurée dans ce packaging qui ne laissait rien transparaître de sa fonction réelle. Le marché du sex-toy, c'était aussi quelques produits importés d'Europe ou des Etats-Unis, disponibles en magasins spécialisés. Mais là non plus, le succès n'était pas au rendez-vous. Qualifiés de grotesques, ces vibromasseurs venus d'ailleurs, surdimensionnés et aux couleurs flashy, avaient la réputation d'être peu confortables et désagréables, voire douloureux. Et puis, il y avait la honte de les acheter, la crainte de passer en caisse avec ça dans son panier. "A l'époque, c'était tabou. Les sex-toys représentaient un secteur de niche complètement underground", se souvient Sanae Takahashi, 57 ans, prêtresse du monde du jouet pour adultes au Japon.

Nous sommes à Akihabara, en plein cœur du "quartier électrique de Tokyo". Surnommé ainsi pour l'étourdissant choix de grands magasins dédiés au matériel électronique et informatique que l'on y trouve, c'est le lieu de la culture geek par excellence, avec des jeux vidéo à foison et des cafés où de jeunes femmes habillées en poupées mangas affirment être nées sur une autre planète. C'est au milieu de cette frénésie assourdissante, des enseignes clinquantes et des hordes de touristes surexcités que trône le Love Merci, un magasin de cinq étages exclusivement réservé aux sex-toys. Dans les rayons, plus de 10 000 références sont présentées. Tout est décliné, du vibromasseur aux vulves pénétrables, en passant par le cosplay, les poupées en silicone, les plaisirs fétiches, les coussins troués, les plugs anaux, les poitrines en latex.

Cette boutique est la vitrine de la célèbre marque fondée par Sanae Takahashi, et c'est ici que se trouvent les bureaux de l'entreprise. Son téléphone rose bonbon vissé à l'oreille, la patronne, toute de noir vêtue, entre dans son bureau d'un pas décidé. Du haut de sa tour, elle est incontestablement la maîtresse des lieux et le staff lui obéit au doigt et à l'œil. Elle court, Sanae Takahashi, sept jours sur sept. Le mot "vacances", elle ne connaît pas. Sitôt posé sur la table, le portable sonne à nouveau. En quelques minutes, elle valide la confection de plusieurs milliers de sex-toys pendant qu'un de ses employés pose un jus d'orange avec une paille devant elle. Sa force de caractère et son assurance apparentes n'ont d'égal que la gentillesse qui émane d'elle.

Un vibromasseur conçu à partir d'une étude pointue du corps des femmes

Sanae Takahashi est celle qui a inventé, entre autres, deux sex-toys féminins que l'on trouve aujourd'hui dans un nombre incalculable de magasins et de love hotels au Japon, le Fairy et l'Orgaster. Un stimulateur clitoridien et un vibromasseur conçus il y a une quinzaine d'années et qui ont révolutionné l'approche réservée au plaisir féminin au Japon. Ils sont aujourd'hui toujours aussi plébiscités.

"Quand je me suis lancée dans le sex-toy, il y a trente ans, il n'était pas aussi démocratisé. C'était un milieu dominé par les hommes, j'ai dû faire ma place et cela n'a pas été facile", sourit-elle. Alors salariée d'une entreprise qui conçoit des jouets pour enfants, elle perd son emploi, "délocalisé en Chine où les frais de production étaient moins élevés". Elle réfléchit à un "moyen de gagner de l'argent" avec son savoir-faire. Un soir, alors qu'elle boit des verres avec un ami gynécologue, elle imagine un vibromasseur conçu à partir d'une étude pointue du corps des femmes. Elle s'associe avec un ami et peaufine ses modèles. Faire accepter l'objet n'était pas gagné puisque l'on ne parlait pas de plaisir sexuel à l'époque, encore moins de celui des femmes. Il faut replacer l'objet dans son contexte : pour la gent féminine japonaise, faire l'amour, c'était avant tout satisfaire son partenaire.

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"Il faut garder en tête qu'acheter des sex-toys reste une source de honte pour de nombreuses femmes"

Dans les derniers produits à l'étude dans le labo de Sanae Takahashi, "un vibromasseur qui sera fixé à une ceinture afin de pouvoir l'utiliser sans les mains" et un stimulateur clitoridien qu'elle promet "révolutionnaire". Son business n'oublie pas les hommes puisque la marque fut aussi pionnière dans le marché des vulves pénétrables. Malgré la notoriété de sa gamme pour femmes et la présence d'un staff à 50 % féminin dans le magasin, elle n'oublie pas que 80 % des clients du Love Merci restent des hommes, qui n'aiment pas être dérangés lorsqu'ils font leurs emplettes, "deux étages sont à la disposition des messieurs et interdits d'accès aux femmes".

