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Jours tranquilles à Paris

29 avril 2020

Coronavirus, eau de javel et ultraviolets : Trump est en train “d’exploser en vol”

trump explose

THE NEW YORK TIMES (NEW YORK)

Le président américain, omniprésent dans la communication de la gestion de la crise sanitaire, multiplie les propos incohérents. Pour ce chroniqueur du New York Times, Trump est un homme “désorienté et de plus en plus désespéré”, et il est désormais inimaginable qu’il soit réélu en novembre 2020.

“Et il va être réélu.” Pas un jour ne passe sans qu’un ami – démocrate ou républicain – ne me le répète. Car tel est le refrain de cette longue lamentation que constitue la litanie des échecs de Donald Trump en temps de pandémie. C’est le sanglot de la reddition qui succède au hurlement d’incrédulité.

Des dizaines de milliers d’Américains vont mourir et que fait le président ? Il répand de fausses informations. Fait naître de faux espoirs, réécrit l’histoire et réinvente la science. Il déblatère sur son héroïsme supposé, gémit de son martyr autoproclamé et s’acharne sur quiconque aurait l’audace de remettre en question son infaillible jugement. En lieu et place d’un véritable chef, nous avons un démagogue. Au lieu d’empathie, nous n’avons droit qu’à de l’agitation. Et il va être réélu.

Ce refrain résonne comme un mécanisme de prévention intellectuelle. Une façon de nous préparer au pire.

Camisole de force

Le problème est qu’à force de le répéter, nous prenons ce mécanisme de défense pour une analyse raisonnée. Et nous commençons à croire que ce tic verbal est porteur d’une vérité inévitable.

C’est faux. Et si Donald Trump se dirige en effet peut-être vers un second mandat, il n’est pas non plus impossible qu’il soit tout bonnement en train d’exploser en vol.

Peut-être suffira-t-il d’un rayon de soleil et de températures printanières pour annihiler le coronavirus ? Et si on s’injectait du désinfectant en intraveineuse ? Voilà deux propositions avancées par le président américain jeudi 23 avril lors d’un point presse – auquel il aurait pu se présenter dans une camisole de force tellement il y a multiplié les propos incohérents dignes d’un homme abattu, désorienté et de plus en plus désespéré.

Le président se sent isolé, assiégé et panique à l’idée de perdre face à Joe Biden [à la présidentielle de] novembre. C’est dans cet état d’esprit qu’il a décrété la suspension de la délivrance des cartes vertes, le genre typique de basse manœuvre auquel il recourt lorsqu’il a l’impression de “perdre le contrôle”.

Trump lit les sondages aussi bien que nous tous, et ce que ces derniers montrent c’est que pendant qu’il passe ses soirées à la Maison-Blanche à s’envoyer des fleurs, les Américains sont loin d’en faire autant.

Pas si populaire

Le mois dernier, les médias nous ont rebattu les oreilles avec la légère hausse de popularité du président. Sauf que la véritable information concernait la modestie de cette amélioration : d’autres présidents ont vu leur popularité augmenter bien plus nettement en temps de crise, période où les Américains ont tendance à se rassembler autour de leur chef. Mais la personnalité de Trump ne suscite pas de ralliement, plutôt une charitable augmentation du bénéfice du doute.

Ce regain de popularité a d’ailleurs été de courte durée, le taux d’approbation du président retournant vite à des niveaux anémiques. Vendredi [24 avril], la moyenne des sondages indiquait que 52,5 % des Américains avaient une opinion négative de l’action présidentielle, contre seulement 43,4 % d’opinions positives.

Certes, les sondages n’étaient pas meilleurs pour Trump en 2016 – ils étaient même moins bons – et ça ne l’a pas empêché de conquérir la Maison-Blanche. Mais à l’époque cet écart pouvait en partie s’expliquer par ce qu’il représentait : un vote de contestation contre l’establishment. Aujourd’hui, Trump incarne l’establishment et les électeurs ont pu goûter à sa politique de disruption. Laquelle ressemble fort à de l’incompétence.

Trump s’inquiète également d’autres chiffres. Dans les trois États clés qui lui ont donné la victoire en 2016 au collège électoral, les sondages le placent actuellement derrière Biden – avec 6,7 points d’écart en Pennsylvanie, 5,5 points de retard dans le Michigan et 2,7 points dans le Wisconsin, rapporte le site RealClearPolitics. Ce site donne également 3,2 points d’avance à Biden en Floride, un État remporté par Trump en 2016 et où il doit impérativement s’imposer de nouveau.

