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Jours tranquilles à Paris
5 décembre 2017

Charlotte Gainsbourg

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5 décembre 2017

Bande-annonce de "Nouvelles pièces courtes" de Philippe Decouflé from Théâtre de Chaillot - save the date

Bande-annonce de "Nouvelles pièces courtes" de Philippe Decouflé from Théâtre de Chaillot on Vimeo.

Compagnie DCA / Philippe Decouflé, artiste associé

Nouvelles pièces courtes

Duo, Le Trou, Vivaldis, Évolution, Voyage au Japon, sont autant de pièces courtes et malicieuses réunies en un même programme inventé par Philippe Decouflé où l'on retrouve ses influences américaines - Georges Balanchine, Merce Cunningham, Martha Graham et Alwin Nikolais - et un goût prononcé pour le rock'n roll. Un spectacle à l'écriture poétique qui permet de traverser des univers différents et d'avoir le plaisir de s'y perdre.

DU 29 DÉCEMBRE 2017 AU 12 JANVIER 2018

4 décembre 2017

Au Théâtre du Rond Point

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3 décembre 2017

CINÉMA : AUX ETATS-UNIS, CLAUSE TOUJOURS

Par Ève Beauvallet - Le Monde

Au cinéma et dans le milieu sportif, une clause de moralité s’est généralisée depuis les années 20 dans les contrats américains. Les studios s’en servent contre les harceleurs. Et Netflix comptait sur elle dans le cas Kevin Spacey.

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David Hemmings et Jane Birkin sur le tournage de Blow-Up, de Michelangelo Antonioni. Un film dont la scène de viol interroge. Photo Bridge Films. Carlo Ponti Production. Sunset Boulevard. Corbis via Getty Images

«Netflix ne participera à aucune nouvelle production de House of Cards où figurerait Kevin Spacey», indiquait récemment un communiqué de la société américaine de vidéo à la demande. Encore faut-il qu’elle en ait le droit. Contre toute attente, et selon les informations du site internet The Blast, aucune clause de moralité ne figurerait dans le contrat de Kevin Spacey. Ni Netflix, ni Media Rights Capital, société de production de la série, ne pourrait alors écarter l’acteur sur la base des accusations de harcèlement sexuel formulées à son encontre. Une «clause de moralité» ? Pascal Kamina, professeur de droit privé à l’université de Franche-Comté et auteur de Droit anglo-américain des propriétés intellectuelles (LGDJ - Lextenso) fait le point sur cet exotisme juridique.

«La clause de moralité (ou morality clause, morals clause, bad boy ou bad girl clause) vient de la pratique contractuelle américaine qui s’est développée au début des années 20 dans l’industrie du cinéma, puis dans le milieu sportif. Universal Studios fut le premier à en insérer une, suite au scandale "Fatty" Arbuckle, acteur aussi célèbre que Charlie Chaplin à l’époque, accusé de viol et de meurtre. Même s’il fut acquitté, le scandale a ruiné sa carrière et causé un préjudice important aux studios. Ces clauses permettent à l’employeur ou au sponsor de se retirer si l’autre contractant ne respecte pas le standard de comportement imposé.

«En plein Maccarthysme, la Metro Goldwyn Mayer avait fait valoir cette clause - dont les critères étaient rédigés de manière très large - pour virer le scénariste Lester Cole, au simple motif qu’il avait refusé de répondre à certaines questions de la Commission sur les activités anti-américaines du Congrès.

«Les décisions de jurisprudence sont rares même si, aujourd’hui, aux Etats-Unis, la pratique a pénétré le droit du travail et même si on la trouve dans la quasi-totalité des contrats du secteur de l’entertainment et du sport, mais aussi dans ceux des cadres dirigeants des grandes entreprises.

«En France, dans les contrats conclus avec les interprètes ou les autres intervenants à la production, et contrairement aux clauses de non-dénigrement, les clauses de moralité ne sont pas pratiquées en raison du risque d’atteinte à la protection de la vie privée - laquelle n’est pas un droit constitutionnel aux Etats-Unis. Elles ne seraient même pas imposées dans le cadre de coproductions internationales. En Europe, on peut trouver ces clauses dans les contrats de sponsoring qui n’appartiennent pas au même régime que les contrats de travail.»

3 décembre 2017

Portrait : Xavier Beauvois, cinéaste d’art et d’excès

Par Pascale Nivelle - Le Monde

Malgré le succès, le réalisateur des « Hommes et des dieux » cultive loin de Paris son aura d’écorché vif. Son septième long-métrage, « Les Gardiennes », sort le 6 décembre.

