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Jours tranquilles à Paris

13 novembre 2019

Bourse du Commerce en travaux... bientôt Fondation Pinault

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13 novembre 2019

L’embarras du cinéma face à Roman Polanski

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Par Clarisse Fabre

Le cinéaste voit la sortie de son film « J’accuse » fortement perturbée par une nouvelle accusation de viol.

Le cinéma français retient son souffle depuis que la photographe Valentine Monnier a accusé, dans le Parisien du 8 novembre, Roman Polanski de l’avoir violée et rouée de coups en 1975. Par l’entremise de son avocat, le réalisateur nie ces accusations portées quelques jours avant la sortie en salle de son film J’accuse, sur l’affaire Dreyfus, déjà récompensé du Grand Prix du jury à la Mostra de Venise. Les faits sont par ailleurs prescrits, remontant à quarante-quatre ans.

Cette nouvelle affaire est intervenue juste après les révélations de l’actrice Adèle Haenel dans Mediapart, expliquant avoir subi un « harcèlement sexuel » et des « attouchements » de la part du réalisateur Christophe Ruggia, lorsqu’elle était adolescente. Deux déflagrations en une semaine pour le cinéma français qui se retrouve une nouvelle fois dans l’embarras : le contraste est saisissant entre les nombreux messages de soutien reçus par Adèle Haenel aussitôt après sa prise de parole, et le mutisme qui semble avoir frappé la profession au lendemain des déclarations de Valentine Monnier. Adèle Haenel est l’une des seules personnalités à avoir exprimé son « soutien total » à la photographe, dans Le Monde.

Prise de court, l’équipe du film J’accuse, produit par Alain Goldman, a mis la promotion en veille : l’acteur principal, Jean Dujardin, a renoncé à se rendre au « 20 heures » de TF1, dimanche 10 novembre ; France Inter, radio partenaire du film, a annoncé que l’actrice Emmanuelle Seigner et femme du cinéaste, qui joue aussi dans le film, s’était « décommandée » de l’émission « Boomerang » prévue mardi, tandis que le programme « Popopop » d’Antoine de Caunes enregistré avec Louis Garrel (qui incarne le capitaine Dreyfus), n’a pas été diffusé lundi – l’enregistrement ayant eu lieu avant que n’éclate la nouvelle « affaire » vendredi dernier. Même chose pour l’émission de France 5 « C à vous » qui n’a pas diffusé lundi une séquence, elle aussi enregistrée quelques jours plus tôt avec l’acteur.

PRISE DE COURT, L’ÉQUIPE DU FILM PRODUIT PAR ALAIN GOLDMAN A MIS LA PROMOTION EN VEILLE

La prise de parole de Valentine Monnier constitue la cinquième accusation de viol contre le réalisateur depuis 1977 – lorsque Samantha Geimer, alors âgée de 13 ans, avait accusé le cinéaste de l’avoir fait boire, puis droguée, avant de la forcer à une relation sexuelle. Après de multiples rebondissements, cette première affaire continue de poursuivre le réalisateur, tandis que trois autres femmes ont elles aussi dénoncé, entre 2010 et 2017, des faits similaires.

A chaque nouvelle affaire, qu’elle concerne Polanski ou d’autres cinéastes accusés de harcèlement, d’agression sexuelle ou de viol (Luc Besson, Jean-Claude Brisseau, Woody Allen, etc.), le cinéma français patine, certains plaidant pour tourner la page, d’autres estimant inenvisageable de continuer à célébrer l’artiste. Mais quelque chose de nouveau semble avoir rompu ce cycle répétitif : le fait qu’une actrice reconnue comme Adèle Haenel ait décidé de briser le silence est susceptible de changer la donne. Faut-il regretter que la célébrité agisse ainsi comme un « label » accordant de l’importance à la parole ? C’est en tout cas consciente de sa force que l’actrice française a décidé de s’exprimer, au nom de toutes les femmes dont le témoignage n’a pas été entendu comme il aurait dû l’être.

