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Jours tranquilles à Paris

24 juillet 2019

Boris Johnson va devenir le prochain premier ministre du Royaume-Uni

boris99

Par Philippe Bernard, Londres, correspondant

L’ancien maire de Londres, décidé à sortir « coûte que coûte » son pays de l’UE, a été désigné, mardi, chef du Parti conservateur et remplacera Theresa May dès mercredi.

Immédiatement après le référendum de juin 2016, le chef de la campagne pro-Brexit, Boris Johnson, surpris par sa propre victoire, avait fait défection, renonçant à mettre en œuvre le divorce d’avec l’Union européenne (UE) et à diriger le pays.

Trois années plus tard, il a été confortablement élu, mardi 23 juillet, chef du Parti conservateur et devait entrer au 10 Downing Street mercredi. Ayant recueilli 66 % des voix des 159 000 membres des tories, seuls appelés à s’exprimer, contre 34 % à son adversaire, le ministre des affaires étrangères Jeremy Hunt, Boris Johnson dispose d’un mandat politique clair pour réaliser sa promesse phare : rendre le Brexit effectif d’ici au 31 octobre.

En 2016, Theresa May, qui avait voté sans enthousiasme pour rester dans l’UE, avait, elle, été désignée chef de file des conservateurs sans vote, après le retrait de tous ses challengers.

Selon les institutions britanniques, le chef du parti qui commande une majorité au Parlement devient premier ministre. Mercredi, Mme May, après avoir répondu une dernière fois aux questions des parlementaires, devait présenter sa démission à la reine Elizabeth II. Puis Boris Johnson devait se présenter à la souveraine et prononcer ensuite son premier discours de chef du gouvernement.

« Concilier deux nobles instincs »

Dès l’annonce de sa victoire, il a prononcé quelques mots apaisants, appelant à « concilier deux nobles instincts : le profond désir d’amitié, de commerce et de soutien mutuel entre la Grande-Bretagne et nos partenaires européens, et le désir profond et sincère d’un gouvernement autonome et démocratique de ce pays » 

Mais sa modération a immédiatement été parasitée par les déclarations lourdement louangeuses de Donald Trump. « Ils l’appellent le Trump de Grande-Bretagne. Et les gens disent que c’est une bonne chose, s’est enthousiasmé le président des Etats-Unis devant des étudiants à Washington. Les gens m’aiment là-bas. (…) Boris est bien, il va faire du bon travail. » Degré supplémentaire dans l’ingérence, M. Trump a affirmé que le nouveau premier ministre britannique allait « bien travailler avec Nigel Farage », le leader du Parti du Brexit (extrême droite), un familier de la Maison Blanche.

Après Theresa May, une proeuropéenne tiède, c’est donc un europhobe dur, prompt à réclamer « le beurre et l’argent du beurre » à l’UE, qui va diriger le gouvernement britannique. Boris Johnson a été adoubé par une partie des députés conservateurs, puis par les adhérents à un moment où le pays et le Parlement, dans l’impasse totale sur le Brexit, se trouvent en plein désarroi.

A l’évidence, la personnalité désinhibée, brouillonne et fantasque de M. Johnson est aux antipodes de celle de Mme May, introvertie, solitaire, studieuse et obstinée.

« Bojo’s mojo »

Pendant sa campagne, le nouveau premier ministre n’a cessé de jouer sur ce contraste, promettant que son énergie et son charme allaient changer la donne. Ses partisans ont relayé la formule du « Bojo’s mojo », la « magie de Boris Johnson ». Lui-même a magnifié l’enthousiasme et le nouvel esprit de « can do » (« on peut le faire ») dont il se dit porteur pour son « formidable pays ».

Pour séduire les parlementaires, longtemps réticents à son égard, M. Johnson a rappelé son élection surprise en 2008 comme maire de Londres, ville de gauche, tout en développant des positions dures sur le Brexit. Il a promis que le Royaume-Uni sortirait « coûte que coûte » de l’UE d’ici au 31 octobre, même au prix d’une rupture sans accord (« no deal »). Selon les experts, cela coûterait au bas mot 30 milliards de livres (33 milliards d’euros) par an à l’économie britannique.