En 1991, Caroline Champetier est sortie « sonnée » de la projection de Nord, au cinéma du Panthéon. Ce premier film autobiographique de Xavier Beauvois, 24 ans, était tout simplement « vrai ». Le napperon sur le buffet du pavillon, le père alcoolique et la mère abusive, le ciel du Pas-de-Calais, la sœur hémiplégique. Et lui dans son propre rôle, sa façon de chevaucher sa moto, de fumer. « Ce type a besoin de cinéma, il voit la beauté, la violence », a compris la directrice de la photo de Jean-Luc Godard, Jacques Doillon, Jacques Rivette et les autres.

Peu après, elle croise le critique Jean Douchet, son ancien professeur de l’Idhec (ancien nom de la Fémis, l’école de cinéma parisienne) et petit rôle dans Nord : « Je veux rencontrer Beauvois, dit-elle. – Tu vas voir le numéro… », sourit Douchet. Cinq ou six ans plus tôt, il avait vu débarquer Xavier Beauvois à Paris, sans un sou en poche : « Il avait magnifiquement raté son bac, pas une relation, et il voulait faire du cinéma. »

« Drogue dure, drogue douce »

Et il en a fait. Sept longs-métrages : Nord, N’oublie pas que tu vas mourir (1996), Selon Matthieu (2000), Le Petit Lieutenant (2005), Des hommes et des dieux (2010, Grand Prix du Festival de Cannes et César du meilleur film, 3,5 millions d’entrées), La Rançon de la gloire (2015) et Les Gardiennes, en salle le 6 décembre.

A chaque fois, depuis N’oublie pas que tu vas mourir, Caroline Champetier apporte sa lumière, en accord avec les tourments clairs-obscurs du réalisateur. « On trouve la beauté au même endroit », dit-elle. Ils se sont estimés dès le premier jour. « Ce n’est pas un petit garçon de la bourgeoisie intello comme les autres. C’est un chasseur, un viseur, il a quelque chose d’archaïque, il sait d’instinct ce qui fera cinéma. » Sur les plateaux, elle est son roc, sa moitié. Dans le rôle du « père que Xavier aurait voulu avoir dans la vie », Jean Douchet, 88 ans, se rend sur chaque tournage et le place très haut sur l’échelle du cinéma d’auteur, « dans la descendance de Jean Renoir, de Maurice Pialat ».

« BELMONDO M’A SAUVÉ LA VIE AVEC SES FILMS, DANS MON LYCÉE DE MERDE À CALAIS. LÀ-BAS, ÊTRE CINÉASTE OU ACTEUR, C’ÉTAIT COMME ÊTRE ASTRONAUTE. » XAVIER BEAUVOIS

Depuis ses débuts, Xavier Beauvois est un jour réalisateur, un autre acteur. « Sa drogue dure et sa drogue douce », selon le comédien Louis-Do de Lencquesaing, son ami depuis vingt-cinq ans, ex-compagnon de Caroline Champetier. Très réclamé, l’acteur Beauvois excelle dans les rôles glauques. Flic facho (dans Le Petit Lieutenant), banquier goujat (dans le récent Un beau soleil intérieur de Claire Denis), personnalité du porno (dans L’Amour est une fête de Cédric Anger), il se lâche devant la caméra. A l’opposé du réalisateur en quête de sens, de « l’écorché vif », dixit la productrice des Gardiennes Sylvie Pialat. « Beauvois acteur et réalisateur, c’est Docteur Jekyll et Mr Hyde », s’amuse Caroline Champetier.

À 50 ans, Beauvois est un cinéaste qui compte, dont les films ne passent pas inaperçus. Mais le succès n’a jamais décollé l’étiquette de « numéro » qu’avait vu Douchet, cette personnalité à part, dont l’énergie sans limite et l’humeur parfois aussi chargée que le ciel de la mer du Nord ont épuisé plusieurs collaborateurs.

Aujourd’hui, Paris le « soûle ». À cause « des lunettes de soleil au Flore » et de bien d’autres choses encore, Xavier Beauvois s’est replié près d’Etretat, dans une longère au milieu des pommiers, avec la mer au bout de son champ. Peut-être à cause des virées arrosées sur les falaises normandes de Gabin et Belmondo, inoubliables père et fils spirituels dans Un singe en hiver (Henri Verneuil, 1962). Il en connaît chaque réplique et voue un culte à Jean-Paul Belmondo : « Il m’a sauvé la vie avec ses films, dans mon lycée de merde à Calais. Là-bas, être cinéaste ou acteur, c’était comme être astronaute. »

Il a remplacé les brèves de comptoir par Twitter, « ça se vaut », et gazouille depuis son jardin. Il balance en rafales, jusqu’à dix fois par jour quand il s’énerve, ce qui arrive vite. Le délégué général de Cannes Thierry Frémaux, pour avoir refusé Les Gardiennes en Sélection officielle, prend régulièrement des bastos – « On ne dit plus le Festival de Cannes mais le Festival de Thierry Frémaux » ; la ministre de la santé Agnès Buzyn pour avoir critiqué la cigarette sur les écrans – « J’espère qu’ils vont virer la ministre de la censure du cinéma. » Sinon, la vie est calme au pays de Maupassant, avec Marie-Julie Maille, son épouse, sa monteuse, sa scénariste, et leur petite Madeleine, sa troisième enfant. Chevelures romantiques et immenses yeux bleus, comme sorties d’un tableau de Millet ou de Vermeer, elles jouent dans la scène finale des Gardiennes.