Le Wisconsin devrait à lui seul donner des sueurs froides au président. En 2018, le gouverneur républicain a été remplacé par un démocrate, de même que le vice-gouverneur et le procureur général d’État. Le mois dernier, les électeurs ont également offert une large victoire à une juge progressiste succédant à un juge conservateur à la Cour suprême d’État. Pas moyen de faire passer ça pour une victoire de Trump.

Les sondages montrent qu’une grande majorité des Américains estiment que le président a réagi trop tard pour freiner la propagation du virus. Et la plupart des Américains ne partagent pas sa vision de ce qu’il est judicieux de faire à court terme.

Messages contradictoires

Les messages émis par Trump sont étourdissants tellement ils peuvent être contradictoires. Par exemple, il s’est dit favorable à un semblant de retour à la normale aux alentours du 1er mai et a réprimandé certains gouverneurs qui se seraient montrés trop zélés dans leur application du confinement. Mais selon un sondage de Yahoo News/YouGov, seuls 22 % des Américains soutiennent les manifestants qui exigent que leurs États mettent fin aux restrictions, alors qu’ils sont 60 % à les désapprouver. Le président Trump, lui, les a incités à continuer.

Suit-il son instinct, ou fait-il simplement n’importe quoi ? Je penche pour cette dernière hypothèse. Ces derniers temps, il n’a cessé de se contredire, plus souvent que jamais, et à un stade inédit, tout en sapant les arguments de son propre parti.

Pour éviter d’être rendus responsables de la réaction de Trump face à la pandémie, les républicains ont adopté une stratégie qui consiste à rejeter la faute sur la Chine et à la diaboliser. “Mais le plan du parti se heurte à un obstacle potentiel, le président en personne”, comme l’a rapporté le New York Times, en soulignant que Trump a “torpillé les efforts qui visent à accuser la Chine” car il cherche toujours à s’attirer les faveurs du président Xi Jinping.

Une attitude qui ne facilite clairement pas la tâche des républicains, lesquels tentent de dépeindre Biden comme étant à la botte des Chinois. Que peuvent-ils espérer avec le nouveau surnom qu’ils lui ont trouvé, “Beijing Biden”, si “Tian’anmen Trump” sonne plus juste ?

De plus, avec ses déclarations tout à fait optimistes sur la fin prochaine de nos malheurs actuels, Trump joue plus gros que jamais. S’il se trompe, il ne pourra pas le cacher. S’il ne fait pas assez preuve de prudence, des Américains le paieront de leur vie.

Son arme secrète : il n’a honte de rien

Alors, certes, c’est Trump. Il a toujours sur lui son arme secrète, sa spectaculaire absence de toute forme de honte, si bien qu’il aura recours à des ruses et des mensonges dont même les moins scrupuleux de ses adversaires n’oseraient faire usage. Il n’hésitera jamais à tout détruire du moment que c’est lui qui se retrouve au sommet du tas de ruines.

De plus, les lois habituelles de la nature ne s’appliquent pas à lui. Il a été enregistré alors qu’il se vantait d’agripper les femmes par l’entrejambe. Même pas mal. Il a obtenu presque trois millions de voix de moins qu’Hillary Clinton. Ça ne l’a pas empêché de gagner. S’il n’a pas vraiment été jugé coupable d’une collusion complexe avec les Russes, il a clairement affiché que le principe ne le dérangeait pas. Il a continué malgré tout, et il continue encore et encore, en dépit de son abus de pouvoir scandaleux dans ses relations avec l’Ukraine, en dépit de la procédure de destitution qu’il méritait plus qu’amplement.

C’est un Houdini, une Schéhérazade, incarnation de tous les rois de l’évasion de l’histoire et de la fiction concentrés en une personne surmontée d’un toupet or et orange. Il a une baraka qui dépasse l’entendement. Mais l’ennui, avec la chance, c’est qu’elle finit par s’épuiser.

On ne cesse de nous dire à quel point sa base le soutient avec ferveur, mais les nombreux Américains qu’il horrifie peuvent se montrer tout aussi engagés. À chaque Sean Hannity [présentateur ultra-conservateur de Fox News] sa Rachel Maddow [présentatrice progressiste de MSNBC] à chaque Kellyanne Conway [conseillère de Donald Trump] son George Conway [républicain et époux de Kellyanne Conway, qui pourfend le président américain dans les médias et sur les réseaux sociaux].

