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Jours tranquilles à Paris

1 septembre 2020

Emmanuel Macron place François Bayrou au Plan

Audrey Tonnelier - Le Monde

Le président du MoDem va prendre la tête, le 3 septembre, du Haut-Commissariat au Plan et à la prospective

C’est un morceau de l’ancien monde qui fait irruption dans le nouveau. Le Haut-Commissariat au Plan, vestige de l’après-guerre, créé en 1946, doit être ressuscité le 3 septembre en conseil des ministres, en même temps que la présentation du plan de relance pour le pays, a annoncé Emmanuel Macron devant l’Association de la presse présidentielle, vendredi 28 août. Une double renaissance, puisque le chef de l’Etat a confié à son allié François Bayrou le soin de réveiller cette institution mise en sommeil depuis le début des années 1990.

Le président du MoDem était sorti du gouvernement en juin 2017 à cause de l’affaire des assistants présumés fictifs de son parti au Parlement européen. L’annonce n’est pas que symbolique. Si la nomination du maire de Pau, dans les tuyaux depuis début juillet, s’est fait attendre tout l’été, c’est parce que cette fonction revêt un caractère transversal dans l’action de l’exécutif. La définition de son périmètre a donné lieu à d’intenses tractations avec le premier ministre, Jean Castex, désireux de ne pas voir le centriste se muer en chef du gouvernement bis.

Un ministre résumait, au cœur de l’été, le problème posé par ce retour de la planification au sommet de l’Etat. « Ce Commissariat au Plan interroge le rôle du premier ministre. Est-ce que cette institution est uniquement un organisme de réflexion, ou bien intervient-elle sur tous les ministères ? Si le Plan est impératif, ça veut dire que le commissaire au Plan est au niveau du premier ministre », estimait alors ce membre du gouvernement.

Or, François Bayrou ne cesse de répéter en privé qu’il veut rétablir la « philosophie d’origine » de la fonction. Jean Monnet, premier titulaire du poste en janvier 1946 sous l’égide de Charles de Gaulle, à l’époque président du gouvernement provisoire de la République française, avait pour mission de moderniser le pays et son économie sur la base de plans quinquennaux, en associant fonctionnaires, ingénieurs, chercheurs et partenaires sociaux. « Il avait un décret d’attribution très étendu. Le premier plan fut adopté en conseil des ministres », rappelle le secrétaire général du MoDem, Jean-Noël Barrot, qui a envoyé une note sur le sujet à l’Elysée.

De son côté, Jean Castex voit le Haut-Commissariat au Plan comme un moyen de « rééclairer l’action publique d’une vision de long terme ». « Il faut recréer des outils de prospective », a-t-il défendu, le 8 juillet, en assurant que sa « seule préoccupation, c’est l’action face à la crise qui arrive ». Une vision partagée par le chef de l’Etat. « On a besoin d’avoir au service du président de la République et du gouvernement une instance qui réfléchit à plus long terme et avec moins de contraintes, en connaissant le pays », a souligné Emmanuel Macron, vendredi.

Après l’abandon des plans quinquennaux au début des années 1990 – le dernier s’acheva en 1992 –, le Commissariat a vu son influence décroître ces dernières années, son rôle étant recentré sur une fonction d’expertise. Baptisé, en 2006, Centre d’analyse stratégique, puis, en 2013, France Stratégie, il a connu un bref regain de notoriété à la faveur du passage à sa tête (2013-2017) de l’économiste Jean Pisani-Ferry, avant que ce dernier ne rejoigne l’équipe de campagne du candidat Macron à la présidentielle.

Rattaché à l’Elysée

Aujourd’hui, François Bayrou souhaite que les différentes agences chargées de la prospective lui soient rattachées. Le secrétariat pour l’investissement ou encore le Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), successeur de la Datar, sont aujourd’hui sous l’autorité de Matignon. Un conseiller ministériel résume la chose crûment : « Il y a une guerre Castex-Bayrou. Castex ne peut pas accepter un Etat dans l’Etat. »

Le Béarnais pourrait devenir un rival potentiellement encombrant, aussi, aux yeux du ministre de l’économie, Bruno Le Maire, chargé de conduire la relance. Le maire de Pau a déjà obtenu gain de cause sur un point crucial : son poste sera rattaché directement à l’Elysée, et pas à Matignon. Une manière, plaide-t-il, de ne pas apparaître comme une instance gouvernementale et de battre en brèche toute idée de concurrence avec le premier ministre.

Dans son esprit, le président de la République est celui qui définit le temps long, là où le chef du gouvernement s’attache à la gestion quotidienne des affaires de l’Etat. Rien de plus logique, donc, que de rendre des comptes au premier, et pas au second. D’autant que cette renaissance du Plan est avant tout une volonté du chef de l’Etat.

L’idée est réapparue à la faveur de l’épidémie de Covid-19. Au printemps, l’Elysée faisait valoir que cette crise inédite rebattait les cartes de la mondialisation et ébranlait les fondements du libre-échange. Le manque de masques ou de médicaments, produits pour la plupart en Chine, a remis au centre du débat les sujets de souveraineté économique et de relocalisation industrielle.