Les belles voitures

La famille possède un potager, un verger, un chien, un âne nommé Gabin et des poules. Un héron vient pêcher dans la mare. La discussion, les dîners en ville, la promo dans les grands hôtels le soûlent aussi, au propre et au figuré. Pour le rencontrer, il faut prendre un train tôt le matin et prévoir la journée. « On ne parle de rien avec Xavier, sinon de la côte de bœuf qu’on va manger le soir. Mais on vit des trucs », a prévenu Louis-Do de Lencquesaing. Un verre de pastis à la main, loulou chic et dépenaillé, Xavier Beauvois offre à voir et à manger.

On commence par le tour du propriétaire, la nouvelle machine à jus de pomme, son bureau fouillis de films et de livres, le buste d’un Christ trisomique offert par Benoît Poelvoorde. La vidéo d’une partie de pêche chez Michel Legrand.

Avant d’aller chercher le compositeur des Demoiselles de Rochefort, l’un de ses films préférés, Beauvois détestait la musique au cinéma : « Tu te balades dans la rue avec un orchestre qui te suit, toi ? » Depuis quatre ans, il reste debout, fasciné, derrière le piano quand Legrand compose pour ses films, dans son château du Loiret. Chez Beauvois, ni donjon ni Steinway. Le César de Des hommes et des dieux prend la poussière sur la cheminée. Les récompenses cannoises et autres sont accrochées « dans les chiottes ». Des bouts de décor, des meubles récupérés des tournages trônent dans toutes les pièces. Beauvois nourrit ses films de sa réalité, la famille Sandrail des Gardiennes, par exemple, porte le nom de sa longère normande.

« JE SAIS QUE JE SUIS INTELLIGENT, ET PAS INTELLO. » XAVIER BEAUVOIS

Pour Sylvie Pialat, « sa vie est un grand tout ». Les murs sont mangés par sa collection d’autographes. Pialat, Fritz Lang, Talleyrand, Hitler, Sitting Bull, Rodin, Fellini… Hitler ? « J’ai un peu de tout », explique vaguement Beauvois. Dans le jardin, il y a la piscine chauffée, le gîte rural 3-épis à peine étrenné (pour réserver, chercher Etretat sur Airbnb, il ne veut pas être envahi). La plage est à huit minutes, trois quand c’est lui qui conduit la décapotable. Une Porsche Carrera, cible des goélands incontinents qui le rendent maboul, 300 chevaux sous l’accélérateur, le bruit est célèbre dans le canton.

Un jour, un copain gendarme a déménagé. « Tu habites où ?, a demandé Beauvois. « La maison dans le virage où tu fais ta troisième reprise », a précisé le gendarme. Au volant, Xavier Beauvois est un as, comme Belmondo : « Ça va de zéro à 100 en une seconde, c’est de la musique. » Et ajoute : « Avant, les belles voitures, je les regardais. » Il propose : « On va faire un tour, tu vas comprendre le concept des voitures. » 50, 100, on ne dit pas combien devant la maison du gendarme… « C’est autre chose que Paris, non ? » La voiture est un marqueur, chez lui. Pour illustrer sa détestation du théâtre, par exemple : « Depuis le cinéma parlant, c’est obsolète. Comme les carrosses après l’invention de la Mercedes. » Son ami Louis-Do, à l’affiche du Théâtre du Rond-Point à Paris : « Il est beauf parfois. » Réponse : « Je sais que je suis intelligent, et pas intello. »

« Le luxe absolu »

Lecteur insomniaque, il est accro aux documentaires, et à l’histoire. D’après sa compagne, il est incollable sur le Débarquement, du nom des GI à la marque des chars. « Et il sait tout sur les éléphants », affirme sa fille de 5 ans. Dans le pays de Caux, on le voit pêcher le mardi, se promener avec sa fille le mercredi, faire ses courses à 4 heures de l’après-midi. « Cinéaste, tu branles rien de la journée », explique Beauvois. Il se compare à son père, préparateur en pharmacie à Ayre-sur-la-Lys : « Je l’ai vu faire le même geste tous les jours, à la même heure, enlever le cadenas de la pharmacie. Moi, je ne sais pas ce qui va se passer dans la journée. C’est le luxe absolu. »