L’ancien ministre des affaires étrangères a affirmé qu’en cas de « no deal » un accord commercial pourrait être négocié avec l’UE pendant une période transitoire, sans retour des droits de douane. Une assertion qui a été formellement démentie par le gouverneur de la Banque d’Angleterre. Il a aussi promis de baisser les impôts sur le revenu des plus fortunés et juré qu’il allait financer largement les secteurs les plus en difficulté, comme l’éducation, l’aide sociale et le logement.

« L’atout de Boris Johnson, si on peut utiliser ce mot, c’est que tout le monde suppose qu’il ment dès qu’il dit quelque chose », tempère Anand Menon, professeur de politique européenne au King’s College de Londres et directeur du cercle de réflexion UK in a Changing Europe. Selon un sondage, seuls 27 % des Britanniques pensent que leur pays quittera l’UE d’ici au 31 octobre, comme l’a juré M. Johnson. La versatilité du nouveau premier ministre alimente toutes les prédictions, y compris celle d’une volte-face et d’une demande d’un nouveau délai pour préparer des élections législatives anticipées.

« La prise du pouvoir va ressembler à un cauchemar »

Car Boris Johnson a beau « être Boris », comme disent ses proches, il va devoir gérer une situation semblable à celle qui a coûté son poste à Mme May.

« La prise du pouvoir va ressembler à un cauchemar », résume Laura Kuenssberg, journaliste politique vedette de la BBC. Beaucoup de commentateurs estiment que les défis posés au nouvel occupant du 10 Downing Street sont les plus difficiles qu’un premier ministre ait eus à relever depuis 1945.

Au Parlement, M. Johnson ne dispose que d’une infime majorité – trois voix, peut-être deux après une législative partielle prévue pour le 1er août. La probabilité pour qu’il soit contraint d’organiser des élections anticipées apparaît d’autant plus forte que, à peine installé, le nouveau chef du gouvernement affronte une rébellion au sein de son propre parti.

Fait sans précédent, trois ministres sortants, dont le chancelier de l’Echiquier, Philip Hammond, ont annoncé qu’ils démissionneraient plutôt que d’avoir à servir sous M. Johnson. Un quatrième, le secrétaire d’Etat aux affaires étrangères, Alan Duncan, qui avait comparé le comportement de M. Johnson à « un numéro de cirque », a claqué la porte dès le lundi 22 juillet.

Un certain nombre de députés conservateurs, résolument hostiles au « no deal » envisagé, fourbissent de leur côté leurs armes. Le vote, mi-juillet, y compris par quarante-deux députés tories, d’un amendement destiné à empêcher le gouvernement de court-circuiter le Parlement pour décider d’un « no deal », donne un avant-goût de ce qui attend le nouveau premier ministre à partir du 3 septembre, jour de la rentrée parlementaire.

Retour « à la réalité »

D’autant que l’équipe de campagne de M. Johnson comprend à la fois des libertariens, résolument hostiles à l’UE, et des pragmatiques, plus conciliants, entre lesquels il devra naviguer. L’annonce de la composition du gouvernement, dans les jours à venir, devrait donner une indication des choix du nouveau chef du gouvernement.

Dans l’immédiat, l’arraisonnement d’un pétrolier britannique dans le détroit d’Ormuz et les tensions avec l’Iran posent un défi d’un autre ordre à M. Johnson, dont les gestes d’amitié à l’égard de Donald Trump mettent à l’épreuve la solidarité européenne sur le dossier du nucléaire iranien.

