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Jours tranquilles à Paris

30 avril 2020

Le covid-19 aura eu raison des Rencontres d’Arles

rencontres arles

Nombreux ont été les festivals et autres manifestations à annuler voire à reporter leurs éditions. Les Rencontres d’Arles avaient fait savoir sur leurs réseaux sociaux qu’ils étudiaient actuellement la situation pour faire face à la crise sanitaire. Mais, la nouvelle vient de tomber, le festival annonce son annulation. 2020 devait être une édition de résistance, elle sera celui de la résilience.

Le 29 juin 2020 devait être inaugurée la 51ème édition de l’un des plus importants festivals de photographie au monde, les Rencontres d’Arles. Il s’agissait de la dernière programmation dirigée par Sam Stourdzé, qui rejoint la Villa Médicis, à Rome. Chaque été, et depuis plus d’un demi-siècle, Arles vibre au rythme de la photographie. Cette année s’annonce donc tristement exceptionnelle.

Depuis près de deux mois, les Rencontres d’Arles ont envisagé tous les scénarios pour tenter de s’adapter à une situation sans précédent et maintenir le festival dans le respect des mesures qui s’imposent.

Mais face à l’impossibilité de produire les expositions, d’équiper les lieux, face à l’interruption des échanges internationaux, et en tenant compte des nouvelles recommandations du gouvernement, nous devons renoncer à organiser l’édition 2020 des Rencontres d’Arles.

Jamais décision n’aura été aussi difficile à prendre.

Depuis 50 ans, les Rencontres d’Arles ont eu lieu chaque été.

Le conseil d’administration, qui s’est réuni ce jour, a donc entériné le plan d’annulation des Rencontres d’Arles 2020 afin de préserver son avenir.

Nous cherchons d’ores et déjà des alternatives aux lourdes conséquences de cette annulation. Par ailleurs, nous allons épauler au mieux les artistes et commissaires d’expositions en leur versant leurs droits d’expositions. Nous explorons toutes les solutions pour accompagner nos équipes qui se sont toujours engagées avec enthousiasme et détermination. Nous avons aussi une pensée pour les nombreux Arlésiens qui se mobilisent en contribuant à l’accueil du public du festival pendant tout l’été.

Face à cette situation inédite, les collectivités publiques (ville, département, région, État), depuis toujours engagées à nos côtés, ont réaffirmé leur soutien indéfectible au festival. Nous les remercions de ce geste fort qui permettra aux Rencontres d’Arles d’être au rendez-vous en 2021.

Le coeur lourd, mais plus que jamais combative, l’équipe des Rencontres d’Arles reste mobilisée au service de ce qui nous lie, la photographie.

https://www.rencontres-arles.com/

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30 avril 2020

Annie Burnell – All Is Reborn

30 avril 2020

Marisa Papen

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30 avril 2020

Libération du 30 avril 2020

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30 avril 2020

L'après confinement selon Boris Cyrulnik : "on aura le choix entre vivre mieux ou subir une dictature"

par France Inter publié le 27 avril 2020 à 18h41

Invité du "Téléphone Sonne", Boris Cyrulnik a donné sa vision sur l'après-confinement. Retrouvez ici les réponses du neuropsychiatre données au micro de Claire Servajean.

Boris Cyrulnik

Le neuropsychiatre Boris Cyrulnik © AFP / Ludovic Marin

Le Covid-19 laissera-t-il un traumatisme ?

Boris Cyrulnik : "Peut-être pas un traumatisme, mais un problème à résoudre.

On a cru pendant 70 ans que les épidémies appartenaient au passé. On découvre que cette épidémie a probablement été provoquée par l'hyper technologie : celle de l'élevage qui concentre les animaux, et accroît l'effet de serre, mais aussi celle du transport des aliments, de l'aviation (le virus ne se déplace pas, c'est nous qui le transportons).

On a oublié qu'on appartenait au monde vivant : on partage la planète avec les animaux. Si on enferme les animaux, si on fait de la surpopulation dans les élevages, on crée les conditions de fabrication de virus. Ensuite les avions et les autres moyens de transport font le reste. Bref, si on massacre le monde vivant, on partira avec lui.

C'est la leçon dont les scientifiques et les politiciens devront tenir compte. C'est une banalité, mais on l'avait oubliée.

On pensait qu'on était au-dessus des lois de la nature. Eh bien non, on n’est pas au-dessus, on est dans la nature. Et si on ne change pas l'an prochain, il y aura une autre épidémie de virus."

Quel est le risque après la catastrophe ?