La masturbation resterait malgré tout l'affaire des hommes dans ce pays classé 110e sur 149 par le Forum économique mondial en matière d'égalité des sexes. "Pour les femmes de ma génération, le plaisir sexuel reste un tabou insurmontable, assène Sanae Takahashi, devenue malgré elle une figure de cette révolution du sex-toy japonais. Mais pour les jeunes générations, les verrous sautent. Le fait de pouvoir acheter en ligne a modifié les comportements et changé les pratiques. On l'observe dans le magasin : les clients viennent majoritairement pour regarder. Ils jettent un œil, puis rentrent chez eux et commandent via internet." Elle ajoute : "Si les mentalités évoluent, il faut garder en tête qu'acheter des sex-toys reste une source de honte pour de nombreuses femmes, même aujourd'hui."

Un constat également dressé par Minori Kitahara, qui a ouvert le tout premier sex-shop du Japon en 1996. Un lieu qu'elle voulait conçu pour et par des filles, "le premier et seul sex-shop féministe du pays". Après des études supérieures où elle s'intéresse à l'éducation sexuelle, l'égalité des genres mais aussi à l'économie, elle s'interroge sur le rôle de la femme dans la société japonaise. Lorsqu'elle quitte l'université, elle se met à écrire pour un média et découvre "tout ce qui pouvait exister hors du Japon en matière de lutte pour les droits des femmes mais aussi d'épanouissement sexuel. Si le féminisme existe au Japon depuis plus de cent cinquante ans, il est différent de ce qui peut se faire hors de l'archipel."

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Le sex-toy comme symbole d'affirmation de soi

Elle lance son affaire "dans une démarche militante. J'ai vu ce type de sex-shops à New York, et je m'en suis inspirée." Avec Love Piece Club, elle offre un espace unique à de nombreuses clientes. Elle invente également quelques modèles de sex-toys plus adaptés "que les gros pénis ou les vibromasseurs en forme de dauphins. Il fallait de nouveaux produits, avec lesquels les femmes auraient du plaisir et se sentiraient bien et en sécurité en les utilisant. Aujourd'hui, on vend surtout des vibromasseurs, des lotions : on a aussi une réflexion plus poussée sur le corps et on parle un peu plus facilement d'orgasme par exemple."

Minori Kitahara est sans doute l'une des figures féministes majeures du pays aujourd'hui. Elle est l'une des instigatrices des Flower Demo, ces manifestations qui brisent le silence à propos des violences sexuelles et exigent une révision du Code pénal pour une meilleure reconnaissance des victimes. Pour elle, le sex-toy est un symbole d'affirmation de soi, mais son succès particulièrement écrasant est aussi révélateur d'un mal-être, "celui de l'écart qui ne cesse de se creuser entre les hommes et les femmes de ce pays. Il y a un véritable problème de communication entre les sexes : à Tokyo, les hommes passent l'essentiel de leur temps avec leurs collègues ou dans leurs entreprises, les femmes font leur vie de leur côté, ils ne partagent rien. C'est d'une tristesse…"

Sanae Takahashi partage ce point de vue alarmant : "La situation ne va faire qu'empirer. Les jeunes gens sont captifs de leurs écrans, ne se rencontrent plus, essaient de se satisfaire autrement. Nos ventes n'augmentent pas forcément mais il y a toujours de nouvelles variétés, des références inédites." La quête de plaisir se fait volontiers seul.

Les filles d'un côté, les garçons de l'autre. Des étages de magasins réservés aux hommes ou encore ce bar conçu uniquement pour les femmes, le Vibe Bar Wild One. Direction le quartier des oiseaux de nuit, Shibuya. Pensé comme un parc à thème du plaisir féminin, ce showroom est une sorte de galerie du sexe très kitsch où les hommes sont admis, à condition d'être accompagnés. Derrière la porte noire capitonnée, une installation en forme de vulve fait office d'entrée. Sur les murs de l'établissement, des reproductions de shunga, ces célèbres estampes érotiques.

