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Jours tranquilles à Paris

30 novembre 2019

« Pour les démocraties, la question n’est hélas plus de juger les combattants fanatisés, mais de les exterminer »

Par Cécile Hennion

Torture, exécutions extrajudiciaires… Le philosophe Michel Terestchenko et la journaliste Auberi Edler expliquent comment les attentats djihadistes ont ouvert une séquence de violences d’Etat et de régressions démocratiques.

Michel Terestchenko est maître de conférences de philosophie à l’université de Reims et à l’IEP d’Aix-en-Provence, il est l’auteur de plusieurs ouvrages dont Du bon usage de la torture (La découverte, 2008) et L’Ere des ténèbres (Le Bord de l’eau, 2015). Il répond ici au côté d’Auberi Edler, qui, après quatre ans d’enquête, signe le documentaire Des bourreaux aux mains propres, disponible sur Arte, et dont le philosophe a été le « conseiller historique ».

Le sort des djihadistes capturés dans le cadre de la « guerre contre la terreur » paraît flotter dans le flou juridique. La troisième convention de Genève de 1949 relative aux prisonniers de guerre et la convention de l’ONU contre la torture ont-elles été violées ?

Michel Terestchenko : Après les attentats du 11-Septembre, l’administration de George Bush a mis en place deux stratégies : l’une consistant à définir les djihadistes comme des « combattants illégaux » ne relevant pas des conventions de Genève ; l’autre à établir que les techniques dites d’interrogatoire coercitives ne sont pas de la torture, avec l’intention d’éviter toute poursuite judiciaire à l’encontre de ceux qui allaient la pratiquer. Des avocats aussi brillants que John Choon Yoo, conseiller au département de la justice entre 2001 et 2003 aux Etats-Unis, ont bâti une justification sophistiquée de la « torture propre », soit l’usage de pratiques psychologiques qui sont aussi dévastatrices que la torture physique.

La France n’a pas eu besoin de semblables précautions. Au soir des attentats du Bataclan, le 13 novembre 2015, François Hollande décrétait l’état d’urgence, assurant vouloir « éradiquer » l’organisation Etat islamique (EI). Dans son hommage aux 130 victimes, le 27 novembre, il a promis de « détruire l’armée de fanatiques » responsable. Si l’on admet cette logique de l’éradication, les questions de justification juridique ou morale ne se posent plus. Le discours de l’éradication n’est pas sécuritaire, il est hygiénique. Répété par les hauts représentants de l’Etat, il est symptomatique de graves régressions démocratiques.

Ces régressions doivent-elles être considérées à l’aune du traumatisme suscité par des attentats meurtriers ?

Auberi Edler : Les Etats-Unis n’ont pas réagi au pied levé. L’arsenal utilisé à partir de 2001 a été étudié et compilé durant des décennies. Durant la guerre froide, les procès soviétiques avaient convaincu Washington que les communistes détenaient l’arme ultime du contrôle du cerveau. Pour l’obtenir, le gouvernement américain s’est lancé dans des recherches, qui n’ont pas abouti, mais qui ont permis de découvrir les fondements de la torture « propre ».

D’abord la privation sensorielle, testée sur des cobayes humains par le docteur Donald Hebb, chef du service de psychologie à l’université McGill, à Montréal, financé par la CIA. Privés de la vue, de l’ouïe, du toucher, isolés dans des cellules sans même être touchés, les volontaires craquaient très vite.

A la même époque, des chercheurs de l’université Cornell, à New York, constataient les effets destructeurs de la souffrance auto-infligée. Le sujet est alors attaché dans une position ne permettant aucun repos, tandis que chaque mouvement provoque des douleurs insoutenables. Ces deux méthodes sont conseillées par la CIA dans son manuel Kubark, en 1963, à ses agents et aux armées alliées (en Amérique latine, aux Philippines, etc.).

Elles sont réactualisées dès 2001, complétées, avec l’aide de John B. Jessen et James Mitchell, deux psychologues payés 81 millions de dollars, d’éléments adaptés à la culture de ce nouvel ennemi « musulman et moyen-oriental » : la peur des chiens, le malaise face à la nudité…

M. T. : Le 11-Septembre a ouvert une séquence de violences d’Etat, une ère nouvelle dont nous ne sommes pas sortis. Les méthodes d’interrogatoire coercitives qu’on avait cru obsolètes après l’effondrement du bloc soviétique ont été aussitôt utilisées par l’administration Bush dans des « sites noirs », partout dans le monde. Il n’était pas question d’être restreint par des principes face à des groupes qui ne les respectent pas. C’est dans ce contexte qu’a été élaborée la justification « libérale » de la torture.