BC : "Après les situations de catastrophes ou de chaos, le danger arrive souvent de quelqu'un qui dit : « J'ai la solution, votez pour moi » Et ce sont des dictateurs que les gens sont prêts à croire... Mais généralement, c'est une escroquerie politique.

La bonne solution serait d’attacher de l'importance à « l'être ensemble » et au groupe pour lequel on fait des efforts et on renonce à certaines choses. La solidarité est un précieux facteur de résilience, mais c’est aussi un sacré défi."

On entend beaucoup parler du monde d'après qui serait différent. Mais à vous écouter, il va falloir faire très attention à ce qu’il peut être.

BC : "C'est un enjeu énorme :

on aura le choix entre vivre mieux ou subir une dictature  - qu’elle soit politique, religieuse, financière ou liée à l'hyper-consommation.

L’après catastrophe peut être bénéfique. Au Moyen-Âge, des commerçants ont apporté le bacille de la peste. En deux ans, il a tué un Européen sur deux. Avant 1348, les aristocrates qui possédaient des terres vendaient ou achetaient des serfs.  Après l’épidémie, en raison de la pénurie de main d’œuvre, ils ont dû mieux traiter les paysans et le servage a disparu en deux ans.

Mais l’après catastrophe peut aussi avoir des effets maléfiques. Parce que l'Allemagne avait été humiliée en 1918 par le traité de Versailles, les Allemands ne pouvaient pas se reconstruire. Est arrivé un pseudo sauveur... Et en 1933, il a été élu, ce qui a provoqué une catastrophe mondiale.

Là, on aura le choix de vivre solidairement, d'une autre manière : en redonnant la parole à beaucoup de ceux que l’on redécouvre maintenant, les aides-soignantes, les infirmières, les facteurs, les éboueurs.

Si on ne le fait pas, il y aura des candidats dictateurs.

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30 avril 2020

Courrier International de cette semaine

courrier inter 225

30 avril 2020

Enquête - Les liaisons dangereuses entre l’OMS et la Chine ont marqué la crise du coronavirus

Par Paul Benkimoun, Marie Bourreau, Genève, correspondance, Frédéric Lemaître, Pékin, correspondant

Covid-19, la déflagration géopolitique 1/3. Dans une série d’enquêtes, « Le Monde » revient sur les failles provoquées au sein des structures multilatérales par la crise sanitaire. Aujourd’hui, l’Organisation mondiale de la santé, accusée d’avoir fait le jeu de Pékin.

En ce 31 décembre 2019, le bureau de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à Pékin, situé dans le quartier diplomatique, tourne au ralenti, comme les autres organisations internationales. Le directeur général du bureau, Gauden Galea, un médecin maltais spécialiste des maladies non transmissibles, est rentré en Europe.

La veille au soir, pourtant, le docteur Gao Fu, directeur du centre chinois de contrôle et de prévention des maladies, a découvert, en surfant sur Internet, qu’à Wuhan quelques médecins hospitaliers s’inquiètent de l’apparition d’un virus ressemblant diablement au SARS (syndrome respiratoire aigu sévère), celui qui, en 2003, avait traumatisé l’Asie.

Le docteur Gao Fu est également tombé sur une note de la commission de la santé de cette ville de la province du Hubei confirmant le phénomène. Dès le 31 au matin, il a envoyé sur place une équipe d’experts. Dans la journée, la Chine informera l’OMS de l’apparition à Wuhan d’un « cluster » – un groupe de cas – de pneumonie atypique.

L’OMS ne le sait pas encore, mais elle s’apprête à affronter la plus grave crise depuis sa fondation, en 1948. Une crise à la fois sanitaire, économique et géopolitique, dont les enjeux dépassent le cadre de cette institution des Nations unies, qui fédère 194 Etats membres.

Ostracisme

Pour autant, est-ce vraiment la Chine qui, la première, a alerté l’OMS ? En réalité, rien n’est moins sûr. Car, le 30 décembre, dans la soirée, un autre médecin s’est alarmé de la situation à Wuhan : le docteur Luo Yijun, vice-directeur du centre de contrôle des maladies de Taïwan. Le 31, ce lève-tôt prévient ses services à 5 heures du matin. Dès la mi-journée, Taïwan demande des explications à la Chine et informe l’OMS.

L’organisation internationale aurait-elle été avertie de la crise par Taïwan ? Son refus obstiné d’indiquer les heures auxquelles les deux mails – le chinois, le taïwanais – ont été reçus le laisse supposer. C’est que la question est sensible du point de vue politique. Sous la pression de la Chine, qui considère Taïwan comme une de ses provinces et non comme un Etat, cette île de 23 millions d’habitants n’est plus autorisée, depuis 2016, à assister aux assemblées générales de l’OMS, même en tant qu’observateur. Les autorités locales ne cessent de dénoncer cet ostracisme. Selon elles, les Taïwanais sont ainsi privés d’informations sanitaires importantes.