Du mobilier jusqu'aux toilettes, des objets artistiques représentent le sexe, avec un goût plus ou moins sûr. Sur les étagères, 350 sex-toys sont disposés. Le bar est une sorte de sex-shop déguisé où l'on vient regarder, manipuler les objets (avec les mains) puis passer commande si on le souhaite. Le tout à l'abri des regards.

Petit à petit, le sex-toy est sorti des sex-shops

Le succès du sex-toy pose inévitablement la question de son influence sur la vie sexuelle des Japonais. Est-il révélateur d'une sexualité en berne ? Selon une enquête menée en 2005 par Durex, les Japonais font l'amour moins d'une fois par semaine, soit un peu moins de cinquante fois par an, ce qui correspond à la moitié de la moyenne annuelle réalisée sur un panel de vingt et un pays, et dévoilée par ce même sondage.

Une autre enquête indique que le recours à la masturbation dépasse désormais le nombre de rapports sexuels des Japonais, et ce à tous les âges de la vie. Les 20-29 ans ont par exemple recours à la masturbation à 100 % pour un peu moins de 60 % de rapports sexuels par an. Sur la même tranche d'âge, on recense deux rapports sexuels par mois pour dix recours à la masturbation. "La faible fréquence des rapports sexuels des Japonais a pour conséquence un plus grand recours à la masturbation, confirme Koichi Nagao, professeur d'urologie à la faculté de médecine de Toho. Les sex-toys sont utiles, aussi bien pour les hommes que pour les femmes, s'ils concourent à une amélioration de la vie sexuelle."

Petit à petit, le sex-toy est sorti des sex-shops et a pris place dans les magasins généralistes. Supermarchés Don Quijote, boutiques de gadgets Village Vanguard, où même pharmacies, drug stores et librairies lui ont ouvert leurs rayonnages. L'été dernier, pour la première fois, un grand magasin annonçait la mise en place d'une large sélection de sex-toys féminins dans un corner temporaire. Derrière cette initiative, un paquebot du sex-toy nippon, Tenga, dont un produit se vend toutes les trois secondes dans le monde.

Tenga, c'est la Onacup, cette petite boîte rouge qui ressemble à une canette de soda et qui abrite une vulve pénétrable. Pour moins de 10 euros et à usage unique, elle promet aux hommes des sensations différentes selon le modèle. Le modèle original, en forme de sablier, procure une compression serrée au moment du passage du pénis au centre du sex-toy et donne une forte sensation d'aspiration. Parmi les quatre autres variantes, le Soft Tube qui permet de contrôler la pression et la force de la stimulation ou le Rolling Head qui possède une partie nervurée.

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"Comme si la masturbation était quelque chose de sale et d'obscène"

En 2018, une enquête révélait que 89 % des Japonais âgés de 20 à 40 ans connaissaient les sex-toys estampillés Tenga et 33,5 % en avaient déjà utilisé un. La marque plaît autant aux hommes qu'aux femmes puisqu'elle s'est également lancée, en 2013, à la conquête de ce marché avec sa collection Iroha. "Il y a encore dix ans, les magazines féminins japonais titraient : 'Comment plaire à un homme ?' Aujourd'hui, on lit : 'Comment vous sentir bien et vous faire plaisir ?' Il n'est plus question de plaire mais bien d'être soi-même", se félicite Koichi Matsumoto, pdg de Tenga.

L'histoire de cet homme est une véritable success story. A 30 ans, il est mécano dans le domaine des voitures vintage lorsqu'il ambitionne de changer de vie. Il raconte une période difficile de sa vie, qu'il qualifie volontiers de "déprimante". Il plaque tout et reprend à zéro. Un jour, alors qu'il se rend dans un magasin pour adultes, il constate que "des sex-toys étaient vendus entre deux DVD pornos". Pas d'identité, pas de marques. "C'était il y a vingt-cinq ans, on avait alors l'impression de devoir acheter cela sous le manteau : comme si la masturbation était quelque chose de sale et d'obscène." C'est là que Tenga naît.

