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Jours tranquilles à Paris
24 avril 2018

Visite d'Etat d'Emmanuel Macron aux Etats Unis

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24 avril 2018

Melania Trump

24 avril 2018

La presse américaine décrypte le pari de Macron sur Trump

Par Stéphanie Le Bars, Washington, correspondance - Le Monde

Le président français a entamé lundi une visite de trois jours outre-Atlantique. Un déplacement que les médias scrutent avec attention.

Emmanuel Macron, le « Obama français » est arrivé lundi 23 avril après-midi à Washington pour la première visite d’Etat organisée par le président des Etats-Unis, Donald Trump, depuis son accession à la Maison Blanche. La presse américaine scrute avec intérêt la « relation particulière » qui unirait les deux hommes aux profils si différents. Elle s’interroge surtout sur les bénéfices, pour le président français, d’afficher sa proximité avec M. Trump.

Ainsi la radio publique NPR estime que l’enjeu de cette visite « pourrait être plus grand pour M. Macron que pour le président américain », car « le dirigeant français devra montrer que sa relation avec Trump produit des résultats », notamment sur l’accord nucléaire iranien, le climat ou la guerre commerciale. Or pour l’heure, comme l’affirme le New York Times, le locataire de l’Elysée « prend le risque de courtiser Trump mais il n’a rien obtenu », si ce n’est « le voyage à Washington ».

Il fait le pari, « malgré l’impopularité » du républicain, que son image n’en pâtira pas et espère même apparaître comme un leader « si fin psychologiquement qu’il parviendra à avoir l’oreille de Trump ». Et qu’au final, cette stratégie permettra à la France d’occuper une position d’influence auprès des Etats-Unis. Avoir choisi de s’exprimer dimanche sur Fox News, la chaîne favorite du président américain, démontrerait même que le dirigeant français a compris quel était « le meilleur moyen de s’adresser à Trump », souligne encore le quotidien.

Des visions antagonistes

Des craquements sont pourtant déjà apparus dans la relation entre les deux hommes, notamment sur les suites à donner aux frappes américaines, françaises et britanniques en Syrie, rappelle NPR. De même, rien n’indique que M. Macron sera en mesure de faire changer d’avis M. Trump sur l’intérêt de conserver l’accord sur le nucléaire iranien, que le président américain doit prolonger ou dénoncer le 12 mai. « Il n’y a pas de plan B », a prévenu le chef de l’Etat français sur Fox News. Mais l’Iran n’est pas le seul sujet de possible discorde entre le Français et l’Américain. Le Washington Post a établi la liste des dossiers (commerce, climat, multilatéralisme…) sur lesquels les visions sont très différentes pour ne pas dire antagonistes.

Tout en reconnaissant la place particulière qu’occupe pour l’heure le Français dans l’estime de Trump – « il ne l’a jamais publiquement critiqué » –, Vox dresse la liste des autres « amis » du président américain. Le magazine décrit certes M. Macron comme « celui qui murmure » à l’oreille du locataire de la Maison Blanche, mais il présente aussi le premier ministre japonais Shinzo Abe ou le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammed Ben Salman, comme les autres prétendants au titre de « meilleur ami ».

Le faste et l’attention portés à la visite de M. Macron à Washington contrastent en tout cas avec la discrétion autour de l’arrivée de la chancelière allemande, Angela Merkel, prévue vendredi, quelques heures après le départ du président français. Une différence de traitement que la Süddeutsche Zeitung explique par l’absence d’alchimie personnelle entre M. Trump et Mme Merkel et par les relations commerciales entre les Etats-Unis et l’Allemagne, que le président américain juge à son désavantage.

23 avril 2018

Mount Vernon, clin d’œil à l’histoire franco-américaine

Par Gilles Paris, Washington, correspondant - Le Monde

Donald Trump a choisi la demeure de George Washington, pour un dîner privé, au premier jour de la visite d’Etat d’Emmanuel Macron aux Etats-Unis.

Une visite d’Etat à Washington d’un président français peut difficilement faire l’économie d’un hommage à l’Histoire. En 2014, reçu par Barack Obama, François Hollande avait eu les honneurs de Monticello, la demeure de Virginie de l’un des plus francophiles Pères fondateurs américains, Thomas Jefferson, ambassadeur à Paris de 1785 à 1789. Lundi 23 avril, leurs successeurs se recueilleront devant la tombe de George Washington, dans sa plantation de Mount Vernon, au sud de Washington.

Les deux couples présidentiels auront partagé auparavant une visite des lieux suivie d’un dîner intime à l’heure américaine depuis la terrasse de la maison du premier président des Etats-Unis (1789-1797) qui domine majestueusement un large méandre du Potomac. Un rappel du repas qui les avait rassemblés au sommet de la Tour Eiffel à la veille du 14-Juillet, à l’occasion de l’invitation de Donald Trump à Paris pour le centenaire de l’entrée en guerre des Etats-Unis aux côtés de la France, en 1917.

Clef historique

La propriété de Mount Vernon où George Washington passa une bonne partie de ses deux mandats (les institutions de la jeune république étant alors installées à Philadelphie) avait reçu en 2007 une autre paire de présidents, George W. Bush et Nicolas Sarkozy. Ils y avaient tenu une réunion de travail.