DÈS LE 31 DÉCEMBRE, LES AUTORITÉS TAÏWANAISES DÉCIDENT DE PRENDRE LA TEMPÉRATURE DES PASSAGERS EN PROVENANCE DE WUHAN

Mais ce 31 décembre, ce sont eux qui se sont tournés vers l’OMS dans un mail formulé en termes clairs : « Des informations indiquent qu’au moins sept cas de pneumonie atypique ont été signalés à Wuhan, Chine. Les autorités de la santé ont répondu aux médias que ces cas n’étaient pas supposés relever du SRAS. Toutefois, les échantillons sont encore en cours d’examen et les cas ont été isolés pour traitement. J’apprécierais beaucoup si vous aviez des informations pertinentes à nous communiquer. Je vous remercie par avance de l’attention que vous porterez à ce sujet. »

D’après l’OMS, critiquée pour sa proximité excessive avec Pékin, ce mail ne prouve rien. Pour le ministre de la santé et du bien-être de Taïwan, Chen Shih-chung, le passage sur l’isolement des malades est au contraire explicite : il montre bien que, dès le 31 décembre, Taïwan suggère que le virus se transmet entre humains. « N’importe quel expert en santé publique ou médecin professionnel saurait quelles circonstances peuvent conduire à isoler des patients pour traitement », expliquera par la suite Chen Shih-chung.

De fait, ce même 31 décembre, les autorités taïwanaises décident de prendre la température des passagers en provenance de Wuhan. Grâce à ce système très précoce de repérage des malades et à leur strict isolement, Taïwan, malgré sa proximité géographique avec la Chine, connaîtra un nombre de décès remarquablement faible : six. Un succès que l’OMS occultera durant toute la crise.

Beaucoup de temps de perdu

En cette veille de Jour de l’an, on n’en est pas encore là. Les autorités chinoises se veulent rassurantes. Tout est sous contrôle. Se fiant à leurs déclarations, l’OMS semble, elle aussi, sereine. Le 14 janvier, elle approuve les conclusions de l’enquête préliminaire des Chinois, selon laquelle il n’y a pas de preuves évidentes de transmissions interhumaines.

D’après cette enquête, il peut certes y en avoir mais elles sont « limitées » et « principalement entre les membres d’une même famille ». Personne n’est troublé par le fait que, dès le 1er janvier, un des lanceurs d’alerte, Ai Fen, la directrice du département des urgences de l’hôpital central de Wuhan, a imposé à ses équipes – contre l’avis de sa hiérarchie – de porter des masques et des gants.

Du reste, il faut attendre le 20 janvier pour que des experts de l’OMS effectuent « une brève visite » sur place, selon les termes mêmes de l’organisation.

Nous sommes alors quarante-huit heures après un gigantesque banquet (40 000 convives !) organisé dans cette ville de 11 millions d’habitants à la gloire du Parti communiste chinois (PCC) et vingt-quatre heures après la visite effectuée par Zhong Nanshan, un expert chinois de réputation planétaire. C’est lui qui, ce même 20 janvier, informe la Chine et le reste du monde que le virus se transmet bien entre humains. Depuis le 31 décembre, au moins trois semaines décisives ont donc été perdues.

Le comité d’urgence de l’OMS pris de court

Deux jours plus tard, l’OMS organise enfin une conférence de presse consacrée à l’épidémie. Une cinquantaine de journalistes patientent dans la salle de presse située au septième étage du siège genevois de l’organisation, sans compter ceux présents en ligne. Mais le temps passe et nul ne se présente devant eux.

Le comité d’urgence chargé de conseiller le directeur général de l’OMS, le docteur Tedros Adhanom Ghebreyesus, un microbiologiste éthiopien plus communément appelé « docteur Tedros », peine à se mettre d’accord sur l’opportunité de déclarer une urgence sanitaire de portée internationale.

Dans la salle, l’ambiance est bon enfant. Personne n’a idée du drame qui se joue en coulisses. La Chine ne compte encore que 17 morts et 509 cas recensés. La menace semble circonscrite. Les journalistes se voient livrer des pizzas. Tout à coup, alors que le comité d’urgence, fort de quinze membres et de six conseillers, est enfermé dans la « situation room » de l’OMS, les portables des correspondants abonnés à l’application du New York Times vibrent : la Chine vient d’annoncer, en pleine nuit, le confinement de Wuhan.