Très vite, le nouveau premier ministre devrait rencontrer la chancelière allemande Angela Merkel, et le président français Emmanuel Macron. Boris Johnson, qui se fait fort de renégocier l’accord sur le Brexit sur des points essentiels comme la question irlandaise, risque de se heurter à une fin de non-recevoir des Vingt-Sept, ou à une ouverture limitée aux « relations futures ». Alors que M. Johnson considère l’accord de Mme May comme « mort », Michel Barnier, le chef des négociateurs européens lui a mis la pression en tweetant dès mardi : « Nous attendons avec impatience de travailler constructivement pour faciliter la ratification de l’accord. »

Dans une retentissante chronique publiée le jour même de l’intronisation de M. Johnson, William Hague, ancien dirigeant des tories et eurosceptique, a adressé une série de mises en garde à son « ami ». « La stratégie du Brexit “coûte que coûte” est contre-productive, assène-t-il, car elle n’effraie pas l’UE, mais pousse à l’opposition certains ministres. »

« Tu n’as cessé de défendre un accord amélioré avec l’UE, mais tu as constamment fait en sorte de le rendre impossible », ajoute-t-il, conseillant à M. Johnson de revenir « à la réalité ». Boris Johnson rêve depuis l’enfance d’entrer au 10 Downing Street. Mais il lui faudra assurément davantage que sa « magie » personnelle pour réussir là où Theresa May s’est enlisée.

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24 juillet 2019

Helmut Newton

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24 juillet 2019

Paris : au cœur du chantier de la ligne 6 du métro

Paris : à 113 ans, un lifting pour les voies aériennes de la ligne 6

Fermée jusqu’au 1er septembre inclus, entre Montparnasse et Trocadéro, la partie aérienne de la ligne 6, dont le pont de Bir-Hakeim, se refait une beauté. Les ouvrages d’art n’avaient pas été touchés depuis… 1906.

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Paris, ce mardi. La rénovation des voies aériennes du tronçon ouest de la ligne 6, ici au niveau de la station Sèvres-Lecourbe, a débuté au 1er juillet 2019. LP/Raphaël Pueyo

Par Thibault Burban

Complètement dévêtue. Plus de rail, ni de ballast… À la station de métro Sèvres-Lecourbe, les ouvriers, la tête à hauteur de quai, s'appliquent à déposer une résine d'étanchéité. Moment rare. Dans quelques jours, l'endroit aura retrouvé son état normal. Avec une voie toute neuve.

« Depuis 1906, sur cette partie, il n'y a jamais eu de travaux sur les ouvrages d'art, souligne Frédéric Legard, chef de projet rénovation du viaduc de la ligne 6. Les seuls changements ont eu lieu en 1974 avec le passage au métro pneumatique. » Le chantier de cet été s'inscrit dans une démarche lancée en 2014 de rénovation des parties aériennes, entre Montparnasse et Trocadéro. « L'arrêt de cinq ans s'explique par le fait qu'on ne voulait pas de doublon avec la coupure totale du RER A l'été, commencée en 2015 », explique David Courteille, directeur d'unité opérationnelle.

Tranquille pour 40 ans

En 2014, le sablage et la remise en peinture des ouvrages d'art du viaduc entre Pasteur et Cambronne, et la reprise d'étanchéité et le changement de voie entre La Motte-Picquet - Grenelle et Bir-Hakeim ont été les principaux travaux effectués. Cette année, le chantier avance et concerne d'autres parties du tronçon (peinture entre Cambronne et Passy et étanchéité entre Pasteur et Cambronne). « Quand on a tout enlevé, en fonction de nos découvertes, on rénove ou remplace à l'identique certaines maçonneries et parties métalliques, détaille Frédéric Legard. On reprend également les systèmes d'évacuation des eaux pluviales. »

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Près de 350 ouvriers travaillent sur ce chantier d’envergure.LP/Raphaël Pueyo 

En tout, près de 2 300 t de ballast (lit de pierres concassées qui soutient les traverses) ont été enlevés (et seront remis) sur un linéaire de plus de 2 km. Au plus fort de l'activité, environ 350 ouvriers travaillent sur ce chantier. La reprise du trafic est prévue le 2 septembre. Une interruption similaire aura lieu l'été prochain, pour la troisième et dernière phase de cette rénovation chiffrée à 44 M€. La durée de vie de la nouvelle peinture anticorrosion est estimée à 20 ans, celle du complexe d'étanchéité à 40 ans.