« Un tournant culturel »

A la mi-octobre, la même Adèle Haenel, invitée au festival de la Roche-sur-Yon, et découvrant que le film de Roman Polanski y était programmé en clôture, avait demandé, et obtenu, du directeur de la manifestation, Paolo Moretti, l’organisation d’une rencontre avant la projection du film. Celle-ci a eu lieu avec la chercheuse et enseignante Iris Brey, qui étudie les représentations de genre dans les séries et au cinéma (l’universitaire est aussi engagée aux côtés de Mediapart pour dénoncer les violences sexuelles).

« Que faire lorsque l’on est programmateur et confronté à une œuvre puissante dont l’auteur est accusé de viols ou d’agressions sexuelles ? », a demandé en substance Paolo Moretti, en ouvrant la discussion. « Etre programmateur, c’est proposer une vision du monde », a répondu Iris Brey, qui estime urgent que le milieu du cinéma aborde enfin les questions qui font mal – l’entretien est disponible sur le site du festival.

MARTIN BIDOU, PROGRAMMATEUR AU LOUXOR : « EST-CE QUE DIFFUSER LE FILM EST RÉPRÉHENSIBLE MORALEMENT ? »

Interrogée par Le Monde, Iris Brey évoque « un tournant culturel » : « Le fait qu’Adèle Haenel parle et qu’on l’écoute, donne envie à d’autres femmes de s’exprimer. C’est d’ailleurs ce qu’a dit Valentine Monnier. Ce sont nos récits manquants », résume Iris Brey. Elle ajoute : « L’histoire du cinéma s’est construite en partie sur l’érotisation de la violence faite aux femmes. C’est ainsi que certains ont construit leur désir et leur plaisir. Remettre en question ce qui nous excite, c’est compliqué. De même, cela demande du courage de regarder l’autre facette d’une personnalité adulée, qu’il s’agisse de Polanski ou de Michael Jackson [accusé d’abus sexuels sur mineurs au début des années 1990]. Mais nous devons passer par là », poursuit-elle.

Paolo Moretti a jugé cette rencontre bénéfique : « Je remercie Adèle Haenel pour ce débat qui était nécessaire. Il fallait trouver la forme et ce n’est pas une censure. Ce film, J’accuse, suscite des discussions mais c’est aussi l’une des œuvres les plus attendues en France. Il s’agit d’accompagner les différentes sensibilités qui s’expriment. »

La carrière du film va-t-elle pâtir de ces nouvelles accusations ? Comment se préparent les exploitants à la veille de la sortie en salle ? Martin Bidou, qui programme J’accuse au Louxor, à Paris (10e arrondissement), n’est sans doute pas le seul à être embarrassé : « Le contrat avec Gaumont a été passé il y a un mois. En tant que diffuseur, je me suis concentré sur l’œuvre. Est-ce que diffuser le film est répréhensible moralement ? Le programmer ne signifie pas que l’on n’est pas vigilant sur les violences sexuelles. Par ailleurs, J’accuse est une œuvre positive du point de vue de l’histoire du pays. Nous envisageons d’ailleurs des séances scolaires. Mais il faut le reconnaître, on marche sur des œufs. »

Des féministes bloquent à Paris une avant-première du film Quelques dizaines de féministes ont bloqué mardi soir une avant-première parisienne du film de Roman Polanski pour dénoncer le réalisateur visé par une nouvelle affaire de viol. Scandant « Polanski violeur, cinémas coupables », une quarantaine de militantes ont bloqué l’entrée du cinéma Le Champo dans le Quartier latin, portant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « dans ce cinéma on glorifie les violeurs » ou encore « Polanski persécute les femmes ». Les militantes ont également écrit sur une pancarte le nom des accusatrices de Polanski, dont Valentine Monnier, qui dit avoir été « rouée de coups » et violée par le réalisateur franco-polonais en 1975 à l’âge de 18 ans, alors qu’elle était venue skier en Suisse avec une amie. Une accusation réfutée par l’avocat du cinéaste. Des avant-premières se déroulaient à Paris mardi, dont la principale était organisée au cinéma UGC Normandie, sur les Champs-Elysées, en présence d’acteurs comme Vincent Perez, Michaël Youn et Pierre Richard, des journalistes Anne Sinclair et Guillaume Durand et des personnalités comme Jean Veil, fils de Simone Veil.