Les deux hommes s’étaient évidemment attardés devant la pièce la plus évocatrice de la France que recèle la demeure : la clef d’une des principales portes « de la forteresse du despotisme », la Bastille, expédiée par le marquis de Lafayette après le début d’une révolution qu’il considérait comme la continuité de son aventure américaine. Il s’agissait de « l’hommage d’un missionnaire de la liberté à son patriarche », précisait le Français dans sa missive, reçue en août 1790 par le président américain dont il se disait le « fils adoptif ».

Cette clef historique n’est pas la seule à évoquer les liens qui unissent les Etats-Unis à la France dans la plantation, comme le rappelle Melissa Wood, la directrice de communication de l’association des Dames du Mount Vernon qui gère le domaine depuis 1860. Il abrite également des bustes de Jean-Antoine Houdon et des peintures de Claude Lorrain ainsi que des pièces de mobilier et de vaisselle achetées en 1790 à un ambassadeur de France, le marquis Eléonor François Elie de Moustier, rappelé brutalement à Paris après le début de la révolution française.

Le président de la République française aurait pu également profiter de son voyage aux Etats-Unis pour célébrer le tricentenaire de la fondation de la Nouvelle-Orléans par le gouverneur de Louisiane, Jean-Baptiste Le Moyne de Bienville, en 1718. L’agenda contraint de la visite d’Etat, mardi, et l’invitation à s’exprimer devant le Congrès, le lendemain, ne l’ont pas permis.

23 avril 2018

Les enjeux de la visite d’Emmanuel Macron à Washington

Par Marc Semo - Le Monde

Le président français, qui se rend aux Etats-Unis lundi évoquera le terrorisme, l’Iran et le commerce international avec son homologue Donald Trump.

La visite d’Etat d’Emmanuel Macron, lundi 23 avril à Washington, est la première d’un dirigeant étranger depuis l’installation de Donald Trump à la Maison Blanche. Le président américain a ainsi voulu souligner l’importance qu’il accorde à sa relation avec son « ami » Emmanuel Macron. Ce dernier l’avait reçu avec faste pour le défilé du 14-Juillet et il ne veut pas être en reste.

Les trois jours de la visite d’Emmanuel Macron et de sa femme se dérouleront en grande pompe. Entretien dans le bureau Ovale à la Maison Blanche, dîner à Mount Vernon, la maison de George Washington, adresse au Congrès comme pour tous ses prédécesseurs de la Ve République, à l’exception de François Hollande. Comme Valéry Giscard d’Estaing en 1976, il s’exprimera en anglais pendant une trentaine de minutes. Un discours pour « rappeler les valeurs communes et la volonté de continuer à écrire l’histoire ensemble », souligne l’Elysée. Il a accordé également un grand entretien, diffusé dimanche, à Fox News, la chaîne réactionnaire qu’affectionne Donald Trump. Le président français, accompagné lors de cette visite par Jean-Yves Le Drian (affaires étrangères), Florence Parly (armées) et Bruno Le Maire (économie) abordera dans ses entretiens avec son homologue tous les grands sujets internationaux.

Terrorisme

Il y a une évidente convergence dans le caractère prioritaire de la lutte contre le terrorisme, y compris contre ses financements, alors que se tiendra à Paris une conférence internationale sur le sujet les 25 et 26 avril. La France comme les Etats-Unis veulent finir d’éradiquer l’organisation Etat islamique (EI) de son ancrage territorial syro-irakien, mais Emmanuel Macron espère aussi convaincre son interlocuteur de maintenir les quelque 2 000 hommes, notamment des forces spéciales, déployés au nord-est de la Syrie dans le territoire contrôlé par les FDS (Forces démocratiques syriennes) à dominante kurde. Soumis à la pression de son électorat et fidèle à ses promesses de campagne, Donald Trump voudrait au contraire pouvoir rapatrier les « boys » dès que possible.

Ils parleront aussi du Sahel. L’intervention au Mali, en 2013, a convaincu le Pentagone de la détermination française, et la présence, aux côtés d’Emmanuel Macron, de Jean-Yves Le Drian, passé de la défense aux affaires étrangères, est un atout. D’où le soutien américain, désormais affirmé, à la force militaire du G5 Sahel, initiée par la France et réunissant le Tchad, le Mali, le Niger, le Burkina Faso et la Mauritanie.

L’Iran

La lutte contre la prolifération nucléaire et chimique sera aussi au cœur des discussions et notamment le dossier du nucléaire iranien sur lequel Paris et Washington ont de sérieuses divergences d’approche, malgré des préoccupations communes, notamment sur le programme balistique développé par Téhéran. Donald Trump n’a jamais caché son hostilité « à l’horrible accord » de juillet 2015 entre les « 5 + 1 » (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité, plus l’Allemagne, et Téhéran), gelant pour dix ans le programme nucléaire iranien.