Des quais rabotés de 2 cm

Plusieurs opérations viennent se greffer à ce chantier. Du 15 au 18 août, le renouvellement d'un appareil de voie à Kléber amènera une coupure du trafic entre Trocadéro et Charles de Gaulle - Étoile. « On mutualise pour empêcher d'autres interruptions du trafic », note la RATP. Des escaliers sont ainsi remplacés à Bir-Hakeim. Surtout, sur les 28 stations que compte la ligne, 13 verront leurs quais amputés de… 2 cm, pour accueillir à partir de 2021 de nouvelles rames.

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Les traverses métalliques du pont de Bir-Hakeim seront toutes remplacées avant le 2 septembre. LP/Raphaël Pueyo 

C'est déjà le cas de la station Passy, même si la fraîche peinture ne laisse rien deviner. À quelques pas, le fameux pont de Bir-Hakeim voit ses traverses métalliques remplacées. L'an prochain, la dernière tranche du chantier enjambera le pont, direction Trocadéro. Pour définitivement retrouver le charme et la solidité du siècle dernier.

COUP DE CHAUD SUR LA LIGNE 6

Les voies ont beau être aériennes, là-haut, c'est la même fournaise. Avec la hausse du thermomètre, la RATP et les entreprises ont pris plusieurs mesures : horaires décalés pour éviter de travailler entre 14 heures et 16 heures, au moins trois litres d'eau fraîches par personne, des frigos et fontaines à plusieurs points… La chaleur amène également à décaler certaines tâches. La soudure de rails ne peut ainsi pas se faire à une température dépassant les 25°.

23 juillet 2019

Street Art

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23 juillet 2019

Premiers de cordée

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23 juillet 2019

Leni Riefenstahl, fondu au noir sur le IIIe Reich

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Riefenstahl vers 1935. Photo Rue des archives. Everett

Elle a filmé l’Allemagne de Hitler sous tous les angles. L’héritage cinématographique de Leni Riefenstahl suscite autant la fascination que l’effroi, tant la réalisatrice excellait dans l’esthétique et la glorification du régime. Jamais condamnée pour ses activités durant la guerre, elle laissera toujours planer le doute sur son adhésion au projet nazi.

Leni Riefenstahl, fondu au noir sur le IIIe Reich

«Dans la Lumière bleue, j’ai joué le rôle de Junta, qui est une sorte de sorcière. C’est comme une prémonition de ma propre vie. Junta fut aimée et haïe. C’est pareil pour moi. J’ai été aimée et haïe. Et de la même manière que Junta a perdu son idéal à travers le bris du cristal, j’ai perdu mon idéal après cette horrible guerre.» (1) Leni Riefenstahl était une femme méticuleuse. Tout ce qu’elle a entrepris dans sa très longue existence - 101 ans - a fait l’objet d’un soin infini. Il y eut d’abord la danse. Ensuite le cinéma. Puis la photographie. Elle excella dans ces trois domaines. Précisément parce qu’elle était laborieuse, attentive au moindre détail et opiniâtre. Il n’est donc pas surprenant qu’elle ait consacré près de cinquante ans et une énergie folle à ce qui fut, au fond, l’œuvre de sa vie : entretenir sa légende à grand coup de polish. Mais on n’efface pas aisément un tel passé. Comment rebondir dans la vie lorsqu’on a été la propagandiste vidéo du IIIe Reich et que la guerre est terminée ?

«Diriez-vous que la beauté est fasciste ?»

Star damnée, Leni Riefenstahl a partiellement raté sa reconversion. Elle est restée «la cinéaste de Hitler», l’égérie des nazis, la réalisatrice du film le Triomphe de la volonté (1935). Une artiste ayant mis son talent au service du régime national-socialiste. Après la guerre, elle a échappé aux sanctions. Mais pas à l’opprobre.