"Avoir recours à la masturbation et aux sex-toys peut être une alternative aux comportements toxiques de certains"

Koichi Matsumoto explique alors sa vision : "Le sexe fait partie de nos besoins biologiques naturels et il est nécessaire de les assouvir au même titre que manger, boire ou dormir. Lorsque l'on est célibataire, la masturbation peut répondre à cela. Elle ne remplace ni le sexe ni la connexion profonde que l'on peut avoir avec un ou une partenaire, mais elle peut être pratiquée lorsqu'elle devient nécessaire et il n'y a pas de mal à cela." Il va plus loin : "Je vois parfois des comportements d'hommes qui me révoltent... Les femmes ne sont pas des objets et ne sont pas faites pour répondre aux besoins sexuels des hommes. Avoir recours à la masturbation et aux sex-toys peut aussi être une alternative aux comportements toxiques de certains." Un discours inattendu de la part de ce patron qui a fait fortune avec le plaisir solitaire masculin.

Avec Tenga (que l'on peut traduire par "correct" et "élégant"), Koichi Matsumoto avait envie de sortir le sex-toy de cette "sphère underground. L'idée était de lancer un nouveau genre de produit, de qualité supérieure, avec une identité, un design soigné, que l'on peut acheter n'importe où et sans complexe". Après trois ans d'essais et de prototypes, Koichi Matsumoto aboutit à la première Onacup, qui connaît dès sa première mise en vente, en 2005, un succès immédiat. Tous produits confondus, l'enseigne compte aujourd'hui 256 références et continue d'innover.

Fidèle à sa démarche – l'accès au plaisir pour tous –, Tenga a lancé un programme avec des maisons de retraite de jour. Il y a quelques années, les équipes se penchaient sur un sondage selon lequel 79 % des Japonais âgés de 60 à 69 ans et 81 % des 70 à 79 ans ont exprimé l'envie d'un rapport sexuel, au moins une fois par an. "Nous avons proposé aux vingt-neuf centres de la chaîne Iki-Iki Life Spa, que l'on trouve partout au Japon, une sélection de sex-toys à prix réduits pour leurs pensionnaires." Un projet sur lequel la marque ne fait quasiment pas de profit mais qui se heurte à un obstacle de taille. "Au Japon, beaucoup de personnes âgées vivent avec leurs enfants. Ils n'ont parfois pas de chambre à eux et souffrent d'un manque d'intimité." Certaines familles ont également confié ne pas comprendre cette initiative et nient par la même occasion les besoins sexuels de leurs aînés.

Le débat sur les sexualités envahit de plus en plus l’espace public nippon. Sanae Takahashi participe à des séminaires en ce sens. Tout comme Minori Kitahara qui, parmi ses actions, siège dans un groupe

de lutte contre la pornographie. Elle rappelle avec inquiétude que “les sex-toys qui se vendent le plus au Japon aujourd’hui, ce ne sont pas les Tenga mais les lolicon, pour les hommes”. “Lolicon”, raccourci de “Lolita complex”, soit des produits (porno, figurines, coussins troués, cosplay, etc.) à l’effigie d’adolescentes. L’image de la jeune fille en fleur fait vendre et inquiète également Human Rights Watch qui révèle dans une étude que le matériel pédopornographique serait toujours commercialisé, malgré la loi votée en 2015, qui criminalise l’acte.

Le sex-toy n’est pas toujours synonyme de positivité du corps, il est aussi objet de fantasme. Dans des pratiques extrêmes, il adopte des dimensions XXL, des formes surprenantes. Dans le Love Merci, on aperçoit aussi des appareils qui produisent des décharges électriques en tout genre, des coussins pénétrables sur lesquels sont imprimés des motifs d’héroïnes d’anime ou encore le fameux sex-toy moulé à partir de la main de Taka Kato, acteur porno surnommé Goldfinger, qui se vante d’avoir découvert huit zones érogènes dans le sexe féminin avec seulement deux doigts.

28 juillet 2019

En 2050, la France pourrait compter 4 millions de personnes en perte d’autonomie, selon l’Insee

Par Béatrice Jérôme

Dans une étude publiée jeudi, l’institut statistique estime que le nombre de seniors dépendants va augmenter de plus de 60 % par rapport au dernier recensement de 2015.

Un chiffre qui agit comme un électrochoc. En 2050, la France comptera près de 4 millions de personnes de plus de 60 ans qui ne pourront plus se lever seules, faire leur toilette, préparer ou prendre un repas sans dépendre d’autrui, ou bien qui pour une part seront sujettes à des altérations de la mémoire. L’Insee, dans une étude publiée jeudi 25 juillet, établit que les seniors en perte d’autonomie, qui sont aujourd’hui près de 2,5 millions, vont augmenter de plus de 60 % par rapport au dernier recensement de 2015.