Il est près de 21 heures lorsque le comité sort de réunion. Pris de court par cette annonce, il se donne vingt-quatre heures pour décider. Las, le lendemain, l’OMS retarde à nouveau sa décision. Croit-elle que l’épidémie pourra encore être contenue ? Il est « trop tôt » pour déclarer une urgence sanitaire de portée internationale, note le « docteur Tedros », lequel ajoute toutefois : « Ne vous y trompez pas, c’est une urgence en Chine. Mais ce n’est pas encore une urgence sanitaire mondiale. Cela pourrait le devenir. »

Le tempo est donné par Pékin

Des sources diplomatiques ont confirmé au Monde que le « docteur Tedros » avait invité, comme il en a le droit, les ambassadeurs des quatre pays les plus concernés par l’épidémie à ce moment-là – Chine, Thaïlande, Corée du Sud, Japon – à se joindre comme observateurs au comité d’urgence, les 22 et 23 janvier. D’après les mêmes sources, le représentant chinois avait d’emblée exercé une pression sur le groupe, affirmant qu’« il était hors de question de déclarer une urgence de santé publique de portée mondiale ». Rien d’étonnant, dans ces conditions, que les débats suivants aient été houleux…

Quelques jours plus tard, le « docteur Tedros » s’envole pour Pékin. Cet homme de 55 ans, qui fut ministre de la santé de l’Ethiopie (2005-2012) puis ministre des affaires étrangères (2012-2016), s’est déjà rendu à plusieurs reprises dans la capitale chinoise. C’est à ce pays – qui a soutenu activement sa candidature à la tête de l’OMS – qu’il avait réservé l’un de ses premiers déplacements à l’étranger, juste après sa prise de fonction, le 1er juillet 2017.

Dès la mi-août 2017, il est en effet le principal orateur d’une réunion de haut niveau consacrée à la coopération sanitaire « Une ceinture, une route : vers une route de la soie sanitaire ». Un projet du président Xi Jinping que le « docteur Tedros » approuve et qualifie d’« indubitablement visionnaire ». L’année suivante, toujours à Pékin, il qualifie de « modèle » le système de santé chinois.

QUAND LES COMPAGNIES AÉRIENNES OCCIDENTALES ANNULENT LEURS LIAISONS AVEC LA CHINE ET QUE DIVERS PAYS FERMENT LEURS FRONTIÈRES TERRESTRES OU AÉRIENNES, L’OMS CRITIQUE CES DÉCISIONS

Le 28 janvier, alors que l’épidémie touche Wuhan, le voici au Palais du peuple, reçu par Xi Jinping avec les honneurs dus à un chef d’Etat. Une photo – ravageuse pour lui – le montre faisant une légère génuflexion avant d’échanger une franche poignée de main avec le maître des lieux. Le « docteur Tedros » félicite la Chine d’avoir mis en place un « nouveau standard dans le contrôle de l’épidémie ». « La vitesse de la Chine, l’échelle de la Chine, l’efficacité de la Chine… Ce sont les avantages du système chinois », déclare-t-il, poussant l’obséquiosité jusqu’à louer Pékin pour « sa transparence » dans le partage d’informations.

Pourtant, au moment même où il se trouve dans la capitale, les autorités chinoises reconnaissent que début janvier, elles avaient, à tort, dénoncé et interpellé des médecins lanceurs d’alerte qui avaient mis en garde contre la propagation du virus entre humains.

A son retour à Genève, le « docteur Tedros » convoque le comité d’urgence. Le 30 janvier, sur avis de celui-ci, il déclare l’urgence sanitaire de portée internationale, mais en précisant qu’il ne s’agit en aucun cas d’un « acte de défiance vis-à-vis de la Chine ». « Au contraire, indique-t-il, l’OMS continue d’avoir confiance dans les capacités de la Chine à contrôler l’épidémie. »

A l’évidence, l’OMS s’aligne sur le tempo donné par Pékin. Ainsi, fin janvier, quand les compagnies aériennes occidentales annulent les unes après les autres leurs liaisons avec la Chine et que divers pays, notamment l’Italie, les Etats-Unis et la Russie, ferment leurs frontières terrestres ou aériennes avec elle, l’OMS critique ces décisions.

L’organisation approuve sans réserve le confinement du Hubei par Pékin, qui a, selon elle, « fait gagner du temps au monde », mais juge inutile de limiter les échanges d’hommes et de biens avec ce pays. Exactement ce que veulent entendre les dirigeants chinois, qui n’y voient aucune contradiction. Grâce à leur efficacité, la situation n’est-elle pas « sous contrôle » ?