Les critiques à l’égard de la gestion de la crise par l’Etat central, par ailleurs, auraient illustré selon l’exécutif le besoin de déconcentration et de plus grande proximité entre les citoyens et leurs services publics. Une demande déjà présente parmi les doléances des « gilets jaunes ».

« Cette crise a révélé des fragilités en termes d’adaptabilité de l’Etat et des collectivités territoriales. Nous avons besoin de voir à moyen et long terme. C’est ce qui donne tout son sens à la création d’un Haut-Commissariat au Plan », indiquait le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, le 16 juillet, dans une interview aux Echos.

Est-il possible pour autant, dans la France de 2020, de ressusciter cette institution à l’identique ? « Les raisons pour lesquelles le Plan a disparu au début des années 1990 sont toujours là : l’acceptation de la mondialisation, l’économie de marché, la multiplication des contraintes budgétaires, mais aussi le fait que la plupart des grands investissements (TGV, autoroutes…) sont aujourd’hui derrière nous », avertit Philippe Martin, ancien conseiller économique d’Emmanuel Macron, aujourd’hui patron du Conseil d’analyse économique, un think tank rattaché à Matignon. Celui-ci voit néanmoins matière à réflexion pour le futur haut-commissaire dans des domaines comme le changement climatique, la question territoriale, ou encore la démographie, avec le vieillissement de la population.

Le risque est grand, néanmoins, de voir se multiplier les instances. Fin mai, Emmanuel Macron a déjà installé une commission d’experts sur les grands défis économiques, sous l’égide de Jean Tirole, prix Nobel d’économie 2014, et d’Olivier Blanchard, ancien chef économiste du Fonds monétaire international (FMI), censée livrer des recommandations autour des thèmes du « climat », des « inégalités » et du « vieillissement ».

« L’expérience est nécessaire »

Toujours est-il que, sur le plan politique, le choix de confier ce poste à François Bayrou, qu’il pourra cumuler avec sa mairie de Pau, suscite des critiques dans l’opposition. « François Bayrou y a beaucoup réfléchi, c’est une conviction qu’il porte », a défendu M. Macron, prenant soin de préciser que pour l’ancien triple candidat à la présidentielle, « c’est tout sauf un lot de consolation, c’est une responsabilité importante ».

« Qui imagine le haut-commissaire au Plan mis en examen ? », ironise néanmoins le secrétaire national d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), Julien Bayou, alors que M. Bayrou est placé sous ce statut depuis décembre 2019 pour « complicité de détournement de fonds publics » dans l’affaire des assistants de son parti.

« On prend les mêmes qui échouent depuis quarante ans et on recommence ! », dénonce de son côté le Rassemblement national, pointant du doigt le fait que l’ancien ministre de François Mitterrand et de Jacques Chirac, âgé de 69 ans, a commencé sa carrière d’élu en 1983.

Un argument balayé par l’intéressé devant ses proches ces dernières semaines. « Si j’ai besoin de traverser l’Atlantique à la voile, et que je dois choisir entre Titouan Lamazou, qui a traversé l’Atlantique cent fois, et un petit jeune très bien qui ne l’a jamais fait, qui je prends comme skippeur ? L’expérience est nécessaire », plaide-t-il en petit comité. Les récifs placés sur sa route sont nombreux.

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1 septembre 2020

Vu sur internet

jaime41

1 septembre 2020

Fiction raciste : «Valeurs actuelles» au bout de sa logique

Par Jérôme Lefilliâtre — Libération

On aurait donc mal compris le texte de Valeurs actuelles sur Danièle Obono. «Ce n’est pas un texte raciste», a tenté de plaider, en réponse à la condamnation unanime de son dernier fait de gloire journalistique, le directeur du magazine d’extrême droite, Geoffroy Lejeune. On aurait manqué, nous autres ignares, de perspicacité, de hauteur de vue, de connaissance de l’histoire.

Car il se serait seulement agi de rappeler que l’esclavage avait bénéficié de complicités de trafiquants africains - une vieille coutume de l’extrême droite est de minorer la responsabilité des Occidentaux en mettant en avant celle de certains Noirs. Si cet infâme article imaginant la députée de La France insoumise dans un village tchadien du XVIIIe siècle donne la nausée, ce ne serait pas parce qu’il est bêtement à vomir, mais parce que l’esclavage est une horreur, dont Valeurs aurait tenu à nous rappeler l’affreuse réalité. Rien à voir, donc, avec les préjugés ou les obsessions du magazine, a affirmé Geoffroy Lejeune, qu’on a pourtant senti plus péteux que jamais à la télévision ce week-end.