Depuis 1991, il a pris des kilos, et s’est allégé d’un peu de noirceur. Sans doute grâce à sa famille de cinéma. Certains, échaudés par son caractère, l’ont quitté en route, comme le producteur Pascal Caucheteux qui l’a accompagné de N’oublie pas que tu vas mourir à La Rançon de la gloire. Le directeur de Why Not Productions refuse de s’exprimer à son sujet mais aurait dit qu’avec lui « il n’y a pas eu assez de bons moments ». D’autres, surtout des femmes, lui sont fidèles : Nathalie Baye, Sylvie Pialat, Frédérique Moreau la scénariste. Et Marie-Julie Maille, vigie taiseuse et paisible. « Sa bonne fée, ajoute Frédérique Moreau, elle monte les films à l’infini, elle colmate, rattrape tout. » Les femmes le protègent, il les appelle « mes gardiennes » en levant son verre.

Son père, décédé à 52 ans dans un asile, cachait les bouteilles et son désespoir. Xavier Beauvois boit au grand jour, avec la joie forcée des bons vivants. Quand l’ivresse devient grise, les hommes s’y cognent, « il devient con, alors qu’il est tout sauf con », témoigne un proche. Les gardiennes font rempart. « Xavier n’est jamais triste, mais souvent désespéré », avance l’une. Une autre : « Écorché vif, il a besoin de quelque chose de familial. » Pour la troisième, « il cherche son père ».

Le César de « Des hommes et des dieux » prend la poussière sur la cheminée. | VINCENT DESAILLY POUR M LE MAGAZINE DU MONDE

Un jour, Xavier Beauvois a confié : « Avec Nord, j’ai cru faire un film de haine contre mon père. En fait, c’était un film d’amour. » Jean Douchet, le père spirituel, attend le jour où Beauvois, « très drôle dans la vie », se lâchera dans une comédie. « Pour l’instant, il faut qu’il s’affronte, plutôt que faire l’effronté. C’est un cinéaste de la réalité, et il n’est pas prêt à sourire du réel. » La seule comédie à son palmarès, La Rançon de la gloire, avec Roschdy Zem et Benoît Poelvoorde, est sortie en salle le jour de la tuerie de Charlie Hebdo. En ce mois de janvier 2015, personne n’avait le cœur à rire. C’est l’unique fiasco commercial et critique de sa carrière.

« Du vintage qui ne se démode pas »

Les Gardiennes, bien que recalé à Cannes par Thierry Frémaux – Gilles Jacob, ancien président du Festival, a, lui, tweeté plusieurs fois son adoration pour le film –, est l’écho féminin de Des hommes et des dieux. Ce film de deux heures un quart, qu’il a longtemps hésité à couper, distille une magie rythmée par la nature et les passions sourdes dans le huis clos d’une ferme de la Creuse en 1915, quand les femmes remplaçaient les hommes dans les champs. À des centaines de kilomètres du front, elles menaient leur propre guerre.

« IL SE SERT DE TOUT AVEC UNE INTENSITÉ QUI L’ÉPUISE LUI-MÊME. PARFOIS, IL ÉTAIT EN LARMES APRÈS UNE SCÈNE. » LAURA SMET À PROPOS DU TOURNAGE DES « GARDIENNES »

Comme d’habitude, il a tout préparé à la perfection, et tout chamboulé sur le tournage. « Il faut toujours en savoir plus que ce qu’on met dans le film. Cela permet d’improviser », dit-il. Laura Smet, fille de Nathalie Baye dans la vie et dans le film, rêvait de tourner avec Beauvois, comme sa mère dans Le Petit Lieutenant et Selon Matthieu : « Ses films sont comme les costumes Saint Laurent. Du vintage qui ne se démode pas. » Devenue gardienne, elle s’est soumise aux exigences du réalisateur. « On a passé quinze jours dans une ferme pour apprendre à conduire les bœufs, courir avec des sabots en bois, manier les outils, mais il en savait plus que nous. »

D’une minute à l’autre, Beauvois a bousculé le scénario, les dialogues, les décors, s’inspirant du geste d’un paysan local, d’un rayon de soleil… « Un film, c’est un être humain, il faut l’écouter », explique-t-il. « Au début j’étais enceinte, après je ne l’étais plus, et ensuite je ne pouvais pas avoir d’enfants… Tout a bougé en permanence, raconte Laura Smet. Il se sert de tout avec une intensité qui l’épuise lui-même. Parfois, il était en larmes après une scène. »

Frédérique Moreau, scénariste du film avec Marie-Julie Maille, n’a pas retrouvé l’histoire des Gardiennes telle qu’elles l’avaient tissée pendant des mois en Normandie. Pas plus que Sylvie Pialat n’a reconnu le livre d’Ernest Pérochon dont elle est tirée. « Il a beaucoup résisté au scénario. Et dès qu’il a trouvé le lieu, une vieille ferme du Limousin, il se l’est approprié, et il a improvisé. J’ai tenu parce que je savais qu’il y aurait un film au bout », raconte Frédérique Moreau. Le tournage dans la Creuse, coupé du monde, a été « miraculeux » selon Caroline Champetier, « comme toujours ».