Le 13 octobre, le président américain avait refusé de certifier, comme la loi américaine le lui demande, que l’accord avec l’Iran est conforme aux intérêts américains, et de proroger la levée des sanctions contre Téhéran. Donald Trump a posé la date du 12 mai comme ultimatum à ses alliés européens pour qu’ils s’entendent avec l’Iran, afin de « remédier aux terribles lacunes » du texte. Il réclame davantage d’inspections et, surtout, des gages pour l’après alors que l’accord limitant l’activité nucléaire de Téhéran est censé expirer entre 2025 et 2030.

La France s’emploie, avec les autres signataires européens, l’Allemagne et le Royaume-Uni, à le compléter avec des « recommandations fortes », y compris la menace de nouvelles sanctions à propos des missiles balistiques, afin d’augmenter la pression sur Téhéran et de donner des gages au président américain. Le retrait des Etats-Unis donnerait en effet le coup de grâce à l’accord de 2015, même si les autres signataires, à commencer par les Européens, continueraient à en respecter les termes.

Le limogeage du secrétaire d’Etat Rex Tillerson et son remplacement par « le faucon » Mike Pompeo, combinés à la nomination de John Bolton comme conseiller à la sécurité nationale, sont perçus comme un durcissement de la politique américaine de mauvais augure pour l’accord iranien. « Même si le président américain n’a pas encore arrêté sa décision, les signaux reçus ne sont guère encourageants », reconnaît l’Elysée.

Les négociations commerciales

C’est, avec le climat, l’autre grande pomme de discorde, depuis que, le 8 mars, l’administration Trump a relevé de 25 % les taxes douanières sur l’acier et de 10 % sur l’aluminium, tout en épargnant – seulement provisoirement – les intérêts des Européens. Ceux-ci ont jusqu’au 1er mai pour négocier des exemptions permanentes. « On espère que cette visite va être utile pour mieux expliquer nos positions, mais on n’espère pas de “deal”, on ne prévoit pas d’engranger d’accord lors de ces trois jours », explique l’Elysée, soulignant que « ce n’est pas vraiment l’objet de cette visite, c’est une visite très politique ».

Ces sujets seront aussi abordés deux jours plus tard par la chancelière allemande qui arrive à Washington le 27 avril. Mais ses relations avec Donald Trump sont très mauvaises depuis le début. Le président américain s’en est pris, avant et après son élection, à l’Allemagne en général et à la chancelière en particulier pour dénoncer les excédents commerciaux du pays, menacer le secteur de l’automobile de droits de douanes accrus et critiquer l’accueil des réfugiés depuis 2015.

« Pour les Etats-Unis, le numéro de téléphone de l’Europe, sa figure de référence, était Angela Merkel. Désormais, c’est Emmanuel Macron », relève Yves Bertoncini, de l’institut Jacques Delors. Un constat partagé par Célia Belin, chercheuse à la Brookings Institution qui, dans Foreign Affairs, relève que « la France, désormais, est le meilleur interprète des intérêts européens aux Etats-Unis ».

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22 avril 2018

Emmanuel Macron en visite d'Etat aux Etats Unis

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21 avril 2018

La Corée du Nord suspend ses programmes nucléaire et balistique

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Par Philippe Mesmer, Tokyo, correspondance - Le Monde

Kim Jong-un a déclaré qu’il allait fermer un site d’essais nucléaires, une décision aussitôt saluée par Washington et Séoul mais jugée insatisfaisante par Tokyo.

La Corée du Nord suspend ses activités nucléaires et ses essais de missiles balistiques intercontinentaux. Annoncée par l’agence officielle KCNA, puis par la télévision officielle, la décision effective samedi 21 avril a été prise lors d’une réunion du Comité central du Parti du travail au pouvoir, réuni le 20 avril pour la première fois en six mois.

Dans une résolution consacrée à « la grande victoire de la ligne de suivi simultané du développement économique et de la construction d’une force nucléaire », Pyongyang signale son intention de « démanteler le site d’essais nucléaires situé dans le nord du pays pour démontrer de manière transparente la suspension des tests nucléaires ».

La décision s’accompagne d’engagements en faveur du développement économique du pays, conformément à la politique dite de « byongjin » prévoyant un développement en parallèle du nucléaire et de l’économie.

La République populaire et démocratique de Corée (RPDC, nom officiel de la Corée du Nord) s’engage également à participer aux efforts internationaux pour l’interdiction des essais nucléaires. Comme elle l’a toujours affirmé, elle promet de ne jamais utiliser d’armes atomiques à moins d’être menacée ou d’être la cible de provocations nucléaires.

De fait, la décision prise ne prévoit aucun démantèlement des armes nucléaires et des missiles déjà construits. La question des missiles à portée intermédiaire, qui inquiète notamment le Japon, n’est pas non plus évoquée.

A une semaine du sommet des deux Corées

« C’est une très bonne nouvelle pour la Corée du Nord et le monde – Grand progrès ! Impatient de nous retrouver pour notre sommet », a néanmoins tweeté Donald Trump après l’annonce de Pyongyang. La Maison Bleue, la présidence sud-coréenne, a pour sa part salué « une avancée significative » à même de créer un « environnement positif » pour les sommets à venir. Toutefois, le Japon a émis des réserves, jugeant cet engagement insatisfaisant. Le ministre nippon de la défense, Itsunori Onodera, regrette que la Corée du Nord n’ait pas mentionné « l’abandon de missiles balistiques de courte et moyenne portée ».