Publier un texte anonyme sur une femme noire contenant des phrases comme «Danièle fut échangée avec des Toubous prévenus par un tam-tam» ou «elle était pour sa part heureuse d’être trop âgée pour subir ce douloureux écartèlement des lèvres permettant d’y glisser ces plateaux de bois qui leur donnaient ce profil qui l’effrayait malgré elle» n’aurait rien de raciste pour le directeur de l’hebdomadaire. C’est raciste, absolument. On imagine le sourire de l’auteur au moment d’écrire ces lignes, ravi d’adresser un clin d’œil complice, bien entendu, à son lecteur… Interrogé par Libé sur l’identité de ce mystérieux rédacteur, nommé «Harpalus», Geoffroy Lejeune répond : «Je ne veux pas le dire car c’est inutile. J’assume la responsabilité dans cette histoire.»

Qui lit Valeurs actuelles de temps à autre sait parfaitement à quoi s’en tenir avec cet ex-magazine conservateur roupillant, qui a dérivé vers la radicalité à partir de 2012 sous la direction d’Yves de Kerdrel (qui a condamné publiquement le texte sur Danièle Obono). Son successeur nommé en 2016, Geoffroy Lejeune, qui rêve d’union des droites par l’extrême et a promu Zemmour «homme de l’année» en une début août, a poussé les feux plus loin encore dans une direction militante, plus convaincue par la cause. Le fait est que le jeune patron de Valeurs, bientôt 32 ans, se sent assez fort pour imprimer des articles aussi répugnants que ce «voyage» de Danièle Obono dans l’Afrique esclavagiste.

Comment l’injustifiable a-t-il été rendu possible ? Geoffroy Lejeune ne peut pourtant pas s’appuyer sur un bilan commercial étincelant : la «diffusion payée individuelle» de son journal, propriété de l’industriel Iskandar Safa, est tombée de 114 000 exemplaires en moyenne en 2016 à 76 000 en 2019. Ni sur les succès électoraux des candidats qu’il a soutenus, tel François-Xavier Bellamy, en déroute aux européennes. D’où vient alors l’incroyable assurance de Valeurs ? Nul doute que l’interview «exclusive» accordée par Emmanuel Macron en octobre au magazine a beaucoup contribué à ce processus d’autolégitimation et d’autopersuasion.

Mais c’est aussi l’accueil réservé à cet hebdomadaire pas du tout comme les autres dans les médias audiovisuels qui a joué. Chose impensable il y a dix ans, ses journalistes ont envahi les plateaux et studios. La nouvelle garde, composée de Charlotte d’Ornellas, Tugdual Denis, Louis de Raguenel ou Raphaël Stainville, squattent les émissions de débats construites sur la culture du clash, à l’invitation de chaînes très conciliantes. Ex-éditorialiste politique numéro 1 de LCI, Geoffroy Lejeune vient d’être appelé par Cyril Hanouna à la table des chroniqueurs de Balance ton post ! On arrête quand le délire ?

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Large soutien à Danièle Obono contre « Valeurs actuelles »

Service Politique Le Monde

De nombreuses voix ont dénoncé le « racisme » des dessins représentant la députée LFI dans le magazine conservateur

Représentation « abjecte et inacceptable »,« apologie du racisme » : la « politique fiction » du magazine conservateur Valeurs actuelles sur la députée La France insoumise (LFI) Danièle Obono, dépeinte en esclave, a suscité, samedi 29 août, une vague de condamnations, jusqu’au chef de l’Etat. Dans ce récit fiction de sept pages publié dans le cadre d’une série d’été où des personnalités politiques « voyagent dans les couloirs du temps », la députée de Paris, à la peau noire, « expérimente la responsabilité des Africains dans les horreurs de l’esclavage » au XVIIIe siècle, selon la présentation qu’en fait le magazine. Des dessins de Danièle Obono, collier en fer au cou, accompagnent ce « roman de l’été ».

Le chef de l’Etat, Emmanuel Macron, qui avait accordé un entretien exclusif à Valeurs actuelles fin 2019, a appelé la députée en fin de matinée pour lui faire part de sa « condamnation claire de toute forme de racisme », a indiqué l’Elysée à l’Agence France-Presse.

Le premier ministre avait déjà réagi plus tôt dans la journée : « Cette publication révoltante appelle une condamnation sans ambiguïté », a écrit sur Twitter Jean Castex, qui « partage l’indignation de la députée » et « l’assure du soutien de l’ensemble du gouvernement ». « La lutte contre le racisme transcendera, toujours, tous nos clivages », a ajouté le chef du gouvernement. « Le racisme est un mal nocif. Il détruit. Il est un délit », a aussi rappelé la ministre déléguée chargée de la ville, Nadia Hai, sur le réseau social. « On est libre d’écrire un roman nauséabond, dans les limites fixées par la loi. On est libre aussi de le détester. Moi je le déteste et suis [aux] côtés » de la parlementaire, a écrit pour sa part le ministre de la justice, Eric Dupond-Moretti.