L’idée générale est que celle-ci peut moralement être employée comme un moyen chirurgical et désespéré, dès lors qu’il s’agit d’empêcher un attentat imminent menaçant des milliers de vies. Cette hypothèse, dite de la « bombe à retardement », a été scénarisée par des séries américaines à succès. Les soldats américains en Afghanistan ou en Irak s’en réclamaient pour expliquer que la torture « marche »

Or c’est une fable : aucun attentat n’a jamais été déjoué en usant de la torture dans un tel scénario. Il s’agit d’une parabole imaginaire et surtout perverse, car, aussitôt qu’on l’admet, elle conduit à renoncer à nos principes fondamentaux. L’interdiction de la torture et des traitements dégradants est un droit humain absolu, qui n’admet ni exception ni dérogation.

De surcroît, la guerre contre la terreur a conduit au vote de mesures sécuritaires d’exception désormais entrées dans le droit commun et à l’instauration de dispositifs de surveillance généralisés au mépris du respect de l’inviolabilité de la vie privée et du principe de la limitation de la souveraineté de l’Etat. Nous vivons désormais dans des « démocraties sous contrôle », signe en partie de la victoire de Ben Laden.

Vous avez rencontré d’anciens tortionnaires de l’armée américaine, quel bilan font-ils de l’utilité de la torture ?

A. E. : Leur bilan est sans appel : la torture ne leur a pas permis d’obtenir de renseignements décisifs. Comme le confie Tony Lagouranis, ex-interrogateur, tortionnaire repenti de l’armée américaine en Irak, la torture était devenue un moyen de se venger : une réponse à la douleur du 11-Septembre.

Elle est inutile et cruelle pour celui qui la subit ; elle n’est pas sans conséquences pour celui qui l’inflige. Les tortionnaires repentis présentent des troubles de stress post-traumatiques, ils sont souvent sans emploi, sous traitement médicamenteux, incapables de se réinsérer dans la société. Malgré l’aval de leurs hiérarchies politique et militaire, ils savent qu’ils ont commis une faute morale impardonnable.

Le rapport sénatorial Feinstein de 2014 constitue ensuite le réquisitoire le plus implacable contre la torture. Parmi les exemples cités, la capture et la mort en 2011 de Ben Laden. Contrairement aux affirmations du Pentagone, la localisation du chef d’Al-Qaida a été rendue possible par les aveux de prisonniers avant même qu’ils soient torturés.

M. T. : Malgré le démenti des faits et le consensus des spécialistes, l’idée de l’utilité de la torture s’est répandue dans les esprits. En 2016, selon un sondage réalisé par ACAT [Action des chrétiens pour l’abolition de la torture, ONG œcuménique de défense des droits de l’homme], 54 % des Français acceptent qu’une personne suspectée d’avoir posé une bombe soit soumise à des décharges électriques, 36 % jugent le recours à la torture légitime en situation exceptionnelle et 45 % pensent qu’elle est efficace pour prévenir des actes de terrorisme et obtenir des informations fiables.

Ces chiffres démontrent la fragilité des sociétés démocratiques à l’égard des valeurs auxquelles nous sommes prêts à renoncer au nom de la sécurité.

Les otages décapités par des djihadistes, ou l’utilisation par leurs idéologues des failles démocratiques pour accélérer le recrutement, sont-ils des conséquences des pratiques utilisées lors de la « lutte contre la terreur » ?

M. T. : En octobre 2001, Ben Laden déclarait : « La liberté et les droits de l’homme en Amérique sont condamnés. Le gouvernement américain mènera le peuple américain – et l’Occident en général – dans un enfer insupportable et une vie étouffante. » Son objectif affiché n’est pas tant les 2 973 morts du 11-Septembre, mais de plonger les démocraties dans la voie du renoncement à leurs principes.

Avec succès, ainsi qu’en attestent les mots du président Obama au soir de l’exécution du chef d’Al-Qaida, le 2 mai 2011 : « Justice est faite. » Personne ne s’en est ému, pourtant cette exécution n’était pas une affaire de justice, mais de vengeance obéissant à loi du talion. Les démocraties sont entrées dans cette « zone grise » que les groupes terroristes ont su observer et utiliser à leurs fins, et le droit a perdu chez nous sa dimension structurante. C’est d’autant plus grave que l’on a constaté à quel point la morale est fragile.

Obama a fait campagne pour fermer Guantanamo, sans résultat. Pourquoi ?

A. E. : Sa fermeture nécessitait l’amendement du National Defense Authorization Act, qui restreint le transfert vers les Etats-Unis et la libération des prisonniers. Or même des démocrates comme Bernie Sanders s’y sont opposés, estimant le texte trop flou sur le sort des détenus. Aujourd’hui, il reste 40 prisonniers, encadrés par 1 500 soldats américains.

Obama n’a pas tenu sa promesse et a décidé qu’aucun haut responsable, militaire ou politique, ne serait poursuivi et jugé pour les faits du passé. Le procès de Khaled Cheikh Mohammed, cerveau présumé du 11-Septembre, arrêté en 2003 et à l’isolement à Guantanamo depuis 2006, doit se tenir en janvier 2021. Mais un juge doit décider si son témoignage est recevable après les tortures qu’il a subies. Les Etats-Unis se sont peut-être ainsi privés de la possibilité de tourner la page, au moins juridique, de cette tragédie.