L’estimation frappe d’abord par l’ampleur de la hausse. Elle ébranle ensuite parce qu’elle est deux fois plus élevée que la statistique qui fait foi dans les rapports officiels et qui figure dans les documents du ministère de la santé et des solidarités. Les acteurs publics ont eu jusqu’ici pour seule référence la projection de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) qui prévoient que les personnes en perte d’autonomie seront 2,2 millions en 2050, contre 1, 4 million aujourd’hui.

L’étude de l’Insee, co-élaborée avec la Drees et rendue publique jeudi, laisse entrevoir un complet changement d’échelle. La part des seniors en perte de capacités physiques ou cognitives passerait ainsi de 3,7 % en 2015 à 5,4 % de la population totale en 2050. L’Institut statistique module cette explosion démographique par département. Leur proportion augmenterait le plus sensiblement dans le Gard, les Hautes-Alpes, l’Ardèche. En revanche, elle resterait stable dans les Hauts-de-Seine. La croissance des plus dépendants serait globalement plus manifeste à partir de 2027, quand la génération des baby-boomers nés dans les années 1950 passera le cap des 75 ans.

Dans son rapport rendu en mars à Agnès Buzyn après la concertation nationale « grand âge et autonomie » orchestrée par la ministre de la santé, Dominique Libault, président du Haut-conseil du financement de la protection sociale a intégré les données de la Drees et non pas celles récentes de l’Insee. Le rapport indique que « la hausse annuelle du nombre de personnes âgées en perte d’autonomie devrait doubler entre aujourd’hui et 2030, passant de 20 000 à 40 000 par an. Leur nombre s’élèverait à 2 235 000 en 2050, contre 1 265 000 en 2015 ».

L’écart varie du simple au double entre l’étude de l’Insee et le rapport Libault. Difficile de conclure, pour autant, que les deux chiffres se contredisent.

Des critères administratifs

L’étude de la Drees à laquelle se réfère le rapport Libault prend pour base de référence le nombre des bénéficiaires de l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA). Un point de départ restrictif, car toutes les personnes âgées dépendantes ne bénéficient pas de cette aide. Les raisons de ce non-recours sont multiples : elles ne connaissent pas l’existence de l’APA ; elles y renoncent parce que leurs revenus élevés ne leur donnent droit qu’à un niveau d’allocation modique ou bien parce que leur entourage familial les aide. Enfin à domicile, l’APA est allouée après une visite des équipes médico-sociales des départements qui décident ou non de l’attribuer en fonction de plusieurs critères dont l’état de santé de la personne. La projection de la Drees retient donc des critères administratifs.

L’Insee a travaillé sur une autre base. Elle s’est fondée sur deux enquêtes épidémiologiques réalisées sur la base de questionnaires établis en 2014 et 2015 par les plus de 60 ans interrogés sur leur autonomie dans les actions du quotidien. « Quand le rapport Libault a été élaboré, l’Insee n’avait pas réalisé les projections pour 2050 à partir de ces données déclaratives », explique Delphine Roy, cheffe du bureau « handicap, dépendance » à la Drees.

L’étude de l’Insee met pour la première fois en évidence une réalité jamais démontrée jusqu’ici : un senior sur deux en perte d’autonomie ne serait pas attributaire de l’APA.

Pour autant rien ne permet de dire à ce stade que le petit pavé dans la mare statistique que constitue l’étude de l’Insee ébranle l’échafaudage financier que le gouvernement cherche à assembler à partir du schéma livré par le rapport Libault. « Cela ne changera rien aux projections financières si le ratio entre bénéficiaires de l’APA et population totale des seniors en perte d’autonomie reste le même entre aujourd’hui et 2030, voire 2050 », réfute Delphine Roy, coauteure de l’étude.

« Les besoins sont considérables »

Le rapport Libault préconise 175 mesures dont il évalue le coût à 9,2 milliards d’euros entre 2018 et 2030. or, dans ce total, figurent 4,3 milliards au titre de l’évolution démographique fondée sur la seule évolution du nombre d’allocataires de l’APA. Faudra-t-il revoir à la hausse l’évolution naturelle des dépenses à la lumière des projections de l’Insee ?