« Une souillure »

Dénonçant « une insulte à [ses] ancêtres, sa famille » et « à la République », Danièle Obono a dit samedi soir sur BFM-TV « réfléchir » à porter plainte. Cette publication est selon elle « une souillure qui ne s’effacera pas », mais surtout « l’aboutissement d’un acharnement médiatique » contre elle. Le chef de file de LFI, Jean-Luc Mélenchon, s’est élevé contre un « harcèlement nauséabond » envers la députée. Réprouvant vivement un « cortège de haines, comme l’ont déjà expérimenté beaucoup de responsables politiques noirs ou d’origine maghrébine ces dernières années », l’association SOS Racisme a indiqué dans un communiqué étudier « les suites judiciaires envisageables ».

Le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand (La République en marche), a critiqué une « ignoble représentation d’une parlementaire ». « Tout mon soutien personnel et celui de l’Assemblée nationale face à ces abjections », a-t-il tweeté, suivi par de nombreux députés de tous bords. Depuis Malo-les Bains (Nord), lors de la journée d’été du Parti communiste français, son numéro un, Fabien Roussel, a lui aussi épinglé un écrit « particulièrement scandaleux ». Tout comme son homologue du Parti socialiste Olivier Faure ou l’ancienne ministre écologiste Cécile Duflot.

A l’extrême droite, un responsable du Rassemblement national, Wallerand de Saint-Just, a également condamné, toujours sur Twitter, la publication « d’un mauvais goût absolu » de Valeurs actuelles : « Le combat politique ne justifie pas ce type de représentation humiliante et blessante d’une élue de la République », selon lui.

Damien Abad, président du groupe Les Républicains de l’Assemblée, a condamné une publication « dégradante » et « inutilement polémique », mais il a estimé en revanche que Valeurs actuelles n’avait pas eu la volonté de « faire quelque chose de raciste ».

Des excuses à la députée

Le magazine d’opinion a fait valoir qu’« il s’agit d’une fiction mettant en scène les horreurs de l’esclavage organisé par des Africains au XVIIIe siècle », « terrible vérité que les indigénistes ne veulent pas voir ». « J’invite chacun à lire le texte et à voir ce qu’il contient, a expliqué au Parisien Tugdual Denis, directeur adjoint de la rédaction. Il vise à expliquer que l’esclavage n’est pas uniquement le fait des Européens mais également d’Africains. » Ce dernier reconnaît que le dessin représentant l’élue en esclave est « violent » : « C’est une image horrible car la thématique est horrible, assume Tugdual Denis, mais ce n’est pas du racisme. » Samedi, l’hebdomadaire a publié un communiqué présentant ses excuses à la députée. « Si nous contestons fermement les accusations (…), nous avons aussi suffisamment de clairvoyance pour comprendre que Danièle Obono ait pu se sentir personnellement blessée par cette fiction. Nous le regrettons et lui présentons nos excuses. »

Des militants de la Ligue de défense noire africaine se sont introduits, samedi soir, dans les locaux de Valeurs actuelles pour dénoncer « l’incitation à la haine anti-Noirs », selon une vidéo qu’ils ont diffusée sur Twitter. Les locaux étaient désertés par les employés du magazine pendant l’intrusion, selon ce mouvement qui se présente comme défenseur des « droits des Afrodescendants et des Africains ».

1 septembre 2020

David Hamilton -photographe

hamilton

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1 septembre 2020

« La première femme au marathon de Boston » (1967)

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Retour au temps où courir le marathon de Boston n'était réservé qu'aux hommes. En 1967, Katherine Witzer décide de faire bouger les lignes en s'invitant à la course à pieds. Mais les organisateurs et participants ne l'entendent pas de la même oreille. Ensemble, ils tentent de bousculer la sportive pour l'empêcher de continuer et lui arracher son dossard, interrompant ainsi l'événement. Avec l’aide de son petit-ami, elle résistera et deviendra la première femme à courir le marathon de Boston comme participante enregistrée avec ses initiales. Après avoir prouvé que les femmes étaient capables de courir 42,195 kilomètres, elle milite pour qu'elles aient le droit de courir le marathon. En 1972, le marathon de Boston s'ouvrira enfin aux femmes.

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31 août 2020

Libération de ce 31 août

libé 31 aout

31 août 2020

Jean Paul Gaultier

gaultier14

31 août 2020

Portrait - Alexeï Navalny, le patient russe

Par Benoît Vitkine, Moscou, correspondant

Victime d’un empoisonnement et exfiltré à Berlin, l’opposant à Vladimir Poutine est encore dans le coma. Le régime autocratique du président russe a toujours tout fait pour empêcher cet avocat de formation et blogueur impitoyable d’exister vraiment sur la scène politique.

Pas une seule fois, depuis qu’il est au Kremlin, Vladimir Poutine n’a prononcé son nom. Lorsqu’on l’interroge à son sujet, le président russe affiche une moue indéchiffrable, oscillant entre le dégoût et une ironie un peu hautaine : « Ce personnage », « Ce monsieur », « La personne dont vous parlez »… Comme s’il suffisait d’effacer son nom pour que, par miracle, il se taise. Depuis qu’il est tombé dans le coma, le 20 août, c’est « le patient », comme l’appelle le porte-parole de M. Poutine.