Un jeune homme de 23 ans qui rêve de devenir réalisateur n’en a pas perdu une miette. « Il m’a fait la Fémis en deux mois », raconte Victor Belmondo, petit-fils de Jean-Paul, recruté comme assistant. En voiture, Xavier Beauvois et lui passaient en boucle la musique du Professionnel, de Georges Lautner (composée par Ennio Morricone). « À mon tour de transmettre », explique Xavier Beauvois, qui voudrait arrêter le temps : « Tu fais un premier film et quand tu te réveilles, t’as 50 ans. C’est inquiétant. » Un nuage passe dans le ciel normand. On reparle de la plage d’Etretat, « les galets s’en vont parfois, puis ils reviennent », et du cri de l’âne Gabin qui s’entend à cinq kilomètres à la ronde, aussi bruyant que la Porsche.

Les Gardiennes, de Xavier Beauvois, avec Nathalie Baye, Laura Smet, Iris Bry (2 h 14). En salle le 6 décembre.

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3 décembre 2017

Cinquante nuances de Grey - ce soir à la télévision...

2 décembre 2017

LE CINÉMA NE TOURNE PLUS ROND

Par Didier Péron , Julien Gester , Ève Beauvallet et Olivier Lamm - LIBERATION

Peut-on dissocier l’artiste de son œuvre, l’homme-harceleur du réalisateur incontournable ? Depuis la disgrâce du producteur hollywoodien, les têtes d’affiche tombent en cascade, entraînant dans leur chute les œuvres auxquelles elles sont associées. Et le débat se polarise : certains parlant de censure quand d’autres prônent le boycott.

dernier tango

«Le Dernier Tango à Paris» (1972), de Bernardo Bertolucci. Le cinéaste a reconnu avoir voulu «humilier» la comédienne Maria Schneider pendant le tournage. Photo DR

Qui se soucie encore des prochains Disney et Star Wars, quand l’actualité cinématographique de fin d’année se révèle plus mouvementée que jamais ? Jeudi est apparue sur Internet la bande-annonce de Tout l’argent du monde, nouveau film de Ridley Scott, prévu depuis des lustres pour inonder les écrans français le 27 décembre. Mais, fait probablement inédit dans l’histoire du cinéma, une vidéo semblable faisant la réclame de ce même film avait déjà été diffusée deux mois plus tôt, avec un autre acteur pour y camper l’un des personnages principaux : depuis, Christopher Plummer a remplacé au pied levé Kevin Spacey. Entre-temps, Spacey a tout simplement été coupé au montage, purgé numériquement des plans où il apparaissait, et suppléé à l’image par Plummer afin que cet accident de notoriété n’affecte pas le calendrier de lancement planétaire du film. La décision fut prise début novembre, dès le lendemain de la parution d’un déluge d’accusations d’agression sexuelle visant l’acteur de Usual Suspects et House of Cards - série dont Netflix annonçait par ailleurs la suspension (lire ci-contre). Le même jour, devait également sortir en France I Love You Daddy, premier long métrage signé par le comique et showrunner Louis C.K. depuis que sa série Louie en a fait l’un des champions de la comédie d’auteur américaine. Ses distributeurs, en France comme aux Etats-Unis, ont décidé d’ajourner la diffusion du film à une date qui n’adviendra sans doute jamais, en conséquence des aveux du réalisateur, enrubannés d’excuses sans effet : oui, ces femmes, dont les rangs s’étaient épaissis en quelques jours, qui l’accusaient de harcèlement sexuel disaient vrai - à plusieurs reprises, il s’était masturbé devant elles sans leur consentement. Fin janvier, encore, paraîtra sur les écrans français le nouveau Woody Allen, Wonder Wheel, déjà sorti vendredi aux Etats-Unis, dont bon nombre de recensions évoquent les échos malaisants à la liaison controversée entre le cinéaste new-yorkais et son ex-belle-fille, Soon-Yi, rappelant au passage les accusations de viol sur sa fille adoptive Dylan, dont il fait l’objet depuis 1993 sans avoir jamais être jugé.