Déjà les langues des acteurs du secteur qui jusqu’à présent s’étaient gardés de remettre en cause la trajectoire financière du rapport Libault se délient. « On a applaudi le rapport Libault parce qu’il a eu le premier le courage de reconnaître l’ampleur des besoins, confie Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Syndicat National des Etablissements et Résidences Privés pour Personnes Agées (Synerpa). Mais on savait, avant même la publication de l’étude de l’Insee, que les besoins estimés par le rapport étaient sous-côtés. C’est une évidence pour les professionnels que nous sommes ! ». Aujourd’hui l’APA coûte près de 6 milliards d’euros, ne serait-ce qu’un doublement des bénéficiaires en 2050 comme le prévoit le rapport Libault entraînera une hausse supérieure à 9,2 milliards d’euros, explique-t-elle.

Le rapport Libault préconise un soutien financier de 550 millions d’euros pour les services d’aide et d’accompagnement à domicile afin de revaloriser les salaires des professionnels. « C’est notoirement insuffisant, assène Mme Arnaiz-Maumé pour un secteur aussi sinistré ». L’Insee tire aussi la sonnette d’alarme sur la nécessité de promouvoir la prise en charge à domicile des personnes âgées en perte d’autonomie. « Si rien n’est fait », la France devra « ouvrir massivement des places » en Ehpad, prévient l’institut de statistique. « A politique publique de maintien à domicile inchangée », il faudra augmenter de « 50 % entre 2015 et 2045 le nombre de lits » pour atteindre 900 000 places.

« Les besoins sont considérables. Ce qu’il faut désormais c’est s’atteler au financement de ces mesures, un financement progressif mais d’ampleur inédite », tempère Olivier Véran, député La République en marche de l’Isère et rapporteur de la commission des affaires sociales.

Avec d’autres députés macronistes, il tente d’obtenir de Bercy que le gouvernement « réduise le rythme du remboursement de la dette sociale [le « trou » de la Sécurité sociale] actuellement plus rapide que nécessaire au vu de nos engagements », assure M. Véran. Il en va de la capacité de dégager « des marges pour financer au premier chef la dépendance », argue-t-il. Mais s’agissant des arbitrages financiers en cours en vue du projet de loi de financement de la sécurité sociale, on se montre plus que prudent au cabinet d’Agnès Buzyn. « Réponse fin août, pas avant », temporise l’entourage de la ministre.

27 juillet 2019

A Hongkong, les manifestants envahissent l’aéroport

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Les contestataires veulent sensibiliser les voyageurs à leurs revendications démocratiques.

Des milliers de manifestants se sont rassemblés, vendredi 26 juillet, à l’aéroport de Hongkong pour sensibiliser les voyageurs au mouvement de contestation qui agite ce haut lieu de la finance internationale, avant un nouveau week-end de mobilisation.

Le grand hall d’arrivée de l’aéroport international, l’un des plus animés du monde, a été envahi par une marée de manifestants, dont des membres d’équipage. Vêtus de noir, ils ont scandé des slogans antigouvernementaux, brandissant des pancartes et distribuant des tracts. La manifestation s’est déroulée dans une ambiance bon enfant, et aucune perturbation du trafic aérien n’a été signalée.

Sept semaines de contestation

L’ancienne colonie britannique, rétrocédée à la Chine en 1997, est le théâtre depuis sept semaines de gigantesques manifestations pacifiques contre le gouvernement pro-Pékin de Hongkong. Des affrontements sporadiques ont opposé contestataires radicaux et policiers.

Le mouvement est parti du rejet d’un projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine continentale où la justice est sous l’influence du Parti communiste. Mais certains manifestants exigent désormais des réformes démocratiques.

Le rassemblement à l’aéroport était organisé pour informer les voyageurs, principalement ceux venant de Chine continentale, sur le climat politique. Les médias chinois, contrôlés par le gouvernement central, dépeignent les manifestations comme un complot financé par des puissances étrangères pour déstabiliser le pays.

Un syndicat de Cathay Pacific soutient les manifestants

Un groupe de manifestants s’est livré à une parodie des messages de sécurité diffusés à bord des avions, afin d’expliquer leurs revendications et d’informer sur les manifestations en cours.

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« Veuillez mettre vos masques et vos tee-shirts noirs si vous vous rendez à des rassemblements », invitent les organisateurs dans une vidéo, faisant référence à la couleur adoptée par beaucoup de manifestants antigouvernementaux.

D’autres ont brandi des panneaux « Avertissement touriste » expliquant que la police avait fait usage de gaz lacrymogène contre les contestataires dimanche dernier, et que quarante-cinq manifestants avaient été blessés dans des attaques commises par des agresseurs soupçonnés d’appartenir aux triades.