Pourtant, elle s’est efforcée de maintenir sa version jusqu’au bout : elle n’était pas nazie, elle était une artiste. «La laideur, la misère, le pathologique me répugnent. Direz-vous que la beauté est fasciste ?» crânait-elle en 1980 face à un journaliste du journal le Monde.

Elle-même était très élégante, soignée mais sans ostentation, altière et un brin charmeuse. Voire charmante. Jusqu’au moment où un journal la qualifiait de nazie, où un biographe évoquait ses liens avec l’élite du IIIe Reich ; alors elle allait en justice - elle a gagné ainsi plusieurs procès en diffamation. Dans le même temps, pendant plus de cinquante ans elle a répété : «Je n’ai jamais été national-socialiste. J’admirais Hitler, voilà tout.» Avec un extraordinaire aplomb. Leni Riefenstahl ne semblait rien regretter.

Lors des enquêtes en dénazification, elle s’en est tenue à une ligne de défense très claire, avec trois arguments. 1) Je suis une artiste or l’art échappe à la politique. 2) Si on me condamne, que faire d’Eisenstein ? 3) J’étais extérieure au régime, je n’appartenais pas au parti nazi et Goebbels (ministre de la Propagande) me détestait. Lorsque le documentariste allemand Ray Müller, dans Leni Riefenstahl, le pouvoir des images (1993), l’interroge sur ce point - car il s’avère que Goebbels parle d’elle à plusieurs reprises dans son Journal, en des termes relativement positifs -, elle se lève, se fâche tout rouge, et conclut : «Goebbels était le roi du mensonge.»

Ce que l’on sait : Helene Bertha Amalie, dite «Leni» Riefenstahl, est née à Berlin le 22 août 1902, d’un père industriel et d’une mère sans profession. Elle fait de la gymnastique, de la natation, et surtout de la danse ; douée, elle devient soliste au Deutsches Theater de Berlin. Mais sa carrière s’interrompt en 1924 lorsqu’elle se blesse au genou. Cette blessure changera sa vie. «J’attendais un train, raconte-t-elle à Ray Müller. Je devais aller chez le docteur car je m’étais blessé le genou et ne pouvais pas danser. J’étais impatiente parce que le train était en retard. Alors que je m’apprêtais à monter à bord, j’avisai une affiche, la Montagne du destin, avec un alpiniste escaladant un gouffre. Fascinée, je ratai mon train. […] Oubliant le médecin, je suis allée au cinéma.» Elle devient actrice de «films de montagne», genre cinématographique dans lequel les Allemands excellent - avec la montagne comme décor monumental de drames intimes, idéal romantique et mystique. Enthousiaste, bosseuse, téméraire, elle fonde sa société de production et tourne son premier film, la Lumière bleue (1932), dans lequel elle joue le rôle principal. La fameuse Junta à laquelle elle aimait tant s’identifier.

Perfection formelle et dictateur messianique

Si Leni Riefenstahl s’est toujours défendue de faire de la politique - son argument en or massif -, elle assista à son premier meeting en février 1932. Adolf Hitler s’exprimait au Sportpalast de Berlin. Elle décrit l’effet que lui produit alors le futur dictateur. Son vocabulaire est mystique, son état entre l’hypnose et l’orgasme. «Je me sentis submergée de façon ahurissante par une vision apocalyptique qui ne me quitterait jamais plus : j’eus l’impression très physique que la terre s’ouvrait devant moi comme une orange soudain fendue par son milieu et dont jaillirait un jet d’eau immense, si puissant et si violent qu’il atteindrait le sommet du ciel et que la Terre en serait secouée dans ses fondements.» Extatique, elle adresse à Hitler une lettre enthousiaste et, à sa grande joie, ce dernier lui répond. Une belle «amitié» commence. Elle durera plusieurs années.