13 novembre 2019

Sac à dos original...

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Photos : Jacques Snap

13 novembre 2019

INVITATION AU VERNISSAGE Isabelle Huppert par Carole Bellaïche

INVITATION AU VERNISSAGE

Isabelle Huppert par Carole Bellaïche

Le jeudi 14 novembre 2019 à partir de 18h30 en présence de l'artiste

Photographies largement inédites présentées à l'occasion de la sortie de son livre

Isabelle Huppert par Carole Bellaïche aux éditions de La Martinière

Elles se sont rencontrées en 1994 aux Cahiers du Cinéma et ne se sont jamais quittées. Carole Bellaïche a photographiée Isabelle Huppert des centaines de fois depuis lors. Elles partagent depuis toujours cette relation singulière qui leur est apparue comme évidente lors de leur première rencontre. L'actrice est devenue au fil des années le "personnage principal" de la carrière de Carole Bellaïche, un leitmotiv dans son travail de photographe.

Les portraits de Carole Bellaïche racontent l'instant présent, loin des codes du portrait traditionnel. La photographe capture des instants de vérité, résultant de la relation privilégiée qu'elle entretient avec son modèle.

14 rue des Jardins Saint-Paul - Paris 4e

Ouverture du mardi au vendredi de 14h à 19h,

le samedi de 12h à 19h et sur rendez-vous.

www.galeriexii.com

13 novembre 2019

Laetitia Casta - publicité

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12 novembre 2019

Paris : des féministes bloquent un cinéma avant la diffusion de «J’accuse» de Polanski L’entrée du Champo a été bloquée ce mardi

champo

Paris : des féministes bloquent un cinéma avant la diffusion de «J’accuse» de Polanski

L’entrée du Champo a été bloquée ce mardi soir par plusieurs militantes féministes qui dénonçaient la diffusion du film de Roman Polanski.

Elles se sont rassemblées ce mardi derrière une même barrière : « Polanski violeur, cinémas coupables, public complice ». Plusieurs militantes féministes ont empêché l'accès au cinéma Le Champo (Ve) qui diffusait l'avant-première du film de Roman Polanski, « J'accuse ».

Depuis la publication vendredi dans Le Parisien du témoignage de la photographe Valentine Monnier, qui dit avoir été « rouée de coups » et violée par Roman Polanski en 1975 à l'âge de 18 ans, le milieu du cinéma est resté plutôt silencieux.

Si la promotion du film est gelée, pas les diffusions au cinéma. Plusieurs avant-premières étaient en effet programmées ce mardi soir, notamment sur les Champs-Elysées, mais aussi au Champo, donc, qui devait projeter le film en présence de l'un des principaux acteurs, Louis Garrel et de deux universitaires qui devaient animer un débat.

La projection annulée

Mais les militantes ont empêché l'entrée à l'établissement, aux cris de « Polanski violeur, cinémas coupables, public complice », craquant également quelques fumigènes. Vers 21h20, les lumières du cinéma se seraient éteintes, et la projection annulée, selon notre journaliste présente sur place.

Parmi les quelque 200 spectateurs venus voir le film, certains s'agaçaient : « c'est mon droit de citoyen de choisir les films que je vais voir ! », s'exclamait un sexagénaire barbu.