Le syndicat du personnel de vol de la compagnie Cathay Pacific a déclaré soutenir le rassemblement et encouragé ses membres à s’y joindre. Cette prise de position a été condamnée dans les médias d’Etat chinois. « Nous regrettons l’incompétence de Carrie Lam et son équipe, qui se moquent de leur peuple », a publié le syndicat sur Facebook, en référence à la chef de l’exécutif local, soutenue par Pékin.

De nouvelles manifestations prévues ce week-end

Un grand groupe de personnes scandait encore « Libérez Hongkong » dans le hall des arrivées, cinq heures après le début de la protestation. Hongkong se prépare à un autre week-end de rassemblements.

La police a interdit la manifestation prévue samedi en réponse à l’agression des militants prodémocratie par les triades à Yuen Long, au nord des Nouveaux territoires de Hongkong. Mais les groupes de discussion instantanée et les forums sur lesquels se concertent les militants semblent indiquer que les rassemblements auront quand même lieu.

Une autre manifestation se tiendra dimanche près du bureau de liaison du gouvernement chinois à Hongkong. Dimanche, le bâtiment avait été couvert d’œufs et de graffitis, avant que la police ne fasse usage de balles en caoutchouc et de gaz lacrymogène contre les contestataires.

22 juillet 2019

Le consentement masculin : on en parle (enfin) ?

Par Maïa Mazaurette

C’est bien connu, les hommes ne pensent qu’à ça… Rien de moins juste, argumente la chroniqueuse de « La Matinale » Maïa Mazaurette, qui rappelle que le manque de libido concerne aussi la gent masculine.

LE SEXE SELON MAÏA

C’est un cliché constamment rabâché : les hommes auraient envie de rapports sexuels tout le temps, n’importe comment, avec n’importe qui. Cet état d’excitation serait aussi spontané que la respiration : une exigence physique, hormonale, entretenue par des stimulations pornographiques, boostée par la chaleur, exacerbée par le football… bref, il y aurait toujours une raison (lire notre chronique sur les pulsions).

Bien sûr, nous admettons qu’exceptionnellement, le stress, la fatigue ou des problèmes médicaux perturbent la libido – mais dans tous les cas, nous partons du principe qu’il y a une envie, au moins minimale, simplement contrariée ou reportée à plus tard.

Cette conception du mâle « toujours prêt » entraîne des conséquences extrêmement désagréables : si les hommes veulent tout le temps, alors leurs partenaires ne leur donneront jamais suffisamment, et porteront cette culpabilité. Si les hommes sont constamment frustrés, alors il devient « normal » que de temps en temps, ils prennent de force (nous avons toutes et tous entendu le viol ou la prostitution être justifiés par le manque de disponibilité féminine – sous-entendu : c’est de la faute de toutes les femmes si certaines sont violées, d’ailleurs, si elles avaient respecté la nature des hommes, on n’en serait pas là).

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Et pourtant, selon une étude publiée cette année (Charles.co/IFOP), 47 % des hommes ont déjà manqué de désir sexuel, dont 18 % dans l’année écoulée ; 57 % ont déjà connu des érections manquant de fermeté, 29 % n’ont pas réussi à avoir d’érection du tout. Presque un homme sur dix a des complexes à ce sujet.

Recréer une distance propice au désir

L’inépuisable libido masculine constitue donc un mythe, entretenu par les hommes eux-mêmes : la vantardise concernant ses prouesses sexuelles, la taille de son pénis ou son désir font partie des codes de la masculinité. D’où des plaisanteries répétées, quand bien même elles humilieraient ceux qui les propagent : quand on a envie tout le temps, ça s’appelle du priapisme, et c’est une maladie – et si on ne « pense qu’à ça », alors il est peut-être temps d’aller voir un film sympa au cinéma ou de s’intéresser à la politique.

Nous voici donc face à un problème : on sait que la chute de désir est courante dans la réalité, mais on continue malgré tout de perpétrer l’idée qu’un homme, ça veut du sexe, ça consent, tout le temps. Cette norme du « vrai mâle » conduit à des comportements pas terribles pour la santé : 21 % des hommes ont déjà suppléé à leurs « manquements » par des médicaments, 16 % par de l’alcool, 9 % par de la drogue. Moins extrême : 43 % ont consommé de la pornographie pour se motiver (Charles.co/IFOP, 2019).