Le troisième sommet intercoréen de l’histoire, après ceux de 2000 et de 2007, doit se tenir le 27 avril au village de la trêve de Panmunjon, dans la zone démilitarisée entre les deux Corées. Il réunira le président sud-coréen Moon Jae-in et le dirigeant du Nord Kim Jong-un.

Un sommet entre M. Kim et le président américain Donald Trump est aussi envisagé début juin, dans un lieu encore à déterminer. Il s’agirait d’une première historique, aucun président américain en exercice n’ayant jamais rencontré de dirigeant du Nord. Les discussions devraient se concentrer sur les activités nucléaires et de développement de missiles de Pyongyang.

Le Nord aurait évoqué la nécessité de mesures de dénucléarisation par étapes et synchronisées. Les Etats-Unis appellent au démantèlement de son programme nucléaire, de manière complète, vérifiable et irréversible.

Un réchauffement engagé par Moon Jae-in

L’environnement favorable observé actuellement contraste avec celui de 2017. L’an passé, les tensions n’avaient fait que s’exacerber dans la péninsule. Pyongyang avait enchaîné les essais de missiles, dont certains capables d’atteindre le territoire américain, et avait mené son sixième essai nucléaire. « La grande cause historique de mettre au point une force de frappe nucléaire est réalisée », s’était alors félicité Kim Jong-un, signalant que le programme touchait à sa fin.

En réponse, l’administration Trump avait tout fait pour que les sanctions les plus fermes soient imposées par le Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) au régime nord-coréen et elle avait multiplié les déclarations menaçantes. A l’époque, rappelait le 19 avril M. Moon, « L’ombre de la guerre menaçait la péninsule coréenne »,

Le changement a été amorcé par le discours du Nouvel An de Kim Jong-un qui a ouvert la voie au dialogue. La reprise des discussions a été facilitée par les efforts de Moon Jae-in, qui a toujours plaidé en faveur des négociations.

Depuis, les rencontres symboliques se multiplient. La sœur de Kim Jong-un, Kim Yo-jong, a ainsi participé, le 9 février, à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Pyeongchang, en Corée du Sud. Début mars, une délégation du Sud menée par le conseiller à la sécurité nationale Chung Eui-yong s’est rendue à Pyongyang. C’est à cette occasion que les sommets ont été évoqués.

Parvenant à un traité de paix

M. Chung a également négocié la mise en place de la première ligne de communication directe entre les bureaux de Moon Jae-in et ceux de Kim Jong-un. Elle a été inaugurée le 20 avril. D’après la Maison Bleue, la présidence sud-coréenne, MM. Moon et Kim devraient s’entretenir par ce biais avant leur sommet.

Outre le nucléaire, Séoul aimerait profiter des rencontres à venir pour faire avancer l’idée de véritablement mettre fin à la Guerre de Corée (1950-1953) en parvenant à un traité de paix, entre les deux Corées et avec les Etats-Unis. Le conflit s’est en effet arrêté sur un simple armistice signé uniquement par la Corée du Nord et les Etats-Unis au nom des forces de l’ONU, en l’absence de tout représentant du Sud.

« Nous devrons faire preuve de beaucoup d’imagination et devrons trouver des solutions innovantes pour faire des sommets un succès et ne pas répéter les erreurs du passé », a déclaré M. Moon. « Nous aimerions assurément assister à la fin officielle de l’armistice. C’est quelque chose que nous soutiendrons », déclarait le même jour la porte-parole du secrétariat d’Etat américain Heather Nauert.

19 avril 2018

Cuba ne sera plus dirigé par un Castro

Par Paulo A. Paranagua - Le Monde

Raul Castro, 86 ans, devrait céder, jeudi 19 avril, son fauteuil de président à son dauphin, Miguel Diaz-Canel, 57 ans. Bilan de dix ans de règne de Raul, qui reste à la tête du Parti communiste cubain.

Cuba ne sera plus dirigé par un Castro. Raul, 86 ans, général, ministre des Forces armées révolutionnaires (FAR) pendant un demi-siècle, puis successeur de son frère aîné Fidel (1926-2016), devait passer la main à la tête de l’Etat cubain, jeudi 19 avril, après avoir effectué deux mandats de cinq ans comme président du Conseil d’Etat et du conseil des ministres (2008-2018). Il avait lui-même établi une limite de deux mandats consécutifs de cinq ans pour la présidence.

C’est un événement historique : pour la première fois, un Castro ne tiendra pas le gouvernail du régime issu de la révolution de 1959. Raul Castro ne s’éloignera cependant pas du pouvoir, puisqu’il devrait continuer à occuper le poste clef de premier secrétaire du Parti communiste de Cuba (PCC, parti unique) jusqu’au prochain congrès prévu en 2021.