Kellyanne Conway et les gens de son acabit sont peut-être habiles dans leur défense du président. Mais George Conway et sa bande sont encore plus doués quand il s’agit de le vouer aux gémonies.

Les langues vont se délier

Et que dire de la diaspora des réfugiés qui ont fui l’équipe Trump. Des gens comme Rick Bright, le scientifique du gouvernement qui dit avoir été chassé [le 21 avril] de son poste aux commandes de la recherche sur un vaccin contre le coronavirus parce qu’il refusait de se faire l’écho des arguments absurdes de Trump ? Je prédis qu’à l’approche de l’échéance de novembre, de plus en plus de ces exilés vont prendre la parole, et partager des récits terribles sur la vie dans la galerie des glaces présidentielle.

Trump ripostera en dénonçant le “Deep State”, mais la formule ne fonctionnera plus aussi bien quand il se retrouvera entouré de la maigre cohorte de ses charlatans – et ce d’autant moins qu’il se montre d’une bêtise chaque jour un peu plus odieuse.

Ne venez pas me dire que ses points presse du soir ne sont qu’une nouvelle version de ses meetings dans les stades. Car ils ont pour arrière-plan des souffrances monstrueuses qui les rendent de plus en plus difficiles à supporter. Les Américains qui y trouvent un quelconque réconfort sont de toute façon ivres de Trump depuis longtemps.

Qui n’est pas épris de lui voit et entend le président pour ce qu’il est : un histrion imperméable à toute sensibilité, et pour qui tout est une scène, même une montagne de cadavres.

Frank Bruni

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29 avril 2020

Milo Moiré

Milo Moire is a Swiss conceptual artist and artivist. She is international well known for her public performances.

29 avril 2020

Liberté.... etc

lliberté etc

29 avril 2020

Des émeutes de la faim en Seine-Saint-Denis : c’est, hélas, probable mais à qui la faute ?

MISÈRE DE MISÈRE

Les responsables de cette possible explosion sont aisément identifiables. Ils sont au pouvoir depuis des dizaines d’années.

Avec Benoît Rayski

C’est un mail de Georges-François Leclerc, préfet de Seine-Saint-Denis, à Michel Cadot, préfet de la région Ile-de-France. « Je redoute des émeutes de la faim. Nous comptons entre 15.000 et 20.000 personnes qui, entre les bidonvilles, les hébergements d’urgence et les foyers de travailleurs migrants vont avoir du mal à se nourrir ». Pourquoi ?  Parce que, poursuit le préfet, « l’économie souterraine, de rapine, et l’uber économie se sont effondrées ».

Il y a des parties du territoire français où la misère est grande. La France n’a pas accueilli toute la misère du monde. Elle en a pris sa part. Une trop grande part. Bien trop grande pour qu’elle puisse la soulager et la supporter. Une politique de frontières passoires vantée comme généreuse en est la cause. Beaucoup sont venus. Bien peu sont repartis. Peut-être parce que c’était pire chez eux. Et sans doute car tout leur paraissait plus facile chez nous.

C’était un mensonge, une illusion entretenue avec constance par nos gouvernants.  A la télévision, ces malheureux - et ils l’étaient dans tous les sens de ce terme – voyaient des images montrant de beaux appartements et des voitures magnifiques. Qui, de tous nos gouvernements successifs, a osé leur dire que ce n’était pas pour eux ? Qui a eu le courage de leur annoncer qu’ils seraient logés dans des foyers vétustes ou, dans la meilleure hypothèse, dans des HLM dégradés ?

Revenons sur les mots du préfet de Seine-Saint-Denis. Il parle de « rapine ». Un mot ancien qui aujourd’hui se dit simplement « vol ». Eh oui, il est plus difficile de voler en ces temps de confinement quand les déplacements sont limités et contrôlés. C’est pourquoi, ces malheureux vont avoir faim.

Il évoque aussi « l’économie souterraine ». Celle-ci repose sur deux piliers : le trafic de drogue et la prostitution. Deux activités rendues très aléatoires par la crise du coronavirus. Oui, ils auront faim.