Habituée aux critiques sur son action

Pourtant, les nouvelles en provenance de Pékin et de Wuhan ne sont guère rassurantes. Certes, des hôpitaux sont construits en un temps record et plus de 40 000 soignants viennent en renfort à Wuhan mais, depuis le début, la propagande laisse peu de place à la transparence. La vive émotion provoquée dans le pays par le décès – officiellement le 7 février – d’un des lanceurs d’alerte, le docteur Li Wenliang, montre que la population n’est pas dupe. Mais l’OMS ne s’y attarde guère, pas plus qu’elle ne se préoccupe de la « disparition » de deux « citoyens-journalistes » connus pour avoir révélé l’état réel des hôpitaux de Wuhan, ou qu’elle ne s’inquiète du silence imposé par la Chine aux pays soucieux de rapatrier leurs ressortissants. L’OMS n’enquête pas, elle relaie, c’est tout.

Comme l’écrit François Godement, spécialiste de l’Asie dans son blog de l’Institut Montaigne : « Ceci amène une question : lorsque des épidémies majeures, comme c’est le cas pour le SRAS, la grippe aviaire et le coronavirus, ont la Chine pour berceau, quelle est la fiabilité réelle de l’OMS ? Dans le cas présent, l’OMS se comporte en organisation intergouvernementale stricto sensu, ne questionne pas les sources officielles sur lesquelles elle s’appuie. Elle échoue alors dans sa mission d’information. Pire, un certain nombre de gouvernements et d’organisations soit croient à ces affirmations et à leur bien-fondé, soit choisissent de s’appuyer sur cette réticence pour repousser l’adoption de mesures difficiles. »

L’OMS BAPTISE LA MALADIE DE « COVID-19 », UN TERME « QUI NE FAIT RÉFÉRENCE NI À UN LIEU GÉOGRAPHIQUE, NI À UN ANIMAL, NI À UN GROUPE PARTICULIER DE POPULATION »

Au siège de cette organisation habituée aux critiques sur sa gestion des épidémies – jugée selon les cas soit trop laxiste soit trop alarmiste –, on jure au contraire que la réponse a été très rapide. Pourtant, la vitesse à laquelle se propage l’épidémie durant les premiers jours de février place l’OMS sur la sellette.

Soucieuse de redorer son image mise à mal, en particulier, lors de l’épidémie d’Ebola en 2014-2015, celle-ci propose des conférences de presse quotidiennes. Les louanges renouvelées du partenaire chinois provoquent à chaque fois la stupéfaction des journalistes. « Nous avons le sentiment profond que les Chinois font du bon travail », assure un communicant, la main sur le cœur.

Il est vrai qu’en matière de « com », les Chinois sont de vrais pros. Ainsi, le 11 février, l’OMS baptise officiellement la maladie de « Covid-19 », un terme « qui ne fait référence ni à un lieu géographique, ni à un animal, ni à un groupe particulier de population », selon le « docteur Tedros » . Celui-ci agit-il par conviction ? Par stratégie ? Nul ne le sait.

En tout cas, l’OMS rechigne à utiliser le nom « SARS-CoV-2 » donné au nouveau coronavirus par le Comité international de taxinomie des virus, l’organisme international chargé de leur appellation. Cette dénomination déplaît à la Chine car elle rappelle trop le souvenir du SRAS (« SARS » en anglais). « Si l’organisation s’était aliénée la Chine dès les premières semaines de la crise, que ne lui aurait-on alors reproché ? », s’interroge un diplomate en poste à Genève.

Une mission fantoche

Mi-février, l’OMS parvient enfin à remplir un de ses objectifs : l’envoi en Chine d’une mission internationale d’experts spécialistes des maladies infectieuses. Une opération pour le moins limitée : il n’est évidemment pas question d’aller inspecter un puissant membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU… C’est donc une mission conjointe (treize experts occidentaux, douze experts chinois) qui se rend sur place du 17 au 24 février.

L’OMS DOIT AVALER UNE AUTRE COULEUVRE : IL N’EST PAS PRÉVU QUE LA MISSION SE RENDE DANS LE HUBEI !

Comme il ne saurait être question de filmer leur arrivée en Chine, celle-ci ne sera annoncée qu’a posteriori. Au passage, l’OMS doit avaler une autre couleuvre : il n’est pas prévu que la mission se rende dans le Hubei ! « La province est à un stade crucial du combat contre l’épidémie et ne peut pas consacrer du temps et [mobiliser] des hommes pour recevoir des experts », explique la presse chinoise. Ce n’est qu’à la dernière minute que la Chine accepte que trois experts occidentaux passent finalement quelques heures à Wuhan, du moins en périphérie de la ville et sans pouvoir faire la moindre enquête.