M. T. : Barack Obama s’est présenté comme une figure morale qui mettrait fin aux pratiques honteuses de l’administration Bush. Il n’a fait que changer de stratégie, en remplaçant la torture par les drones, multipliant par cinq les exécutions extrajudiciaires. Une ligne suivie par Donald Trump.

La France tergiverse sur le rapatriement des djihadistes français. Certains seraient justiciables en Irak. Quelle justice pour les proches des victimes ?

M. T. : Sur le plan des principes, on ne saurait accepter que des ressortissants français soient soumis à la torture, à des conditions de détention effroyables, jugés dans des procès expéditifs et condamnés à mort en Irak. Sur le plan juridique, le code pénal comme la jurisprudence de la Cour de cassation reconnaissent la compétence des tribunaux français en matière d’acte terroriste commis par un Français à l’étranger. Pourtant, il y a une énorme résistance dans notre pays à l’idée que des djihadistes français doivent bénéficier des conditions d’un procès équitable. C’est pourtant là un droit absolu, une obligation propre à l’Etat de droit, qui s’exerce envers toute personne, quelle que soit la gravité des crimes dont elle est accusée.

Dès lors que les démocraties sont entrées dans une logique de guerre asymétrique contre un ennemi invisible prêt à tout pour les détruire, la question n’est hélas plus de traduire devant un juge ces combattants fanatisés, mais de les exterminer. Telle politique ne laisse aucune place aux victimes, qui n’ont plus qu’à faire leur deuil en silence. Le travail de justice qui, dans un procès, rétablit l’humanité du criminel, libère la victime de l’appel à la vengeance et introduit la raison dans la barbarie doit être fait.

Le terrorisme est un miroir dans lequel la société est appelée à prendre conscience des valeurs sur lesquelles elle est édifiée et auxquelles nous tenons. D’autres épreuves nous attendent. Demain ce sera la catastrophe climatique et les crises migratoires, et personne ne sait comment les démocraties réagiront.

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29 novembre 2019

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29 novembre 2019

Entretien - Olga Tokarczuk, Prix Nobel de littérature 2018 : « Le roman englobe toutes les expériences »

Par Nicolas Weill

L’écrivaine polonaise évoque la situation politique dans son pays mais aussi son art, son œuvre et sa place dans le monde d’aujourd’hui.

La romancière Olga Tokarczuk, sans doute l’écrivaine polonaise la plus lue dans son pays et à l’étranger, se verra remettre, mardi 10 décembre à Stockholm, le prix Nobel de littérature 2018. Auteure d’une quinzaine de romans, et de quelques essais, traduits en français chez Robert Laffont et depuis 2007 chez Noir sur blanc, elle est aussi une voix de l’opposition au gouver­nement nationaliste actuellement au pouvoir en Pologne. Lors de son passage à Paris, le 26 novembre, elle a accordé au « Monde des livres » un entretien ­exclusif.

L’attribution du prix Nobel de litté­rature à vous-même et à Peter Handke a été précédée d’une longue crise interne au jury du prix Nobel. Elle a été suivie d’une polémique sur les positions politiques prises par l’écrivain autrichien dans le conflit en ex-Yougoslavie. Que pensez-vous de ce climat ?

Olga Tokarczuk : J’ai obtenu ce prix un an après le scandale. Un scandale qui, d’ailleurs, a provoqué un choc et beaucoup d’incrédulité en Pologne, puisque l’académie suédoise y était considérée par beaucoup comme une figure d’autorité dans un monde où ces figures ont plutôt tendance à disparaître. Quant à Peter Handke, je dirai ­seulement, en tant qu’écrivaine, que j’ai grandi en le lisant et qu’il est une voix très forte pour avoir rompu avec les conventions.

L’ambiance nationaliste à Varsovie a-t-elle pesé sur la réception de votre prix Nobel ?

Non. Je dois reconnaître que l’annonce de ce prix a plutôt provoqué un bref regain de solidarité. Même les personnes d’un bord politique opposé au mien s’en sont réjouies. Les Polonais sont tellement maltraités par leur gouvernement qu’ils n’ont plus confiance en eux. Cet événement leur a redonné, pour un moment, de l’optimisme. Il montre que la Pologne reste présente dans le monde et que notre voix est audible.

N’êtes-vous pas déçue par l’évolution politique du pays, après les espoirs suscités par Solidarité ?

Certainement. Pour quelqu’un qui, comme moi, est né dans les années 1960, assister au retour des idées nationalistes constitue un vrai choc. Tout cela semblait ne plus exister. De même pour l’antisémitisme. Je croyais le chapitre définitivement clos. Je ne soupçonnais même pas qu’il subsistait, à titre virtuel, dans la tête des gens et qu’on l’utiliserait à des fins politiques. Je constate le cynisme du gouvernement, qui n’hésite pas à puiser dans cette réserve redoutable d’énergie, uniquement dans le but de conserver le pouvoir. Le pire, ce sont les jeunes générations. Car cet état d’esprit a gagné les programmes scolaires. Les enseignants s’en inquiètent. Ils estiment que la génération qui a grandi ces dernières années est d’ores et déjà contaminée.