Cette relation fait décoller définitivement sa carrière : en août 1934, Adolf Hitler devenu chancelier la sollicite afin de filmer le congrès du parti nazi à Nuremberg. Elle en sortira un film intitulé le Triomphe de la volonté. Tout y est : l’esthétique fascisante, la perfection formelle, le mouvement ordonné des foules, les corps à l’œuvre, le dictateur messianique.

Beaucoup de nos représentations visuelles du nazisme nous viennent de Leni Riefenstahl. Et pourtant, estime l’historien Johann Chapoutot (2), ses films n’ont pas une grande valeur documentaire. Le pouvoir n’y est pas mis à nu ; il est mis en scène : «Quand on connaît le fonctionnement concret de l’appareil nazi, contrairement à ce que montre Riefenstahl, c’est un bazar sans nom, opaque, concurrentiel, désorganisé, corrompu.» Les Dieux du stade (1938), son film sur les Jeux olympiques de Berlin en 1936, est d’une grande virtuosité technique. A-t-on jamais filmé le sport ainsi ? Elle y célèbre surtout, formule le documentariste Jérôme Prieur dans les Jeux de Hitler, Berlin 1936 (2016), «le corps en pleine vigueur, la beauté des apparences, l’hygiène de la race sportive». C’est une débauche de moyens. Riefenstahl est accompagnée d’une équipe de 300 personnes, le film va coûter 2 millions de reichsmarks, soit quatre fois le budget d’un film de l’époque. Et tout cela est financé par le régime. En somme, Hitler a permis à Riefenstahl de réaliser son rêve d’artiste : des moyens illimités afin de déployer son art. Pour le reste… Elle regarde ailleurs.

Durant la guerre, elle s’attelle à un film, Tiefland, qui ne sortira qu’en 1954. Mais voilà que le conflit se termine. Réfugiée dans son chalet du Tyrol, elle y est arrêtée en 1945. Son «procès» en dénazification, en zone d’Occupation française - le terme de procès est impropre puisqu’il s’agit d’une procédure administrative et non judiciaire -, peut commencer. Les anciens nazis sont classés en plusieurs catégories, parmi lesquelles on trouve les suivistes - les mitläufer - ou bien les personnes «exonérées». Ces deux catégories excluent les personnes «non concernées», c’est-à-dire étrangères à la dénazification, tels les opposants avérés ou victimes du régime. On sera donc surpris d’apprendre qu’un premier jugement de la chambre de dénazification la considère comme «non concernée». Le gouvernement militaire conteste cette décision et fait appel. Le cas est réexaminé à Fribourg, la chambre confirme sa décision. Fait rare, le gouvernement militaire fait une nouvelle fois appel.

Un troisième examen du cas Riefenstahl a lieu en décembre 1949 : c’est ainsi qu’elle est finalement classée comme mitlaüferin, «suiviste». Face aux autorités d’épuration, elle accumule les mensonges. Affirme qu’elle n’a pas bénéficié d’avantages financiers. Qu’elle n’avait pas de rapport particulier avec Hitler. Elle évoque une grave maladie l’obligeant à séjourner en montagne (elle qui faisait de la plongée sous-marine à 90 ans). Enfin, elle assène ses deux arguments massue : elle n’avait pas sa carte du parti et elle est une artiste. «Elle a réussi un sacré tour de passe-passe, commente Johann Chapoutot. Comme Albert Speer, elle a dit, en somme : "J’étais une artiste, je n’ai rien vu, je n’ai pas compris", et elle a maintenu cette version jusqu’à la fin.»

Un 100e anniversaire en grande pompe

Si l’institution l’a dédouanée, l’opinion ne l’a pas oubliée. Leni Riefenstahl sera écartée du milieu du cinéma. Comme ses collègues ? Pas vraiment. «Si elle fait partie de ceux qui ont profité du national-socialisme pour faire carrière, elle s’en est nettement moins bien sortie que d’autres, dit la journaliste Géraldine Schwarz, auteure du livre les Amnésiques (Flammarion, 2017). L’acteur nazi Gustaf Gründgens, par exemple, a dirigé le Schauspielhaus de Hambourg, de 1955 à 1963. Et Veit Harlan, réalisateur du Juif Süss [film de propagande antisémite sorti en 1940, ndlr] a continué sa carrière dans les années 50.»