Cela n’empêche pas le chef de la mission, le médecin canadien Bruce Aylward, de juger à son retour à Genève que « le monde [avait] besoin des leçons de la Chine ». Il confie même – sans ciller – que, s’il devait tomber malade, il aimerait se faire « soigner là-bas ».

L’épidémiologiste fait à nouveau sensation fin mars, lorsque, interrogé par une chaîne de télévision de Hongkong sur la réponse de Taïwan au Covid-19, il fait mine de ne pas entendre la question avant de refuser d’y répondre et de couper la communication. Quelques jours plus tard, le « docteur Tedros » en personne accusera Taïwan de se livrer à des attaques racistes contre lui. L’ancien ministre éthiopien n’apportera pas la moindre preuve à ses allégations. Après enquête des autorités taïwanaises, il apparaît que ces attaques émanent en fait de trolls chinois qui se sont fait passer pour des citoyens taïwanais. Autant d’éléments qui ne font qu’alimenter la théorie d’une OMS sous l’influence de Pékin. Le vice-premier ministre japonais Taro Aso, dépité par le report des Jeux olympiques d’été, n’a-t-il pas suggéré de la rebaptiser « Organisation chinoise de la santé » ?

L’OMS au cœur des jeux d’influence

Il faut attendre le 11 mars pour que l’OMS décrète enfin l’état de pandémie. La veille, Xi Jinping s’est rendu, triomphant, à Wuhan, signifier que son pays avait remporté la « guerre du peuple » contre le coronavirus, un succès dû, d’après la propagande, à son « système politique ». Désormais, la Chine est prête à sauver le monde.

Autant sa gestion de la crise du SRAS en 2003 et le coupable silence dont elle avait fait preuve durant trois mois l’avaient décrédibilisée, autant le Covid-19 la place au centre du jeu diplomatique. « Après la crise du SRAS, la sévérité des dénonciations de l’OMS avait fortement inquiété le régime chinois, qui a depuis tenté, comme à la Commission des droits de l’homme, de limiter la portée des critiques en renforçant sa capacité d’influence », analyse la chercheuse française Valérie Niquet, dans une récente note de la Fondation pour la recherche stratégique pour expliquer l’importance que revêt l’OMS aux yeux de Pékin.

« L’OMS EST LE SEUL CADRE MULTILATÉRAL LÉGITIME POUR COORDONNER UNE POLITIQUE DE SANTÉ MONDIALE »

Les jeux d’influence politique au sein de l’organisation n’ont pas débuté avec l’épidémie actuelle. « La Chine a retardé la déclaration d’une urgence de santé publique de portée internationale en février, mais ce n’est pas pire que ce qui se passe depuis quinze ans à l’OMS, estime ainsi German Velasquez, ancien cadre de l’institution, aujourd’hui conseiller spécial sur la politique de santé au South Centre, une organisation intergouvernementale des pays en développement. Je me souviens de l’interventionnisme des Etats-Unis, qui ont toujours eu une forte influence à l’OMS. Ils n’avaient pas hésité à faire pilonner des brochures sur l’accès aux médicaments juste avant leur diffusion, à empêcher toute prise de position de l’OMS sur la gestion de l’ouragan Katrina et à obtenir l’annulation in extremis d’un discours, dont le texte leur déplaisait, que devait prononcer le docteur Lee Jong-Wook », directeur général de l’OMS de 2003 à 2006.

« Si l’on peut critiquer la politique suivie par le « docteur Tedros », il faut sauver le soldat OMS, plaide un diplomate. Elle a produit des dizaines de recommandations pour lutter contre le Covid-19 et a adopté une communication dynamique. Surtout, c’est le seul cadre multilatéral légitime pour coordonner une politique de santé mondiale. Encore faut-il lui donner des moyens juridiques pour ce faire. Les Etats membres y sont-ils prêts ? »

La récente décision de Donald Trump de suspendre les contributions américaines à l’OMS a soulevé de nombreuses réactions internationales. Associations médicales américaines, éditoriaux dans les revues scientifiques, tweet de Bill et Melinda Gates, ont convergé en faveur de l’organisation. Le 20 avril, une résolution du G20 virtuel des ministres de la santé s’engageant à renforcer le mandat de l’OMS pour coordonner la réponse à la pandémie de Covid-19 a été torpillée par les Etats-Unis.