L’idéal politique porté par votre œuvre pourrait être qualifié de postmoderne : écologiste, féministe, antispéciste, multiculturel. Croyez-vous que ces valeurs du nomadisme que vous prônez soient menacées par une nouvelle tendance à l’enracinement ?

Je ne suis pas une penseuse. Mais je sens bien que nous sommes à l’orée d’un grand changement : changement philosophique, de mentalité, de vie. Je sens moi-même que je perds de l’intérêt pour les voyages. Je pressens qu’il nous faut, désormais, rétrécir et intensifier notre présence dans le lieu dont nous sommes responsables. Une littérature et un art nouveau vont peut-être naître d’un tel contexte. Mais ce n’est pas de moi qu’ils viendront.

Quelle « musique » différente la ­littérature est-européenne fait-elle entendre ?

Quand on examine la littérature ­centreuropéenne – ce terme me tient à cœur –, on est frappé d’y voir le monde représenté comme une réalité mouvante, aux frontières floues, instables. Du fait de notre histoire compliquée, tout peut changer, tout peut arriver. La ­limite entre le réel et l’imaginaire ne se dessine pas aussi nettement qu’il y paraît. Le grotesque, l’ironie ou la poésie nous paraissent plus appropriés pour peindre le monde que le roman réaliste. Czeslaw Milosz [1911-2004, poète, Prix Nobel de littérature 1980] a, à ce sujet, une phrase terrible en affirmant qu’un seul vers vaut des milliers de pages en prose. Un propos qui a le don de m’agacer prodigieusement !

Est-ce la menace lancinante de ce chaos que reflète votre écriture en fragments ?

La narration linéaire et classique m’a toujours rendue méfiante. Pour moi, elle ne permet pas d’accéder au vrai. Je recours à l’écriture fragmentaire depuis Maison de jour, maison de nuit [Robert Laffont, 2001] qui, effectivement, se ­présente comme une mosaïque, un ­patchwork. Mais c’est seulement dans Les Pérégrins [Noir sur blanc, 2010] que j’ai approfondi ma réflexion sur ce mode d’écriture. Le roman moderne exige un récit qui corresponde à notre expérience d’un monde morcelé, zébré, où l’on zappe… Comment, à partir de cette réalité éclatée, retrouver un sens unique ? A travers ce que je nomme « roman-constellation », à l’image d’un homme regardant le ciel étoilé depuis sa terrasse. Nous voyons un chaos d’étoiles disposées à l’aventure, tandis que notre intel­ligence s’efforce, elle, d’y percevoir des ensembles, des structures dotées de sens auxquelles on associe même une ­mythologie.

Les protagonistes de vos romans sont souvent des femmes. Pourquoi ?

Dans la littérature mondiale, les femmes apparaissent beaucoup, mais cantonnées à leur rôle social, assujetties à des forces qui les dominent. J’essaie, moi, de multiplier les personnages de femmes fortes. Dans Récits ultimes [Noir sur blanc, 2007], histoire de trois générations féminines, j’ai voulu décrire des femmes à chaque fois confrontées à des expériences extrêmes et à des questions éthiques. On trouve aussi, dans Les Livres de Jakob [Noir sur blanc, 2018], le personnage de Gitla Rapaport [la fille du secrétaire du rabbin de Lwow qui devient princesse ­polonaise]. Elle relève des défis philosophiques et contribue à cette enquête à laquelle le philosophe Emmanuel Kant a répondu par son fameux texte de 1784, Qu’est-ce que les Lumières ?

Peut-on qualifier votre style de ­ « réalisme fantastique » ?

J’ignore si cette formule convient, mais nous vivons à une époque où une redéfinition du « réalisme » dans la littérature et dans l’art en général s’impose. Comment reformuler le réalisme ? Dans Les Livres de Jakob, j’ai tenté une expérience avec ce que j’ai nommé un narrateur à la « quatrième personne » – Ienta [la grand-mère agonisante qui, tout au long du livre, suit les événements d’en haut, sur le mode d’une expérience de sortie du corps], un personnage qui ignore le temps, dont le point de vue est celui tantôt de la grenouille, tantôt de l’oiseau. Il s’agit d’un narrateur qui outrepasse la perspective de l’auteur comme celle des personnages et projette un regard cosmique sur l’action.

Quel rapport à la langue entretenez-vous ?

J’ai renoncé délibérément à la travailler depuis que j’ai commencé à être écrivaine. Je préfère créer des images. La langue n’est pour moi qu’un outil pour y parvenir. Voilà pourquoi la mienne est transparente. Je me souviens de l’époque où je préparais la première version de Dieu, le temps, les hommes et les anges [Robert Laffont, 1998]. Mon obsession était d’atteindre à la plus extrême simplicité. A chaque fois que je trouvais une subordonnée, je l’éliminais afin que la langue devienne invisible pour le lecteur.