Si l’avion dans lequel il se trouvait n’avait pas atterri à Omsk, ce jour-là, Alexeï Navalny aurait bel et bien disparu de la scène politique russe, selon le directeur de l’ONG Cinema For Peace, qui, au forceps, a obtenu son évacuation vers l’Allemagne, le 22 août. M. Navalny y est toujours dans un état grave. Les médecins berlinois qui le soignent ont trouvé dans son corps des traces d’empoisonnement. Ils ignorent dans quel état l’opposant de 44 ans, père de deux enfants, se réveillera.

« Opposant numéro un » : l’expression est galvaudée et, s’agissant d’Alexeï Navalny, elle est parfois critiquée. Privé de toute apparition ou mention à la télévision, où son nom est, là aussi, tabou, il est certes moins connu des Russes qu’un Vladimir Jirinovski, le dirigeant nationaliste historique, ou qu’un Guennadi Ziouganov, son homologue communiste. Mais ceux-là n’ont d’opposant que le nom : loyaux sur l’essentiel, ils n’ont le droit que de contester les miettes, quelques places au Parlement.

Alexeï Navalny, lui, a fait le choix d’une dénonciation radicale du système autocratique russe et de sa corruption. Opposant numéro un, il l’est aussi devenu par le traitement qui lui a été réservé tout au long de sa carrière, celui d’un ennemi qu’il est vital de bâillonner. Le dédain affiché avec opiniâtreté par Vladimir Poutine contraste avec le traitement qui lui a toujours été réservé par les autorités.

Ce grand gaillard de 1,88 m ne pouvait pas faire un pas, en Russie ou à l’étranger, sans être entouré d’une nuée de provocateurs ou de « journalistes » guettant ou cherchant à provoquer un faux pas. Le 23 août, un article du quotidien Moskovski Komsomolets, basé sur des informations divulguées par le FSB (les services de sécurité russes), a aussi montré le degré de surveillance dont fait l’objet, en permanence, l’opposant. Cet article, interprété comme une façon pour les services de sécurité de clamer leur innocence, récapitule minute par minute l’emploi du temps de M. Navalny à Tomsk, en Sibérie, la veille de son empoisonnement. On y voit un Alexeï Navalny prêt à conduire 25 km, à 22 heures, pour aller se baigner dans la rivière Tom – loin de l’image renvoyée dans les portraits publiés les jours précédents, évoquant son alcoolisme ou sa toxicomanie supposés pour tenter d’expliquer un simple « malaise ».

Traitement sur mesure

Alexeï Navalny s’est depuis longtemps habitué à ce bruit de fond fait de calomnies et de harcèlement comme aux mille autres désagréments posés sur sa route. Depuis un an, sa famille – ses parents autant que ses enfants – et lui avaient, par exemple, dû s’habituer à vivre privés de cartes bancaires…

Ces tracasseries ne sont que l’un des aspects de la redoutable machine à broyer lancée par l’Etat russe contre cet opposant opiniâtre. Son outil principal est la justice, transformée en auxiliaire des services de sécurité. Ces dernières années, Alexeï Navalny et ses proches ont été les cibles de dizaines d’affaires civiles ou criminelles. Depuis 2011, lui-même a passé 232 jours en prison et 242 en résidence surveillée. Ces procédures incessantes lui fournissaient d’ailleurs une source de financements non négligeable, avec la condamnation systématique de Moscou devant la Cour européenne des droits de l’homme. A cela s’ajoutaient les dons de particuliers.

Dans ce traitement sur mesure, le plus dramatique pouvait alterner avec le plus trivial : ainsi, des enquêtes ont été lancées contre son Fonds de lutte contre la corruption, notamment pour des accusations fantaisistes de financements étrangers ou de blanchiment, simples prétextes à des perquisitions à répétition, destinées à saisir du matériel informatique. Parallèlement, une procédure pénale contre les deux frères Navalny, à la suite d’une dénonciation de la firme française Yves Rocher, avait abouti en 2014, un 30 décembre, à une condamnation de son frère Oleg à trois ans et demi de prison ferme.

Autre arme utilisée : la violence. En 2017, à la sortie de son bureau, à Moscou, M. Navalny avait été aspergé de produit antiseptique, ce qui avait gravement affecté ses yeux. En juillet 2019, tandis qu’il purgeait une courte peine de prison, Alexeï Navalny avait aussi affirmé avoir été empoisonné par une matière chimique inconnue. Les autorités avaient évoqué une simple « réaction allergique ».