Si la crise du coronavirus est un révélateur des dysfonctionnements de cette structure et de l’influence chinoise en son sein, il ne faudrait pas qu’elle en devienne un accélérateur. « Le retrait américain est une erreur qui va affaiblir l’ensemble du système », prévient Suerie Moon, codirectrice du Centre de santé globale à l’Institut de hautes études internationales et du développement. L’Assemblée mondiale de la santé, qui détermine les orientations que le DG doit suivre, prévue – par visioconférence – du 17 au 21 mai, et où chaque Etat membre dispose du même poids, permettra de prendre le pouls de cette organisation décriée par tous mais jugée irremplaçable.

30 avril 2020

Coronavirus

corona

30 avril 2020

Les galeries d’art préparent l’après-11 mai

galerie art

Philippe Dagen

Vente en ligne, fin des vernissages, recul des foires… la pandémie contraint les galeristes à revoir leur modèle

ENQUÊTE

Les galeries d’art contemporain parisiennes ont fermé mi-mars. Les biennales et les foires ont disparu des calendriers. Passé la sidération, le monde du marché de l’art se voit contraint de s’interroger sur ses usages passés et sur l’« après » : après le 11 mai d’abord, après la crise sanitaire ensuite. Nous avons posé quelques-unes de ces questions à des galeristes qui ont en commun leur forte présence internationale, mais qui sont d’âges, de situations et de trajectoires variés : Kamel Mennour, Nathalie Obadia, Vincent Sator, Daniel Templon et Georges-Philippe Vallois. Leurs lieux sont exclusivement parisiens – Sator, Vallois – ou ils en ont créé ailleurs – Mennour à Londres, Obadia et Templon à Bruxelles.

Tous sont d’accord sur la nécessité d’une adaptation des règles. « Nous attendons les directives du gouvernement sur les conditions sanitaires : espacement des bureaux, port du masque, nombre de visiteurs dans les expositions, gel nettoyant à disposition », déclare Nathalie Obadia. Georges-Philippe Vallois prévoit déjà « une distanciation dans notre espace de travail, des masques, des solutions hydroalcooliques à l’entrée ».

Il faudra éviter qu’il y ait trop de visiteurs en même temps… mais les galeries d’art contemporain sont de toute façon rarement bondées. « A la différence des ventes publiques et des foires, ce sont des lieux où la fréquentation est par nature individualisée, ajoute-t-il. Il sera relativement simple de s’adresser à nos interlocuteurs en respectant une distance de sécurité. » Autre point d’accord : pas de vernissage de sitôt. « Il nous faudra réfléchir à d’autres façons de recevoir le public et favoriser les rendez-vous privés au détriment des ouvertures collectives et festives », constate Vincent Sator. L’avenir sera donc sobre.

« Parcours déraisonné »

Quand celui-ci commence-t-il ? Daniel Templon a déjà programmé deux ouvertures, Will Cotton à Bruxelles le 28 mai et Chiharu Shiota à Paris le 30 mai. Georges-Philippe Vallois préfère, lui, attendre un peu : « Nous pensons présenter notre première exposition post-confinement aux environs du 4 juillet, à l’occasion du week-end des galeries. Avant cela, nous donnerons un mois supplémentaire à nos expositions antérieures, interrompues à peine ouvertes. » Ce Gallery Weekend, qui depuis cinq ans organise des événements dans une quarantaine de galeries parisiennes, serait « un très bon signe pour marquer la reprise et pour inciter les collectionneurs français, plus nombreux qu’on ne le laisse penser, à venir nous revoir », insiste Nathalie Obadia, qui prévoit de faire durer ses premières expositions jusqu’au 31 juillet. « J’espère que la rentrée de septembre correspondra à une reprise plus classique de nos activités, indique Vincent Sator. Mais je pense que les précautions sanitaires resteront appliquées pour une période longue. Nous apprendrons simplement à vivre et à travailler avec… »

Les galeries sont une chose. Mais quid des foires et biennales ? « Dans les mois qui viennent, je doute fortement que les foires soient autorisées, avance Vincent Sator, et, si elles devaient l’être, que collectionneurs et visiteurs prennent le risque de s’y rendre. Les foires d’automne risquent de souffrir de cette situation. » Dont la FIAC, qui, pour l’heure, affirme qu’elle ouvrira le 22 octobre.