Mais le président ne cumulera pas ses fonctions avec celles de chef du parti. Le castrisme entame ainsi une relève générationnelle. Les commandants de la guérilla et les dirigeants de la « génération historique » font un pas de côté au profit de cadres nés après la prise de pouvoir par les Castro. Miguel Diaz-Canel, 57 ans, le successeur désigné, qui devrait être élu par l’Assemblée nationale cubaine jeudi au terme de deux jours de sessions, a fait sa carrière politique en province, avant d’être coopté par la direction du PCC.

« Nous sommes face à une succession sans transition, estime l’historien cubain Rafael Rojas, professeur invité à l’université de Yale (Etats-Unis). Cette succession autoritaire, où les Cubains n’ont pas eu leur mot à dire, ne s’accompagne pas d’une transition vers la démocratie. »

Transformation en profondeur

Les dix ans de présidence de Raul Castro ont transformé en profondeur la vie des Cubains, sans pour autant remettre en cause le castrisme. A en croire les officiels, les nombreux changements introduits constituent une simple « actualisation du modèle socialiste cubain ». La principale avancée a été le rétablissement des relations diplomatiques avec les Etats-Unis, en 2015, après cinquante-cinq ans de guerre froide tropicale.

Même si l’embargo américain n’a pas été levé, l’ennemi héréditaire, cible de toutes les diatribes de Fidel Castro, devenait enfin un voisin fréquentable, dont le gouvernement cubain espérait attirer un maximum de touristes. La visite du président Barack Obama à La Havane, en 2016, souleva un immense espoir parmi les Cubains, qui affichèrent leur enthousiasme sans retenue : le drapeau américain s’exhibait sur les balcons, comme sur les vêtements ou les véhicules. Pour le professeur Rojas. « Le tournant diplomatique était en phase avec les changements internes à Cuba Lors de sa visite à La Havane. »

« Obama appuya les autoentrepreneurs et la société civile émergente. Au point que les secteurs les plus conservateurs et orthodoxes du PCC, craignant le surgissement d’une nouvelle bourgeoisie nationale, ont mis un frein aux réformes en cours. »

Le rétropédalage commence dès le lendemain du discours du président américain à La Havane, retransmis en direct par la télévision locale.

Raul Castro avait promis d’avancer « lentement mais sûrement » et d’en finir avec les interdictions « absurdes » qui compliquaient la vie des Cubains, mais faisaient partie de l’héritage laissé par Fidel. Depuis « l’offensive révolutionnaire » de 1968, tous les métiers et activités étaient exercés par des fonctionnaires. L’Etat-patron dominait toute l’économie et partant, toute la société. Pas moyen d’effectuer des travaux de plomberie ou de se faire une coupe de cheveux sans passer par un organisme public. Bien entendu, les Cubains ont vite trouvé le moyen de contourner la loi, quitte à être à la merci des Comités de défense de la révolution ou de l’omniprésente Sécurité de l’Etat, la police politique créée selon le modèle de la Stasi est-allemande.

Un secteur privé embryonnaire

Depuis 2010, l’autorisation d’exercice de 200 activités à son propre compte a permis de légaliser une bonne partie de l’économie souterraine et d’alléger par la même occasion le fardeau de l’Etat, sous tension depuis la disparition des subsides soviétiques. Plus d’un demi-million de Cubains sont devenus des cuentapropistas (« travailleurs à leur propre compte »), un euphémisme qui désigne des autoentrepreneurs pouvant embaucher un petit nombre de salariés. Ainsi, les fameux paladares (« restaurants privés ») prisés des touristes, sont-ils obligés d’avoir un nombre limité de couverts.

Le travail à son compte reste interdit aux médecins, aux informaticiens, aux journalistes, aux avocats, aux enseignants ou encore aux architectes. Il n’empêche, ce secteur privé embryonnaire, surtaxé et harcelé par les autorités, a connu une croissance exponentielle, même s’il représente encore une part infime du produit intérieur brut. Toutefois, après avoir accordé 580 000 licences, le gouvernement bloque les nouvelles autorisations depuis août 2017.

En 2008, Raul Castro avait autorisé les Cubains à fréquenter les hôtels et les restaurants jusqu’alors réservés aux étrangers, et à acquérir des téléphones portables ou des ordinateurs. Dix ans plus tard, on dénombre dans l’île 4,5 millions de mobiles (pour une population de 11 millions d’habitants). La cybersphère cubaine a acquis une réelle diversité, qui reste quasi inaccessible à cause de la faible connectivité à Internet. Les infos et les programmes franchissent néanmoins ce fossé via des mailings ou des clés USB : un paquete hebdomadaire avec un mélange de divertissement et de nouvelles circule au marché noir.

UN PAS ÉNORME A ÉTÉ FRANCHI AVEC LA

« RÉFORME MIGRATOIRE » DE 2013, C’EST-À-DIRE L’ABOLITION DU PERMIS DE SORTIE DU TERRITOIRE QUE DEVAIENT OBTENIR LES CUBAINS AVANT DE DE VOYAGER À L’ÉTRANGER

Depuis 2011, les Cubains peuvent enfin vendre et acheter des véhicules et des résidences. Cela a favorisé l’essor du marché immobilier dont témoignent les petites annonces sur Internet. Auparavant, les Cubains devaient recourir à la permuta (« échange ») s’ils voulaient déménager. Mais trouver un partenaire occupant un logement équivalent n’était pas aisé et beaucoup de transactions s’effectuaient grâce à des dessous-de-table versés aux autorités compétentes. A La Havane, sur le boulevard du Prado, un marché informel de la permuta se réunissait régulièrement. Maintenant, les opérations sont plus transparentes et les prix flambent.