Riefenstahl, elle, photographie des Noubas, populations africaines des monts Nouba, au Soudan, s’intéresse aux fonds sous-marins, fait de la plongée, donne des interviews et nie tout en bloc. Cela lui prendra cinquante ans. La pestiférée finira par fêter ses 100 ans en grande pompe à Munich, en compagnie de nombreux invités - dont les magiciens germano-américains Siegfried et Roy. Un an avant que Roy ne manque de se faire croquer la tête sur scène par l’un de ses tigres. Un an avant la mort de Leni Riefenstahl, le 8 septembre 2003 à Munich. Elle regretta beaucoup l’échec de son film Tiefland, commencé dans les années 30. Mais elle s’épancha moins sur le sort de la cinquantaine de figurants roms et sintis recrutés dans un camp nazi près de Salzbourg pour les besoins du film. Renvoyés en camp de concentration aussitôt après le tournage, la moitié d’entre eux y ont péri.

(1) Leni Riefenstahl, le pouvoir des images (1993), de Ray Müller. (2) La Loi du sang. Penser et agir en nazi, de Johann Chapoutot, Gallimard, 2014.

23 juillet 2019

La vie d'Adèle

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23 juillet 2019

Traversée de la Manche en Flyboard : Franky Zapata reçoit un « avis défavorable » de la préfecture maritime

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La préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord a émis un « avis défavorable » au projet de Franky Zapata. Le champion du monde de jet-ski français envisage de traverser la Manche le 25 juillet à bord de son Flyboard. Les Français ont découvert son incroyable invention dimanche 14 Juillet lors du défilé militaire sur les Champs-Elysées.

« On lui a fait parvenir un courrier dans lequel on émet un avis défavorable à son projet », a expliqué la préfecture maritime à l'AFP, confirmant une information de La Voix du Nord. Toutefois, cet avis ne constitue pas une interdiction, a précisé la préfecture maritime.

L'accord de l'Aviation civile

« Nous savons que côté DGAC (Direction générale de l'Aviation civile), il a eu les accords, mais côté maritime, il n'y a pas eu d'accord », a-t-elle ajouté, assurant que Franky Zapata n'avait pas déposé de « déclaration de manifestation nautique ».

« On lui a donc envoyé un courrier en lui disant qu'on émettait un avis défavorable à son projet compte tenu de la dangerosité de la zone », a indiqué la préfecture maritime.

« C'est une zone extrêmement dangereuse, nous n'étions pas sûrs qu'il puisse passer au-dessus des porte-conteneurs et le détroit du Pas-de-Calais représente un quart du trafic mondial avec des bateaux très grands et pas manoeuvrants », a-t-elle argumenté.

Ravitaillement dans les eaux anglaises

« Nous lui avons demandé dans le courrier qu'au moment où il décide de traverser, il prévienne le Cross (Centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage) pour qu'il puisse le suivre et réagir en cas de problème en mer », a poursuivi la préfecture.

« La tentative de traversée est maintenue », a affirmé Anna Venekas, chargée de la communication de Franky Zapata. « Mais nous avons modifié légèrement le programme. Contrairement à ce qui était prévu initialement, il n'y aura pas de ravitaillement en vol dans les eaux territoriales françaises mais seulement dans les eaux territoriales anglaises. » En outre, « un deuxième bateau sera positionné plus près des côtes anglaises, ce qui permettra l'option d'un second ravitaillement », a-t-elle ajouté.

23 juillet 2019

Petter Hegre - photographe

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23 juillet 2019

Eglise Saint Germain des Près (rénovée)

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