Nombre de vos romans ont des ­ambitions encyclopédiques. Ecrivez-vous des « livres bibliothèques » ?

Effectivement, je suis fascinée par l’idée d’encyclopédie ; c’est un thème récurrent de mon œuvre. Au XVIIe siècle, Jan Amos Komensky [Comenius, 1592-1670] pensait que, dans l’avenir, les connaissances et la science seraient accessibles à tous et que le monde qui en résulterait serait parfait. L’omniscience était perçue comme un moteur éthique accélérant l’amélioration universelle. Bien sûr, aujourd’hui, une telle approche peut susciter pas mal d’ironie, surtout lorsqu’on sait le mal engendré par Internet. Mais le côté naïf de cette vision continue à produire ses effets sur moi.

Le ton de votre univers romanesque ne vient-il pas de la dimension ­mystique qui l’habite ?

La mystique est un héritage de l’homme. Je pense qu’il y a dans la littérature de la place pour ce qui est défini par le psychanalyste Carl Jung [1875-1961] comme des archétypes. Dans un roman de jeunesse, qui n’est pas traduit en français, EE [1995], une jeune fille de 15 ans voit des fantômes, et quatre personnes essaient d’interpréter son expérience en utilisant chacune une langue différente afin de nommer et expliquer ce phénomène. Dans le roman, on peut englober toutes les expériences, y compris des expériences extrêmes, à la limite des cas psychiatriques, qui nous assurent un regard différent sur les évidences.

Les propos d’Olga Tokarczuk ont été traduits du polonais par Anna Juszczak.

REPÈRES

1962 Olga Tokarczuk naît à Sulechow (Pologne). Elle étudie dans une école ­alternative inspirée par les ­méthodes du pédagogue ­danois Nicolaï Grundvigt.

1980 Etudes de psychologie à l’université de Varsovie, en pleine révolte de Solidarité. Psychothérapeute.

1997 Après avoir publié ­quatre livres, dont deux ­romans, elle se consacre ­exclusivement à la littérature.

2017 Adaptation de son ­roman Sur les ossements des morts (Noir sur blanc, 2012) par la cinéaste Agnieszka ­Holland.

2018 International Man ­Booker Prize pour Les ­Pérégrins (Noir sur blanc, 2010).

2019 Prix Nobel de littérature.

29 novembre 2019

TREATS Magazine

 

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29 novembre 2019

Philippe Barbarin : « J’ai fait tout ce que je croyais pouvoir faire »

Par Pascale Robert-Diar 

Le cardinal comparaît à son initiative devant la cour d’appel de Lyon pour contester sa condamnation, en mars, à six mois d’emprisonnement avec sursis pour « non-dénonciation d’agressions sexuelles sur mineurs ».

Il y a neuf mois, cinq prévenus dont Philippe Barbarin, cardinal de Lyon en exercice, un archevêque et un évêque étaient attraits devant le tribunal correctionnel de Lyon par l’association La Parole libérée pour « non-dénonciation d’agressions sexuelles sur mineurs. » L’enjeu, revendiqué par les plaignants, était de faire de cette audience le réceptacle d’un débat de société sur le silence coupable de l’Eglise face à la pédophilie.

Jeudi 28 novembre, devant la cour d’appel de Lyon, c’est un homme seul, cardinal « en retrait » de ses fonctions, qui comparaît à son initiative pour contester sa condamnation à six mois d’emprisonnement avec sursis. Et ce n’est plus tout à fait le même procès.

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« Pourquoi faites-vous appel ? », lui demande le président Eric Seguy. « J’utilise un droit que la justice française me donne », répond Philippe Barbarin. Avec la motivation du jugement qui l’a condamné le 7 mars, le cardinal dispose d’un atout : il sait sur quoi il doit se battre et sur quoi il peut céder. De cette feuille de route, il ne s’écarte pas, se montrant plus humble sur certains points et plus offensif sur d’autres.

Le souci d’éviter le « scandale public »

Ainsi de son entretien, en mars 2010, avec Bernard Preynat. Les plaignants soutiennent que dès cette date, Philippe Barbarin a eu conscience de la gravité des faits reprochés à l’ancien aumônier scout et n’a rien dit.

« J’entends des bruits, des rumeurs. Bernard Preynat me dit qu’il y a eu des trucs mais me certifie qu’il ne s’est plus rien passé depuis 1991.

– Les rumeurs, les trucs, c’était quoi ? Qu’il leur apprenait à tricher au Monopoly ? ironise l’un des avocats des plaignants, Me Jean Boudot.

– Ce n’était pas clair. Personne ne m’a rien dit. Ni les parents, ni les autres prêtres qui savaient. Moi, je suis là depuis 2002, je ne vais pas refaire l’histoire avant 1991 ! »

Il reconnaît toutefois : « Je m’en veux de ne pas lui avoir posé de questions plus précises. Je n’ai pas eu le courage, à ce moment-là, de lui demander de nommer les faits. »

La concession ne présente pas grand risque. Si, dans son jugement du 7 mars, le tribunal avait suivi les parties civiles en estimant que le délit de non-dénonciation d’agressions sexuelles était bel et bien constitué à compter de mars 2010, il relevait que, concernant cette période, les faits sont prescrits.