Rigueur et provocation

Avocat de formation, diplômé de la faculté de droit de l’université Lumumba de Moscou et titulaire d’une bourse à Yale (Etats-Unis), Alexeï Navalny fut longtemps réduit au statut de « blogueur le plus célèbre de Russie ». Dès sa création en 2010, son blog, « Rospil », connaît de fait un immense succès. Une obsession, déjà, s’y affiche : la lutte contre la corruption, la gabegie, le pillage des ressources d’Etat (« rospil »). Navalny y allie son sens de la formule et de la polémique à une rigueur et une efficacité incontestables. L’un de ses premiers coups : la révélation de la disparition de l’équivalent de 2,9 milliards d’euros lors de la construction du pipeline Sibérie-Pacifique (sur un budget total de 8,7 milliards d’euros).

L’avocat se fait réellement connaître lors du mouvement de contestation contre les fraudes aux élections législatives de décembre 2011. A la tribune, dès le lendemain du scrutin, il s’amuse et menace : « On dit de nous que nous sommes des hamsters rivés à leurs ordinateurs. Oui, je suis un hamster du Net et je vais ronger les gorges de ces salauds ! » Quelques heures plus tard, il est mis en prison pour quinze jours.

Ses talents d’orateur et sa hargne se confirment lors de cet immense mouvement de protestation. Il est de toutes les mobilisations, toujours prêt à prendre le micro. C’est lui qui invente une expression dont le succès, jusqu’à aujourd’hui, ne s’est jamais démenti : dans sa bouche, le parti du pouvoir, Russie unie, devient « le parti des escrocs et des voleurs ».

L’homme est ambitieux, doué. Dans tout autre pays, ce devrait être le début d’une carrière politique. Mais nous sommes en Russie, et la porte ne va jamais vraiment s’ouvrir. En 2013, il peut concourir à une élection pour la seule et unique fois de sa vie. Sûr de sa force, le maire de Moscou, Sergueï Sobianine, persuade les stratèges du Kremlin de laisser le jeune insolent participer au scrutin municipal. Navalny récolte 27 % des suffrages, dans une élection marquée, elle aussi, par les soupçons de fraude.

Fin de sa carrière électorale : durant les années suivantes, Alexeï Navalny n’aura plus jamais l’occasion de participer à un scrutin, ni même l’autorisation de créer un parti politique. A chaque fois, la justice en refuse l’enregistrement, pour des motifs fallacieux, effaçant d’un trait de plume le travail de milliers de volontaires dans tout le pays. Lorsque ses candidats tentent de se présenter à un scrutin comme indépendants, ils sont, à leur tour, quasi systématiquement empêchés.

L’homme du « Medvedevgate »

Alexeï Navalny optera longtemps pour le boycottage, comme lors du scrutin présidentiel de 2018. Il changera ensuite de stratégie, avec le concept de « vote intelligent » : soutenir le candidat le mieux placé, quel qu’il soit, pour mettre en échec celui du pouvoir. La tactique a fait ses preuves dans les scrutins locaux de 2019. C’est d’ailleurs à partir de cette époque que la pression s’est accentuée sur lui.

Interdit d’exercer dans la « grande » politique, Alexeï Navalny n’a jamais abandonné ses premières amours. La dénonciation de la corruption était même devenue son arme la plus efficace contre le régime Poutine. Dans les années 2010, les enquêtes de son organisation, le Fonds contre la corruption, s’enchaînent à une vitesse affolante. Elles totalisent des millions de vues sur YouTube et ridiculisent les officiels, le décalage cynique entre leur discours et leur mode de vie, leurs tentatives désespérées pour cacher leurs malversations. Personne n’y échappe : fonctionnaires, élus, oligarques, propagandistes des télévisions publiques… La liste de ses ennemis personnels s’allonge.

En 2017, une enquête sur les propriétés et somptueux avoirs de l’ancien premier ministre, Dmitri Medvedev, vue par 36 millions d’internautes, pousse dans la rue des dizaines de milliers de jeunes, parfois d’adolescents. Une « génération Navalny » apparaît. Elle est sa force et son point faible : très populaire auprès des jeunes, des urbains, il ne peut entrer dans le foyer du Russe moyen, où la télévision règne en maître. L’image de l’ex-premier ministre, elle, restera marquée à jamais par cette humiliation.

Malgré des dizaines d’heures d’interviews passées (non sur les chaînes fédérales) à présenter un programme assez modéré, aux tonalités classiquement libérales, Alexeï Navalny n’a jamais pu non plus se défaire d’une image de révolutionnaire exalté, plein de rancœur. Il s’est aussi brouillé avec une partie de l’opposition libérale, lors de ces éternelles luttes de chapelles propres au camp démocrate. Beaucoup lui reprochent son style trop personnel, son ambition, sa colère.

Odeur de soufre

Son passé nationaliste lui revient aussi fréquemment au visage, laissant derrière lui une odeur de soufre, jusqu’à le rendre suspect auprès de certains interlocuteurs occidentaux. En 2007, il s’était fait exclure du Parti libéral pour ses sympathies nationalistes, sa dénonciation de la « criminalité ethnique » ou une comparaison des rebelles tchétchènes avec des « cafards ». Il avait aussi participé aux « Marches russes », l’événement des ultranationalistes.