12 novembre 2019

A Lille, des étudiants envahissent la fac et contraignent Hollande à annuler sa conférence

Par Anne-Charlotte Dusseaulx

L'ancien président François Hollande n'a pas pu prendre part à une conférence prévue à la faculté de Lille. Des étudiants protestant contre la précarité étudiante ont envahi l'amphithéâtre.

hollande

L'affiche de la conférence que devait tenir François Hollande à Lille.

L'échange était prévu depuis plusieurs semaines. Mardi, dans l'amphithéâtre F de la faculté de Lille, François Hollande devait débattre autour du thème "Répondre à la crise démocratique", du nom de son dernier livre. Mais la conférence a été annulée, à la dernière minute. Environ 300 manifestants, présents pour dénoncer la précarité étudiante après l'immolation par le feu d'un étudiant à Lyon la semaine dernière, sont entrés dans la salle aux cris de "Hollande assassin!" Selon La Voix du Nord, François Hollande qui n'était pas encore présent dans l'amphithéâtre à ce moment-là a été placé en "zone de sécurité".

Des livres de l'ex-Président ont été déchirés, les pages jonchant le sol.

François Hollande "comprend" l'émotion des étudiants, mais regrette la violence

"Il y a une émotion légitime après le geste désespéré d'un étudiant à Lyon, et le Président la comprend, explique au JDD l'entourage de François Hollande. Il est compréhensible que certains étudiants se soient saisis de la venue d’un ancien Président pour médiatiser leurs revendications."

Mais, toujours selon son entourage, François Hollande "regrette que cette émotion se soit transformée en violence de la part d’une centaine d'individus ne laissant aucune place au dialogue et empêchant plus de 1.200 étudiants d'échanger avec lui sur la démocratie".

"François Hollande a toujours placé la jeunesse et la justice sociale au cœur de son quinquennat", ajoute-t-on encore, rappelant les mesures prises en ce sens (construction de logements étudiants, augmentation de l'indemnité minimale de stage, création de l'aide à la recherche du premier emploi, nouveaux échelons de bourse). L'ancien chef de l'Etat reviendra sur place pour défendre ses propositions institutionnelles et parler de la démocratie.

L'action d'un "petit collectif"

L'enseignant organisateur du rendez-vous, Jean-Philippe Derosier, a dénoncé l'attitude d'un "petit collectif", avec le hashtag #Inadmissible :

Aujourd’hui, on a tenté d’organiser un débat démocratique à la faculté de droit de l’Université de Lille, avec plus de 1000 étudiants.

Un petit collectif, se disant prôner la liberté d’expression, les a privés d’un tel débat, en saccageant un amphi et des ouvrages.

Sur Twitter, le socialiste Julien Dray a réagi à l'accueil réservé à l'ancien chef d'Etat, évoquant un "climat de violence intolérable".

Quand on renverse des livres quand on empêche une conference dans une universitaire .. on a beau se dire anticapitaliste ., on est d’abord stupide et totalitaire .Et ce climat de violence devient intolérable . 

Le syndicat étudiant Solidaires, auquel appartenait l'étudiant de Lyon, avait lancé un appel à se rassembler devant les Crous dans toute la France pour dénoncer la précarité et "lutter contre des conditions de vie déplorables".

L'étudiant de 22 ans, qui a tenté de se suicider à Lyon, avait publié un long message sur Facebook, où il évoquait nommément l'ancien Président : "J'accuse Macron, Hollande, Sarkozy et l'UE de m'avoir tué, en créant des incertitudes sur l'avenir de tous-tes, j'accuse aussi Le Pen et les éditorialistes d'avoir créé des peurs plus que secondaires." Brûlé à 90%, le jeune homme est soigné au centre des brûlés de l'hôpital Edouard-Herriot à Lyon.