L’enjeu du procès en appel porte bien davantage sur l’attitude de Philippe Barbarin en 2014, quand il reçoit les confidences d’Alexandre Hezez, et en 2015, quand ce dernier l’informe avoir connaissance d’autres victimes de l’ancien aumônier scout.

A l’appui de sa décision de condamnation, le tribunal avait en effet estimé que le souci d’éviter le « scandale public » avait été, pour lui, la « seule priorité qu’il convenait de servir. » Philippe Barbarin, indiquait le jugement, « a fait le choix en conscience » de ne pas transmettre au procureur les faits qui lui étaient rapportés, « pour préserver l’institution à laquelle il appartient » alors qu’il était « dans l’obligation de dénoncer ces faits. »

« Personne n’a bougé »

A la barre, Philippe Barbarin conteste vigoureusement cette interprétation. « Pourquoi attend-on de moi que je porte plainte, vingt ans après, alors que des paroissiens et des parents ne l’ont pas fait à l’époque ? C’est une question que l’on peut se poser. Personne n’a bougé. Aujourd’hui, je reçois des lettres de gens qui me demandent : “Mais pourquoi ça tombe sur vous ? Nous aussi, on savait et on n’a rien dit. On en parlait partout, à la boulangerie, à la boucherie.” Une quinzaine de familles au moins pourraient témoigner. Il y a même une victime qui m’a dit : “Je m’attaque à vous car je ne vais quand même pas attaquer mon père.” »

Alexandre Hezez, rappelle-t-il, lui avait précisé que les agressions sexuelles le concernant étaient prescrites. « Ni dans sa tête, ni dans la mienne, il n’y avait l’idée de porter plainte. Il m’a dit qu’il s’en voulait de ne pas l’avoir fait. »

Le cardinal poursuit : « Les consignes de l’Eglise [sur la dénonciation d’agressions sexuelles portées à sa connaissance] sont très claires pour des faits qui se passent dans le présent. Mais personne ne dit ce qu’il faut faire pour des faits qui se sont produits il y a vingt ans. »

« Considérez-vous que Rome est un supérieur auquel vous devez obéir ? lui demande la cour

– Je n’avais pas d’accès à la justice. Tandis qu’à Rome, j’en avais un. J’ai fait tout ce que je croyais pouvoir faire. »

« L’Eglise a changé, la société également »

Philippe Barbarin en dresse l’énumération : « J’ai parlé directement avec le pape, je lui ai demandé de recevoir les victimes ou de leur écrire, ce qui n’a pas été fait. J’ai obtenu la levée de la prescription canonique et j’ai donné la sanction maximale que je pouvais donner [contre Bernard Preynat].

Il dit surtout avoir encouragé Alexandre Hezez à trouver d’autres victimes susceptibles de porter plainte. Confronté au cardinal, celui-ci dément. « Je suis très embêté. C’est toujours difficile de penser qu’un évêque ment ou oublie. Mais Philippe Barbarin ne m’a jamais, jamais, demandé de trouver d’autres cas. On n’était pas du tout dans une démarche où lui s’occupait de Rome et moi de la justice. » Philippe Barbarin réaffirme, imperturbable : « Je lui ai dit : “On va en trouver d’autres.” » Il insiste : « J’ai fait tout ce que j’ai pu de l’endroit où j’étais. »

« Agiriez-vous différemment aujourd’hui ? lui demande le président de la cour.

– Evidemment.

– Vous avez donc changé ?

– L’Eglise a changé. La société également. »

Le réquisitoire de l’avocat général Joël Sollier est attendu ce vendredi matin. Comme en première instance, le parquet va requérir la relaxe de Philippe Barbarin.

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29 novembre 2019

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29 novembre 2019

« Mort cérébrale de l’OTAN » : Macron assume, Stoltenberg recherche l’unité

Par Nathalie Guibert

Le secrétaire général de l’Alliance atlantique explique au « Monde » que le dialogue avec la Russie doit se faire « d’une seule voix » parmi les alliés.

Ils ont passé plus d’une heure ensemble à l’Elysée, et la conversation fut nourrie. A-t-elle permis de mieux se comprendre ? Sûrement, mais pas sur tous les sujets. Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, était à Paris jeudi 28 novembre pour rencontrer Emmanuel Macron, en vue du mini-sommet de Londres des 3 et 4 décembre. Une première explication depuis les propos présidentiels sur la « mort cérébrale » de l’Alliance, qui ont surpris et provoqué de vives réactions dans les capitales européennes.