«Zinzins»

Témoignages accablant de producteurs, cinéastes, showrunners, scénaristes, acteurs, de James Toback à John Lasseter (patron de Pixar), de Steven Seagal à Dustin Hoffman, de Matthew Weiner (créateur de la série Mad Men) à Jeffrey Tambor (interprète principale de la série Transparent)… Pendant qu’aux Etats-Unis, la liste s’allongeait de jour en jour, d’autres en France se préparaient à assister à la rétrospective à la Cinémathèque française de l’œuvre de Jean-Claude Brisseau, condamné en 2005 et 2006 pour des faits de harcèlement et d’agressions sexuelles lors de castings érotiques. Sauf que celle-ci a été remise à plus tard - une pétition signée par nombre de grands noms du cinéma français réclame son maintien. L’annulation fut décidée début novembre «par souci d’apaisement», à la suite des protestations dont avait déjà fait l’objet la rétro (maintenue, celle-là), consacrée à Roman Polanski en septembre. Des collectifs féministes (Osez le féminisme, la Barbe, Femen…) avaient appelé à une manifestation, réclamé l’annulation du cycle (lire page 5) et, lors de l’inauguration, opposé aux honneurs du tapis rouge les cinq accusations de viols sur mineures dont le cinéaste fait désormais l’objet, tandis que celui-ci était acclamé à l’intérieur et traitait ces dernières de «zinzins» à la faveur d’une comparaison osée avec les autodafés nazis. Quelques jours plus tard, le directeur de l’institution cinéphile, Frédéric Bonnaud, renchérissait sur le plateau d’une émission de Mediapart. Sans guère rencontrer de contradiction, il évoquait alors un «choc totalitaire» exercé par de «demi folles» et «un retour à l’ordre moral sous les ordres de véritables ligues de vertu».

Une «ligne défensive», «déconnectée des vrais enjeux», déplorait alors la Société des réalisateurs de films (SRF) dans un communiqué mis en ligne le 10 novembre. La SRF, qui compte dans son conseil d’administration des réalisateurs comme Jacques Audiard, Rebecca Zlotowski ou Céline Sciamma (lire page 7), regrettait «que la Cinémathèque joue la fuite, l’hostilité ou la résistance au débat qu’elle n’arrive manifestement pas à penser dans sa complexité ni même ses grandes lignes». Le 15 novembre, c’est l’Observatoire de la liberté de création (dont la SRF est membre) qui montait au créneau en publiant un communiqué intitulé «Contre le retour de la censure institutionnelle» pour «dire son inquiétude face à la démultiplication des demandes de censure» et rappeler que les institutions culturelles «ne sont pas les gardiennes de la vertu».

«Conseillé d’interdire»

Pendant ce temps, dans une tribune publiée par Libération, Frédéric Bonnaud répondait aux chroniques de Daniel Schneidermann parues dans ces mêmes pages («Frédéric Bonnaud a toujours été "du bon côté". Et soudain, dans le sidérant miroir que lui tend l’époque, il se découvre du côté des oppresseurs») en s’alarmant d’un «contexte de mise en accusation délirante du cinéma dans son ensemble» où «il est maintenant conseillé d’interdire, pour se garder de façon préventive de la mise au pilori médiatique».

Se demander ce que valent ces reports, ces ajournements, ces disgrâces, c’est aussi questionner l’impact réel de la «révolution» à l’œuvre. «Révolution» qui semble convoquer sur le banc des accusés, à longueurs de tweets et de tribunes, trois cas de figure pourtant bien distincts : d’une part les œuvres «entachées» par les actes de leurs auteurs (celles de Polanski ou Allen), de l’autre les œuvres au prétexte desquelles ont été commises des violences sexuelles (à l’instar du Dernier Tango à Paris de Bertolucci, où l’actrice n’avait pas donné son consentement pour simuler une scène de sodomie), et enfin les œuvres soupçonnées d’alimenter une «culture du viol» (ce serait même le cas de A bout de souffle, dans lequel certains lisent le comportement de Belmondo comme du harcèlement à l’égard de Seberg).

Imbroglio ? Il continue avec la nature et la gravité des fautes des auteurs ou acteurs incriminés, tous évacués d’un même geste rageur. Reste que le caractère pour le moins inédit de cette crise oblige chacun à reconsidérer sa place, son regard, ses convictions à l’aune d’une actualité où la stupéfaction le dispute à l’embarras. «Je ne pense pas qu’il y ait jamais eu un tel ébranlement du secteur de l’entertainment hollywoodien, dévoré en son cœur par un seul et même sujet», dit notamment le critique vétéran Todd McCarthy dans une table ronde de journalistes cinéma publiée par le Hollywood Reporter, expression collective d’un trouble sismique chez ces spectateurs professionnels dont les critères de jugement semblaient soudain violemment bousculés. Comme si le vent mauvais de l’opprobre sexiste avait fracassé le plafond idéalisé des idées esthétiques. Todd McCarthy, après trente ans passés à juger des films au sein du magazine Variety, s’estime aujourd’hui représentatif de cette catégorie de spectateurs ayant aimé le cinéma pour sa «capacité à rompre les limites de la sexualité, à prendre des risques, à partir en éclaireur dans les zones obscures du comportement humain. Cependant, déclare-t-il dans le Hollywood Reporter, cette approche doit désormais être reconsidérée d’un tout autre point de vue».