Aussi spectaculaire que l’introduction du marché dans ces affaires est la « réforme migratoire » de 2013, c’est-à-dire l’abolition du permis de sortie du territoire que devaient obtenir les Cubains avant de voyager à l’étranger. Un pas énorme a été franchi vers la libre circulation, même si le gouvernement s’arroge le droit d’interdire le départ d’opposants. La Havane a également assoupli les conditions de résidence à l’étranger, qui peuvent se prolonger pendant deux ans. Une nouvelle catégorie d’expatriés flottants est ainsi apparue, qui font des allers-retours plus ou moins fréquents. « Les relations entre l’île et la diaspora sont devenues plus fluides », se réjouit Rafael Rojas, qui réside à Mexico. Néanmoins, les Cubano-Américains doivent recourir à leur passeport cubain, puisque la double nationalité n’est pas reconnue.

« Frein idéologique »

Malgré tout, la liberté d’aller et de venir n’est pas acquise. Les provinciaux n’ont pas le droit de s’installer à La Havane sans un permis spécial. Du coup, des milliers de migrants internes sont fragilisés, dans l’illégalité. Faute d’une résidence déclarée, ils sont privés aussi de la fameuse libreta, la carte de rationnement instaurée en 1963, que Raul Castro n’est pas parvenu a éliminer, même si elle ne satisfait plus qu’une part des besoins alimentaires.

Pour pallier les pénuries, des terres ont été remises à des agriculteurs en usufruit, depuis 2008, sans pour autant leur donner accès aux crédits, aux approvisionnements et aux débouchés qui permettraient leur essor. Résultat : le régime importe 80 % des denrées alimentaires, une facture qui pèse lourd, alors que plus de la moitié des terres sont en friche.

« LE FREIN AUX RÉFORMES EST PUREMENT IDÉOLOGIQUE », OMAR EVERLENY PÉREZ, EX- DIRECTEUR DU CENTRE D’ÉTUDES DE L’ÉCONOMIE CUBAINE À L’UNIVERSITÉ DE LA HAVANE

La dualité monétaire, c’est-à-dire l’existence simultanée d’un peso convertible en devises et d’un autre qui ne l’est pas, reste la grande impasse des réformes économiques. La consommation de ceux qui ont accès au dollar, par leur travail ou grâce aux remesas (les fonds envoyés par les expatriés à leurs proches), diffère radicalement des privations subies par ceux qui doivent se contenter d’un revenu en pesos non convertibles (le salaire moyen équivaut à 24 euros). L’ouverture économique a fracturé l’égalitarisme prôné par Fidel Castro et creusé les inégalités, sans pour autant permettre la croissance des forces productives.

9 940 interpellations ou arrestations d’opposants en 2016

« Le frein aux réformes est purement idéologique », assure Omar Everleny Pérez, ancien directeur du Centre d’études de l’économie cubaine auprès de l’université de La Havane. Le social est en panne sèche parce que l’économie est restée au milieu du gué. Contrairement aux « pays frères » comme la Chine ou le Vietnam, à Cuba la conversion au marché relève du non-dit. Le secteur privé n’est pas reconnu par la Constitution.

De manière plus générale, toute initiative indépendante prise à l’égard du régime de parti unique est dans les limbes, dépourvue de sécurité juridique, à la merci de l’arbitraire et de l’improvisation du pouvoir. Alors que le régime se défausse sur l’embargo américain, les Cubains raillent « l’auto blocus », l’immobilisme. « Raul Castro a gouverné de manière plus collégiale et institutionnelle, plus pragmatique et moins volontariste que son frère Fidel », admet néanmoins M. Rojas.

Toutefois, trois grandes réformes politiques dont la nécessité a été évoquée en haut lieu sont restées lettre morte : la législation sur les associations, qui verrouille tout regroupement autonome ; la loi électorale, qui empêche des candidatures pluralistes, comme l’ont prouvé les élections municipales de novembre 2017 ; enfin, le monopole du PCC sur les médias, ce qu’explique M. Rojas.

« Le verrouillage politique et la répression préventive systématique visent à réduire les espaces de sociabilité et la convergence entre l’opposition traditionnelle et la jeunesse activiste qui cherche à élargir les libertés publiques. »

La Commission cubaine pour les droits de l’homme et la réconciliation nationale a enregistré un pic de 9 940 interpellations ou arrestations d’opposants en 2016.

Raul Castro a placé des officiers supérieurs des FAR, des « raulistas », à la tête des principaux leviers économiques, y compris le tourisme. Le PCC ne partage pas la moindre parcelle de pouvoir politique. Le castrisme aurait-il procédé comme le Guépard du roman de Lampedusa : « Il faut que tout change pour que rien ne change » ?