Pendant des années, au nom d’une politique pompeusement baptisée « politique de la ville » (« politique des cités » eut été plus juste)  on a déversé des milliards sur les banlieues. Mais comment remplir un tonneau percé ? On construisait des Maisons des Jeunes et de la Culture où personne n’allait. On réhabilitait les HLM qui ne tardaient pas à être saccagés et abîmés quelques années après.

Contre le trafic de drogue, qui permettait aussi de remplir le frigidaire familial, rien n’a été fait. Pour préserver la paix civile et par crainte d’émeutes, on a laissé prospérer la vente de shit. L’eut on éradiqué que les jeunes guetteurs auraient été obligés d’apprendre un métier au lieu d’avoir comme perspective une balle de kalach’ dans le ventre.

Certes, ils sont responsables de leurs actes. Mais ceux qui les ont accompagnés, choyés et d’une certaine façon encouragés sont coupables. Quand il y aura des émeutes de la faim, c’est à eux qu’il faudra s’en prendre avant de mater les émeutiers.  

29 avril 2020

Paris : une famille de renards surprise au cœur du Père-Lachaise

renards

Un couple et leurs quatre renardeaux ont été photographiés au cœur du cimetière parisien. Une première dans ce lieu même si d’autres avaient été aperçus ailleurs dans Paris.

 Une famille de renards a élu domicile au cimetière du Père-Lachaise à Paris. En tout, il y a quatre renardeaux qui se promènent en liberté.

Par Nicolas Maviel

Ce n'est pas une fable de Jean de La Fontaine car dans cette histoire il n'est pas question de corbeau mais juste de renards, ou plutôt de renardeaux. Ces adorables boules de poils ont été photographiées en fin de semaine par le conservateur du cimetière du Père-Lachaise (XXe) en train de se balader dans les allées et entre les tombes de ce lieu déserté par les promeneurs depuis le début du confinement.

Benoît Gallot, puisqu'il s'agit de lui, a immortalisé cette scène qui, relayée sur les réseaux sociaux par Pénélope Komitès — adjointe en charge des espaces verts, nature en ville, biodiversité, agriculture urbaine et affaires funéraires — n'a pas manqué de faire fondre les cœurs. D'ailleurs, l'élue parisienne l'avoue en rigolant « j'en aurais bien adopté un tellement ils sont mignons ». Mais cette boutade passée, car il s'agit d'animaux sauvages et considérés comme nuisibles, la madame écologie de la Ville est ravie par ces clichés qui confirment le retour de faune dans les cimetières parisiens.

Une première… au Père-Lachaise

« Depuis cinq ou six ans, nous avions déjà noté la présence de renards dans nos cimetières mais cela concernait surtout ceux en banlieue comme à Thiais, Bagneux, Pantin ou Ivry, note Pénélope Komitès. Là, au Père-Lachaise, c'est une première. D'ailleurs, la conservatrice adjointe, qui est là depuis 25 ans, n'en avait jamais vu ! »

Un couple et leurs quatre renardeaux ont donc élu domicile dans le plus célèbre des cimetières de la capitale. Depuis le début du confinement, ils découvrent les 43 hectares sans se soucier des illustres pensionnaires comme Jim Morrison, Édith Piaf, Oscar Wilde, Marcel Proust, Yves Montand, Georges Moustaki, Frédéric Chopin et un certain… Jean de La Fontaine.

Un lieu calme sans prédateurs

« Ils ne sont pas dérangés et cela confirme également qu'ils sont désormais capables de parcourir de grandes distances notamment pour chasser et se nourrir. En effet, nous en avons répertorié dans le bois de Vincennes ou encore sur la Petite ceinture, explique l'adjointe d'Anne Hidalgo. Pour cette famille nouvellement installée, la situation est quasiment idyllique. Pas de voitures, pas de visites et pas de prédateurs. En effet, pendant de nombreuses années une chienne Malinois s'est promenée seule au Père-Lachaise. Il aura fallu plusieurs mois à une association pour parvenir à l'attraper en fin d'année dernière. Désormais seuls les rongeurs, les chats et les oiseaux occupent les lieux.

« Depuis 2015, nous avons entièrement modifié la gestion des cimetières et des espaces verts en bannissant les produits phytosanitaires, en enherbement les allées, avec du paillage et aujourd'hui nous assistons à un retour de la biodiversité », détaille encore Pénélope Komitès. Des canards ont aussi été vus déambulant devant la comédie française ou encore place de la République ses derniers jours ou semaines. Rues moins peuplées et voitures presque absentes font le bonheur des animaux qui repartent à la conquête d'un Paris plus calme.