Soudain il est devenu comme évident qu’il y avait quelque chose de pourri au royaume de La La Land. La façade prestigieuse et rutilante d’un monde soigneusement marketé par des milliers de conseillers en communication, scellé en son périmètre VIP par une solide culture du secret, s’est comme écroulée et un flot de questions qu’on s’était peut-être habitué à ne plus se poser sont remontées à la surface dans cette tourmente mêlant souvent dans la plus grande confusion revendications militantes, crispations cinéphiles, opprobres paniques et réflexes sectoriels couplant la prophylaxie morale et la sauvegarde économique.

Machine à enfumage

Le cinéma ne serait-il pas - dans son imagerie dominante, son emprise sociale et culturelle, ses récits, son glamour, son insatiable désir de fabriquer et sublimer des archétypes - une vaste machine à enfumage qui permettrait, un peu mieux que les autres industries, au machisme et au sexisme de se perpétuer sans fin ? Les lectures canoniques sur le male gaze (concept forgé par la théoricienne féministe Laura Mulvey en 1975) ont repris du service, rappelant à nouveau la domination de ce «regard masculin» qui continue de structurer la majorité des fictions, des pubs, des clips, et tend à objectiver les rôles féminins sous la forme d’icônes que la mise en scène et le montage subliment et découpent selon les modalités d’un fétiche qu’on adore et qu’on malmène sans fin.

«What do we do with the art of monstrous men ?» («Que faire de l’art des hommes monstrueux ?») s’interroge dans un long texte pour la Paris Review Claire Dederer, quelques jours après la publication par le New York Times d’un article titré, «Charlie Rose, Louis C.K., Kevin Spacey : Rebuked. Now what do we do with their work ?» («Que faire de leurs œuvres ?»). Comment sortir de ces apories morales par le haut ? Doit-on polariser le débat à l’extrême ? Avec d’un côté, la peur panique qu’on interdise purement et simplement la vision de films au nom d’une cinéphilie purgée de toute zone d’ombre ou ambiguïté (ce qui ne s’est exprimé tel quel dans aucune revendication d’aucune association) ; de l’autre, le soupçon que les cris d’orfraie des défenseurs du droit à offenser et à subvertir morale et normes par l’art ne soient rien d’autre que les derniers râles d’une classe privilégiée par son genre et ses acquis.

Narcissisme

A l’équivalence d’un krach boursier détruisant la valeur et la réputation de plusieurs banques en quelques heures ou quelques jours, l’affaire Weinstein a profondément démonétisé le prestige et l’aura d’un milieu nourri par une culture féroce de la compétition, mais aussi un goût très prononcé pour le no limit (d’ambition, d’argent, de pouvoir, de célébrité, de narcissisme… et de sexe). Bigger than life, oui, mais à quel prix ? Que le moment soit historique, il n’est guère possible d’en douter, il s’écrit sous nos yeux dans un contexte passionné, où chacun se trouve un peu trop promptement sommé de choisir son camp. Or, il doit être possible de goûter la complexité morale d’œuvres qui ne sont pas toujours et toutes destinées à refléter ou corriger les injustices du monde réel, de continuer de sonder les mérites et travers (esthétiques, moraux, politiques) de leurs travellings, sans transiger pour autant avec les errements coupables de leurs démiurges.

Didier Péron , Julien Gester @juliengester , Ève Beauvallet , Olivier Lamm

1 décembre 2017

Charlotte Gainsbourg - Lying With You (Official Music Video)

30 novembre 2017

« 12 jours » : une chambre d’écho aux détresses contemporaines

depardon

Par Mathieu Macheret - Le Monde

Raymond Depardon filme des audiences entre patients internés sous contrainte et juge des libertés et de la détention.

L’AVIS DU « MONDE » – À NE PAS MANQUER

Après Les Habitants (2016), qui partait sur les routes à la rencontre des Français, le photographe et cinéaste Raymond Depardon, 75 ans, revient sur les écrans avec 12 jours, un très beau film au sujet d’un récent dispositif légal concernant les pensionnaires des hôpitaux psychiatriques.

Depuis 2013, les établissements disposent de douze jours pour présenter les patients internés sous contrainte à un juge des libertés et de la détention, qui doit statuer sur le prolongement de leur internement ou sur leur remise en liberté.

Cette décision est prise dans le cadre d’une audience entre juge et patient, ce dernier étant accompagné d’un avocat et pouvant ensuite se pourvoir en appel. Ce sont ces entretiens que Depardon a obtenu l’autorisation de filmer, à l’hôpital du Vinatier, à Lyon, où se succèdent, devant sa caméra, une dizaine de cas (parmi les 72 que le cinéaste a pu suivre). Dix personnes en situation de grande fragilité, souffrant de dépression, de pulsions suicidaires, de dissociation ou de schizophrénie paranoïde, et dont la réunion au sein du film offre une chambre d’écho saisissante aux détresses contemporaines.