Mais, au-delà, la pandémie provoque une remise en cause plus générale du système. Kamel Mennour est sévère : « Ce n’est pas tellement la taille des foires et biennales, mais bel et bien leur nombre qui suscite chez moi des questions, depuis longtemps. Nous faisions partie d’un parcours déraisonné où chaque galerie de taille importante se devait d’investir toujours plus de territoires dans l’espoir de rallier plus de collectionneurs. Aujourd’hui, face à l’arrêt brutal de la moitié de la planète, force est de se dire que nous avions tout faux. »

Georges-Philippe Vallois compare même les foires à « des genres de championnats » : « Nous avons la première division, la deuxième, etc. L’emplacement et les dimensions de votre stand sont les signes de votre niveau tel qu’il est évalué par le directeur de la foire. Cela pose évidemment un problème car, malheureusement, un grand nombre de galeries sont souvent, de fait, jugées sans avoir été visitées. » Vincent Sator y ajoute l’argument écologique, espérant « que la multiplicité des déplacements sera plus limitée et que les différents acteurs du marché opéreront des choix plus restreints ».

Aspirer à un rééquilibrage

Le seul à n’avouer aucune lassitude est Daniel Templon, qui tient ces événements pour absolument nécessaires : « Les relations nouées et les conversations engagées pendant ce type d’événements sont le terreau des ventes futures. Les foires créent une dynamique de festival et cet aspect festif, mondain et éphémère, est devenu un catalyseur essentiel. Nos collectionneurs aiment visiter les foires et y faire des découvertes. » Aussi distingue-t-il entre deux fonctionnements : « Nous avons en quelque sorte une “galerie nomade” avec des rendez-vous aux quatre coins du monde – les foires – et une galerie physique, mère, à Paris et à Bruxelles avec une programmation plus “culturelle”, des expositions de fond. »

Sur cette distinction, ses confrères sont d’accord. Mais ils aspirent à un rééquilibrage. « Les foires doivent être perçues comme des outils complémentaires au travail quotidien des galeries, relativise Vincent Sator. Un certain équilibre doit être restauré entre ce qu’elles apportent aux galeries et les contraintes lourdes qu’elles représentent, notamment financièrement. » Nathalie Obadia estime que, justement, « il faut profiter de cette période de jachère des foires pour remettre la galerie au centre de la scène artistique. Pendant un an, si ce n’est plus, les galeries feront moins de foires internationales et les collectionneurs voyageront moins. Donc elles seront plus visitées. Elles redeviendront lieux de rencontre et de promotion ».

Remettre Paris au premier plan

Pour concilier intimité de la galerie et dynamique de foire, Vallois s’appuierait volontiers sur le modèle de Parcours des mondes, salon en accès libre autour des arts d’Afrique, d’Asie et d’Océanie, à Saint-Germain-des-Prés : « Il me semble envisageable de créer un événement international à l’échelon européen pour la création contemporaine. Outre un retour dans les galeries, objectif majeur, ce rassemblement serait l’occasion de réunir dans un espace à peine supérieur à une foire un ensemble de galeries françaises et étrangères. » Et de remettre Paris au premier plan. Car il faut saisir l’occasion, affirme Nathalie Obadia : « Paris a tous les atouts pour devenir la ville du réveil artistique dès juin avec le maillage très complet des galeries qui vont de la plus internationale et puissante à la plus expérimentale du 20e ou de Romainville. Il faut profiter de cette situation, ce ne sera pas le cas avant quelques mois à Londres ou à New York, et Berlin est moins attractif que Paris. »

Pour les contacts, il reste de toute façon le Web. Et donc l’hypothèse d’un marché de l’art de plus en plus en ligne. « La pandémie a accéléré un phénomène déjà présent, note Kamel Mennour. Les transactions en ligne ne vont pas remplacer les ventes en personne mais elles vont certainement devenir de plus en plus significatives. » L’hypothèse d’un déplacement des ventes sur Internet déplaît à Georges-Philippe Vallois : « Une galerie est un lieu d’échange où se mêlent contenu, contenant et valeur commerciale. C’est ce qui nous différencie des maisons de vente, dont le rôle, majeur par ailleurs, est d’accoler une valeur à un bien, et des musées et autres manifestations institutionnelles, qui apportent une consécration et une visibilité à l’artiste. Si les sites et les transactions en ligne prenaient le pas sur nos espaces, alors cela pourrait signifier que les galeries sont devenues inutiles. »

Daniel Templon, rassurant, se fonde sur son expérience : « Nous avons un site privé pour nos clients et une online viewing room. Ces canaux se sont révélés très efficaces pour diffuser les images, en discuter, mais ils ne se substituent pas à la confrontation physique avec l’œuvre d’art. A partir d’un certain prix, il faut quand même voir ce que l’on achète. C’est une règle élémentaire. »

30 avril 2020

Confessionnal dans l'église St Eustache

confessionnal

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