12 novembre 2019

Caroline Vreeland

caroline33

12 novembre 2019

Récit - La première édition du Festival de Cannes voit enfin le jour, à Orléans, 80 ans après son annulation

Par Jacques Mandelbaum

Le festival de cinéma aurait dû débuter en 1939 et non en 1946, à l’initiative de Jean Zay. La guerre en a décidé autrement, et Jean Zay a été assassiné. L’événement Cannes 39, du 12 au 17 novembre à Orléans, le réhabilite.

Le Festival de Cannes n’est pas sorti tout armé de l’année 1946. Sa genèse, au risque d’écorner l’histoire heureuse de son avènement, date moins de l’après que de l’avant-guerre. A cet égard, deux récits rivalisent, sans nécessairement se contredire. Le premier, lapidaire et hégélien, va dans le sens de l’histoire. Philippe Erlanger, directeur de l’Association française d’action artistique à partir de 1938, puis premier délégué général du Festival de Cannes de 1946 à 1951, en est le talentueux mémorialiste.

Présent en 1938 au jury de la Mostra de Venise, alors discréditée par ses obédiences totalitaires, il revient de la lagune porteur de l’idée cannoise, destinée à allumer le contre-feu des puissances démocratiques. Prévue du 1er au 20 septembre 1939, la première édition du Festival de Cannes est annulée en raison de la guerre. On retrouve Erlanger à la manœuvre et aux manettes pour l’ouverture officielle en 1946 du festival, dont l’histoire commence dès lors de s’écrire.

L’autre approche est plus complexe, plus accidentée, plus douloureuse, moins tendue vers la légende dorée inscrite en 1946 au fronton de l’institution. Cette histoire, qui émerge du travail lent des historiens, un événement la raconte aujourd’hui, Cannes 39. Sous la houlette de l’historien Antoine de Baecque, la manifestation, organisée à Orléans, du 12 au 17 novembre, permet à la première édition du festival, piétinée voici quatre-vingts ans par Adolf Hitler, de voir enfin le jour. Thierry Frémaux, actuel délégué général du Festival de Cannes, déplore la tenue paradoxale de Cannes 39 dans la préfecture du Loiret : « C’est une formidable initiative, nous aurions été heureux de l’accueillir à Cannes, mais nous n’avons pas été sollicités. »

Les trente films sélectionnés en 1939 projetés

Présentés au public et à un jury dirigé par le réalisateur israélien Amos Gitaï, les trente films que comptait cette compétition mort-née y seront projetés, parmi lesquels ceux de la délégation américaine surpassent la concurrence. Avec entre autres, et pour mémoire : Seuls les anges ont des ailes, de Howard Hawks, Mr. Smith au Sénat, de Frank Capra, Le Magicien d’Oz, de Victor Fleming, ou Elle et lui, de Leo McCarey. Alfred Hitchcock y emmène quant à lui son dernier film sous pavillon britannique avant son installation aux Etats-Unis, La Taverne de la Jamaïque.

Côté russe, on note une comédie musicale kolkhozienne, Les Tractoristes, d’Ivan Pyriev, remplaçant à la dernière minute, sur ordre de Staline et de manière pas nécessairement avantageuse, Alexandre Nevski, de Sergueï Eisenstein. Un film tchécoslovaque, La Grande solution, de Hugo Haas, y représente un pays qui n’existe plus depuis mars 1939. Quant aux films français – ici représentés par des œuvres mineures telles que La Charrette fantôme, de Julien Duvivier, ou L’Homme du Niger, de Jacques de Baroncelli – les meilleurs d’entre eux (La Bête humaine, de Jean Renoir, La Fin du jour, de Julien Duvivier, Le Jour se lève, de Marcel Carné) ont rejoint la Mostra, par une prudence corporative et un aveuglement moral qui annoncent la politique nationale à venir.