Huis clos

Le film s’inscrit dans une veine particulière de la filmographie de Depardon, qu’on pourrait appeler de la « comparution ». Déjà, dans Délits flagrants (1994), des déférés comparaissaient devant le substitut du procureur, au Palais de justice de Paris, puis dix ans plus tard, dans 10e chambre, instants d’audience (2004), des prévenus devant le tribunal correctionnel.

A chaque fois, Depardon rend son dispositif technique le plus discret et le moins invasif possible, pour enregistrer ces audiences comme un échange, un dialogue, une conversation, en huis clos. A ceci près que la comparution n’est pas un échange anodin, mais bien un rapport de pouvoir, où l’un des interlocuteurs doit à terme sceller le sort de l’autre. Justiciable et préposé, de part et d’autre de la table, sont assignés à des rôles différents – emporter la conviction pour l’un, dégager une forme de vérité pour l’autre – dans un petit théâtre réciproque de la persuasion, dont l’objet principal n’est autre que la parole en elle-même.

Or, dans le cas de 12 jours, la parole des patients est bien sûr altérée par leur maladie, rendue confuse, parfois obscure, et l’échange se produit dans un brouillard de signes contradictoires, qui rend toute décision problématique

Un inconscient à ciel ouvert

Qui sont donc ces hommes et ces femmes qui se présentent devant la caméra de Depardon ? Un vagabond responsable d’une agression sur autrui, dans une rue de Vienne (Isère). Une dame éperdue, qui souffre de harcèlement au travail et dont on apprend qu’elle est employée d’Orange. Un sans-papiers d’origine angolaise, qui dégringole depuis des années dans des actes de délinquance, avant d’apprendre enfin qu’il est schizophrène. Une jeune de cité aux prises avec une sévère paranoïa liée au contexte du djihadisme, hantée par l’image d’une kalachnikov. Une autre femme rongée par la solitude et qui semble résolue à en finir au plus vite…

Autant de drames privés et domestiques, souvent bouleversants, qui se bousculent dans cette petite pièce à la nudité grège toute fonctionnelle, et renvoient, par la grâce de l’évocation, au monde extérieur, à la France d’aujourd’hui et à sa terrible actualité.

En face, trois juges (un homme et deux femmes) dont la fonction première consiste moins à statuer qu’à mener l’enquête, à révéler les troubles et les fêlures qui hantent ces patients. Les aliénations qui se font jour ne parlent finalement de rien d’autre que de la souffrance au travail, du statut d’immigré, de la difficulté d’intégration, des violences faites aux femmes, de la hantise du terrorisme. En somme, une carte incroyablement complète de la psychopathologie française contemporaine, comme un inconscient à ciel ouvert.

LA LANGUE N’EST PAS LA MÊME : ACCIDENTÉE POUR LES UNS, D’UNE RHÉTORIQUE BIEN RODÉE POUR LES AUTRES

Au dispositif légal examiné répond logiquement le dispositif de mise en scène. Celui-ci se concentre sur une figure élémentaire et essentielle du cinéma : le champ-contrechamp. Un gros plan pour le patient, un gros plan pour le juge, alternés par un montage qui non seulement retrace le déroulement de l’audience, mais marque aussi une séparation, un hiatus infranchissable, le lieu d’un rapport asymétrique ou d’une incommunicabilité. D’un côté ou de l’autre, la langue n’est pas la même : fragile, accidentée ou engourdie pour les uns, d’une rhétorique bien rodée et d’un registre soutenu pour les autres.

Magnifiques portraits humains

Parfois, un troisième axe, plus large, vient triangulariser la relation, révélant la présence d’un avocat venu prêter main-forte aux patients. Or, le dispositif n’est si rigoureusement cadré que pour laisser advenir quelque chose d’incontrôlable : les surgissements ou les fulgurances du discours aliéné, par nature imprévisible, aux vérités toujours troublantes.

Un patient achève son entretien en lançant à la juge : « Merci pour votre abus de pouvoir ! » Un autre confond la « procédure » en cours avec le décorum d’un tribunal. Une dernière se lance dans un plaidoyer bouleversant pour retrouver la garde de ses enfants.

Entre ces magnifiques portraits humains, Depardon filme les couloirs vides de l’hôpital, la cour banale de l’établissement, les rues avoisinantes, la brume du petit matin qui se répand sur un mobilier urbain anonyme. Sans doute comme le revers trop calme et sans qualité, injustement pacifié, d’une folie maintenue à l’écart.

« 12 jours », documentaire français de Raymond Depardon (1 h 27). Sur le Web : 12jours-lefilm.com

29 novembre 2017

Le théâtre du Châtelet au Grand Palais !

 

I'm singin' in the rain, just singin' in the rain. 🎶 © Vincent Pontet



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