18 avril 2018

Trump a envoyé le patron de la CIA rencontrer Kim Jong-un

Par Arnaud Leparmentier, New York, correspondant - Le Monde

L’existence de contacts au plus haut niveau entre Washington et Pyongyang rend de plus en plus probable la rencontre des deux dirigeants.

Le patron de la CIA – et secrétaire d’Etat désigné – Mike Pompeo a été envoyé par le président Donald Trump lors du week-end de Pâques (1er avril) pour rencontrer Kim Jong-un, le leader nord-coréen. C’est ce qu’a révélé le Washington Post, mardi 17 avril, sur la foi de sources concordantes. Le voyage a eu lieu après que M. Pompeo a été désigné secrétaire d’Etat.

Cette information, non confirmée officiellement mais reprise par toute la presse, est cohérente avec les propos tenus par M. Trump, mardi, lors d’un point presse avec le premier ministre japonais Shinzo Abe, qu’il recevait dans son golf de Mar-a-Lago, en Floride :

« Nous avons eu des discussions directes à un très haut niveau, à un niveau extrêmement élevé avec la Corée du Nord. »

L’affaire rend de plus en plus probable la rencontre des deux dirigeants. « Nous allons organiser des rencontres avec Kim Jong-un très rapidement. Ce sera probablement début juin ou un peu avant, en supposant que les choses aillent bien », a déclaré le président américain. Le lieu de la rencontre n’est pas précisé. « Nous envisageons cinq lieux différents, a précisé M. Trump. Je crois vraiment qu’il y a beaucoup de bonne volonté. Nous verrons ce qu’il advient, comme je dis toujours. Car à la fin, c’est le résultat qui compte. »

Les contacts ont été noués par la voie des services secrets, entre la CIA et son homologue nord-coréen, le Bureau de reconnaissance générale. Ils sont aussi passés par les services sud-coréens, notamment par leur patron, Suh Hoon, qui aurait transmis l’invitation de Kim Jong-un à Donald Trump. Ce contact entre Kim Jong-un et M. Pompeo serait la rencontre de plus haut niveau, depuis que Madeleine Albright, secrétaire d’Etat de Bill Clinton, avait rencontré Kim Jong-il, le père de Kim Jong-un, en 2000, pour discuter stratégie.

Le rôle de Séoul est décisif

Kim Jong-un avait effectué, avant la rencontre avec M. Pompeo, une visite sécrète à Pékin, les 26 et 27 mars. Accompagné par son épouse, il avait rencontré le président chinois Xi Jinping. L’annonce n’avait été faite qu’après le départ de M. Kim dans son train blindé. Cette visite suggérait que la Corée du Nord cherchait le parrainage ou les conseils de son grand voisin sur l’attitude à adopter vis-à-vis de Washington.

« Il y a eu cette année des changements prometteurs dans la situation de la péninsule coréenne et nous faisons part de notre satisfaction face aux efforts majeurs que la Corée du Nord a fait à cet égard », avait déclaré Xi Jinping, à l’issue de la visite, selon l’agence Xinhua. Selon le résumé de la rencontre faite par l’agence chinoise, Kim Jong-un a tenu à ses homologues chinois des propos ouverts :

« Si la Corée du Sud et les Etats-Unis répondent avec bonne volonté à nos efforts de créer une atmosphère de paix et de stabilité, et prennent des mesures coordonnées et synchronisées pour atteindre la paix, le dossier de la dénucléarisation de la péninsule peut trouver une résolution. »

Lors de sa récente audition par le Sénat, M. Pompeo s’était dit « optimiste que le gouvernement des Etats-Unis puisse créer les conditions appropriées pour que le président et le leader nord-coréen puissent avoir cette conversation, qui nous dirigerait vers l’obtention d’un résultat diplomatique dont l’Amérique et le monde ont si désespérément besoin ».

Le rôle de Séoul est décisif. « La Corée du Sud a des projets de rencontre avec la Corée du Nord pour voir s’ils peuvent mettre fin à la guerre. Et ils ont ma bénédiction à ce sujet », a indiqué M. Trump, signalant que « les gens ne réalisent pas que la guerre de Corée ne s’est pas terminée ». Selon la presse sud-coréenne, Séoul et Pyongyang prépareraient une annonce pour réduire les tensions. Les observateurs estiment que les Corées voudraient un plan global qui garantisse la sécurité de la Corée du Nord et un traité de paix en échange de la dénucléarisation de la péninsule

« Pression maximale »

Le premier ministre japonais, qui est sur une ligne dure dans ce conflit, veut une solution qui permette de mettre son pays à l’abri des tirs de missile nord-coréens et qui intègre la question des Japonais enlevés par la Corée du Nord – à l’automne 2017, M. Trump avait rencontré sur l’Archipel des familles de personnes enlevées.

A Mar-a-Lago, M. Abe s’est réjoui du fait que « les Etats-Unis et le Japon ont tous deux fait preuve de leadership pour appliquer une campagne de pression maximale contre la Corée du Nord, qui a conduit Pyongyang à ouvrir le dialogue avec nous. Il est donc équitable de dire que notre approche fut la bonne, couronnée de succès », a déclaré le chef du gouvernement nippon, saluant le « courage de Donald Trump dans sa décision de rencontrer le leader nord-coréen ».