Si ces prises de position appartiennent au passé, son discours reste, sur certains sujets, différent de celui dominant dans l’intelligentsia libérale. Il a ainsi mis un certain temps à se prononcer sur la politique agressive menée par le Kremlin en Ukraine et a proposé un nouveau référendum pour déterminer le futur de la Crimée, annexée par Moscou en 2014.

Son empoisonnement et sa possible absence de la scène politique auront des effets encore difficiles à mesurer. Ses partisans et ses alliés se disent déjà prêts à prendre la relève, refusant la peur. Les élections régionales du 13 septembre, pour lesquelles M. Navalny se rendait à Tomsk, constitueront un premier test. Vladimir Poutine, lui, fait tout pour montrer son dédain. Le 27 août, il était interrogé à la télévision sur « les sujets les plus importants à l’ordre du jour ». Son interlocuteur a eu le bon goût de ne pas mentionner celui dont on ne prononce pas le nom.

31 août 2020

Extrait d'un shooting - photos : Jacques Snap

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31 août 2020

En Biélorussie, les menaces de Loukachenko semblent galvaniser le mouvement de protestation

Par Alexandra Goubariova, Minsk, correspondance, Benoît Vitkine, Moscou, correspondant Le Monde

Des dizaines de milliers de Biélorusses ont à nouveau manifesté dimanche à Minsk et ailleurs dans le pays, malgré la détermination des autorités à les en empêcher.

Cela commence à ressembler à une routine, presque à un théorème scientifique : plus Alexandre Loukachenko tente d’intimider les Biélorusses, plus ceux-ci sont nombreux à descendre dans la rue pour exiger son départ. Dimanche 30 août, des dizaines de milliers d’entre eux ont à nouveau manifesté à Minsk et ailleurs dans le pays, malgré la détermination des autorités à les en empêcher et le climat de peur que tente d’installer le pouvoir.

Les 9 millions d’habitants de ce pays, réputés pour leur flegme, semblent même s’être habitués aux outrances que leur réserve semaine après semaine M. Loukachenko. Le chef de l’Etat, qui fêtait dimanche ses 66 ans, dont vingt-six au pouvoir, a répété son coup d’éclat de la semaine précédente. Dans la soirée, il est à nouveau apparu dans le palais présidentiel le corps ceint d’un gilet pare-balles, fusil automatique à la main, posture menaçante. Comme pour donner plus de poids à ces images rebattues, des blindés armés de canons entraient au même moment dans la capitale, dans la soirée. Ceux-ci se sont ensuite dispersés dans la ville sans intervenir dans le face-à-face entre le dirigeant et son peuple.

Aveu d’impuissance

Le message envoyé par Alexandre Loukachenko est certes limpide, mais il sonne de plus en plus comme un aveu d’impuissance. Non seulement la menace ne fonctionne plus, mais elle semble galvaniser le mouvement de protestation. Trois semaines après sa réélection frauduleuse, le 9 août, point de départ d’une contestation inédite, le président biélorusse paraissait en effet vouloir siffler la fin de partie. Immobiles les semaines précédentes, les forces antiémeutes avaient semble-t-il reçu l’ordre d’empêcher un rassemblement de se former. Déployés en masse et appuyés par des véhicules, les policiers ont tenté dès la fin de matinée de bloquer les différents cortèges qui affluaient vers la place de l’Indépendance.

L’un des lieux de rassemblement habituels, le monument à la libération de Minsk, devant le musée de la Guerre, était ainsi entièrement bouclé, gardé par de jeunes soldats. A quelques mètres des barbelés, Valentina, infirmière tout juste à la retraite, attend de voir par quel côté elle pourra passer. Cette femme de 60 ans a rejoint la protestation dès le soir du 9 août, choquée par l’ampleur de la fraude. Les violences qui ont suivi, du côté des forces de l’ordre, ont renforcé sa détermination. Cela ne l’empêche pas de regarder avec compassion les conscrits qui gardent la place. « Ils sont tout équipés, avec cette chaleur… et bloqués ici, eux qui n’ont même pas 18 ans… »

Les policiers ont aussi procédé à des arrestations (140 de source officielle), choisissant au hasard leurs proies dans les cortèges de manifestants pacifiques, pour intimider la masse. La réapparition de ces vans banalisés desquels surgissent des hommes masqués ou en civil a pu laisser craindre un nouveau déchaînement de violence, comme lors des quelques jours qui avaient suivi l’élection, le 9 août. Les manifestants étaient alors systématiquement battus en pleine rue et des dizaines d’actes de torture ont été commis en détention.

Les femmes jouent les premiers rôles

Guennadi, un professeur d’université de 61 ans, ne semble même pas accorder d’importance à cette menace. Lui craignait plutôt les orages, qui pourraient dissuader la foule. Assis sur un banc, il observe avec satisfaction les rues noires de monde. « Regardez combien nous sommes, c’est tout simplement impossible d’étouffer une telle mobilisation, s’enthousiasme-t-il. Mais cela aurait été impossible sans la magnifique manifestation des femmes ce samedi. »

Ce rassemblement, qui a une fois de plus vu les femmes jouer les premiers rôles, a en effet redonné du souffle à la contestation, à la veille de la mobilisation cruciale de dimanche. Il a vu des milliers de femmes, habillées souvent en blanc, défiler dans Minsk et forcer les cordons de police qui tentaient de les contenir.