Trouver une solution post déconfinement

Mais quid de cette famille de renards après le 11 mai ? « Dès ce lundi, nous aurons une réunion avec l'agence d'écologie urbaine de la Ville de Paris pour savoir comment les protéger. On ne peut pas imaginer qu'ils se fassent écraser par une voiture. Il va falloir trouver une solution », conclut l'adjointe.

En attendant, ces renardeaux qui n'ont pas encore de prénom, ont deux semaines pour profiter de cet espace pour le moins silencieux au cœur du XXe arrondissement avant d'être capturés et réorientés vers la Petite ceinture ou le bois de Vincennes, des lieux plus propices à leur sécurité sur le long terme.

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29 avril 2020

Déconfinement - est-ce clair ?

deconfinement

29 avril 2020

Déconfinement : l’exécutif nage entre deux os

Par Laure Equy et Laure Bretton — Libération

Tiraillé entre la crainte de voir l’économie sombrer et la peur d’une deuxième vague de l’épidémie, Edouard Philippe a présenté à des députés plus que divisés une stratégie nationale progressive à base de «en même temps», adoptée mardi soir à l’Assemblée.

Deux France. En présentant mardi la «stratégie nationale de déconfinement», Edouard Philippe a fait basculer le pays dans une nouvelle étape de la lutte contre le coronavirus. A partir de jeudi, le gouvernement présentera chaque soir une carte en rouge et vert, deux couleurs qui vont déterminer le rythme de retour à un semblant de normalité. En fonction du nombre de contaminations, de l’occupation des lits en réanimation et du déploiement des tests virologiques, les départements obtiendront le droit de rouvrir écoles, collèges, lycées, jardins ou structures publiques. L’enjeu ? Ne pas avoir à reconfiner après avoir déconfiné. D’où la prudence et la «progressivité» du plan soumis à l’Assemblée nationale et adopté mardi soir (par 368 voix contre 100). «Pour tous ceux qui, comme moi, croient au bon sens, il n’est pas inutile, et même nécessaire, de prendre en compte les différences» locales dans le déconfinement, explique le Premier ministre dans un hémicycle où ne siègent que 75 députés - quelques-uns portant des masques - et où l’on entend résonner les pas des huissiers sur le carrelage. Un appel au «bon sens» qui sonne comme un énième revirement au sommet : le déconfinement sera territorialisé et les déplacements encadrés, deux options pourtant écartées par l’Elysée jeudi.

En une heure, le Premier ministre manie plus le bâton que la carotte : «Je le dis aux Français, si les indicateurs ne sont pas au rendez-vous, nous ne déconfinerons pas le 11 mai.» Et ce déconfinement sera citoyen ou ne sera pas. L’épidémie de Covid-19 ne peut pas être enrayée «si la chaîne virale n’est pas remplacée par une chaîne de solidarité», souligne Philippe. «A partir du 11 mai, le succès ne reposera pas sur la seule autorité de l’Etat mais sur le civisme», un mot répété cinq fois dans un discours qui, vu la solennité du moment, a de faux airs de déclaration de politique générale.

Nuances de gris

Dans le plan gouvernemental, il n’y a donc plus d’unité de lieu ni de temps. Devant l’obligation de «vivre avec le virus», le 11 mai ne marquera pas le retour au grand air mais le début, tout en nuances de gris, d’une stratégie «progressive». Et l’ouverture d’une phase allant jusqu’au 2 juin, date à laquelle le gouvernement ajustera «les mesures à prendre dans la phase suivante», qui ira jusqu’à l’été. Rendez-vous fin mai pour savoir si les lycées (lire ci-contre), les cafés et restaurants peuvent rouvrir. Un desserrement du confinement davantage qu’un déconfinement.