Si l’événement est organisé à Orléans, c’est en hommage à l’un des principaux architectes du festival dont ce fut, à tous les sens du terme, la ville d’élection, Jean Zay. Il permet ainsi de rétablir la place éminente, mais longtemps occultée, qu’occupe cet homme, ministre de l’éducation nationale et de la culture du Front populaire, entré en 2015 au Panthéon, dans la création de la manifestation. Ainsi que le souligne Antoine de Baecque : « Alors qu’on retrouve mis à l’honneur, en 1946, les principaux collaborateurs de Zay, Philippe Erlanger et Georges Huisman, accompagnés d’Auguste Lumière qui devient la figure tutélaire du festival, Zay lui-même, du moins son rôle et sa mémoire, sont comme effacés de cette première édition, et le seront durablement par la suite ».

Justice rendue à Jean Zay

Version de l’histoire que, fermes sur leurs appuis, contestent de concert Gilles Jacob, l’ancien délégué général de la manifestation, et Thierry Frémaux, qui ne manquent pas de rappeler l’hommage rendu à Jean Zay en 2000, ainsi que la tenue en 2002 d’une mini-rétrospective de l’édition fantôme de 1939.

DÉGUISÉS EN RÉSISTANTS, CES HOMMES MITRAILLENT ZAY, LE DÉNUDENT, ET L’ENTERRENT DANS UN RAVIN QU’ILS FONT SAUTER À L’EXPLOSIF.

Toujours est-il que l’absence de Jean Zay lors de la renaissance du festival en 1946 résulte en premier lieu de son assassinat. Radical de gauche, d’origine juive et protestante, libre penseur et, au-delà, antifasciste et anti-munichois de la première heure, rare politique à refuser l’armistice proposé par le maréchal Pétain, il devient l’une des cibles favorites de l’extrême droite durant les années 1930 et l’une des premières victimes expiatoires du régime de Vichy. Accusé de « désertion » par des juges aux ordres, condamné à être déporté sur l’île du diable, en Guyane, à l’instar d’Alfred Dreyfus, finalement incarcéré dans la maison d’arrêt de Riom, il en sera tiré le 20 juin 1944 pour être assassiné, sur ordre du secrétaire d’Etat à l’intérieur Joseph Darnand, par un commando de miliciens. Déguisés en résistants, ces hommes mitraillent Zay, le dénudent, et l’enterrent dans un ravin qu’ils font sauter à l’explosif.

Arrêté en 1948 alors qu’il s’apprête à fuir en Amérique du Sud depuis l’Italie où il s’était réfugié, l’un des membres de ce commando, Charles Develle, permet enfin d’identifier le corps. Condamné en 1953 aux travaux forcés à perpétuité, l’homme sortira de prison au bout de deux ans. A l’heure où s’ouvre le Festival de Cannes en 1946, personne ne sait au juste ce que Jean Zay est devenu. Le silence se referme donc d’emblée sur lui, et ce n’est pas la révélation, deux ans plus tard, de l’assassinat commandité par l’Etat français acquis au nazisme, qui incitera à combler ce trou de mémoire.

Cependant, comme le rappelle l’historien Olivier Loubes, auteur de Jean Zay, l’inconnu de la République (Armand Colin, 2012) et de Cannes 1939, le festival qui n’a pas eu lieu (Armand Colin, 2016) : « Sans doute Philippe Erlanger signe-t-il de son nom l’acte de naissance du Festival de Cannes. Sans doute aussi, la création du festival ressemble-t-elle à un film choral de Robert Altman. Il n’en reste pas moins que l’homme majeur de cette histoire, pour moi, est Jean Zay. Il s’est battu pour l’imposer contre les Munichois du gouvernement, le ministre des affaires étrangères Georges Bonnet en tête. Et lorsque le président du Conseil Edouard Daladier, très tardivement, donne son accord au printemps 1939, Zay mettra tout en œuvre pour le réaliser en temps et en heure. »

Cannes 39. Orléans. Du 12 au 17 novembre. festivalcannes1939.com

12 novembre 2019

Extrait d'un shooting . Photo : Jacques Snap

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