Sans se départir de leur stratégie non-violente, les manifestants ont, dimanche aussi, réussi à contourner ou faire reculer les cordons policiers, pour se regrouper en une immense marée humaine sur l’avenue des Vainqueurs. La foule était au moins aussi nombreuse que la semaine précédente, soit une estimation basse de 100 000 personnes. De rares affrontements ont eu lieu lorsque des manifestants tentaient d’empêcher l’arrestation de l’un des leurs. Des rassemblements fournis ont aussi eu lieu à Gomel, Brest, Vitebsk, Moguilev ou Grodno, mais aussi dans des villes de moindre importance.

« Chaque dimanche ressemble à une fête nationale, se réjouit Ekaterina, une photographe de 29 ans. Regardez comme ils sont beaux et déterminés », ajoute la jeune femme en désignant les quelques milliers de manifestants qui restent regroupés à proximité du palais présidentiel, sous la pluie, après que le gros de la manifestation se soit dispersé.

Eviter la confrontation directe

Une fois de plus, c’est la taille de la foule qui a constitué une garantie de sécurité pour les manifestants. Le face-à-face semble de plus en plus se concentrer autour de ces dimanches où chaque camp expose sa force et sa détermination. Là, la fluidité de la protestation et son absence de leader apparaissent comme une force, lui permettant d’éviter la confrontation directe. Le reste du temps, le régime Loukachenko semble mieux armé pour réprimer. Toute la semaine, les multiples actions de l’opposition, originales et créatives, ont donné lieu à des arrestations. La bataille souterraine dans les entreprises est elle aussi impitoyable : les meneurs des grèves dans les usines sont intimidés par le KGB ou licenciés. A l’inverse, la forte dégradation de l’économie biélorusse affaiblit la position des autorités.

« Nous savons qu’obtenir la victoire prendra du temps, disait cette semaine au Monde Maria Kolesnikova, l’unique représentante du triumvirat formé autour de l’ancienne candidate Svetlana Tsikhanovskaïa à ne pas avoir fui le pays. Les changements qui ont lieu dans la société biélorusse sont profonds, ils touchent à la formation d’une conscience nationale, au respect de soi-même. Face à cela, le pouvoir ne peut rien, nous devons seulement continuer à montrer notre détermination et notre refus de la peur. »

Alexandre Loukachenko ne paraît pas prêt non plus à modifier sa stratégie. Le président a rejeté d’emblée le dialogue avec le Conseil de coordination formé autour de Mme Tsikhanovskaïa et convoqué ou emprisonné ses membres. La semaine dernière, il qualifiait encore ceux qui défient son autorité de « rats ». La répression semble même devoir s’intensifier dans les jours à venir. C’est en tout cas le message envoyé par les expulsions de nombreux journalistes étrangers du pays (sauf russes) et le retrait de l’accréditation de certains médias installés de très longue date en Biélorussie. L’Agence France-Presse voit ainsi deux de ses journalistes interdits de travailler.

Marques de soutien russe

Le président semble aussi revigoré par les marques de soutien envoyées par la Russie voisine. M. Loukachenko, qui aura tenté à toute force ces dernières années de résister aux tentatives russes de rogner la souveraineté biélorusse, s’est mis entièrement dans la main de Moscou pour sauver son pouvoir. Des spécialistes envoyés de Russie remplacent d’ores et déjà les personnels de la télévision publique en grève.

Jeudi, Vladimir Poutine a évoqué la formation d’une « réserve d’agents des forces de l’ordre » prêts à intervenir en soutien aux forces biélorusses. Cette intervention est certes hypothétique, soumise à l’apparition de violences du côté d’« éléments extrémistes », mais cette annonce est en soi un appui à M. Loukachenko. Le président russe, qui intime aux autres nations de rester à l’écart de la crise biélorusse, a justifié ce geste par la « proximité » entre Moscou et Minsk et les demandes de son homologue. Le Kremlin aurait aussi effacé un milliard de dollars (846 millions d’euros) de dette biélorusse.

« Je n’ai pas peur d’une intervention russe, malgré les rumeurs permanentes sur des arrivées d’avions-cargos, balaie la vieille Valentina, l’infirmière retraitée inquiète pour la santé des soldats. Nous sommes trop liés pour que les Russes nous fassent ça, et ça n’aurait pas de sens pour eux. »

Dimanche, M. Poutine a réitéré ce soutien, lors des heures incertaines dans la matinée. Après avoir félicité M. Loukachenko à l’occasion de son anniversaire, le dirigeant russe a invité le Biélorusse à venir à Moscou « dans les semaines à venir ». Au menu des discussions, un « approfondissement de l’union » entre les deux pays.

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