«Etape nécessaire» pour préserver un maximum de vies, le confinement, s’il devait durer, «aurait des conséquences gravissimes» sur l’économie, insiste Philippe, qui pointe même le «risque de l’écroulement» : «Je n’emploie pas ce terme au hasard. On me reproche bien plus souvent la litote que l’exagération.» Tout autant à double tranchant, le déconfinement est «aussi attendu que risqué». Le voilà décrivant sa «ligne de crête», qui dit ce que doit être la longueur de ses nuits à Matignon au côté du délégué interministériel au déconfinement, Jean Castex : «Un peu trop d’insouciance et c’est l’épidémie qui repart. Un peu trop de prudence et c’est l’ensemble du pays qui s’enfonce.» Sonnant l’heure de la «reprise économique», le chef du gouvernement demande aux entreprises de maintenir le télétravail «partout où c’est possible». Après les élus locaux et les préfets mercredi, Philippe doit échanger jeudi avec les partenaires sociaux. But de la manœuvre : rien de moins que «réorganiser» la vie au travail. Son discours parle de reprise mais peu des salariés et ne fait qu’effleurer le dialogue social que certaines entreprises piétinent allégrement depuis la mi-mars.

Grommellements

A l’hémicycle qui l’écoute depuis une heure, le Premier ministre rappelle qu’il lui a réservé ses annonces, préférant l’Assemblée à une conférence de presse ou un JT. De quoi s’attirer les premiers applaudissements et grommellements des députés admis en séance. Côté face, il rend hommage à la «place éminente» du Parlement et à sa démocratie «vivante, exigeante, bruyante parfois, mais indispensable». Côté pile, il s’en prend aux «commentateurs» passés «du café du commerce à certains plateaux de télévision». «Les courbes d’audience y gagnent ce que la convivialité des bistrots y perd, mais cela ne grandit pas le débat public […]. Non. Les députés ne commentent pas. Ils votent», flatte et tacle Philippe. Vu le pataquès, le Premier ministre n’ignore pas que les membres de l’opposition et une partie de la majorité se sont rebiffés contre l’organisation chaotique de ce débat. Celui-ci les a rassurés sur un point : l’application de traçage numérique, si elle devait voir le jour, fera bien l’objet d’une discussion et d’un vote. Et le Parlement sera saisi la semaine prochaine d’un projet de loi prolongeant l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 23 juillet. Celui qui joue son va-tout politique avec le déconfinement termine le discours le plus compliqué de sa carrière en regardant dans le rétroviseur. Le moment lui rappelle sa déclaration de politique générale, en juillet 2017. Il avait alors vanté «l’antique qualité» des généraux romains : «La vertu, qui mêle la rectitude, l’honnêteté et le courage. J’étais loin d’imaginer combien cette qualité serait essentielle pour préparer notre avenir.» Un autoportrait tout en humilité.

29 avril 2020

Virginie Efira

virginie70

29 avril 2020

Pauline Moulettes

pauline33

29 avril 2020

Covid-19 : la réa jusqu’à quel âge ?

Par Véronique Fournier , médecin, fondatrice du Centre d’éthique clinique et de l’association Vieux et chez soi

Deux bioéthiciens américains de renom, âgés de 75 ans, s’interrogent : en période de tension, ne faut-il pas faire preuve de sobriété médicale et limiter l’accès à la ventilation au-dessus d’un certain âge ? Un devoir éthique des plus âgés au nom de la solidarité intergénérationnelle ? Le débat est ouvert.