Le président français assume tous ses mots, comme il l’a dit à l’issue de la rencontre. L’alerte a été donnée, juge-t-il, « et je me félicite que chacun, maintenant, considère que la priorité est plutôt de réfléchir à nos objectifs stratégiques ». Reste à trouver une méthode, peut-être le groupe de travail de haut niveau suggéré par l’Allemagne sous la houlette du secrétariat général. « On agit dans l’OTAN sur la base d’analyses politiques, on fait ça tous les jours », a tempéré le secrétaire général dans un entretien accordé au Monde. « Nous y avons réussi, puisque depuis l’annexion illégale de la Crimée en 2014, nous sommes arrivés au plus important renforcement de l’OTAN depuis des décennies. »

Ce qui a été jugé comme une provocation inutile a quand même eu un effet positif, admet-on officieusement au secrétariat général. « Le président français a ouvert une conversation stratégique, et elle va commencer à Londres ». Depuis 2014, les dossiers sécuritaires ont été traités, mais les uns après les autres – commandement militaire, cyber, menaces hybrides, défense de l’espace, etc. « Les alliés sont d’accord pour continuer de moderniser l’Alliance atlantique. Comment le faire, nous allons poursuivre la discussion », affirme M.  Stoltenberg.

« Attachement à la sécurité collective »

Les alliés de l’OTAN « peuvent compter sur la France », a rassuré Emmanuel Macron. Mais que faire avec la Turquie ? Quel est l’ennemi commun ? Selon lui, la priorité de l’OTAN est « le terrorisme ». Et là, dit-il, « proclamer son attachement à la sécurité collective ne suffit pas. Une véritable alliance, ce sont des actes, pas des mots ». L’hôte de l’Elysée réclame, à Londres, une discussion sur l’engagement au Sahel et au Levant. Ce à quoi les alliés, notamment des Allemands très fâchés contre Paris, répondent en substance : « La France dit être seule tout en considérant le Sahel comme sa chasse gardée et elle n’a jamais fait de proposition pour une implication de l’OTAN ».

Le secrétaire général confirme être venu pour composer avec ces nuances. « Mon rôle est d’être sûr qu’on trouve des compromis et qu’on soit unis. Il y a toujours eu des différences, ce fut le cas en 1956 avec Suez » et les tensions ne viennent pas toujours de la France, a-t-il assuré au Monde. « Je ne donne pas de conseils, je discute et je consulte les décideurs pour agir. »

Mais sur la Russie, qui n’est pas l’ennemi selon Paris, le « dialogue lucide, robuste et exigeant » présenté jeudi par Emmanuel Macron continue de susciter des incompréhensions. Le secrétaire général et le président français se sont adressé des « Nous ne sommes pas naïfs » réciproques.

« Mon message principal a été de dire que nous devons nous en tenir à la double approche stratégique, que tous les alliés ont approuvée, vis-à-vis de la Russie : une dissuasion forte et un dialogue, nous précise Jens Stoltenberg. C’est seulement en parlant d’une seule voix que nous pourrons convaincre la Russie d’engager dans un contrôle crédible et sérieux des armements. »

« Les missiles russes sont là et peuvent atteindre Paris »

Certains craignent que Paris fasse des concessions à Moscou. Notamment celle d’engager des discussions sur la « nouvelle génération d’accord pour remplacer le traité sur les forces nucléaires intermédiaires » (FNI), terrain sur lequel Emmanuel Macron cherche des avancées « avec les Européens ».

Le FNI, traité bilatéral russo-américain de la guerre froide sur l’élimination des missiles intermédiaires terrestres en Europe, est devenu caduc en août quand les Etats-Unis s’en sont retirés, avec l’accord de leurs vingt-huit alliés convaincus que les SSC-8 russes le violaient. Moscou propose à présent un « moratoire » sur ces armes. « Nous n’avons pas accepté l’offre de moratoire, a précisé le président français en conférence de presse. Mais nous avons considéré que, comme base de discussion, il ne fallait pas la chasser d’un revers de main. Constater la fin d’un traité sans rien d’autre ? Soyons sérieux ! »

Au Monde, M. Stoltenberg a précisé : « Les missiles de la Russie sont là, en violation du FNI, et peuvent atteindre Paris. Il ne peut y avoir de moratoire. » L’organisation atlantique estime que le dialogue doit avoir lieu dans le cadre du conseil OTAN-Russie.

« L’OTAN est la seule plate-forme dans laquelle on a pu discuter de ces sujets stratégiques avec les Etats-Unis, ajoute le secrétaire général. Nous travaillons ensemble à la façon de répondre à la fin du FNI. Nous avons déjà décidé de ne pas réagir en miroir de la Russie, en ne déployant pas de nouveaux missiles nucléaires terrestres en Europe. Cela montre que l’OTAN a aussi des résultats en termes de consultations politiques. »

29 novembre 2019

Pauline Moulettes

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29 novembre 2019

La maire de Lille, Martine Aubry, est candidate aux municipales de 2020

Par Laurie Moniez, Lille, correspondance

A 69 ans, l’édile a décidé de briguer un quatrième mandat. Assurant avoir « beaucoup mûri » sa décision, l’ancienne ministre tente pour cela de « verdir » son image.