Ces mécanismes de compensation s’opèrent souvent au détriment de l’écoute de notre intériorité qu’il faudrait mieux cultiver, ne serait-ce que pour mieux se connaître soi-même – ou pour devenir un meilleur amant. Si on peut se poser les questions simples (« ai-je vraiment envie, avec qui, pourquoi, dans quelles circonstances ? »), alors on peut comprendre quelles conditions sont propices à une libido enflammée… tout en récupérant au passage un peu de dignité (« je ne suis pas un homme facile, et non, on ne dispose pas de moi comme d’un objet »).

Les bénéfices s’étendent au couple : en se refusant de temps à l’autre (tout en communiquant), on recrée une distance propice au désir : plutôt que de s’offrir en surabondance, on peut même organiser le manque.

L’érection n’est pas un marqueur de consentement

D’autant que dans ce paradigme, les femmes ne sont pas toujours les plus délicates, sur un continuum qui va des remarques méprisantes (des hommes « en chien », « morts de faim », « comme des bêtes ») à l’agression. En France, un homme sur vingt a subi un viol ou une tentative, la moitié avant leurs 11 ans (enquête CSF, 2006). Leurs agresseurs sont parfois des femmes, qui ont exercé des pressions psychologiques ou physiques, en profitant par exemple d’états d’ivresse.

Malgré la difficulté inhérente au dépôt de plainte (quel que soit le cas de figure), rappelons que la loi votée le 1er août 2018 à l’initiative de la secrétaire d’Etat à l’égalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, permet de qualifier en viol des fellations forcées (reçues) et des pénétrations forcées (quand on est contraint à pénétrer une autre personne).

L’érection n’est pas un marqueur de consentement, l’éjaculation non plus (de même que la lubrification ou l’orgasme féminins ne sont pas des preuves qu’en fait, la victime était d’accord).

Mais même sans en arriver là, la perte de libido d’un amant se traduit souvent par une incompréhension de la part des partenaires. Les femmes, notamment, ne sont pas éduquées au consentement masculin : elles ne demandent pas parce que, par défaut, elles considèrent que l’homme consent (les vantardises masculines ne tombent pas dans l’oreille de sourdes). Cela signifie aussi que les femmes peuvent rater des signes « évidents » de désintérêt ou d’évitement – ou passer outre un rejet verbalisé et répété. Elles mettent alors leur amant dans une situation bien connue : quand on dit non une fois, il faut souvent dire non cinq, dix, quarante fois. Il devient alors plus simple, et plus rapide, de céder que de résister – quitte à se réveiller le lendemain avec la boule au ventre.

Un ego masculin fragilisé

En l’occurrence, l’incompréhension des femmes devant un cas de figure socialement invisible est parfois intériorisée, sur le mode de la déception (« s’il n’a pas envie, c’est vraiment que je suis indésirable »), parfois extériorisée avec agressivité (« tu ne m’aimes plus, je suis sûre que tu vas voir ailleurs, tu pourrais faire un effort »). Dans tous les cas, les enjeux perçus dépassent de loin la réalité du problème : c’est une chute de libido (ou un rendez-vous amoureux raté), pas une explosion nucléaire.

Outre les problèmes d’ego féminins, il faut en outre se pencher sur un ego masculin fragilisé. Culturellement, la virilité d’un homme est encore indexée sur sa libido : un homme qui n’a pas envie, ou pas vraiment envie, n’est plus un homme – et s’il n’est plus un homme, alors il n’est plus le patron. Si ces codes relevaient d’autre chose que du fantasme, vous pensez bien que Rocco Siffredi serait président du Conseil de sécurité des Nations unies.

Cette réduction du masculin à sa seule force désirante pose une pression supplémentaire sur les épaules (ou le pénis) des hommes : quand cette partie-là du corps ne fonctionne pas, alors rien d’autre n’existe, peu importe qu’on soit joli garçon, en pleine santé, souriant, on a « un gros problème ». Si vous cherchez la recette magique pour bloquer une libido, vous venez de la trouver…

Parce que les hommes concernés n’en parlent souvent ni à leurs partenaires ni à leurs amis, et n’ont parfois même pas conscience de n’avoir pas envie, il est temps d’en parler culturellement.

Tout simplement en rappelant que non, les hommes n’ont pas toujours envie, non, ils ne sont pas disponibles pour n’importe quel fantasme à n’importe quelle heure, et non, le manque de libido ne les remet pas en question en tant qu’humains. C’est dit !

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