Tribune. Le Hastings Center est un haut lieu de la réflexion éthique et philosophique outre-Atlantique. Il y a quelques semaines, un forum de discussion Covid-19 a été ouvert sur son site internet. On y trouve des contributions fort intéressantes. Deux ont particulièrement attiré mon attention parce que légitimant la raison d’âge pour limiter l’accès aux soins en situation de pénurie, position qui reste fortement contestée dans notre pays. L’une d’elles est signée par Larry R. Churchill, bioéthicien réputé, attaché à l’université de Vanderbilt. Elle est parue le 13 avril sous le titre «Etre vieux en situation de pandémie». L’auteur, 75 ans, se pose la question de savoir si les personnes de son âge, non atteintes, ont des obligations éthiques spécifiques vis-à-vis de la société du fait de l’épidémie. Oui, répond-il, et la première d’entre elles consiste à faire en sorte d’utiliser de la façon la plus parcimonieuse possible les ressources sanitaires disponibles, puisqu’il y a risque de rareté. Il adhère, écrit-il, aux préconisations de Miller - autre bioéthicien remarquable, ayant commis une contribution dans le même forum, pour défendre l’idée qu’il était au plan éthique légitime en cas de tension, de limiter l’accès à la ventilation artificielle des personnes au-dessus d’un certain âge. Mais Churchill va plus loin. Il estime que, dans son cas, se comporter «éthiquement» consiste à faire acte de sobriété à tous les étages de la consommation médicale courante, compte tenu de ces circonstances épidémiques exceptionnelles. Il fonde sa position sur une conception de l’éthique qui se doit, selon lui, d’être évolutive et repensée différemment aux différents âges de la vie. A 75 ans révolus, après une vie bien remplie, riche en opportunités et occasions d’épanouissement personnel, «j’estime, dit-il, que mes obligations sont les suivantes : ne pas être un poids pour le système et respecter pour cela, encore plus que les plus jeunes les précautions et le confinement préconisés ; consommer le moins possible de médecine : ne pas aller me faire tester si les tests sont rares, même si j’ai des connexions pour y accéder plus facilement que d’autres ; si l’hôpital est surchargé, éviter d’y aller si ce n’est pas indispensable ; si je dois y aller tout de même, et qu’il y a pénurie ou risque de pénurie de ventilateurs, en refuser l’accès ; et si un vaccin devient disponible, ne pas me précipiter, m’inscrire en dernier sur la liste, pour le cas où il n’y en aurait pas suffisamment pour tous. Ce n’est pas une question de "sacrifice", conclut-il, ni même de "générosité", il s’agit de "justice intergénérationnelle" : contribuer à ce que le plus possible de vies jeunes puissent être sauvées alors que pour ma part, j’ai déjà largement vécu la mienne».

Les recommandations de Miller sur l’accès à la ventilation artificielle en situation de tension suivent la même logique. Il les justifie non seulement du fait que plus on avance en âge, moins on supporte une réanimation agressive et longue, d’autant plus si on a un organisme fatigué par des comorbidités, mais aussi, comme Churchill, en ayant recours à des arguments de justice intergénération-nelle : «Les jeunes ont plus à perdre que les moins jeunes à ne pas pouvoir accéder à la réanimation, en termes d’années de vie gagnées», dit-il.

Pour conclure, les deux auteurs soulignent, avec insistance, l’un comme l’autre, que «s’il peut être admis que le droit de tous les patients de recevoir les traitements les plus indiqués selon la science, ainsi que le devoir des médecins de les leur fournir soient limités en situation exceptionnelle de pandémie, fournir à tous des soins palliatifs adéquats, y compris à domicile, devient en contrepartie un impératif moral incontournable».

Comme c’est étrange d’entendre ainsi des Américains prôner des arguments de solidarité collective à l’heure où chez nous les «vieux» s’offusquent de se sentir discriminés et revendiquent d’être considérés comme ayant exactement les mêmes droits d’accès aux soins que les plus jeunes ! C’est le monde à l’envers ! Deviendrions-nous plus individualistes qu’eux ? N’y a-t-il pas un certain bon sens dans leurs réflexions ? Au fond, il s’agit probablement d’une autre façon de concevoir l’égalité. Là où nous sommes férocement attachés à l’égalité de tous en toutes choses, sans considération ni d’âge ni de tout autre critère social ou démographique, eux estiment inégalitaire de ne pas tenir compte des arguments de justice intergénérationnelle qu’ils avancent. Selon eux, c’est un argument éthique fort - si ce n’est politique - qui prend tout son poids avec l’âge, quand d’autres pèsent au contraire moins lourds avec les années, comme par exemple l’argument d’autonomie, car ce qui fait sens au plan éthique à 20 ans ne pèse pas le même poids à 70 ans et réciproquement.

Qui a raison ? Au moins, pourrions-nous en débattre, sans clouer si vite au pilori ceux qui osent chez nous ouvrir la question ! Combien parmi ceux dont d’aucuns ont pensé qu’il serait sage de les inciter à continuer de se confiner au-delà du 11 mai seraient prêts à souscrire aux obligations éthiques proposées par Churchill ? Peut-être beaucoup plus que l’on imagine ? Et que pensent les jeunes générations de cet argument de justice intergénérationnelle, car enfin pour se déterminer de façon démocratique sur la question, leur avis est au moins aussi important que celui des âgés. Quel drôle de pays qui se fait prier pour développer les soins palliatifs ou les ressources humaines en Ehpad, mais rechigne à lésiner sur l’argent dépensé en réanimation pour les mêmes personnes âgées !

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