C’est la fin d’un faux suspens. Dans une interview au quotidien régional La Voix du Nord, la maire socialiste de Lille, Martine Aubry, a annoncé, jeudi 28 novembre, sa candidature aux municipales de mars 2020.

A 69 ans, l’ancienne ministre a décidé de briguer un quatrième mandat pour, dit-elle, faire face à « des défis très lourds : le défi écologique, bien sûr, mais aussi le défi social. Sans justice sociale, il ne peut pas y avoir de transition écologique ».

Elle met aussi fin aux rumeurs annonçant qu’elle pourrait passer le relais en 2022 si elle est réélue en précisant : « Je pars pour un mandat complet. » Elle annonce toutefois qu’elle ne sera pas candidate à la présidence de la Métropole européenne de Lille.

Dès le mois d’août 2018, la fille de Jacques Delors était revenue sur sa décision de ne pas se représenter : « J’avais dit qu’après trois mandats, normalement, il faut passer la main. Mais personne ne savait alors qu’Emmanuel Macron serait élu. Et, moi, je n’ai pas envie qu’on laisse Lille devenir ce que la France devient aujourd’hui, c’est-à-dire [un pays où] seuls les plus riches sont aidés. »

A la tête de la municipalité lilloise depuis 2001, Martine Aubry avait prévu d’annoncer officiellement sa décision fin septembre, avant de décider de la « reporter un petit peu, de quelques semaines, comme d’ailleurs la plupart des maires des grandes villes », avait-elle précisé lors d’un point presse, le 16 septembre.

Faute de successeur à Lille

Si Pierre Mauroy avait préparé sa succession en la faisant venir dans le Nord dès 1995, il n’y avait que peu de doute sur une nouvelle candidature de Martine Aubry pour 2020, faute de successeur à Lille.

Après le parachutage raté de l’ancien ministre François Lamy, défait en 2017 dans la première circonscription lilloise remportée par l’« insoumis » Adrien Quatennens, la maire a vu son cercle de fidèles se restreindre. Son ami et bras droit, le premier adjoint Pierre de Saintignon, est mort en mars. L’ancienne députée du Nord Audrey Linkenheld, conseillère municipale PS, n’a pas souhaité reprendre le flambeau qu’elle lui tendait.

Quant au sénateur socialiste du Nord Patrick Kanner, il a tenté, en vain, de se poser en recours. En froid avec la « dame des trente-cinq heures » depuis sa nomination, en 2014, dans le gouvernement de Manuel Valls, l’ancien ministre de la jeunesse et des sports a refusé d’entrer en dissidence. Il a repris contact avec elle en septembre, sans toutefois la convaincre de lui céder la place. A 62 ans, M. Kanner avait pourtant préparé le terrain en créant son association, Ce sera Lille, en décembre 2018. Désormais, sa seule ambition est que « le Beffroi reste à gauche, avec le PS en leadership ».

Les stigmates des querelles internes

L’ancienne grande famille socialiste du Nord a conservé des stigmates des querelles internes vécues entre frondeurs et hollandais lors du mandat de François Hollande. Jeudi soir, Martine Aubry devait annoncer officiellement sa candidature aux militants. Beaucoup expliquent en coulisses qu’elle est la seule capable de garder la ville à gauche.

La campagne des municipales s’annonce, en tous les cas, difficile pour l’ancienne numéro deux du gouvernement Jospin. Quelques anciennes figures locales socialistes ont en effet rejoint les rangs de La République en marche (LRM), comme l’ancien député européen et ex-premier secrétaire de la fédération PS du Nord, Gilles Pargneaux, ou le sénateur du Nord Frédéric Marchand. Et c’est l’ancienne directrice de cabinet de Martine Aubry, Violette Spillebout, qui a été investie par le mouvement d’Emmanuel Macron pour mener la bataille face à l’ancienne première secrétaire du PS.

Mme Spillebout, comme les deux autres candidats de la droite – le sénateur (Les Républicains) du Nord Marc-Philippe Daubresse et le conseiller municipal Thierry Pauchet –, ou le candidat de La France insoumise Julien Poix ne cessent de pointer du doigt le bilan de Martine Aubry en matière d’environnement.

Qualifiée par ses opposants de « maire bétonneuse » pour avoir mis en tête de ses priorités le droit au logement pour tous, l’édile tente de « verdir » son image depuis un an. La ville de Lille a notamment été finaliste pour le titre de Capitale verte européenne 2021 en juin.

Pourra-t-elle s’appuyer sur une alliance rouges-verts pour faire oublier sa conversion tardive à l’écologie ? Pas au premier tour, puisque le duo d’élus lillois Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Stéphane Baly et Stéphanie Bocquet, forts du résultat de leur parti aux européennes de mai à Lille (21,7 %), espère arriver en tête pour ensuite négocier dans l’entre-deux-tours. Avec Paris et Nantes, Lille reste l’une des dernières grandes villes françaises socialistes.

29 novembre 2019

Virginie Efira en couverture de VOGUE Paris dès le 4 décembre...

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