17 avril 2018

La justice russe ordonne le blocage de Telegram

Par Isabelle Mandraud, Moscou, correspondante - Le Monde

L’application refuse de fournir au FSB, les services russes de sécurité, les clés permettant de déchiffrer les messages de ses utilisateurs.

Le cofondateur de la messagerie Telegram, Pavel Dourov, avait interdit à ses avocats de se rendre au tribunal de Taganski, un arrondissement du centre de Moscou, où, disait-il, « tous les principes élémentaires [du droit] ont été violés ».

C’est donc devant des bancs vides, du côté des accusés, que la justice russe a ordonné en un temps record de vingt minutes, vendredi 13 avril, le blocage « immédiat » de la messagerie sur tout le territoire du pays. En cause : le refus de Telegram de fournir au FSB, les services russes de sécurité, les clés permettant de déchiffrer les messages.

Sur les quelque 200 millions d’utilisateurs de la messagerie dans le monde, plus de 10 millions sont Russes, dont de nombreuses administrations et officiels eux-mêmes, au Kremlin comme au sein du gouvernement. Quelques minutes après le verdict, le ministère russe des affaires étrangères signalait d’ailleurs sur son site Internet : « Chers abonnés, vous pouvez toujours nous suivre sur Viber, et d’autres réseaux sociaux, Facebook, Vkontakte, Twitter, Instagram… »

Ironie du sort, M. Dourov, d’origine russe, cofondateur de Telegram avec son frère Nikolaï en 2013, est aussi celui qui a donné naissance à l’application Vkontakte, le Facebook russe, dont il fut le directeur général jusqu’à son éviction, en 2014, année où il a décidé de quitter la Russie « sans retour ».

Sur une liste noire

Vendredi, le vice-ministre de la communication, Alexeï Voline, s’est voulu rassurant : « Le blocus de Telegram ne nuira pas à ses abonnés, a-t-il déclaré. Ils utiliseront d’autres ressources ou contourneront l’interdiction. »

Sa remarque est parfaitement exacte. Dès le début de son bras de fer avec les autorités russes, commencé en 2017, les dirigeants de Telegram ont ajouté dans la messagerie la possibilité de contourner un blocus grâce à des serveurs relais, et l’Internet russe est déjà inondé de conseils pour briser l’embargo. Un rapide sondage organisé sur le site de la radio Echo de Moscou a conclu dans le même sens : 82 % des personnes qui ont répondu ont déclaré qu’elles éviteraient le blocus.

« Le tribunal Taganski de Moscou (…) a prouvé que le “bureau” [le FSB] n’arrive pas à lire les messageries qui utilisent un chiffrement complet, il a ainsi montré que Telegram est la plus sûre », a ironisé Pavel Chikov, l’un des avocats russes de la société. « Il a augmenté la quantité d’ennemis du pouvoir de quelques millions, a-t-il poursuivi. Il a démontré que le système judiciaire sert fidèlement ses intérêts et inscrit la Russie dans la liste des pays en guerre contre le progrès et la liberté. » Pavel Dourov a également réagi. « Chez Telegram, nous avons le luxe de ne pas dépendre d’une source de revenus ou de la vente de publicité, a-t-il déclaré sur son compte Telegram. La vie privée n’est pas à vendre, et les droits humains ne doivent pas être sacrifiés sur l’autel de la peur ou de la cupidité. »

Telegram rejoint, en effet, d’autres réseaux inscrits sur une liste noire en Russie et interdits, comme LinkedIn ou Dailymotion.

« Assaut » contre la liberté d’expression

Ce blocage est un nouvel « assaut » contre la liberté d’expression, selon Amnesty International. Les autorités russes, souligne l’organisation de défense des droits humains dans un communiqué, « ont bloqué les sites d’information qui les critiquent, imposé des règles de stockage de données draconiennes et déclaré les médias enregistrés en dehors de la Russie comme des “agents étrangers”. Maintenant, ils ciblent l’une des applications de messagerie les plus populaires en Russie simplement pour avoir le courage et l’intégrité de respecter la vie privée de ses utilisateurs ».

Saisie par Roskomnadzor, l’agence fédérale russe des télécommunications, la justice n’a pas reculé. « Les informations diffusées par Telegram peuvent contenir des données utilisées par des terroristes et des extrémistes », a une nouvelle fois plaidé, vendredi, sa représentante en décrivant une « menace » pour la Russie. En juin 2017, Roskomnadzor avait averti la messagerie d’un possible blocage en lui intimant l’ordre de s’inscrire dans le registre des diffuseurs d’information, une injonction à laquelle Telegram avait fini par se plier.

M. Dourov a cependant opposé un « niet » catégorique à la demande de fournir les clés de déchiffrement aux services de sécurité, s’attirant à nouveau les foudres des autorités. Cette fois, avertissait-il en mars, les menaces de blocage « ne porteront pas leurs fruits ».

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